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Stéphane

Il s’appelle Stéphane, il a 41 ans aujourd'hui.

Dimanche, je sortais d’un brunch gargantuesque avec un ami quand il s’est écroulé devant nous, sur le boulevard Saint-Germain.

Sa main tremblait, j’ai d’abord cru à une crise d’épilepsie. Quand je me suis agenouillée, il a refusé que j’appelle les secours. Il a ouvert les yeux et chuchoté « Non, n’appelez pas, je veux juste parler, s’il vous plaît ».

Il est resté allongé un moment, pour reprendre des forces, tandis qu’une jeune femme courait lui acheter à manger et à boire (merci à elle). Puis, nous l’avons aidé à s’asseoir. Il était épuisé par le manque de sommeil et la faim, tout ce qu'il répétait, c'était : "Je veux juste parler, s'il vous plaît, quelques minutes." . Stéphane n’est pas encore abîmé. Il précise mais je l’ai compris, qu’il ne boit pas. Je lui demande de tenir aussi longtemps que possible, de ne pas tomber dans l’alcool parce qu’alors, c’est la fin. L’alcool fait oublier le froid et l’indifférence alentour et un matin, on ne se réveille pas. Stéphane répond à mes questions mais ses réponses, je les connais déjà. Pas de centres d’hébergement parce qu’on le tabasse et lui pique ses affaires. Pas de potes dans la rue pour ne pas tomber dans la picole et les embrouilles. Pas d’aides des assoc’, parce qu’il n’est pas « prioritaire ». Prioritaire, c’est sans doute quand tu es devenu un animal, à l’article de la mort, plus assez conscient pour réfléchir. Putain, comment ça te fout les boules de regarder dans les yeux un homme qui essaie de ne pas sombrer, qui pourrait être ton frère. Stéphane, lui, il n’a plus de sœur, elle est morte avec ses parents dans un accident de voiture il y a 15 ans. Comment le 5ème pays le plus riche du monde peut laisser faire ça ?

Sur ce bout de trottoir, il n’y avait plus que nous 3. Stéphane posait des questions sur nos boulots, nos vies. Il a voulu nous raconter comment il était arrivé là.

Il y a encore un an, Stéphane avait un appart’, une femme et un boulot. Il était commercial indépendant et passait son temps en bagnole. Jusqu’au jour où son crédit de points est arrivé à zéro et où il a perdu son permis. Plus de permis, plus de boulot. Indépendant donc pas de droit au chômage. Sa femme le quitte, il ne peut plus payer les traites de son crédit auto, on le saisit et c’est la rue. Quand je dis « Ca va vite, on est pas à l’abri », il me répond « Les gens ne savent pas ». Moi je sais, et Nicolas aussi. Stéphane dit que ça lui ferait plaisir qu'on aille boire un café ensemble. Il a une bonne bouille, Stéphane, il sourit encore. Nous avons passé près de 2 heures avec lui, à parler de choses et d’autres, à rire aussi.

Ne jamais oublier. L’autre, c’est moi.

 

Commentaires

  • Beau billet !

    Je vais me faire de la pub ! Il illustre parfaitement ce que j'ai dit l'autre jour :
    http://jegpol.blogspot.com/2007/11/53.html
    à propos des 53% de Français qui pensent qu'ils ne se retrouveront jamais à la rue.

  • Des faits qu'on n'aime pas lire, des faits qu'il faut dire, les crier les gueuler et pas les encaisser en silence. C'est terrible ses situations ou tout s'enchaine jusqu'à une déchéance. Il aurait suffit d'un rien pour que rien ne se passe ainsi pour lui. Fiso je t'admire, tu as pris sur ton temps pour lui, un rire et quelques heures. Il est reparti comme ca ou tu sais ou le trouver ?

  • C'est poignant. Personne n'est pas à l'abri de ça.
    La France est tombée bien bas.

  • Nicolas,
    J'ai réintégré le lien vers ton billet dans le mien :)
    Bougrenette,
    Oui, je sais où le trouver ;)
    On reste en contact. Il voudrait retourner en Bretagne, on va voir ce qu'on peut faire.

  • très poignant...
    merci à toi de t'être arrétée pour le secourir. Personne n'est à l'abri de se retrouver sans rien dans la rue...
    je suis en train de lire No et moi de Delphine Devigan...une histoire différente...mais si proche...

  • C'aurait pu etre moi en l'espace de trois jours il y a quatre ans maintenant... Sans mes parents à cette époque, j'aurai pu etre dans cette situation aussi.

  • Bonjour,

    elle est bouleversante cette histoire. On reste rassurés que vous ayez gardé un contact. J'espère qu'il pourra s'en sortir.
    Par ailleurs, je me demande si ce récit ne pourrait pas figurer sur un blog " Equilibre précaire". Parce que ça en dit long sur la fragilité sociale qui peut toucher n'importe qui aujourd'hui.

  • Aujourd'hui, j'ai 35 ans et je suis chez moi, au chaud, en pleine santé, avec mon mari et mes enfants ... avec nos emmerdes de tous les jours !!!

    Bon sang qu'est ce qu'on est heureux !!! on nage en plein bonheur !!!

    Merci de me l'avoir rappelé, Fiso !

  • Un contact, encore mieux et tiens nous au courant, il y a peu être moyen d'aider d'une manière ou d'une autre.

  • Puisque tu as gardé contact avec lui passe le bonjour à Stéphane,.
    Dis lui qu'il peut rebondir, qu'il ne s'enferme pas dans le désespoir.
    Dis lui merci s'il te plais pour son message et que si la Bretagne lui parait plus douce qu'il la tente, il en a le droit.

    Le lien qui a été établi entre vous peut paraitre fragile mais quelle force il peut devenir si ce n'est que pour relancer un Homme.

  • Ce qui est beau c’est l’humanité dont tu as su faire preuve ainsi que les autres personnes qui portent de l’attention à Stéphane.
    Cependant (et oui, je mets un « cependant » qui risque peut-être de me faire passer pour un homme sans cœur ou mesquin…) même si la misère de cet homme est visible et certainement incontestable, ce qu’il dit sur la manière d’en arriver là n’est pas aussi simple à vérifier. J’ai aujourd’hui beaucoup de méfiance vis-à-vis des gens qui se positionnent d’emblée en victimes. Je sais, pour en avoir fait les frais, que des personnes ayant connu la déchéance imputent volontiers les responsabilités qu’ils refusent d’assumer à d’autres, qu’ils camouflent parfois leurs méfaits ou leurs lâcheté par un éclairage qui les fait prendre en pitié. Tandis que d’autres triment et souffrent en silence, arrachent à la misère quotidienne une portion de beauté et d’espoir, des gens qui ne laissent paraître ni leur fardeau ni leur courage.
    Oui, j’ai tendance à me méfier de toute forme de discours qui implique avant tout les autres et le mauvais destin dans une chute. Qui nous dit que Stéphane n’est pas toxicomane ? On peut consommer de l’héroïne sans sentir la vinasse. Qui nous dit qu’il n’a pas commis des actions innommables qui l’auraient conduit à être rejeté par celles et ceux qui l’ont aimé naguère ? Qui nous dit qu’il n’entretient pas, par complaisance, un état d’impuissance devant une réalité qu’il ne souhaite pas affronter ? Rien, sinon ce que lui et seulement lui énonce de sa vie.
    Mais je ne prône pas là l’indifférence, le mépris ou la condescendance, je ne dis pas non plus qu’il faille dénier les circonstances extérieures qui peuvent amener au déclin (car nous savons tous combien elles sont nombreuses !). Je crois au contraire que ne pas ressentir de la compassion devant une misère manifeste témoigne d’un manque d’humanisme et de sentiments.
    C’est donc une chose honorable que d’accorder du temps à des personnes comme Stéphane et de se révolter contre les lacunes de nos structures sociales tandis que d’aucuns spéculent en bourse, s’enrichissent de la détresse des locataires forcés d’accepter l’inacceptable fautes de trouver où loger, etc.
    Mais je tenais à témoigner de ce à quoi j’ai assisté à diverses reprises : un apitoiement sur soi qui masque parfois une grande lâcheté dont le conteur fait désormais les frais. Et plus le temps passe, plus je découvre que des gens courageux en grande souffrance et en grande détresse vivent autour de nous avec une discrétion paradoxalement très éloquente.

    Il existe un livre très intéressant et aussi nuancé que bien écrit qui s'intitule "Les naufragés". L'auteur a vécu parmi les plus pauvres pour voir et comprendre. Cet ouvrage a aussi le mérite d'illustrer les failles de nos structures d'aide et d'acceuil qui sont parfois très mal adaptées aux besoins concrets des gens qui y ont recours, car réalisées sans connaissance de ces besoins, justement. Plus références ici, par exemple :

    http://www.parutions.com/pages/1-6-63-2000.html

    Bon, j'espère ne pas m'être fait mal comprendre, hein, le sort des pauvres et des plus mal lotis est loin d’être un sujet que je prends à la légère ou « de haut » !

  • bonjour: j'ai été touché par cette note. c'est un milieu que je connais bien puisque mon métier est de m'occuper des personnes en situation précaire...je l'ai aussi fait pendant 9 ans en tant que bénévole dans une association!!!! je suis aussi touché par cette note pour des raisons plus personnelles aussi. je la trouve émouvante...
    alex : si je peux me permettre...tu dis "un apitoiement sur soi qui masque parfois une grande lâcheté"...pourquoi cette lacheté, d'où vient elle? tu t'es posé la question?
    une anecdote : en parlant avec certains SDF, j'ai compris pourquoi certains n'avaient pas la volonté de s'en sortir. ils avaient une femme , des enfants, une profession...la cause de leur descente étaient simples : un divorce, un décès d'un proche, un chômage, une maladie grave... la descente a été terrible pour eux...tellement terrible qu'ils ont peur...peur de reconstruire quelque chose et que ce quelque chose s'écroule à niveau. ils ont tellement souffert pendant cette chute qu'ils ne veulent pas revivre ce processus de descente...

    j'arrête mon monologue...
    bonne soirée

  • Alex,
    Ah, un com un peu contradicteur, c'est bien. Fiso nous a montré une vérité, celle de Stéphane. C'est la sienne. Je m'étonne quelque peu de cette rapide dégringolade en un an, alors qu'il avait tout. Les poins qu'ils à perdus, on ne lui a pas volés, il doit bien être responsable. Je ne vais pas re développer tout ce que vous avez justement retranscris. Je l'aurais aidé tout pareillement, mais on est pas obligé non plus d'adhérer sans méfiance. Je pense et me pose les presque mêmes questions que vous. Pour moi, c'est clair j'ai très bien compris ce que vous voulez dire, gageons que ce sera pareil pour d'autres.

  • > el desdichado : je me suis posé de nombreuses questions, tu sais ! Mais parle-t-on beaucoup des dégats parfois irréparables que causent les "déchéants" autour d'eux, à leurs familles, à celles et ceux qui les aiment...? La vrai lâcheté, la pire, je crois qu'elle est là. Penses-tu qu'ils n'ont pas eu peur, très peur eux aussi ? Crois-tu qu'ils soient les responsables ? Crois-tu qu'il n'aient rien tenté de faire pour aider ?
    La cause d'une descente, n'est jamais simple, ni pour celui qui chute, ni pour celles et ceux qui chutent avec lui.

    Je voulais juste parler de la misère silencieuse, du courage silencieux, qui ne se voient pas, que l'on oublie souvent.

  • alex : c'est vrai je suis d'accord avec toi quant à la souffrance des proches!!!!! tout ceci est très compliqué...

  • Et si on l'aidait ? Si tu récoltes de l'argent pour lui
    je suis partante .

    Bravo Fiso , ne le lache pas . A nous tous , on avance .

  • Victoire,

    Désolé ! Je t'arrête ! Il ne s'agit pas d'aider une personne. Des millierrs, voire milliions, de cas sont comme Stéphane ! C'est la société qu'il faut changer (comment ? Je ne sais pas)

    Mais aider un type de doit pas nous donner bonne conscience !

  • N'empêche que je comprends Vic ... ça donne envie !
    Ne t'en déplaise Nicolas !!!
    Et puis ce n'est peut-être pas une question de bonne conscience, juste de générosité ! (celle du coeur !)

  • Via le blog de Bougrenette , je suis venue chez toi. Je suis vraiment touchée par cette note , profondément !! Cette région que Stéphane veut retrouver, j'y habite alors si je peux t'aider à quelque chose dans la limite du possible , je serai contente de le faire ... Fais le moi savoir

  • Laefab,

    Je me répète : aider un type, ça donne bonne conscience : ça ne fait pas bouger la société. La générosité, ce n'est pas donner à un gugusse, c'est de trouver normal que ses impôts permettent une meilleure redistribution.

    Manue,

    Fais moi un virement.

    Fiso,

    Très bon billet : il amène le débat sans parler d'histoires de cul. Au fait ! Où est Tonnegrande ?

  • Alex,
    Merci de ton com qui soulève des questions intéressantes. Car en effet, je ne suis pas à l'aise avec ces bons sentiments "à tout prix", cette compassion qui est souvent récupérée pour nous faire verser des larmes.
    Tu m'amènes donc à aborder un questionnement que j'avais volontairement éludé, plus par souci de ne pas donner trop de détails sur la vie de Stéphane qu'autre chose.
    "L'enfer est pavé de bonnes intentions", n'est-ce-pas ?
    Figure-toi que notre premier réflexe a été de nous dire "on lui paie son billet de retour dans cette Bretagne chérie".
    Mais alors il nous a dit que son ex-femme ne voulait plus entendre parler de lui. Et là, on s'est demandé pourquoi.
    Et si en renvoyant Stéphane dans la ville ou elle a refait sa vie, on faisait de sa vie à elle un enfer ?
    Et si elle avait fui l'enfer, justement, en le quittant ?
    C'est pourquoi j'aime les questions que tu poses. Tu fais bien de rappeler que les victimes ne sont pas toujours celles qu'on croit. Cela renvoie au fameux triangle de Karpmann que j'ai découvert samedi dernier avec Isabelle
    N'empêche, Stéphane a notre numéro. S'il appelle on avisera.
    El Desdichado,
    L'être humain a des contradictions qu'on en peut comprendre qu'en vivant ce qu'il vit.
    Tu l'écris, nous ne sommes pas tous égaux devant l'adversité.
    Tu es le bienvenu, ici. Merci de ta visite et de ton implication à changer les choses.
    Nicolas,
    Je ne suis pas tout à fait d'accord avec toi. Je comprends parfaitement ce que tu veux dire, mais on peut aller loin dans le raisonnement. Tu avoues toi-même ne pas savoir comment changer la société. Un pansement n'est qu'un pansement, certes, mais ça peut éviter l'infection.
    Je ne crois pas que l'aider concrètement donne bonne conscience, en tout cas c'est sûrement plus utile que lui sourire en passant son chemin bien vite. Ca peut être CE coup de pouce qui le relance. En passant 2 heures avec lui, est-ce que je ne me suis pas donné bonne conscience moi aussi ?
    Dans ce cas, on ne fait plus rien et on attend que les autres la changent, la société ...
    Je n'ai pas de solution non plus. Je me pose des questions depuis dimanche sur ce qu'il faudrait faire. Mais je ne me prends pas pour un sauveteur non plus.
    Tonnégrande ? Il m'a remerciée de m'inquiéter pour les vieux ... Il a changé de couleur, il est au vert apparemment ;)
    Manue,
    Merci mille fois ! On verra la suite.

  • Je pense que cela a été une chance pour Stéphane de "tomber" sur toi Fiso. Sinon c'était les pompiers et tout le reste. Ou rien l'indifférence totale.
    J'espère qu'il va s'en sortir.

  • Beau billet. Touchant au plus profond.

  • chaque geste, chaque pas vers l'autre nous repporche un peu de notre humanité... il ne s'agit pas de ocnscience, il s'agit d'agir à son échelle...
    merci pour ce récit et pour ton empathie...je reviendrai^^

  • Toute sa vie dans un sac plastique, assis sur un trottoir, aux pieds des passants.

    Le système que nous dénonçons et qui permet qu'arrive cela, ce système est NOTRE société. C'est nous tous qui acceptons cette politique et c'est nous-mêmes, un par un, qui sommes les collabos qu'on devrait tondre…

  • Fauvette,
    J'espère aussi.
    Car quoi qu'il aie fait, aucun homme ne mérite ça.
    Ecrivateur,
    Survolé ton blog. J'y reviendrai, j'aime bien ta franchise, sans langue de bois.
    Néa,
    Il s'agit de ne pas s'habituer, de ne pas devenir sourd et aveugle. Tu sais, ça m'a sans doute fait autant de bien qu'à lui, ces 2 heures.
    Bienvenue, reviens quand tu veux !
    Filaplomb,
    Oh la la !!! Quels propos extrêmes !
    Encore toute bouleversée après avoir revu "Hiroshima", les termes de "collabos qu'on devrait tondre", j'aime pas du tout !!!
    Si tu veux te flageller, ce sera sans moi ;)

  • Fiso, je trouve enfin une minute pour réagir. Il n'y a en fait rien à ajouter, ni à ton billet, ni aux commentaires qu'il a suscités.
    C'est à Alex que j'aurais envie de répondre : sa méfiance est légitime. Mais ne croit il pas au contraire que les "déchéants", comme il dit, ont justement tendance, dans leur grande majorité, à se vivre en coupable plutôt qu'en victimes ? Alors quand l'un d'eux, à l'occasion d'un sourire et d'une main tendue, raconte son parcours... ça peut être mytho, ça peut être de la manipulation, mais ça peut être aussi une simple roue de secours. De toutes les façons, victimes, ils le sont, même quand ils portent une part de responsablité, même quand ils ont accompli des erreurs... Pace que la société n'a pas le droit de laisser des gens à ce point sans perspective et sans secours.
    Et qui peut dire : moi, je ne basculerai jamais ? Nous sommes tous menacés, tous fragiles. Et c'est bien la société qui nous fragilise chaque jour d'avantage en organisant les inégalités, la vie chère, les franchises médicales, les loyers démoniaques, etc, etc...

  • Fiso : ah mais j'ai juste parler de tondre moi ! Je ne suis pas fan des orties et des martinets !!!
    :-)

  • > Oh!91 : Je suis parfaitement d’accord avec ce que tu dis. Je sais que les gens qui « chutent » souffrent et ressentent aussi de la culpabilité. C’est important de savoir les écouter sans les juger et c’est aussi ce que je fais lorsque quelqu’un qui va mal se confie à moi. Encourager une personne qui vacille, qui perd pied, c’est de loin une des meilleures choses à faire ; lui montrer qu’elle est aussi capable de remonter la pente parce qu’elle a des ressources est assurément un discours positif. Mais il faut également se montrer lucide et savoir faire la part des choses qui sont évoquées : filer des sous à quelqu’un qui va s’empresser de les dépenser pour acheter de quoi se défoncer, par exemple, ne risque pas de l’aider énormément… Accepter qu’on n’est pas un pro du travail social, qu’on n’est pas psy ou médecin lorsqu’on ne l’est effectivement pas, c’est se monter humble et réaliste. C’est pourquoi je pense qu’il est préférable d’agir au sein d’une association bien structurée lorsqu’on souhaite faire de l’action humanitaire, sans quoi on risque d’y laisser des plumes sur le plan psychologique (et financier).

    Personne, en effet, ne peut se targuer de ne pas se casser la gueule un de ces jours, ça m’est arrivé plusieurs fois, je me suis relevé, j’en suis sorti renforcé, avec des connaissances et une expérience supplémentaire. Quand ça allait mal, j’ai été chercher de l’aide et ne le regrette pas. Mais c’était l’aide de spécialistes, de gens dont c’est le travail, qui savent y faire… J’ai bougé mon cul, je ne me suis pas contenté de couiner sur mon sort et les résultats ont été probants.

    Quant à la « société », elle est ce qu’elle est à un moment donné en un lieu donné. Si on veut améliorer des choses (et Dieu sait qu’il y en a à améliorer !) il faut être assez fort pour s’engager et agir, bref : il faut aller bien…
    Donc, je maintiens : c’est très important de ne pas se représenter UNIQUEMENT en victime même lorsqu’on a été victime en certaines occasions. Faire la part des choses avec humilité, prendre conscience de ses propres égarements, ne pas chercher à faire entretenir ses déviances par les autres, ne pas accuser à tort et à travers. Somme toute : ne pas oublier qu’on construit notre propre existence avec nos petites mimines, comme on peut, avec les moyens qu’on a, ne pas hésiter à recourir aux professionnels, à se faire soigner si on en a besoin, se battre, lutter, et retrouver ainsi l’estime de soi.

    "Notre plus grande gloire n'est point de tomber, mais de nous relever chaque fois que nous tombons."
    Confucius (551 – 479 av. J.C. )

  • Alex, Bravo pour cette démonstration et pour la citation de Confucius que nous devons garder à l'esprit. Et continuons à aider bien sûr, mais avec discernement et en faisant confiance à la société et ceux qui la compose. J'affirme qu'il y a des gens bien partout, et pas au devant de la scène. Ne pas oublier les structures mises en place, comme les restos du coeur, la croix rouge, et nous simples quidams qui n'hésitons pas à répondre présent lors de collectes de denrées pour les démunies, comme ce fut le cas le week end dernier.
    C'est faire injure à toutes ces bonnes volontés de penser que la société est pourrie.

  • Mère mi, je me sens interpellé : ce n'est pas dans ma nature de faire injure aux gens généreux. La société recèle des trésors, c'est indéniable. Et bien plus qu'on ne veut le croire ou le montrer. Et même dans ces zones de déserrance humaine que sont devenus certains quartiers. Et même au plus profond de la misère sociale. Quand je constate que la société décline, je ne m'occulte pas ces richesses-là qui, seules, permettent de garder espoir, et dont témoignent ces structures que tu cites. C'est simplement que toutes ces solidarités - c'est un fait - ne suffisent pas à endiguer l'avancée de la misère, du repli, de la violence, ne suffisent pas à empêcher la précarité et la désespérence de progresser. J'ai 42 ans, et n'ayant pas vécu la guerre, je ne me souviens pas avoir connu une époque aussi troublée du point de vue des repères et des perspectives, l'horizon est bouché et l'on se sent menacés, fragiles. Comme jamais. Quand je dis "la société est coupable", je ne dis pas "la société est pourrie". J'interpelle le politique. Et le pouvoir économique.

  • Post Scriptum : parce que quand je regarde Stéphane, je me vois moi. Avec moins de chance...

  • Tiens pourtant ce n'était pas toi que j'interpellais loin de là, puisque je pense et j'en suis convaincue après avoir lu ton com, être sur la même longueur d'onde. Mais plutôt Filaplomb très négatif dans son commentaire.
    Donc tout va bien entre nous pour l'instant (c'est une boutade bien sûr)
    D'accord pour dire que l'avenir se présente avec beaucoup d'incertitudes. La pauvreté, la déchéance ont toujours existé mais on en parlait moins que maintenant où l'on veut nous rendre responsable de cet état de fait. Que nenni. C'était pas forcément mieux hier, loin de là. Quand je suis née, j'étais loin d'être désirée et ma mère (fille mère) recevait des bons pour me nourrir.

  • Merci Fiso pour ton humanité,

    "l'autre, c'est moi", c'est tellement évident !

    et pourtant...à 20 ans à peine, pendant mes études, j'ai fait un stage de 6 mois (c'est long) en prison, et là, j'ai compris ça :l'autre, c'est moi ! je ne l'aurais pas imaginé un seul instant avant de rencontrer ces "autres" qui sont "de l'autre côté"(pourtant,je te jure que je ne suis pas une criminelle, même pas une mouche! :-))

    si au lieu de les condamner et de les exclure, ces autres, plus de gens leur tendaient la main, comme tu l'as si simplemnt fait, sans doute qu'il y aurait moins "d'autres"...

  • Cela me rappelle la rencontre que j'ai faite sur le trottoirs de Neuilly et que j'ai relaté dans une note du 8/07; on dirait même qu'il s'agit de la même personne...est-ce parce que toutes ces histoires se ressemblent; alors, n'oublions pas qu'elle pourraient devenir nôtres...et comme tu le dis, l'autre n'est pas autre, juste un miroir... de soi, de la société dans laquelle nous vivons...
    :-)
    i

  • Fiso
    Je n'aime pas parlé de moi et j ai dissimulé une grande partie de ma vie depuis 2 ans à mes proches, mes amis et autres..pas envie de larmoyer et qu on s appitoye sur mon sortt..et en plus mal a l aise, coupable et honteux... juste qq mots je me reconnais un peu, même si je n ai pas été aussi loin..
    Il y a 3 ans directeur de société en Belgique; tourisme..voyages dans le monde entier,vacances hiver et été avec femme et enfants aux Cara¨bes, Asie ou Afriaue ..douce vie.. et puis rachat de la société, restructuration, mon poste supprimé licenciement négociçié et pas pas de fric en indemnités, retour sur Lyon chomage mais aaseidc plus que confortables..et puis la chute..pas de réponses aux demandes d emplois..les mois passent on doute de plus en plus.. pb de couple..23 ans de mariage rien ne va plus..10 mois a dormir dans le canape du salon..depression, psy.. separation... seul en appart... passer de 6000 e par mois au rmi a 450.. ne plus payer la pension aliéentaire, ensuite le loyer..vendre ses livres et ses bibelots pour bouffer... le fond du puit...
    huissier avec police pour saisie.. la totale
    pas envie de faire pleurer ds les chaumieres..juste dire que ca existe et que je pensais que c etait pour les autres.. j ai vu..j ai compris...je viens de m en sortir... un emploi ..une direction de résidence en montagne..changer d air.. à tous les niveaux...

    Sorry Fiso..un peu long et pas l habitude de deballer des trucs persos..mais juste par rapport a ton post qui m a touché...
    bonnes vacances au Mexique... Merida, Oaxaca, Mexico...plein de belles choses pour toi

  • Je le dis comme je le pense, mais vous êtes parfois trop sérieux sur ce blog. Vous pensez au côté philosophique tu truc, mais oubliez le côté politique.

    Pensez ensemble : pour qui était il néfaste de voter. Pour qui ai-je voté ?

  • Arachnée: c'est tout à ton honneur, tu t'en es sorti. Un licenciement ça ne prévient pas, la chute est dure, il faut se relever. Tu n'y ai pour rien. Tu as su t'en sortir, par toi même. Qiui sait peut être que l'avenir te dira "qu'il fallait en passer par là". Peut être que maintenant ce sera encor mieux qu'avant . C'est ce que je te souhaite. Tu as bien fait de mettre ce com, c'est pas du misérabilisme, c'est une leçon de vie avec une fin heureuse (je ne parle pas de la séparation, je n'ai pas toutes les données).

  • Merci Mére mi... je ne sais pas si c est a mon honneur.. mais envie envie de retrouver cette envie de se battre contre soi meme contre tout... Votre comm me fait plaisir... oui rebondir.. bonne soirée

  • sorry faute ortho ..."parler"... même en se relisant!!

  • Mille bénédictions pour une personne qui fait preuve d'une aussi simple humanité ...
    Grandissime, tu es ...

  • Bonjour, moi je sais pas, mais j'aime l'attitude de Fiso envers Stéphane. Alex a sans doute raison, face à certains énergumènes... c'est possible... par discrétion je ne parlerai pas de moi il y a 12 ans, juste : il faut peu de choses pour "descendre", alors attention aux jugements hâtifs..
    Voilà, c'est tout.

  • Arachnée & Rony,
    Vos coms pudiques démontrent, s'il était besoin, que tout peut basculer du jour au lendemain. Je vous souhaite de ne plus jamais connaître ça.
    Trèfle,
    Est-e que tu es qui je pense que tu es ???
    ;)
    Si oui, quelle surprise ! Sinon, bienvenue :)

  • Non je ne suis pas qui tu penses que je suis :)
    Merci de ta bienvenue.
    J'ai apprécié que tu aies aidé Stephane sans philosopher.
    Si on devait, avant d'aider quelqu'un, réfléchir trois heures à la portée de l'aide et sa signification profonde, je ne suis pas certain que l'on serait plus ..."utile".
    Bon aprèm :)

  • Récit intemporel, universel. Quelle que soit la saison, le mal est là qui ronge. Solitude, égarement, dépression... C'est fou de se dire que cet homme avait tout et que sa vie ne dépendait, sans qu'il le sache, qu'à quelques petits points. Comment les a-t-il perdus. Aurait-il pu les garder ? N'est-il pas un peu fautif ou véritable victime d'un système qui annihile celui qui sort un tantinet du "droit" chemin ? Vous avez raison, ne jamais oublier car c'est peut-être nous demain...

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