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Conclusion d'une leçon humaine

Dans l’avion qui me ramène vers Paris, je savoure le confort d’être seule sur ma rangée. Le service des stewards d’Air Atlas est bien plus convivial que celui des navigants de Royal Air Maroc, à l’aller.

Je suis perdue dans mes pensées et les questions tournent dans ma tête. Partagée entre la joie de cette journée riche en enseignements et le regret de n’avoir commencé à cerner que le jour de mon départ une infime partie de la mentalité marocaine, je me promets de poser à mes amis maghrébins les questions que je n’ai pas osé formuler auprès d’Ibrahim.

Peu après le décollage, un homme s’installe sur ma rangée, côté couloir. Il lit puis somnole un moment. Je l’observe, c’est un très bel homme d’une soixantaine d’années, à l’allure fort élégante. Lorsqu’il se réveille, je trouve un prétexte pour engager la conversation. Après un voyage au Vietnam, il a retrouvé le Maroc. Sa dernière visite remonte à plus de 20 ans. Il dit sa surprise de trouver le pays si changé. « En mieux ou en moins bien ? » « En mieux ! C’est incroyable les progrès que fait ce pays ! Les routes et autoroutes qui se construisent, le développement des infrastructures, les immeubles en construction à travers la ville. Il y a 20 ans, nous étions assaillis par une nuée de gamins dès la sortie de l’hôtel » Il reconnaît aussi une augmentation du nombre de femmes voilées dans les rues de Marrakech.

Je profite de sa connaissance du pays pour lui poser les questions qui m’ont taraudée tout au long de cette journée. Ce qu’en bonne occidentale j’ai pris pour une tentative de profiter de la cupidité légendaire du touriste ne serait-elle qu’un échange de bons procédés ? Car après tout, sans Ibrahim, j’aurais payé mes achats au prix fort. De plus, cheminer en sa compagnie m’a préservée d’être importunée.

Mon compagnon provisoire confirme mes doutes. « Les Marocains savent ce que veulent dire fraternité et solidarité. Il est normal, sans tomber dans l’excès inverse, de rétribuer un service rendu ».

Me souvenant de la mendiante buvant dans le verre de thé, du morceau de pain tendu au cireur de chaussures et du tajine poussé discrètement vers l’homme affamé, je raconte le cheminement qui s’est fait dans ma tête depuis le début de mon séjour. Je réfléchis à voix haute et il étoffe mes propos. Je me souviens aussi de mon ami F., exilé au Mexique, qui distribuait des piécettes dans les bouchons interminables de Mexico. En Europe, on n’aime pas les pauvres parce qu’ils nous renvoient une image de l’humain que nous ne supportons pas. Dans les pays musulmans, la charité est un geste naturel du quotidien. Il  y a un devoir de charité envers le pauvre et lorsqu’on cuisine, une part lui est réservée.

Je me console de ma méprise : « Il y a eu des incompréhensions et des malentendus des deux côtés. C’est ainsi que se construit l’amitié, après tout. Au début, on se cherche, on se teste, on apprend à connaître l’autre. C’est ça la richesse des rapports humains. Le principal, c’est d’apprendre de l’autre ».

Cette conclusion, qui ce soir justifie le prénom qu'on m'a donnée, me fait du bien. Il y aura, je l'espère ardemment, d’autres occasions de faire amende honorable auprès d’Ibrahim, Mohammed et toutes les personnes que j’ai rencontrées.

 

Commentaires

  • Je reconnais bien là, ta facilité à nouer les contacts humains. C'est une grande qualité et aussi une grande chance. Très beau billet, ma belle et heureuse de te savoir de retour malgré tout !

  • Etait ce votre premier contact avec ce beau pays ?
    et la découverte du " clientélisme" ( qui n'a pas de connotations négatives ) ?
    C'est comme celà dans tout le Moyen Orient , et méme en Afrique Noire Sahélienne .
    Tout est échange .... Il suffit de savoir maintenir l'équilibre . Mais " l'amende honorable" n'y a pas sa place .... sauf à vouloir se faire plumer par grandeur d'âme . :)

  • Les nuages bavards,
    Tu comprends pourquoi je ne me sens jamais seule ;)
    Je vais enfin pouvoir profiter un peu de mon chez moi !
    Patton,
    Oui, c'était mon premier contact avec le Maroc, mais pas avec le Maghreb puisque j'ai passé une semaine à Djerba, il y a qq années, mais sans réels contacts avec les locaux.
    Dommage, quand même, qu'on ne m'aie pas mieux briefée sur ce point, cela m'aurait évité des maladresses ...

  • J'avais écrit un commentaire mais il a disparu, horreur et désespoir. J'ai lu mes 11 billets en retards, 11 ! t'y crois toi ! ce séjour t'a inspiré des merveilles, deux yeux deux oreilles l'endroit porte bien son nom, tu partages tes expériences d'une façon si vivante qu'on ne peut rester insensible, tu es comme le soleil.

  • P'tain Fiso, comment je fais moi pour commenter après que soit passée une Boug' avec ses propos dithyrambiques, hein, comment je fais ? Après le soleil, qu'ajouter ? Ben rien car au fond, mon commentaire aurait en gros été la somme de ce que disent Les Nuages Bavards, Bougrenette et d'autres qui ne se sont pas encore exprimés !

  • Boug' : Bien ouéj, Nadège :)
    Mamz'elle Gigi,
    Rien à ajouter non plus à part que ce soir, il flotte.

  • merci de ta visite et de ta délicatesse.

  • pie xii,
    Tu es bien le pompier breton ? (enfin, je fais confiance à ma mémoire parfois défaillante)
    Merci de ton commentaire. Délicate, moi ? ;)

  • Non je ne suis ni pompier ni breton.
    Et délicate oui, il me semble que ce billet le prouve bien ;-)

  • pie xii,
    Ni blogueur, visiblement ?
    (oui je suis aussi très curieuse !)

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