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Un changement s'opère

Selon un vieux conte japonais, un jour un samouraï belliqueux somma un maître zen de lui expliquer ce qu'étaient le paradis et l'enfer. Le moine lui répondit avec mépris :
- Tu n'es qu'un rustre, je n'ai pas de temps à perdre avec des gens de ton espèce.
Se sentant insulté, le samouraï devint furieux et tirant son épée, s'écria :
- Je pourrais te tuer pour ton impertinence.
- Voilà ce qu'est l'enfer, répliqua le moine calmement.
Surpris par la vérité de ses paroles, le samouraï se calma, rengaina son épée, salua le maître et le remercia de l'avoir éclairé.
- Et voilà le paradis, ajouta celui-ci.

Dans le train vers Montpellier, j'ai occupé mes 5 heures de trajet à lire. Des livres apaisants et empreints de la sagesse dont j'ai besoin actuellement, des esquisses de billets, initiées sur des pensées. J'en ai retrouvé un où je décrivais une femme appartenant à mon groupe de théâtre. Elle me sortait par les yeux, cette femme. Mon ton alors était moqueur et méprisant. J'ai réécrit le billet en adoptant un angle différent.
Je ne sais si cela ressort de mon blog. Peut-être retient-on plutôt ma bonne humeur, pourtant je suis une personne qui se met souvent en colère. Et rarement pour des rasions valables, à supposer qu'il y en ait. Mon existence alterne entre des moments où j'aime profondément les êtres que je croise et des moments où je les déteste, avec une intensité au moins aussi forte. Ma colère nait souvent de révoltes contre le manque de respect, la moquerie ou la méchanceté gratuite et encore plus souvent de messages implicites que je leur attribue et dont je suis pourtant l'unique créatrice.

Depuis quelques jours pourtant, mes lectures me font penser que je pourrais m'abandonner de moins en moins souvent à ce sentiment épuisant et stérile.

" La colère est le mouvement de l'âme le plus difficile à maîtriser. Elle est en effet la plus séduisante des émotions négatives; le monologue intérieur qui la déclenche fournit à l'esprit les arguments les plus convaincants. A l'inverse de la tristesse, la colère procure de l'énergie, voire de l'euphorie.
Puisque la colère trouve son origine dans la réaction de préparation au combat, son détonateur est le sentiment d'être menacé, le plus souvent de façon symbolique, par une menace pesant sur son amour-propre ou sa dignité : le fait d'être traité injustement ou avec brutalité, d'être insulté ou humilié, d'être contrecarré lorsqu'on poursuit un but important.
Cette perception a un double effet sur le cerveau. D'une part, il libère de la catécholamine, génératrice d'un afflux d'énergie brusque et passager, préparant le corps à combattre ou à fuir, selon la façon dont le cerveau évaluera les forces de l'adversaire.
D'autre part, une autre onde issue de l'amygdale dispose également à l'action en procurant une tonicité de fond, qui perdure bien plus longtemps que le coup de fouet de la catécholamine. Cette excitation peut se prolonger pendant des heures, voire des jours, maintenant le cerveau émotionnel en état d'alerte et fournissant la base à partir de laquelle d'autres réactions pourront se développer avec une rapidité particulière. Cet état d'instabilité explique que les gens voient rouge si aisément lorsqu'ils ont déjà été provoqués ou irrités par autre chose. Des tensions de toutes sortes déclenchent cette excitation et abaissent par là-même le seuil à partir duquel une "agression" provoque la colère.

Apaiser la colère
L'un des moyens d'intervention possibles consiste à désamorcer la colère en contestant les pensées qui déclenchent sa montée en puissance. En d'autres mots, visualiser la situation en adoptant un point de vue différent amoindrit instantanément la colère.

[NDLR : On a tous un exemple d'un de ces instants où on s'est énervé avant de se rendre compte, un peu honteux, que l'objet de notre courroux était absolument innocent, voire en difficulté. Un ralentissement soudain sur le quai du métro qui nous fait trépigner d'impatience jusqu'à ce que nous apercevions une mémé qui avance péniblement sur sa canne. Ou encore un automobiliste qui roule lentement et contre lequel nous actionnons klaxon et appels de phares, avant de réaliser qu'il arbore une plaque d'immatriculation étrangère et est complètement paniqué, au volant de sa voiture.]
 
La seconde méhode permettant de provoquer la décrue de la colère est de se calmer physiologiquement en laissant passer la poussée d'adranaline dans un cadre propice. La distraction est un procédé extrêmement efficace pour modifier son humeur, et ce pour une raison simple : il est difficile de rester en colère lorsqu'on prend du bon temps.

[Extrait de "L'intelligence émotionnelle" de Daniel Goleman]

[NDLR : La musique a cet effet sur mes humeurs. J'ai, par exemple, cessé d'écouter du rap en voiture lorsque je me suis aperçue que cela me rendait agressive. Et si l'écoute de mélodies mélancoliques n'altère en rien ma gaieté, elle renforce mon désarroi si je suis en proie à la tristesse. En revanche, aucune colère ne résiste à "Let's get it on" de Marvin Gaye.]

Depuis quelques jours, je mets en pratique mes lectures et m'amuse, lorsque je sens poindre une irritation, à envisager mon ressenti d'une agression sous un autre angle. Ça fonctionne plutôt bien et je suis beaucoup plus sereine.

Ainsi, un sms au ton allumeur reçu de quelqu'un qui a déclenché de la souffrance en moi a transformé l'ébauche de la pensée "Il va falloir qu'il arrête de se foutre de ma gueule" en "Cet homme a peur de la solitude et recherche l'amour en suscitant le désir".

Un autre sms transforme un "Putain qu'est-ce qu'elle me veut encore ?" en un "Elle est malheureuse et espère que je vais atténuer sa souffrance".

Ces changements de perspectives ne m'obligent pas à répondre à ces sollicitations. En tout cas pas d'une façon qui rendraient ces personnes - et moi - plus malheureuses encore. Elles me permettent d'être plus sereine, de couper à la racine tout ressentiment et c'est tout ce dont j'ai besoin actuellement : m'apaiser.

Commentaires

  • Je suis resté un peu opaque à la parabole du moine zen, mais le reste me parle.

    Kiss !

  • C'est marrant comme on a quand même le filtre de notre personnalité qui joue dans cette mécanique.
    Chez moi la colère est l'émotion qui naît surtout de la sensation d'impuissance, plus que du sentiment de menace. J'essaie de l'identifier quand je peux, et alors je dois faire le choix de la patience (pour contourner le problème) ou du deuil (lâcher prise pour passer à autre chose).

    Je n'ai pratiquement jamais de colère "explosive" vis à vis des gens, car dans cette situation de stress soudain, j'ai un réflexe empathique inconscient surdéveloppé qui me conduit à me mettre à la place de l'autre, pour justifier son comportement et ravaler ma colère, dans un grand élan pacificateur, comme si la peur des effets de ma propre colère prenait le pas sur tout le reste. Et ça c'est terrible, car du coup bien souvent je ne me protège pas assez...
    Bref tu travailles pour acquérir ce dont je dispose en excès, tout comme moi je dois travailler pour obtenir ce mécanisme d'autodéfense dont tu sembles disposer à volonté.. :-)

  • CUI,
    Kiss itou :))
    Usclade,
    Et si c'était notre sexe (au sens homme-femme) qui expliquait la différence ? Après discussion avec des hommes, leur colère trouve souvent la même origine que la tienne.
    Je n'ai pas non plus de colères explosives. J'insulte mentalement les gens, je trépigne ... :)
    Je l'ai parfois regretté, pensant que ça me ferait du bien d'exploser, mais ce n'est pas la conclusion du livre, loin de là, alors ....
    Et dans de nombreuses cultures asiatiques, perdre son sang-froid est jugé comme une forme de faiblesse.

  • Ton billet vient à point nommé... je suis d'astreinte comme cela m'arrive et après une journée passée chez moi me suis dis qu'il était temps que je change d'air donc je me suis mis dans un bar pour prendre une bière et un croque monsieur (nous sommes loin de tes billets descriptifs de diners) et bien sûr ce p.. tél d'astreinte a sonné.... ce qui fait après tout parti du métier mais c'est comme si c'était fait express quand tu te dis je vais me relaxer et penser à autre chose dring........... et bien sûr sur des choses le plus souvent que je ne maîtrise absolument pas parce que je ne fais pas, en ce moment mon vrai métier pour lequel je suis payé...Bref... Sinon je venais aussi me changer les idées parce qu'il faut que je fasse une réponse polie à ma DRH sans essayer de faire transparaître dans ma réponse que son incompétence dans le domaine de congé sans solde me rend fou....en fait dans le cas précis ce n'est pas tellement ces erreurs (ou du moins ce que moi je considère comme des erreurs après tout je ne suis pas juriste que péquenaud qui dit que ça tient pas la route son truc) parce que dans le fond la différence d"argent mineure comme elle l'est dans le cas qui me concerne ne changera rien à ma vie mais le fait que j'ai l'impression de parler une langue étrangère (pourtant je ne l'ai pas encore insulté en Alsacien) quand je lui parle tellement elle n'a pas l'air de comprendre ce que je dis. Et ça me rend fou. Heureusement l'age aidant je n'ai pas répondu encore à son mail et je laisse passer une bonne journée avant de le faire, quelques années en arrière je pense que j'aurais répondu vertement ce qui n'aurais rien arrangé bien au contraire. Et oui j'aimerais bien posséder cette fausse façade que savent arborer les asiatiques où il semble que des choses ne les affectent pas même si elle le font...mais j'en suis malheureusement incapable. Et j'aime bien cette phrase attribuée à Bouddha il me semble : Face à un problème si la solution existe inutile de s'énerver. Si elle n'existe pas s'énerver ni changera rien.... Bisous

  • Maurice l'alsacien,
    Heureusement, tu étais beaucoup plus détendu la semaine dernière, dans le bar où tu m'as fait boire la tasse ;)
    La colère était retombée ... Et finalement, ce mail ?

  • BRAVA ! Voilà fait un sacré pas en avant, un pas vers la sérénité sans aucun doute, et sur la tolérance par voie de conséquence... Seriez-vous comme le bon vin ?

  • C'est une belle leçon.
    Moi aussi j'essaie régulièrement de l'appliquer mais le plus difficile pour moi est de tenir sur la distance et de garder ce précepte en mémoire...

  • Mamz'elle Gigi,
    J'aime à croire que je me bonifie en vieillissant, en effet.
    Senga,
    En tout cas, ça économise de l'énergie négative et destructrice. Mais c'est pas simple tous les jours.

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