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Des bidonvilles aux portes de Paris

Aujourd’hui, c’est la journée mondiale de lutte contre la misère. Encore une occasion pour notre président de faire un beau discours, les yeux humides, alors que la pauvreté touche de plus en plus de français. Je n’ai pas écrit "précarité", c’est volontaire, j’en ai ma claque des termes édulcorés.

La chaîne W9 nous montrait avant-hier, dans l’émission "Enquête d'action", la vie cachée du périphérique. Cela fait plusieurs années maintenant que les franciliens ont vu apparaître, tout le long du périphérique, des tentes et abris sommaires. La première fois que j’ai vue une de ces tentes, plantée à 1 mètre des bagnoles sur un terrain en pente au bas de la bretelle d’accès de la porte d’Orléans, j’ai cru à un cas isolé. Comment peut-on vivre et dormir là, dans le béton, le bruit et la pollution générés par le passage de plus d’1 million de véhicules / jour ?

La multiplication de ces campements sommaires a eu raison de  mon incrédulité. Plutôt que de s’attaquer aux sources du problème, une chasse aux clochards s’est mise en place. Peu importe qu’ils se multiplient, on ne veut pas les voir, c’est tout. Font chier, les pauvres ! Ah non, Fiso, maintenant on ne dit plus « pauvre » mais « personne à revenus modestes », c’est moins violent …  

Chassés par la police qui organisent de grandes opérations de nettoyage des rues de Paris (les campements sauvages en bord de Seine en plein Paris-Plage, ça fait désordre sur les photos des touristes). Chassés des bancs publics chers à Brassens qui ont été remplacés par des assises métalliques sur lesquelles il est impossible de s’allonger (ni d’ailleurs, pour les amoureux, de se bécoter serrés l’un contre l’autre). 

Plus encore que de voir la misère, je suis dégoûtée de m’y habituer. Ecoeurée et honteuse, je suis, de passer à côté d'hommes qui dorment à même le trottoir, comme des chiens.

«Les associations tentent de les convaincre d'accepter les solutions d'hébergements proposées ou de se déplacer dans des endroits où les riverains sont moins gênés», tempère Mylène Stambouli, adjointe en charge de l'exclusion à l'Hôtel de Ville.

Certains se sont déplacés « dans des endroits où les riverains seront moins gênés ». Ils ont choisi de vivre au milieu des rats et des bagnoles plutôt que de côtoyer notre humanité déshumanisée et affronter nos regards gênés, voire dégoûtés.

Au milieu du bruit et de la crasse, les clochards ne gênent plus personne. Ils peuvent faire tout le bruit qu’ils veulent, celui-ci est couvert par les coups de klaxons des automobilistes excédés. Leurs odeurs corporelles se mélangent harmonieusement à la pollution automobile. Déjà muets, bientôt sourds avec 80 décibels dans les oreilles en permanence, lentement asphyxiés au dioxyde de carbone, leur espérance de vie déjà courte (43 ans) s’amenuise encore plus.

La mairie de Paris estime que 600 à 800 personnes vivent au bord du périphérique. Plus d'un million de véhicules y transitent chaque jour. En regardant ce reportage, horrifiée, je reconnais la tente de la porte d’Orléans. Ses habitants sont interrogés, ils s’appellent Gilles et Marie et s’aiment depuis 5 ans. Marie traverse régulièrement le périphérique pour déposer des fleurs sur la tombe de Coluche, enterré à Montrouge. « Il nous manque » dit-elle, émue.

En deuxième partie, un reportage sur «Le village de l'espoir », implanté à Ivry sur Seine. Un vieux rêve de Jacques Deroo, fondateur de l’association «Salauds de pauvres» qui a connu la rue et la prison. 30 mobil home, une transition entre la rue et le vrai logement. Tout s'est débloqué durant l"hiver 2006-2007, suite à l'opération Don Quichotte. Pour sortit de la crise du canal Saint-Martin et se débarrasser de cette nouvelle cour des miracles en plein Paris, l’Etat met à disposition un terrain à Ivry sur Seine, destiné à accueillir 30 mobil home. Un projet porté depuis 18 ans par Jacques Deroo. Face à l’inertie des pouvoirs publics, les citoyens s’organisent. La relève de Coluche est assurée.

Sacré bonhomme que ce Jacques Deroo : "Quand il y a eu les inondations de la Somme, on a relogé les sinistrés. Moi je travaille avec des sinistrés de la vie." Pas facile pour lui de se battre pour des êtres qui ont perdu toute dignité : "Ils sont encore SDF dans leur tête. Ils arrivent pas encore à se regarder." Il invite 300 personnes à un déjeuner, 50 habitants d'Ivry ont fait le déplacement. Jacques peut être fier de son bilan. En un mois et demi, 12 locataires ont retrouvé du travail.

Gilles, l’homme qui vivait dans la tente de la porte d’Orléans, est sur le plateau de W9 avec Jacques Deroo. C’est un homme transformé qui expose son projet d'ouvrir une épicerie. Dans le Village de l’Espoir mené par la poigne de fer du tendre Jacques Deroo, la cohabitation avec les riverains s'est améliorée et l'alcool est un peu moins présent. Rappelons que lors de sa campagne électorale, M. Sarkozy promettait zéro SDF en 2007. Sur son site, Jacques Deroo lance un appel à volontaires pour que, faute de changement, le 15 décembre, « 1000 véhicules se rendent sur Paris, à raison d’un SDF dans chacun d’eux.»

 

Commentaires

  • Tu devrais proposer des billets pour Equilibre Précaire !

  • Pauvre france ! ou bien les chinois copient sur ou c'est nous qui copions sur les chinois! pourquoi? Le fils d'une amie travaille pour une multinationale et se rend souvent en Chine (et ailleurs). Mais en Chine c'est particulier à cause des Jo , les autorités déplacent "les pauvres" assez loin pour que personne ne puisse les voir durant ces jeux ! Navrant et l'autre naze (de plus en plus) va essayer de nous faire pleurer avec tous les "cadeaux" qu'il fait aux riches ! à sa place je la fermerais !

  • Rien à dire. Comme je ne peux rien faire, que ce n'est pas en mon pouvoir je ne peux que déplorer, exécrer ce genre de situation sans vouloir tomber dans le misérabilisme et en sachant que mes considérations sont peut être déplacées.

  • Moi je trouve qu'il faut soutenir le commerce équitable ! alors rendez-vous sur www.natbe.fr !

  • Pour une fois je vais être sérieux... Très sérieux même...

    Déjà il n'y a pas que Paris qui a ses bidonvilles... Oh chez nous à Cherbourg, on appelle ça des squats (quelques tentes dans des champs pres des habitations...)

    Voilà un texte qui résume très vaguement la situation (ok ça vient de la LCR dont je n'épouse pas du tout les idees... mais bon...) :

    http://lcrcalvados.fr/Soutien-aux-refigies-de-Cherbourg

    Leur réalité, je la vis régulierement au travail... Sans briser le secret médical : des mecs qui sautent du haut d'un trente tonne en s'apercevant qu'il reste en france au lieu d'aller en Angleterre... Un deux etait chirurgien dans son pays, l'autre etudiant en sciences... En parlant avec eux on en apprend des choses, ici ce sont des clochards ou presque...

    Des mecs tellement desesperes que l'un deux se retrouve avec une balle dans le cou... Il s'en ai sorti miraculeusement... C'etait dans le journal, je ne brise pas le secret medical, mais je l'ai vu et je m'en suis occupé...

    Là un arrêté est encore tombé et ils ont ete encore délogés, ils sont revenus sur un autre terrain pas loin de chez moi...

    Chez eux ce sont les epidemies, la gale, ce genre de saloperies... Des types qui ont pour la plupart des situations professionnelles importantes et réduits à l'etat de "BETES GENANTES" à cacher... L'hiver arrive, les associations en bavent...

    Alors PAris, Cherbourg, quels endroits aussi?

  • Bonne idée Mélanie, c'est ce que je fais chaque fois que je le peux.

  • Nicolas,
    Je ne peux pas, j'essaie de bosser plus pour gagner plus.
    C'est pas gagné !
    Lhuna,
    Faut les comprendre, ça gâche un peu le goût des petits-fours, la pauvreté à portée de vue ...
    Arno,
    Bien sûr, la pauvreté n'est pas qu'à Paris.
    C'est juste que c'est impressionnant de voir des campements sur le périphérique et c'est relativement nouveau.
    C'est dramatique ce que tu racontes. Ca montre bien l'état de désespoir dans lequel se retrouvent certains immigrés.
    Tu rappelles aussi que chez eux, ils n'étaient pas les mendiants qu'ils sont devenus chez nous, pour certains.
    C'est une nouvelle forme de colonisation qui s'opère, de la main d'oeuvre au rabais sous prétexte de manque de papiers.

  • Fiso,

    Tu envoies un mail à Eric en disant : j'ai fait un billet sur la précarité, vous pouvez le reprendre sur EP, ça me ferait plaisir, nananère.

    Tiens ! Tonnegrande n'a pas dit de bêtises ici !

  • Les clochard qu'on met au ban(c) de la société ?
    J'ai vu aussi ce reportage. Pour une fois ça valait le coup de rester sur W9 (qui est l'arrière cour de M6 comme son nom l'indique, c'est dire le niveau général !).

    Le problème c'est que Coluche, ça commence à faire un bail et qu'on en est toujours là… Que faire ?
    :-)

  • Fil,
    On peut faire un truc : demander à Fiso de publier son billet sur EP.

  • j'ai vu le reportage sur W9 et j'en ai été extrêmement touché également, beau cri du coeur ton billet

  • Nicolas,
    Je suis d'accord pour publier ce billet sur EP !

  • Merci Fiso!

    Très bien, Nicolas d'avoir proposé à fiso de republier son billet sur équilibre précaire!

  • Bravo Fiso et que Mère Mi se rassure, ce qu'elle dirait ne serait pas déplacé. J'apprécie ton billet et les commentaires qui l'accompagnent. Je ne raconterai pas ma vie, mais ici, en Lorraine, je bataille aussi pour ces êtres humains à part entière... après avoir vécu quelques mois dans ma voiture. Alors le petit homme fait plus que me faire grincer des dents, tu peux me croire. Merci pour ce billet...

  • Rony,
    Je sais qu'avant ta "grotte", tu as vécu des moments très durs.
    Contente de te revoir par ici, aussi (je te lis toujours régulièrement même si je ne commente plus beaucoup)

  • Merci... merci à tous. Pour eux, dont je m'occupe, au village de Jacques Deroo, justement... quel homme et quel ami. Quellechance j'ai, je sais. Je la mesure à sa juste valeur...

    Il y a beaucoup à faire et ce n'est, certes, pas dans ce domaine qu'on peut s'endormir sur ses lauriers...

  • Lili Cactus,
    Bienvenue et merci pour ton message !
    Ils ont bien de la chance de t'avoir aussi.
    Je suis sûre que tes peintures colorées et ta crinière flamboyante apportent beaucoup d'éclat dans leur quotidien.
    Continue à être égoïste (dixit tes propos sur ton site).

  • Me rendant réguliérement sur votre site, je viens de lire votre article "Des bidonvilles aux portes de Paris" étant révoltée par ce fait de société déplorable et je me demande, en lisant les commentaires, quel est le rapport avec Natbé dont parle Mélanie, je suis allée sur ce site, c'est celui d'une boutique de puériculture et l'on n'y parle pas beaucoup de commerce équitable. Je me demande si ce n'est pas une pub détournée, genre je m'incruste sur le web et tous les sujets sont bons, j'espère que ce n'est pas le cas, déjà que notre société n'est pas jojo...

  • Sare,
    Bienvenue et merci de ce premier passage signé :)
    Je pense en effet que le com de Mélanie n'avait pour but que de se faire une pub, mais comme tu as pu le voir, j'ignore systématiquement ce type de com sans rapport avec le sujet.

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