Hier soir, j’étais invitée à l’avant-première du film « La question humaine » au cinéma Le Luxy d’Ivry sur Seine. Juste avant, nous avons dîné dans un restaurant libanais à 2 pas du métro, le « Al Dabka ». Après avoir siroté un arak sur la terrasse au soleil, j’ai laissé mon compagnon, fin connaisseur de la cuisine libanaise, choisir un mezze succulent composé d’ailes de poulet au citron, humous, feuilletés, caviar d’aubergines.
« La question humaine », de Nicolas Klotz, adapté du roman de François Emmanuel, réunit des acteurs talentueux qu’on ne voit que trop rarement : Mathieu Amalric, Michael Lonsdale et Jean-Pierre Kalfon parmi d’autres.
La trame ?
Simon est un psychologue en ressources humaines qui fait la fierté de son entreprise, multinationale pétrochimique, depuis qu'il a réussi à virer proprement des centaines de salariés inutiles. La nouvelle mission qu'on lui confie sera moins simple : enquêter sur le cas troublant et troublé de Mathias Jüst, vieux boss chez lequel ses pairs soupçonnent un début de dangereuse dépression. Très vite, en pénétrant dans la nuit d’un homme, Simon entre dans la sienne : une nuit hantée par les spectres de l’Europe contemporaine.
Avant la projection, le réalisateur a expliqué que le film avait été tourné dans une usine de Vitry sur Seine ; c’est sur la vue de cette usine que s’ouvre la première scène du film, avec en fond sonore des bruits de métal. On pénètre tout de suite dans un univers froid et gris. La constante du film, c’est l’absence de couleur et de sourires. Tous les personnages sont vêtus de noir et arborent des visages fermés. L’impression d’être dans un nid de corbeaux lugubres. Quelques scènes dont je n’ai pas compris le message, comme celle de la rave ou de la ballade en bateau, la nuit. Et puis, au fur et à mesure, le rideau qui glisse et découvre les traumatismes d’enfants et la honte qu’on porte, sous le poids de l’héritage familial. Le passage où Simon lit la fiche technique de 1942, qui par l’utilisation de termes dénués d’humanité, donne la nausée.
Quelle résonance ont les mots de Simon, dans notre monde capitaliste où on parle d’êtres humains comme de machines : problèmes, planification, rendement, marchandises, investissement ! Où l’on pousse à sans cesse se surpasser et où ceux qui ne correspondent pas à la fiche produit sont exclus du système.
Après la projection qui dure 2h20 (sans qu’on s’impatiente), nous avons assisté au débat. C’est une chance de découvrir les motivations du réalisateur et de pouvoir lui poser des questions. Nicolas Klotz a alors expliqué qu’il avait voulu montrer à quel point la Shoah avait été la matrice du monde industriel contemporain. Pour lui, cette extermination à grande échelle fut l’acte fondateur de la modernité. Le pouvoir aujourd’hui est entre les mains des pères, dont certains ont eu du sang sur les mains ou un comportement douteux pendant la seconde guerre mondiale. Nicolas Klotz met en lumière cet héritage à travers le langage utilisé aujourd’hui.
J’ai particulièrement eu plaisir à retrouver à l’écran Michael Lonsdale. J’aime le visage de cet homme. Un bref embarras quand O. a pronocé son nom à la française alors que je lui donne une intonation anglophone (bien plus sexy) mais en fait, mon intuition était la bonne. Michael Lonsdale est né de père anglais. Dans « La question humaine », il est tout simplement bouleversant. Un grand acteur !
Al Dabka (restaurant libanais)
1 bis rue Robespierre
94200 Ivry sur Seine (tél : 01.46.58.56.56)
Commentaires
Bon j'ai compris qu'il ne faut pas aller voir ce film. C'est drôle mais cette boîte me rappelle quelque chose, mais quoi ? ;o)
Un film que j'ai très envie de voir; encore plus après avoir lu ta note.
A mon avis, ce film a quelques faiblesses (que je sens en te lisant: tu n'es pas très enthousiaste). C'est peut-être un peu "théorisant"; mais ça semble intéressant, justement en raison de ces théories développées.
J'allais voir ce film avec en tête beaucoup de choses lues et entendues sur l'analogie entre le système nazi d'hier et les logiques impitoyables de l'entreprise aujourd'hui. Je redoutais donc une démarche un peu didactique. Mais là n'est pas le fond du film, son sujet : c'est le mécanisme langagier, technocratique, qui fait des histoires des mécanismes, qui les segmente pour les rendre acceptables par morceau, pour que chacun de ses artisans s'acceptent dans l'accomplissement du pire, là où des monstruosités et des dévastations humaines se jouent. Allez voir ce film absolument, il n'est pas théorique ni théorisant, bousculant c'est sûr, et vous ne lirez plus jamais de la même façon une note de service ou des préconisations administratives.
Merci de ce post, ma Fiso.
Eric & Giao,
Si je ne semble pas enthousiaste, c'est parce qu'on ressort de ce film mal à l'aise, bousculé.
J'imagine mal dire "C'est génial" parce que c'est un film très fort. Le genre de film auquel tu penses encore pendant des heures et qui soulève des questions sur tout.
Pour moi, cette élimination de tout ce qui ne correspond pas à un modèle, on le retrouve à d'autres niveaux, tous les niveaux en fait.
Donc, pour répondre à votre questionnement, bien sûr je vous recommande ce film. Il ne vous laissera pas indifférent.
Pour prolonger la discussion et découvrir les derniers livres parus de François Emmanuel, auteur de "La question humaine" (Stock) dont on a tiré le film, j'ai le plaisir de vous transmettre l'invitation suivante :
mardi 2 octobre 2007 à 19h00
Rencontre avec
François Emmanuel
À l’occasion de la sortie du roman Regarde la vague (éd. du Seuil), de la publication Les Voix et les ombres réunissant quatre conférences données à la chaire d’études poétiques de l’Université de Louvain-la-Neuve (éd. Lansman) et de la réédition de La Question humaine (éd. Stock).
L’auteur lit des extraits de ses oeuvres et évoque le film La Question humaine réalisé par Nicolas Klotz, adaptation de son roman au cinéma.
46, rue Quincampoix
75004 Paris
Mo Châtelet-les-Halles ou Rambuteau
http://www.cwb.fr
Entrée libre dans la limite des places disponibles
Réservation souhaitée au 0 153019696 ou lettres@cwb.fr
À l’issue de la soirée, dédicace des ouvrages à la librairie Wallonie-Bruxelles
Avec le soutien du service de la promotion des lettres du Ministère de la Communauté
française de Belgique.
Bien cordialement,
Pierre Vanderstappen
bonjour,
Je en suis pas très cinéphile, au grand sourire de mon voisin producteur, mais je retiens le restaurant dans lequel nous pourrions communier. Je pense qu'a terme, je verrai ce film, d'une façon ou d'une autre, mais probablement pas en salle.
Un ami m'a parlé d'une épicerie arménienne sur ivry, mais il n'a pas été plus précis. As-tu une idée de l'endroit ?
Vanderstappen,
Merci beaucoup pour l'invitation.
Je connais le centre Wallonie-Bruxelles et je pense y être.
Oh, ça te branche ?
Spamy,
J'adore les challenges.
Pour l'heure, je file en week-end mais "stay tuned" et je te trouverai l'info courant de semaine prochaine (ça tombe bien, un de mes collab' est arménien)
Ca m'auait bien branché, mais je taffe mardi 2 au soir, jusqu'à point d'heure (table ronde avec les habitants en vue de l'élaboration d'un plan bleu départemental - j'aurais l'occasion d'en reparler aux val-de-marnais de ta bande !...)
Merci de l'offre. Si t'y es, tu me raconteras ça autour d'un petit Sancerre rosé.
Bises. Oh!91
Chaque fois que j'ai lu un livre et chaque fois que ce livre devient un film je suis déçue par l'adaptation qui ne correspond pas à l'image que les mots avaient imprimés dans ma tête. Mais là ce que tu dis me donne envie d'aller le voir. Je te dirai ce que j'en pense!
Lhuna,
Tu l'as donc lu ?
Cette déception qu'on ressent souvent est dûe, je pense, à la non-concordance de notre imagination avec celle du réalisateur. Bizzarement, je n'ai pas beaucoup de souvenirs de déceptions de ce genre.
"Ne le dis à personne" tiré du thriller d'Harlan Coben était très crédible et pourtant, j'étais sceptique.
Evidemment, Nicolas Klotz a reconnu avoir pris quelques libertés par rapport au livre. Mia slà, tout de suite, je ne sais plus lesquelles. Tu te rappelles, O. ?
Il s'est même assez librement affranchi d'un texte totalement impropre à l'écriture cinématographique, si je me rappelle ce qu'en a dit l'adaptatrice. Le livre est un parcours mental. Le film est le parcours de l'homme. Il a dû reconstruire le fil d'un récit, que le livre ne donnait pas. Donc le film est autre chose, je crois. Il y a réinjecté des réflexions appartenant à Eric Hazan, sur les travers de la communication contemporaine. Bref, je crois qu'on peut aller voir le film, mais sans chercher nécessairement à y retrouver le livre...
Où en sont les vendenges, Fiso ?
Ce réalisateur considère-t-il vraiment la Shoa comme l'acte fondateur de la modernité ?
Il doit passer par des chemins inconnus bien tortueux pour arriver à une telle conclusion.
Mais je n'ai pas lu le livre, ni vu le film, alors peut-être dois-je combler cette lacune pour comprendre.
Bonne soirée
J'apprécie beaucoup Mathieu Amalric et Michael Lonsdale. J'avais envie d'aller voir ce film, mais j'avais peur de sortir ensuite trop bouleversée, et le moral bien bas.
Allez courage, j'irai peut-être !
Merci Fiso !
j'ai entendu de très bonnes critiques à son sujet.
christophe de Marmande
C'est une bonne idée que d'aligner la shoah sur nos comportements non-humains d'aujourd'hui.
Bien sûr la shoah est le résultat de la colonisation et de l'esclavage puis de l'industrialisation à outrance.
Mais pour le côté où les humains ne sont plus que des trucs utiles dans le système, c'est juste.
J'aurais bien aimé assister à cette séance, même pour le restau !
:-))
Motpassant,
Je résume, le cheminement est bien plus long et subtil que quelques mots jetés comme ça, à froid. En fait, j'ai compris que selon lui, la Shoah (mais n'importe quelle extermination d'un peuple) avait durablement influencé le monde industriel moderne.
Peuples, Fauvette,
Allez-y !
Filaplomb,
Je t'aurais emmené avec plaisir, Fil ! Tu aurais tout aimé, du resto au film et au débat :)
Spamy,
Après recherche, pas de trace d'une épicerie arménienne à Ivry …
En revanche, plusieurs adresses dans la ville voisine, Alfortville, fief de la communauté arménienne :
- dans la rue Etienne Dolet, l'épicerie Hay Ararat et la pâtisserie Arthur.
- Place Carnot
- marché Philippe
Et puis, 2 sites où tu trouveras des infos et des adresses : http://www.armenews.com/?var_mode-recalcul http://www.netarmenie.com/accueil/index.php
@ fiso
merci, je dois recevoir ces même amis début octobre, et je voulais leur trouver de vrais fromages arméniens. J'ai un fournisseur du coté de Ivry-alfortville. Je devrais bien trouver une raison d'aller par là-bas la semaine prochaine...
Encore merci.
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