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Chez Walczak

Walczak.jpgQuand je remontai la rue Brancion en direction de la station de tramway, la porte de Chez Walczak était close. Pour ce soir, je garderais mes questions pour moi.

C'est un autre moustachu qui lèverait le mystère, le lendemain :
- Pap's, j'ai découvert un endroit, je ne savais pas du tout que c'était là ! Juste à quelques mètres de ton ancien boulot. La Ruche, tu connais ? "
Sa réponse me sidéra.
"Bien sûr que je connais, j'y avais un copain sculpteur et un autre, peintre. Et toi aussi, tu connais, je t'y ai emmenée quand tu avais 16 ans, mon copain nous avait tout fait visiter".
"C'est pas vrai ?? Merde ! J'en ai aucun souvenir !"
"Ben oui, mais t'en avais rien à foutre, à cet âge-là ...Et maintenant, je n'y ai plus de contact."

Quelle déveine ! Dire qu'aujourd'hui, je rêverais qu'on m'ouvre les portes de ce mystérieux endroit ...
Je lui racontai la suite de mon exploration. C'est fou comme on en sait peu, finalement, sur les gens qu'on aime.

Non seulement mon père connaissait le bistrot de Walczak mais ils étaient copains ! Il me raconta leur amitié :
- Walczak était un ancien boxeur, il avait combattu contre Cerdan et Sugar Ray Robinson. C'était un Polonais qui avait commencé dans le Pas de Calais. Son bistrot était fréquenté par Brassens, Brel et bien sûr, Marcel Cerdan et Edith Piaf.
Mon père décrivit le bistrot où pas un centimètre de mur, couvert de photos, affiches et articles sur les boxeurs, n'était libre.
- Quand j'y allais, il sortait tous les artices qu'il avait gardés sur ses combats, des coupures de Paris-Match et autres. Un soir, il me les montrait pour la énième fois "Là c'est Cerdan, là c'est untel et là, c'est mon copain Mamadou."
Mon père leva un  sourcil.
"Mamadou ?"
" Ben oui, mon copain Mamadou, c'était un prof de boxe."
" Oui, c'était même MON prof de boxe à Roubaix", répondit mon père.
"Si tu retournes dans le Nord, salue le de ma part".

Mon père avait appelé son frère, resté dans la région. Mamadou était mort depuis plusieurs années déjà. Un jour que Walczak lui demandait s'il avait eu des nouvelles de Mamadou, mon père n'avait pas eu le coeur de lui dire que son ami était mort. "Oui, il va bien", avait-il répondu.

Un soir, le vieux Walczak était mort, lui aussi. Le bistrot avait fermé pendant quelques années et puis ses enfants l'avaient rouvert, en l'état. Ils n'avaient pas touché aux souvenirs de leur père.
J'ai cherché des informations sur le champion Walczak et j'en ai trouvé beaucoup. J'ai également trouvé mention d'un Mamadou mais je ne suis pas sûre qu'il s'agisse du prof sénégalais de mon père.
Aujourd'hui, le bistrot de Walczak, qui à ma connaissance est tenu par sa petite-fille, n'est pas ouvert aux passants. Il faut montrer patte blanche, à défaut de gant de boxe, pour franchir ce sanctuaire chargé de sueur et d'amitié.  

cvwalk.jpg

J'étais heureuse d'apprendre toutes ces choses sur mon père. S'il vivait encore à Paris, on irait boire des bières dans d'authentiques bistrots et j'écouterai les souvenirs et les anecdotes du quartier, comme Nicolas le fait si bien.

Des articles sur Walczak : , et encore là.

Prochaine mission : y entrer. Le feuilleton continue !

Commentaires

  • Bien belle histoire... On attend la suite (mais abuse pas sur la bière du nord quand tu y entreras, depuis le temps elle doit être frelatée !)
    :-)

  • Usclade,
    Je n'y manquerai pas !
    (ptain, t'assures pas un cachou, je ne bois que de la Guinness, tu suis ou bien ?)
    C'est l'approche de la quarantaine qui altère ta mémoire ? :p

  • Oh mais j'ai pas oublié pour la Guiness. Mais me dis pas que tu ferais pas une petite infidèlité aux irlandais pour trinquer à la mémoire des ch'tis, des polonais, des Piaf et autres Brassens, non? (et je sais bien que t'adores l'eau, mais pas tout le temps :-)

  • Emouvant témoignage Fiso, ce matin je suis ramollo. Nostalgie, nostalgie. On est tous pareils finalement. En revanche, je n'ai pas compris pourquoi le bar n'est pas ouvert à tout le monde ?

  • Usclade,
    Non, la Jeanlain, c'est pas ma pinte de bière ;)
    Mamz'elle Gigi,
    Je l'ignore également. C'est étrange. Et mystérieux :))

  • Hier une bouffée de nostalgie, 45 ans après je me souviens de cet homme à la voix cassée. Mon père bossait aux abattoirs et venait dans ce lieu hors du temps. Toujours pas de poignée sur la porte pour empécher les souvenirs de partir. Ne changeons rien

  • Pluplu,
    Merci de ce joli témoignage et bienvenu(e) :)
    Le bistrot a failli fermer il y a 2 ans, j'espère qu'il ne disparaîtra pas car je me suis déjà attachée à ce lieu tellement empreint de toutes les "gueules" qu'il a accueillies, belles ou cassées, et encore bruissant de l'agitation du quartier d'antan.
    Si vous tapez "Walczak" dans le moteur de recherche en haut à gauche, vous trouverez d'autres articles car j'ai enfin réussi à y entrer ! :)

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