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Conduire en Roumanie

Pépé.jpgUn des autres apprentissages de mon road-trip avec Boug'fut celui de la conduite hors de nos frontières. Si je n'ai pas grand-chose à dire des conduites autrichiennes et hongroises, sillonner les autoroutes en Allemagne et les routes en Roumanie fut source d'interrogations et d’apprentissage.

En Allemagne, la vitesse modifie grandement le comportement au volant. Tout va vite et il m'est arrivé plusieurs fois, doublant un véhicule à plus de 150 km/h, d'apercevoir dans mon rétroviseur, surgie de nulle part, une puissante berline qui me poussait au cul. Tout cela sans appels de phares ni coups de klaxon.

Les conducteurs allemands pratiquent à la perfection le dépassement. En fait, comme nous l’avons tous appris dans le code de la route : je double, je me rabats.

On n’y voit pas, comme ici-bas, des véhicules isolés avalant les kilomètres sur la voie la plus rapide, se foutant éperdument de freiner plus rapide qu’eux.

Et puis, sur les autoroutes allemandes, les décapotables sont souvent pilotées par des jeunes femmes sophistiquées, cheveux brillants et sourire ultrabright. Ça sent bon l’ordre et la discipline.

En Roumanie, c’est bien différent. Les routes sont un spectacle permanent, théâtre d’un joyeux bordel, d’où surgissent mille surprises qui font tour à tour frémir et sourire.

Frisson de dégoût à la vue des carcasses de chiens errants martyrisés sur le bas-côté, frissons fugaces de peur lorsqu’au détour d’un lacet de montagne, on est frôlé par un des nombreux poids-lourds qui sillonnent le pays.

Sourire attendri au spectacle d’une mémé se tapant un petit roupillon, les mains sur le ventre, dans le foin de la charrette que conduit son mari, laquelle est menée par un cheval parfois coiffé de pompons rouges.

Charrette2.jpg

Sourire empreint de nostalgie en traversant des villages où posément installés sur les bancs de pierre qui ornent le perron de leurs maisons fleuries, des petits vieux, eux en vest,on, elles en foulard, papotent dans le jour déclinant. Pourquoi on n'a plus ça, en France ?

Sourire encore à la vue des robes laiteuses des troupeaux de moutons en transhumance, menés par un fier berger sur le vert tendre des prairies, ou encore au détour d’un virage, la mine placide d’un pépé chapeauté qui promène sa vache au bout d’une corde.

Sourire admiratif, aussi, au passage de la jupe virevoltante d’une belle et piquante gitane aux allures d’Esméralda.  

Le premier soir, à l’assaut des routes sinueuses de la montagne noire, j’ai bien cru que jamais nous n’embrasserions Dana. Un type avait bien failli me balancer dans le ravin en voulant me doubler, me klaxonnant abondamment au passage. En l’insultant copieusement, je m’étais écrié « Ils roulent n’importe comment, ici, ça promet ! »

Dix jours plus tard, j’avais compris mon erreur et louais l’étonnant esprit de solidarité des conducteurs roumains, rendu nécessaire par l’état déplorable des routes. J’avais noté avec surprise que les conducteurs signalaient à ceux qui les suivaient un rétrécissement de chaussée en faisant jouer leur clignotant gauche (oui parce que pour faciliter la chose, on roule à droite, certes, mais on se rabat sur la gauche, vous me suivez toujours ?)

Ignorant cet usage (et d’ailleurs m’étant moi-même fait surprendre par cette voie qui se finissait brutalement sous mes roues), j’avais déclenché le courroux de celui qui entreprenait de me doubler parce que je ne l’avais pas averti que la deux voies se transformait en une.

Une autre pratique qui m’a surprise, c’est la façon dont les Roumains pratiquent le dépassement.

Dès qu’ils ont quelques dizaines de mètres de visibilité, ils déboitent et doublent plusieurs véhicules à la fois, se rabattant seulement lorsqu’un véhicule arrive en face. Parfois d’extrême justesse.

Le premier qui se lance donne ainsi le signal du départ aux autres qui s’élancent à sa suite jusqu’à ce qu’il se rabatte, leur signalant l’arrivée d’un véhicule en sens inverse.

Ce comportement risqué mais néanmoins inévitable, étant donné la densité de la circulation et les voies uniques, n’est possible que parce que le conducteur se faisant doubler ralentit et permet à tout moment une réinsertion rapide dans le flux de la circulation.

Attention impensable sur les routes françaises où les conducteurs se comportent le plus souvent en coqs et où chacun se pose en donneur de leçons, quitte à accélérer pour empêcher plus rapides qu’eux de continuer leur route.

Après quelques hésitations, Boug’ et moi avons vite adopté le comportement de nos hôtes.

En Roumanie, on ne conduit pas, on pilote, zigzaguant prudemment entre les nids-de-poules et priant qu’un chien ne traverse pas sous notre nez (ni un ours, mais ça c’est une private joke).

Et si les accidents sont nombreux, ce n’est pas à cause de l’alcool (tolérance zéro) ou de la vitesse mais de l’état des routes.

Et longtemps après avoir franchi les frontières roumaines, on pouvait encore nous entendre nous écrier, dans un éclat de rire « On a fait la Roumanie, nous, monsieur ! »

PS 1 : Qu’est qu’on s’emmerde, sur les route françaises !

PS 2 : Ce billet n’intéressera sans doute que nous, Boug’, mais ça fait du bien, non ?

Commentaires

  • tu m'étonnes ... te faudrait quelques photos pour illustrer :-) je vois qu'on est dans un dimension commune, et je bichonne le moteur pour l'année prochaine !

  • C'est passionnant tout ça ! :)
    Il faudra prévoir une virée en Suède où les règles de dépassement sont encore différentes !
    C'est le dépassé qui cède la place en se rabattant sur ce qui est pour nous la bande d'arrêt d'urgence ...
    Oui ça manque cruellement de photos !!
    Je me souviens des airbags de Fiso qui m'avaient fortement ému ... :p
    Vive la prévention routière !!! :)

  • Quel joli tableau plein de poésie...
    Ca me fait penser aussi à l'Italie, à ces spectacles qu'offrent les carrefours bondées où ça klaxonne, ça braille, ça crie entre vespas et bagnoles qui jouent les fangios et se croisent on ne sait comment, et pourtant après des heures d'observation, pas un seul accident...
    En Roumanie, on m'a raconté aussi la présence fréquente sur le bord des routes de quelques carcasses, non pas de quelques mammifères ou autres humains malchanceux, mais de voitures, laissées pour mortes sur le bas côté, victimes d'une fracture d'un essieu, après les attaques d'un nid de poule non signalé sans doute...
    Monde cruel.
    Et de me faire penser à cette chanson touchante
    http://www.youtube.com/watch?v=G6kxC3G4nQY

  • Ben non, moi j'ai lu aussi ! Bon, je ne dirais pas comme Philo (fayot) que c'est passionnant mais c'est intéressant. Surtout parce que c'est vous qui l'avez vécu ! Et j'aime assez la répartie "on a fait la Roumanie nous Monsieur" comme si cela soudainement vous conférait un statut différent digne de respect...

  • Oh l'ôôôtre comment qu'elle est Gigi ! V'là qu'elle me traite de fayot alors que c'est mon second degré habituel ! :))

  • Boug',
    Je manque à tous mes devoirs ... mais toi, tu sais ....
    Philo,
    Ça me rappelle le comportement des irlandais, cette façon de faire en Suède.
    (mes airbags en ce moment, vaut mieux pas s'en approcher, ils te pèteraient à la gueule)
    ;)
    Usclade,
    Sympa cette photo italienne, j'ai imaginé un instant, et j'ai souri :)
    (la chanson, je l'écouterai demain, là je suis sur du Gotan Project)
    Gicerilla,
    Y'a de quoi se gausser -un peu - je t'assure !
    D'ailleurs, pas de femmes au volant en Roumanie, c'est te dire !

  • sourire...
    j'ai adoré ton billet.

  • Mmmmmmm.....
    A ce point explosive ?
    Ça donne envie de jouer au démineur... ;)

  • Ca m'a rappelé (à un degré d'intensité moindre, tout de même) la conduite en Sicile, l'été dernier. En débarquant du bateau avec notre Clio, on avait une trouille bleue de se plonger dans la circulation aux abords de Palerme... N'écoutant que mon courage, j'avais laissé le volant à TiNours... Et c'était parti pour la conduite "à l'italienne" : ça se doublait, ça se grillait la priorité, ça stationnait n'importe où, dans un joyeux charivari de voitures ivres, MAIS, sans agressivité aucune. Pas de coups de klaxon excessifs, ni d'insultes. Ca, ça m'avait frappé.
    Au bout de 24h, on a vite compris la leçon. les deux règles d'or étant, 1) Il n'y a pas de priorité, sauf pour celui qui passe le premier. 2) On se gare là où il y a de la place, sans chercher à comprendre si on gêne ou pas.
    La vie en vacances est devenue tout de suite beaucoup plus simple ! Quelle idée de se tracasser avec toutes ces règles, c'est vrai, quoi.... :)

  • Charles,
    Il ne vous reste plus qu'à faire le voyage pour partager votre ressenti, à votre tour :)
    Philo,
    Je crois qu'il y a méprise ! Je ne suis pas DU TOUT d'humeur à batifoler ;)
    Lancelot,
    Finalement, ce billet appelle des témoignages intéressants et très imagés. C'est cool :)
    (je comprends que tu aies laissé le volant à TiNours ... il est imperturbable, comme Boug', alors que toi et moi on est un peu ... sanguins ;))

  • Oupsss !!
    Sorry ...

  • Dans l'ensemble d'accord avec votre description et votre analyse du comportement
    des automobilistes roumains au volant.
    Mon expérience plus récente ( 2014 ) me permet de préciser quelques points que vous n'avez pas évoqués:
    - La quantité importante de mémoriaux fleuris le long des routes en mémoire aux victimes d'accidents le long des routes
    - Le nombre invraisemblable de poids lourds qui ralentissent le trafic sur toutes
    les routes et rendent ainsi les roumains prêts à tous les risques pour gagner un peu de temps
    - Les consignes de sécurité et la présence policière qui foisonnent au bord des routes et qui contrastent de façon ironique avec l'état de délabrement de celles ci.

    Le réseau autoroutier de la roumanie est d'environ 200 kilometres et vu qu'il faut là bas environ 5 ans pour construire 20 kilomètres (corruption des services publics oblige), il faudra encore pas mal de temps aux roumains pour espérer rouler dans des conditions correctes dans leur pays.

  • Dom bout,
    Les mémoriaux fleuris et les policiers au bord des routes, j'ai dû les rater entre les carcasses de chiens;) ... Il vaut mieux d'ailleurs ne pas trop regarder ce qu'il se passe en dehors de la route ...
    Les poids lourds, c'est vrai, un fléau et pas rassurant quand on conduit.
    Merci de votre témoignage.

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