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  • A vot'bon coeur, mesdames !

    Bonjour Mesdames

    Je vais me marier en 2012
    Mais voilà ma future femme est mince et a une petite poitrine...
    Avant d'officialiser mon union et d'être officiellement un gentil mari, j'aimerais avoir une dernière relation charnelle avec une femme plantureuse et ainsi me rappeler une dernière fois aux plaisirs des courbes vertigineuses
    Au plaisir d'avoir de vos nouvelles

    Bises

  • ApérOpéra

    Mon prestigieux client déménage bientôt de la rue où s'alignent bijouteries, magasins et hôtels de luxe. Les femmes, qui suivent manifestement la mode dictée par Elle, y sont bronzées toute l'année. Dommage, je commençais à me constituer un joli carnet d'adresses entre la place Vendôme et celle de l'Opéra  Ce quartier, bien loin de mes lieux de villégiature, l'est devenu un peu plus depuis que je fréquente assidûment l'Oustaou Café et les restaurants japonais de la rue Sainte-Anne.
    Il y a quelques semaines, j'ai déjeuné d'un excellent rougail saucisses au restaurant Le Cap Bourbon, aux accents de l'île de la Réunion. Chaque jour offre son plat réunionnais et on peut aussi y manger de l'authentique cuisine de brasserie. Les plats y sont en moyenne à 13€, ce qui est fort raisonnable pour Paris, et encore plus pour ce quartier. Une vraie bonne adresse désormais sur ma liste de bons plans. En revanche, je suis restée perplexe en déchiffrant l'inscription du tee shirt d'un - pas si jeune - homme au bar : "J'étais pas un porc, j'avais pas la gale, avant le Portugal". D'un parfait mauvais goût, non ?

    Bourbon.jpg


    Ce midi, j'ai voulu tester une terrasse fort animée que j'avais débusquée, un jeudi soir, en allant acheter la merveilleuse burrata de la coppérative italienne.

    Le restaurant "Le Petit Vendôme", rue des Capucines, est un endroit étonnant. Une profusion de miroirs, affichettes, fanions, une vraie fête foraine ! L'ambiance y est très bonne franquette sur fond sonore élevé. C'est qu'on est là dans un authentique bar à vin où l'on sert de goûteux casse-croûte auvergnats. La foule qui s'y presse, dedans et dehors, témoigne du succès de son concept.

    En salle, on déjeune, coude à coude, sur des nappes à carreaux. Au comptoir, où jambons et fromages s'exhibent sans pudeur, on fait la queue pour emporter un authentique casse-croûte auvergnat.  Fritons, rillettes, saucisse sèche, andouille de campagne, terrine maison, frometons odorants, il y a là de quoi faire péter le taux de cholestérol sans une once de culpabilité. Les clients sont essentiellement des hommes (des vrais!) : jeunes, vieux, cadres et tout ça mélangé, ils partagent joyeusement une bouteille de pinard en se léchant les doigts.

    On me cale dans un coin. A la table voisine, deux "hommes d'âge mûr" (expression politiquement correcte pour ne pas dire vieux) saucent leurs assiettes de moules au roquefort. Marine, la serveuse, brune joliment décolletée et néammoins efficace, arpente la salle en criant "chaud chaud chaud !". Deux hommes s'installent à côté de moi. L'un d'eux, pas de pot pour lui, est obligé de se tourner vers moi pour me déshabiller dévisager à son aise. Il tente de lier conversation mais je coupe court à ses maladroites tentatives. Ma sociabilité ne m'a pas beaucoup réussie ces derniers temps.

    Petit Vendôme.jpg

    J'ai décidé de faire léger ce midi; ce sera donc saucisse-aligot. J'ai une pensée pour mon ami Oh!91 qui nous en avait régalés - entre autres délices dont il a le secret - lors de vacances en Dordogne. C'est savoureux et je suis gourmande mais je me fais violence et abandonne aux 3/4 de l'assiette, faisant la sourde oreille à la voix de mon enfance qui s'insurge "Finis ton assiette !"

    [Une des aberrations de nos sociétés - moi la première - ne manquant de rien : manger par automatisme ou ennui, rarement par faim, sans être à l'écoute de son corps qui dit "Assez!". J'ai fait,  quelquefois, l'expérience inédite d'arrêter de manger dès que je ne ressens plus ni faim ni plaisir : je suis rassasiée avec des portions incroyablement petites]

    Les clients qui entrent, visiblement habitués, complimentent la serveuse sur sa nouvelle coupe de cheveux. Je l'alpague "Il n'est pas dans le quartier, par hasard ? J'en cherche justement un". Quelques minutes plus tard, rendez-vous est pris avec Elie, à quelques mètres de là.

    En fin de journée, lorsque j'entre dans le salon, une cliente raconte des trucs salaces à la coiffeuse, un demi posé devant elle, en attendant que sa couleur fasse effet. Un homme entre, déclare venir pour une épilation maillot, charrie la cliente qui boit son demi de cervoise. "J'ai soif" dit-elle. "Si t'as soif, t'as qu'à boire du shampoing, y'en a plein ici."
    Elie m'installe devant un miroir et sourit, visiblement amusé de ma surprise devant cette ambiance très "Comète du KB":

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    "A cette heure-ci, on se lâche, dit-il. Ce sont tous des commerçants du quartier. Lui, là, avec l'accent du midi, c'est le cordonnier du coin et elle, c'est la serveuse du restaurant d'à côté."
    La patronne fait le tour de la salle : "Madame la cliente, qu'est ce que vous buvez? me demande-t-elle. Elle revient bientôt avec un plateau et pose un demi devant moi. Je me marre et me congratule  mentalement de ma capacité à me fourrer dans les bons plans, tout en trinquant à la santé d'Elie, qui m'a fait une jolie coupe printanière. Je suis sûre que Nicolas va être jaloux comme un pou : se faire payer un demi chez le coiffeur, faut le faire quand même ! Nico, à côté d'Elie, ta coiffeuse plate comme une limande ne vaut pas un clou !

    Le Cap Bourbon au 1, rue Louis le Grand (angle Danielle Casanova), Paris 2ème (01.42.61.81.05)

    Le Petit Vendôme au 8, rue des Capucines, Paris 2ème (01.42.61.05.88)

    sans oublier le meilleur bar du quartier, chez mes potes Kamel et Chichi : l'Oustaou Café au 28 bis, rue de Richelieu.

  • Dans nos murs

    Dans nos murs.jpgIl y a quelques semaines, j'ai reçu ceci dans ma boîte aux lettres :


    Bonjour,
    Pour ceux qui ne le savent pas encore, la jolie petite maison du 40 rue de la Vanne va bientôt être détruite.
    Presque 100 ans de vies, de joies, d'amour, d'épreuves, d'amitié, de fraternité, de partage et d'échange, vont s'éteindre avec elle et rester dans nos coeurs.
    Etant la fille des propriétaires et ayant toujours vécu dans cette maison, je souhaite marquer le coup, lui rendre un dernier hommage. Afin donc de fêter les vies qu'elle a portées et se remémorer les bonheurs partagés, j'organise avec l'association Arti'Street un évènement sur 3 jours les 2, 3 et 4 septembre 2011.
    Nous présenterons donc pendant ces 3 jours des expositions (photos, peintures, graffs, une exposition sur l'évolution de la ville de Montrouge), des concerts et des performances en tout genre.
    L'accès à la maison sera ouvert tout le week-end et jusqu'à 1h00.

    Hier soir donc, guidée par la musique, je me suis pointée devant cette maison peu après 21h.

    Dans l'ancien garage, une jeune fille accroche un bracelet vert à mon poignet. Il n'y a pas plus d'une dizaine de personnes, tous dans la vingtaine. Seule, je suis un peu intimidée.
    Le jardinet est décoré de lampions et de guéridons en métal. La maison, vidée de ses meubles, est ornée de tags. Au rez de chaussée, dans ce qui devait être le salon, je suis attirée par de très grands tableaux. Ce sont des portraits d'artistes noirs réalisés au collage. J'y retrouve Myriam Makeba, Louis Armstrong, James Brown, Frantz Fanon, fondateur du mouvement de pensée tiers-mondiste, dont j'ai lu "Peau noire, masques blancs" : : 

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    Je décide de me réfugier au sous-sol, où un jeune home blond mixe à merveille des morceaux de hip-hop. Gangstarr, merde, j'ai envie de danser ! Je pense à mon petit frère, s'il était là on danserait ensemble, du coup je l'appelle.

    « Il parait que tu es mignonne, dit-il en décrochant.
    — Ah bon ? Qui a dit ça ?
    — Mon pote Antoine. Ta photo est apparu sur mon téléphone quand il a sonné, il a dit "Ouh ! elle est mignonne !
    — Embrasse ton pote Antoine de ma part !
    Je lui dis qu'il me manque. « T'inquiètes, Fiso, je reviens définitivement à Paris dans 2 semaines, au plus.»
    Je raccroche avant que ma voix ne fasse des remous et retourne écouter la musique. Dommage que je n'ai pas, dans mes ami(e)s, d'amateurs de hip-hop. Les vieux de la vieille qui dansaient avec moi au Bobino et au Rex se sont mariés et ont fait des gosses. ils passent sans doute désormais leurs soirées devant la Star Ac' ou des séries américaines. J'en appelle un, pas rentré dans le moule non plus, mais il décroche en disant : « Je suis au taf', je te rappelle.»

    Un peu plus tard, je suis la flèche "Expos" et monte au premier étage. Une pièce abrite des portraits de tatoués et d'un vieil homme. Une autre des vues comparatives de Montrouge avant et aujourd'hui, mises en place par le sexy Guacamelo (il a passé le week end à se balader torse nu, le bougre!) J'adore imaginer la vie avant. En vieillissant, je succombe doucement à cette ridicule idée que c'était mieux avant. Pourtant, pour rien au monde je ne voudrais frotter le linge au lavoir avec les bonnes femmes du village, cuisiner chaque jour pour une tablée de dix ou quémander de l'argent à mon mari. Quoique. Elles se posaient moins de questions à l'époque. Bref, je m'égare.

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    Je redescends dans la pièce aux collages et me plonge dans une analyse plus minutieuse de ces magnifiques portraits. J'aime particulièrement ceux de Tracy Chapman et James Brown. Je regrette l'absence de Boug' qui s'était collée aux collages, à une époque. J'ai toujours une pile de magazines féminins à la con en stock pour elle. J'essaie de déchiffrer le nom de l'artiste, écrit à la verticale. Une jeune femme à la tignasse mousseuse, accompagnée d'une petite fille dans une robe rose de princesse, prend des clichés des tableaux : "C'est mon papa qui les a faits !"
    Chouette ! J'ai devant moi la réponse à mes interrogations. L'artiste, c'est donc Mustapha Boutadjine. Il vit à Bagneux mais son atelier est dans le 13ème arrondissement. Les portraits exposés ici appartiennent à la série "Black is toujours beautiful". Ci-dessous, d'autres portraits, issus des galeries "Insurgés" et "Poètes" :

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    « Normalement sa photo est insérée dans chaque tableau, il a des moustaches » dit-elle.
    Et en effet, sur celui de Tracy, je découvre un moustachu aux faux-air de Dali. Je m'extasie à vois haute et une jeune femme brune engage la conversation. Elle vit à quelques rues de chez moi, travaille dans le social et évolue dans le milieu artistique. D'après ce qu'elle a appris, la jolie maison laisserait place à un immeuble de logements.

    [Nous passerons le reste de la soirée ensemble, danserons un peu au sous-sol avant de boire un verre dans le jardinet. Cette jolie initiative de rassembler des gens, dans un quartier où il ne se passe jamais rien, ouvre une discussion sur notre ras-le-bol du virtuel. J'ai fini par céder et ouvert un compte Facebook il y a quelques mois, principalement destiné à mes connaissances hors-hexagone et j'en ai marre de ces connaissances ou même ami(e)s qui ponctuent mes rares publications de "J'aime" ou me balancent des "Coucou" publics, auxquels je ne réponds pas, alors qu'ils ont mon numéro de téléphone.]

    Dans le jardin, une jolie jeune fille aux lèvres fardées de rouge et au décolleté pigeonnant, canette de bière à la main, me claque deux bises. Elle est chanteuse de textes français et aussi de psyché-rock et clôturera le festival dimanche.

    Edit du 10 septembre :

    Le lendemain, samedi, j'ai fait la connaissance de Nassima, fille de l'artiste qui fait de très beaux collages, d'un grafeur en live branché reggae, de Sabrina, chanteuse soul et de Sarah, à la fraîcheur irrésistible et au sourire flamboyant.  Et puis, surtout, j'ai eu la chance d'écouter le groupe Square Circle et suis tombée sous le charme de son très charismatique chanteur, Julien. J'ai cherché des infos sur internet, mené ma petite enquête, dégoté deux vidéos Youtube mais pas de site internet, de page FB ou MySpace exploitable, et fini par lui envoyer un mail sur Facebook, où j'ai retrouvé sa trace. Dans la journée, j'ai croisé des têtes familières : un couple de mon immeuble qui comptent parmi mes chouchous, ma voisine rouquine du bout du couloir qui venait faire un tour en curieuse.

    Le soir, j'y suis retournée avec mes deux seuls amis du quartier et j'ai chopé le chanteur sur la pelouse. En plus d'avoir une énergie folle sur scène, il est absolument charmant, ce Julien. Il a été fort surpris que j'ai réussi à dégoter autant d'infos sur lui, et le coup de la recherche de sandwiches dans Londres l'a bluffé. C'est qu'il ne sait pas que je suis un petit reporter, le Julien, et têtue, en plus. J'ai ainsi appris qu'ils sortaient un CD en novembre et il a confirmé ce que j'avais deviné, à savoir qu'il vit à Londres.J'espère bien que Julien me tiendra informée, comme il l'a promis, de leurs dates de concerts car j'ai bien l'intention de les suivre.

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    J'aurai passé 3 jours dans la maison de la rue de la Vanne. Le dimanche, les proches se sont succédés pour les derniers moments dans la maison qui sera remplacée bientôt par un immeuble de bureaux. Le regard de Josette, retraitée qui vint là pendant des années, s'embua lorsqu'elle passa pour la dernière fois le portique de la maison. Les anciens propriétaires et les filles de la maison étaient là, eux aussi.

    Le soir, blessée par la bétise de 2 connards que j'ai eu le malheur de croiser, je suis aller mater un western devant un plateau de sushis chez un copain tout à fait charmant, lui. Et tant pis si, à l'heure où je suis rentrée chez moi, il me restait 4 heures de sommeil (il est 5h, Fiso s'éveille ...)
     

    Arti'Street

  • La femme-pansement

    Elle recontacte un collègue, perdu de vue depuis des années. Seule depuis quelques mois, déprimée, elle a besoin de se refaire un cercle d'amis avec lesquels sortir. Les siens ont tous fondé famille. Il répond à son mail d'un ton enjoué, visiblement enchanté de cette réapparition. Il est seul depuis quelques mois et déprimé, lui aussi.

    Ils se retrouvent dans un café, un soir de janvier. Il est moins séduisant que dans son souvenir. Tout à fait quelconque, même.

    Quelques soirées plus tard, elle se laisse embrasser, sans conviction. Les sens font le reste.
    Au petit matin, son regard brun est plein de gratitude. D'autres matins viennent jusqu'à celui où il la pique, une première fois. Elle encaisse le coup, espère que la lueur de ses yeux ne s'est pas ternie, ne dit rien. Il lui écrit des mails où il dit tout le bien qu'elle lui fait : "Tu m'as permis de rester un homme quand je me voyais comme une serpillère."

    Un autre matin vient où il ressent le besoin d'exprimer l'inutile, le superflu, le tacite : "Le jour où je rencontrerai quelqu'un, je te le dirai tout de suite."   
    Cette fois c'est trop. Quelques jours plus tard, elle met fin à leur relation. Reçoit un mail assassin, puis d'autres, qu'elle parcourt, sans comprendre. Ils ne sont pas restés amis, il ne lui a jamais pardonné. Pardonné quoi ?

    aime-toi et on t'aimera

    Le hasard la remet en relation avec un ami très cher, perdu de vue depuis des années. Ils se sont connus au lycée et sont sortis ensemble, de façon épisodique. Seule depuis quelques années, apaisée, elle s'est constitué un cercle de connaissances et ami(e)s avec lesquels elle partage de nombreuses sorties. Il l'appelle un soir, elle est très émue d'entendre sa voix, il veut la voir tout de suite.

    Le jeudi suivant, il s'avance vers elle devant la gare du Nord. Il est encore plus beau que dans son souvenir. Les boucles de ses cheveux noirs sont tissées de gris, les chagrins ont laissé sur son visage, autrefois poupon, de légères griffures, sa démarche est toujours aussi féline.

    Il est seul depuis quelques mois et dans le restaurant où ils se racontent les joies et les blessures des dix années écoulées, l'émotion est palpable. De retour chez elle, où il l'a déposée, elle reçoit un sms de lui : "I'm so excited !" Elle sourit de sa spontanéité, s'interroge quelques instants sur l'ambiguité du message et s'endort, le sourire aux lèvres.

    Quelques soirées plus tard, il la soulève enfin dans ses bras et l'embrasse. L'amour qu'ils se portent depuis si longtemps fait le reste.
    Au petit matin, son regard brun est mâtiné de gêne. D'autres soirées et d'autres nuits se suivent, où ils refont le monde et l'amour. Ses amis s'étonnent de cette relation qui dure mais n'évolue pas. Elle invoque leur attachement à la liberté, leur peur de l'échec. Pourtant, certains soirs, elle est triste et il n'est pas là.

    Un jour où le nombre de leurs nuits ensemble a atteint trois chiffres, il confie que sa solitude lui pèse. Il la câline, lui fait passionément et rageusement l'amour et elle pose enfin la question qui lui brûle les lèvres depuis plusieurs mois :"Pourquoi on n'a jamais essayé de faire un bout de chemin ensemble ?"
    Elle connaissait la réponse à sa question. Elle avait compris, depuis longtemps. Elle voulait juste être rassurée. Il sera à jamais son ami, et peut-être même qu'au soir de leur vie, ils se retrouveront enfin, qui sait ?  

    aime-toi et on t'aimera

    Elle recontacte un copain avec lequel elle s'est brouillée, il y a quelques années. Ils ne sont jamais sortis ensemble. Seule depuis de longues années, stabilisée, elle n'a plus grand-chose à se prouver, si ce n'est qu'elle peut encore aimer et être aimée. Il lui écrit un soir, propose de partager des sardines grillées dans un troquet de Ménilmontant. Elle trouve la proposition pleine de fraîcheur et accepte, ravie.

    Le vendredi suivant, il marche vers elle, sur un trottoir animé. Il est comme dans son souvenir, juste un peu plus cabossé.

    Dans le bistrot bondé où des musiciens chantent, les sardines sont savoureuse et la soirée pleine de simplicité, comme par le passé. Il sort d'une énième rupture avec la même femme, qu'elle connaît, il est déprimé et noie sa solitude dans le vin, comme par le passé. De retour chez elle, il monte pour un dernier café. Au moment de la quitter, il l'attire contre son torse et elle se laisse aller dans la chaleur de ses bras. Sa main caresse la peau dénudée au bas du dos, sa bouche cherche la sienne. Leurs solitudes désormais subies font le reste.

    Au petit matin, leurs regards débordent de tendresse. D'autres nuits se suivent, très vite, et des soirées collés l'un contre l'autre, à se câliner. Parfois l'ombre de l'autre femme voile le regard brun mais elle fait semblant de ne rien remarquer. Elle vit l'instant présent et le présent est bon dans ses bras.

    Il lui écrit de jolis mails où il dit que leur rencontre est capitale pour lui, qu'elle l'éveille, qu'elle lui manque, qu'il retrouve "un paradis perdu qu'il n'a jamais connu". Pourtant, il mentionne aussi l'autre femme, qu'il n'arrive pas à chasser de ses pensées. Elle savoure les jolis mots mais ne se laisse pas griser. Elle devine qu'il se raconte des histoires, qu'il essaie d'y croire; elle ne lui manque pas, tout au plus c'est une présence qui lui manque, celle de l'autre ?

    Un soir où elle est triste, elle lui écrit sa lassitude d'être celle qui console, reconstruit, répare. "Celle avec laquelle on aime passer un instant, une nuit, plusieurs, mais pas celle qu'on veut. Pas celle qu'on aime. Pas celle qui manque." Il ne relève pas. Qui ne dit mot consent.
    Un jour où sa boîte mail s'entête à rester vide, elle pressent qu'il est avec elle, qu'ils sont en train de faire l'amour. Elle appelle, sans succès. Le lendemain matin, elle envoie un mail et reçoit une réponse qui confirme son pressentiment de la veille. Faisant fi de son souhait d'anonymat, il a jeté leur relation à la tête de l'autre femme "pour la rendre jalouse, pour lui mettre tous ses défauts et ses erreurs sous le nez." Il lui demande de l'en excuser puis poursuit en lui donnant tous les détails de leur réconciliation passionnée.

    Elle ne l'a pas excusé. Elle déteste qu'un homme la fasse entrer en rivalité avec une autre femme. Pourtant elle souhaite qu'ils restent amis, mais plus jamais elle ne lui donnera l'occasion de l'utiliser.

    A force de se brûler les ailes, même un peu à chaque fois, il ne va plus lui en rester.