J'avais 17 ans en 1988, quelques années après l'apparition du Sida. Ma première expérience sexuelle s'est donc faite sous latex et les suivantes aussi, avec quelques loupés. Je sais donc à quel point il est difficile pour une jeune fille d'imposer le préservatif, je suis passée par là. On se dit toujours que ça n'arrive qu'aux autres.
Encore une injustice pour nous, les femmes : notre sort des femmes dépend de la bonne volonté et dextérité de ces messieurs. Plusieurs de mes copines ont payé cher cette dépendance; l'une s'est rendu compte - trop tard - que son copain avait enlevé son préservatif à son insu pendant le rapport et une autre, trompée sans précaution, s'est retrouvé à 2 doigts de la stérilité suite à une salpingite aiguë. Un médecin du centre de dépistage m'a confirmé qu'aujourd'hui, de plus en plus de femmes sont contaminées par un mari volage et irresponsable. Dans le milieu africain, le virus fait des ravages. Sans parler de l'explosion de viols qu'on a pu voir en Afrique du Sud suite à une rumeur assurant que faire l'amour avec une vierge éliminait le virus.
Aujourd'hui, il semble que l'utilisation du préservatif soit en net recul en France. En ce qui concerne ma génération (30-40 ans), je constate avec soulagement que je n'ai plus besoin de me battre, les hommes l'utilisent presque automatiquement.
J'aurais du mal aujourd'hui à envisager une relation sérieuse avec un homme qui, ne me connaissant ni d'Adam ni d'Eve, veut sauter dans le vide et sans filet. Au-delà de la peur des maladies, il est primordial pour moi de savoir que si mon homme fait un écart - ce qui soyons réaliste, est du domaine du possible -, il ne me mettra pas en danger. Je me souviens de mon effaremment face à l'un d'eux qui, papa de surcroît et plein de voyages à son actif, m'expliquait le plus sérieusement du monde qu'il n'en mettait jamais et "qu'on sait quand même à qui on a affaire". Son refus catégorique lui valut de passer une nuit, des plus chastes, à se la mordre à transpirer à côté de moi.
De la part de nos aînés (je pense à la génération de mes parents), il y a incompréhension. J'ai récemment eu une discussion animée avec mon père qui ne comprenait pas qu'on puisse faire l'amour "sous plastique". J'aurais bien voulu découvrir l'amour comme eux à l'époque et ne pas avoir à m'attarder sur des détails pratiques mais voilà, la vérité aujourd'hui c'est que l'insouciance peut au mieux filer des infections, au pire tuer.
Il ya un an, j'accompagnais une amie à un test de dépistage et j'en profitai pour questionner le docteur sur le préservatif féminin. Il m'expliqua que celui-ci était plus solide et plus fin que son équivalent masculin. Qu'il limitait les risques d'allergie car en polyuréthane et non en latex. Et qu'à moins de faire l'amour avec une lance à incendie, il pouvait rester en place pour plusieurs rapports successifs. Il me proposa de l'essayer et je repartai avec plusieurs échantillons. Dans la voiture, mon amie et moi sommes parties dans une crise de fou-rire en déballant l'engin qui, à dire vrai, n'était pas très appétissant. C'est pourtant aujourd'hui le seul moyen pour les femmes, en particulier dans les pays où le préservatif n'est pas de coutume, de se préserver des maladies sans avoir besoin de l'aval de leur partenaire. Le test Femidom - c'est son nom - fut peu probant, je suppose qu'il faut s'y habituer.
Et vous, ça vous tente ? Vous avez déjà essayé ?