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Dans la peau d'un homme

865497160.jpgJ'aime bien parler des choses quand ce n'est pas ou plus "à la mode". Comme WajDi, j'avais renoncé à m'essayer à ce drôle d'exercice proposé par Zoridae. Pas facile de se mettre dans la peau d'un homme sans aligner les clichés. Une conversation franchement hilarante, il y a 2 jours, avec mes collègues masculins, m'a soudain donné l'inspiration nécessaire.

Merci donc à L. et surtout à JN, ma muse inspiratrice, bien malgré lui. 

J’ouvre les yeux sur une toile beige, à quelques dizaines de centimètres de moi.

« Tiens, je ne suis pas dans ma toile de tente … »

Sensation d'étouffement. Le soleil qui cogne au-dessus de moi ravive les odeurs mélées de corps et celle, caractéristique, des toiles de tentes neuves. Qu’est ce qu’il fait chaud !

Je tourne la tête à droite et dans mon champ de vision,  un préservatif usagé. Sur mon flanc gauche, une présence chaude. Je remue les jambes, et le contact de mon sexe contre le drap me confirme que je suis à poil. Lentement, je jette un coup d’œil sur la gauche. Une masse de cheveux bruns d’où émerge le profil d’une femme et une épaule, nue. Grand moment de solitude. Qui est-elle ? Je fouille ma mémoire à la recherche du déroulé de la nuit passée. Je me souviens de l’arrivée en boîte avec mon pote Stéph’, des nombreuses bières au bar, des jolies filles, toutes plus sexys – et chaudes - les unes que les autres, de la piste de danse, de corps frôlés et d’odeurs mêlées de parfum et d’aisselles nues. Mais comment je me suis retrouvé dans la toile de tente de cette inconnue, avec laquelle visiblement j’ai baisé, aucune idée. Et merde !

La chaleur, une barre au front qui confirme que j’ai bien trop bu hier soir, je referme les yeux. Concentre-toi, Loïc, t’as quand même pas pu baiser une nana sans en avoir le moindre souvenir ???

A ma gauche, elle a bougé. Elle se redresse, me découvrant au passage mais je me garde bien de signaler que je suis réveillé. J’entends le zip de la toile de tente, elle est sortie. Ouf ! Mon soulagement n’est que de courte durée. Quand j’étends les bras, je sens autre chose, sur la gauche. Coup de tête paniqué. Merde ! Une deuxième !! Brune aussi, dos tourné. Oh, putain ! Avec laquelle j’ai baisé ? Les 2 ???

Dehors, des bruits de casseroles, de l’eau. Je suis tétanisé. La brune allongée à ma gauche remue quelques instants, puis se lève aussi. Bruits de discussion dehors, et rire étouffés aussi. Bon, mon coco, va falloir y aller … D’autant plus que j’ai une méchante envie de pisser.

Je retrouve mon caleçon en boule dans un coin de la tente. J’enfile mon jean tant bien que mal et mon tee-shirt. Lorsque je mets le nez à l’air libre, manquant de me vautrer dans l’ouverture étroite, elles sont là, debout, toutes 2 à me guetter avec un sourire amusé. Putain, mais c’est quoi ces monstres ??? Chacune d’elle fait deux fois ma carrure … !!!

Je sens des gouttes de sueur perler à mon front.

« Tu veux un café ? » me demande l’une d’entre elles. Je balbutie un « Oui, merci » étranglé.

« Vas-y assieds toi ». Je pose la pointe de mes fesses sur un siège pliant de couleur verte. Surtout, fermer sa gueule, attendre et observer. En dire le moins possible, y’aura bien un signe à un moment ou un autre qui me dira avec laquelle j’ai couché. Pendant que la brune au débardeur kaki remplit un mug de café brûlant, je les détaille. Comment j’ai pu finir avec ces meufs, elles sont pas du tout mon genre ! On dirait des videurs de boîte de nuit. Grandes, toutes en muscles, un dos en V, des épaules de nageuses est-allemandes. La vache ! La deuxième me tend un paquet de pains au lait. "Laquelle, bordel ????" Je dois avoir l’air con, mais con !...

« Alors, bien dormi ? » J'acquiesce et essaie de me détendre. Je ne sais rien, même pas leur prénom ! Le stress, putain, de se retrouver nez à nez avec une (deux?) nanas avec laquelle on a couché, et se rendre compte qu'on ne sait absolument rien d'elle.

"Tu habites où" demande l'une. "Au camping municipal". "De Biscarosse ?" "Heu, non, de Mimizan ... pourquoi on est où, là ?" "Ben à Bisca." "Ah, ok .." 

Et merde ! Comment je vais rentrer ? 

La brune au top kaki passe à côté de moi et me caresse le bras au passage. Bon, ça doit être elle. 

Elle susurre "Et tu fais quoi dans la vie?"

C'est ça ma cocotte, continue à causer, ça meuble.

"Je bosse dans la grande distribution, et vous ?"

"Nous, on est profs de karaté"

Je manque m'étrangler en avalant mon café de travers. Le palpitant qui s'emballe. Une peur irraissonnée s'empare de moi.

Pas question, désormais, de dire "Ecoutez les filles, je ne sais pas laquelle d'entre vous j'ai sauté cette nuit, j'étais bourré, je ne me rapelle de rien, c'était une erreur monumentale, vous êtes pas du tout mon genre, chuis désolé, on oublie tout, ok ?" Je m'imagine déjà, latté comme jamais par 2 nanas rendues hystériques par le fait que je me fasse la belle après une nuit d'amour.  

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J'ai pas intérêt à déconner, faut la jouer fine. Les pensées défilent à toute vitesse dans ma tête. Je touille mon café, tentant de me remettre les idées en place. Comment je vais faire pour me tirer sans déclencher un drame ? Bon, d'abord pisser parce qu'avec le cerveau embrumé plus la trique matinale, j'arrive plus à réfléchir. Je me dirige vers les toilettes du camping d'un pas traînant. Je vais appeler Stéph' qu'il vienne me tirer de ce cauchemar. Pourvu qu'il réponde ce con, parce que j'ai pas l'intention de faire la causette pendant des heures avec 2 ceintures noires ! 
Je reviens vers les filles. Visiblement, elles ne se rendent compte de rien et continuent à discuter. 
"Heu, je dois appeler mon pote, vous savez où il y a une cabine téléphonique ?"
"Oui, à l'entrée du camping, tu prends la première allée à gauche, là."
"Ok, bon ben je reviens."
"Tu voudras un autre café ?"
"Ouais, super !"
Je m'éloigne vers la liberté. Au téléphone, Stéphane est mort de rire et me charrie "Ben, mon salaud, t'avais la patate hier soir !"
"Ramène ton cul et vite, j'ai pas envie de faire un remake de Kill Bill, je t'attend devant la mairie".
Je raccroche, et file en hâte, sans me retourner.
Quand je suis arrivé au camping et que j'ai raconté ma mésaventure aux copains, aussi frais que moi, ils m'ont charrié. Moi je riais jaune et tout le reste du séjour, cet été-là, j'ai flippé de recroiser mes profs de karaté. La moindre paire de cheveux bruns se promenant à moins de 50 mètres de moi me donnait des sueurs froides. 
Pour rien au monde, je ne voudrais revivre l'angoisse de ce réveil dans une toile de tente inconnue. Quand j'y repense, j'ai encore honte de ma lâcheté. J'étais jeune. C'est peut-être ce matin-là que j'ai décidé de ne jamais plus m'enfuir au petit matin.

Commentaires

  • Oh yes ! Je suis trop contente que tu aies participé. L'histoire est terrible, et très bien raconté... Il y a beaucoup de suspense et d'humour ! Bravo !

  • C'est quoi ce binzz ?? On raconte des turpitudes qui se seraient passées chez moi ? Pour un peu ce serait la boîte que tient mon cousin ! Non, mais...
    mdr
    Tu tiens la route, fillette... Largement !

  • Exercice réussi, de l'intro à la conclusion. Mais honte, lâcheté, salaud, je sais pas.

  • Bourré à ce point, vous auriez été infoutu de bander : exercice raté, pas crédible. Et toutes ces nanas "sexys et chaudes" : non, vraiment, il faut me revoir cette copie, ça ne va pas du tout...

  • C'est une caricature, ce mec ^^

  • Au fait Fiso, je mettrai ça en ligne ce soir ou demain... Grosse journée aujourd'hui !
    Merci encore

  • C'est quand même toutes des salopes. S'y mettre à deux profs de karaté pour se farcir un type bourré.

  • "Se farcir" ne me semble pas être le terme approprié...
    Il n'est pas dit que l'on ait trouvé des godes sous la toile de tente...
    Ah, aussi... Mais pourquoi relever des affirmations pontifiantes et autosuffisantes ?... Je suis incorrigible !
    Mais quand même... Si tous les types bourrés étaient incapables de bander, il y aurait moins de viols, le samedi soir à la sortie des boîtes...

  • Excellent !
    J'ai connu un mec comme ça... non, deux... trois... quatre... plein en fait ! J'ai même été à sa place, enfin, juste une fois... ;-)
    J'avais écrit la même, une fois, mais en gardant ma place de fille, à la manière du sketch de Florence Foresti, tu sais ?
    http://www.youtube.com/watch?v=VOxfltEEJ3I

  • Zoridae,
    Contente aussi d'avoir enfin relevé le défi :)
    En fait, j'ai plein d'autres scénarios qui surgissent depuis. Vais p'têtre m'amuser à en écrire plusieurs ;)
    Boby,
    C'était un clin d'oeil, mon Bi-O-Bi-Ouaille ;) Rapport à d'inoubliables magrets de canard farcis au foie gras et aux figues...
    Didier Goux,
    C'est pas parce que VOUS n'y arrivez pas que les autres non plus
    :p
    Ellie,
    Si tu savais ...
    Nicolas,
    C'est quand même con de n'avoir aucun souvenir d'une nuit pareille, hein ???
    M.,
    Ah, toi aussi ? Faaut que je remonte les archives chez toi :)
    Bisous jolie luciole :)

  • Fiso,

    C'est pour ça que je ne bois pas.

  • C'est une idée que je me fais ou le quatrième épisode crétois a brusquement disparu ?

  • Sourire ...
    Oui, erreur de programmation, il sera publié demain :)

  • Ça prouve au moins que je vous lis avec attention...

  • Ben moi ossi j'me serais baré. Pour devoir boire un deuxième café de camping réchauffé à la casserole et un pain au lait, merci. Ca sert à koi de se donner du mal si c'est pour être remercié comme ça...

    Bon sinon c'est balèze, t'as évité tous les clichés.

    Une erreur kan même : la trique matinale nous a jamais empêché de réfléchir. C'est au contraire notre seul instant de lucidité.

  • Ce serait génial si tu en faisais plusieurs...
    Moi aussi je pense à récidiver de temps en temps...
    :))

  • WajDi,
    Le seul ? P'tain, c'est pire que ce que je pensais !
    Zoridae,
    J'ai même envie de faire un "dans la peau d'une femme", mais ce serait trop autobiographique.

  • Excellent !!!

    Je me suis régalé à lire ce texte, Ke du bonheur !!!! MDR !!!

    Effectivement par cette anecdote, tu as su éviter avec brio tous les clichés avec lesquels la gent féminine nous accable généralement (Ah guerre des sexes quand tu nous tiens !) tout en décrivant avec drôlerie la bêtise et la lâcheté qu’un homme peut rencontrer dans l’apprentissage de sa vie.

    Sinon Fiso,

    J’ai hâte de savoir ….. lol ;o)

  • Fiso,
    Et alors ?

  • JN,
    Ah, si j'ai ton approbation, alors ...
    Et merci pour ce premier commentaire, je sais que tu n'osais pas, et j'apprécie l'effort :)
    Zoridae,
    Chuis pas très à l'aise pour parler trop perso ... on verra :)

  • Exercice tout à fait réussi et grand moment de solitude !!!

    Sûr que pleins de femmes vont le penser salaud alors qu'il n'y a là qu des adultes consentants !
    :-]

  • Monsieur Poireau,
    Bien entendu, les encouragements masculins me font très très plaisir !
    Je constate aussi que, (pudeur toute masculine?), ça fait marrer les hommes mais aucun ne se risque à dire que ça lui est arrivé aussi ;)

  • Je pourrais le dire mais ca ne m'est jamais arrivé !
    :-))

  • Malheureusement je n'ai jamais su boire.
    Dommage pour cette occasion, car cela ne m'aurait pas déplu de me retrouver dans une situation aussi cocasse.

  • Cet épisode est tout de même beaucoup plus guilleret que le numéro 2 totalement déprimant ! Puisque « les hommes » sont interpelés, je témoigne que je n'ai jamais bu assez pour ne pas me souvenir de ce que j'avais fait la veille au réveil, je n'ai jamais fait la moindre conquête sous l'emprise de l'alcool (ah, quoi que si, une fois, mais il n'y a pas eu consommation immédiate), que de manière générale, les amours de vacances, je n'ai jamais connu (oui je sais c'est pathétique) et qu'il m'est arrivé une fois, malgré un taux d'alcoolémie sévère, de passer une grande nuit d'amour (et sans vomir, sous vos applaudissements).

  • Comme Une Image,
    J'applaudis !
    :)

  • (Je précise au passage – une fois les applaudissements étouffés – que ça n'est hélas arrivé qu'une seule fois ; les autres fois, non que l'alcool ait privé mon membre viril de sa sève, mais plutôt que mon état aura dissuadé quiconque de partager ma couche – sinon en respectant un périmètre de sécurité proportionnel au chargement de mon haleine.)

  • J'adore !!!
    Même deux ans plus tard ... je suis toujours mort de rire :oD

    Bisous

  • JN,
    Heyyy ! ma muse préférée, mon inspiration inépuisable ! :p
    Cool, moi aussi j'ai relu et souri. On se voit quand ?

  • Fiso,

    Je suis en Espagne pour le mois d'Aout.
    Je reviens sur Paris en Septembre, on se voit à mon retour ;o)

    Bisous :o)

  • JN,
    Cool ! Moi je pars en Martinique, mais pour bosser ;)
    On se voit en septembre, ma caille, j'aurai du rhum ...

  • Julie,
    Tiens, une exploratrice ! :)

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