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  • Sound system

    Dans ce pub de Saint Germain des Prés, ils restent debout, dans un coin de la pièce. Pour parler, ils doivent se pencher l'un vers l'autre. Elle découvre son parfum, elle l'aime, leurs corps se rapprochent. La légèreté de leur conversation a laissé place à un silence troublé. La phase de séduction est enclenchée. Elle refrène et s'en amuse, une envie subite de le toucher. Sereine, confiante, elle ne ressent pas le besoin de meubler le silence. Il lui demande si ça va, elle acquiesce et répond "Ca ne te gêne pas, le silence ?" S'interroge presqu'aussitôt sur cette façon qu'elle a, souvent, de placer une affirmation dans ses questions. Il faudra qu'elle y repense.

    Pour l'heure, elle raconte à son compagnon que pendant ses années dublinoises, elle s'était étonnée, au Café en Seine, d'un couple qui déjeunait, chacun plongé dans un des journaux mis à disposition. Elle avait trouvé ça désolant, alors, mais aujourd'hui elle rêve de ces instants très ordinaires, où la complicité est telle que l'étreinte d'un regard suffit.  

    Elle aime le silence. Il la terrorisait dans sa jeunesse et aujourd'hui il est le baromètre qui témoigne de la qualité de sa relation à autrui. Elle se souvient de cet ami, lorsqu'elle avait à peine 20 ans, qui lui proposait aux beaux jours d'aller bouquiner ensemble, sur un banc du parc André Citroën.

    Elle trouvait ça bizarre, à l'époque, de se rejoindre pour s'adonner à un loisir individuel, et puis elle a compris. Il avait juste envie de la sentir à côté de lui, d'entendre sa voix de temps à autre, comme on accueille avec délice une brise légère aux plus chaudes heures de la journée.

    Après que plusieurs pages aient été tournées, il l'inviterait à boire un thé, comme d'habitude, dans son minuscule studio de la rue Lecourbe. Sur le chemin du retour, pendue à son bras, elle l'écouterait parler des livres. Elle aimait son ton exalté lorsqu'il évoquait tel ou tel philosophe, Schopenhauer, Nietzsche, qu'elle n'avait jamais lus. Les heures filaient, il remplissait la théière de fonte et elle était bien, lovée sur son clic-clac de fortune. Alors que la nuit tombait et que l'agitation se calmait, ils riaient ensemble en entendant, de l'autre côté de la cloison, le voisin fou qui criait, comme chaque soir "Salope ! Mais tu vas la fermer ta gueule!" à son écran de télévision.

    L'homme au catogan avait disparu de sa vie, un beau jour, sans savoir tout ce qu'il lui avait légué. Elle avait tant appris à ses côtés. Sa misanthropie la faisait rire, son analyse de ses semblables était désolante mais si souvent juste. Elle aimait sa noirceur et son humour désabusé, son caractère entier et son intransigeance. Ses amis d'alors appréciaient peu le personnage, forcément. Aujourd'hui, elle repense à lui avec nostalgie quand parcourant ses livres préférés, son regard s'arrête quelques instants sur "La conjuration des imbéciles".

    Dans ce restaurant japonais près de la rue Sainte-Anne, elle se dit que ses belles théories sur la beauté du silence, c'est vraiment de la connerie. Ce soir, le silence qui s' amoncelle entre eux comme une dune de sable la fait suffoquer d' impuissance. Qu' est devenue sa belle assurance, où sont les mots, ses alliés, qui refusent ce soir de franchir son sourire devenu stupide ? 

    Elle accueille les questions de son compagnon avec soulagement mais ne parvient pas à aligner plus que quelques phrases et elle se retrouve désemparée, elle se déteste, voudrait disparaitre, s' enfuir.  Si elle pouvait cesser de réfléchir, dénouer le noeud dans son estomac et laisser les mots, habituellement si fluides, se déverser de sa bouche, cela leur épargnerait au moins les inepties qui jaillissent de la table derrière eux, ou plus précisément de la bouche d'une jeune femme blonde qui parle trop fort. Mais elle, au moins, elle parle ... 

    "Pour le mercredi soir, j'ai une robe rose en satin, que j'ai trouvée chez ... Pour le jeudi soir, j'ai ma robe noire en dentelle que j'ai achetée chez ..." La jeune femme se lance dans un inventaire complet de sa garde-robe griffée. Entre deux phrases, ils vérifient avec consternation que la conversation concerne toujours la garde-robe.

    Dans son désarroi, elle se demande si la jeune femme blonde porte aussi des culottes estampillées d'un lundi, mardi, mercredi. 

  • Dimanche, minuit, au Shannon

    Dimanche, 17h, on se retrouvait juste pour boire un thé du côté de Montparnasse. Mais quitter Chacha est toujours difficile, et parce que le vin chaud était trop léger, je lui ai proposé d'aller se réfugier dans mon pub préféré, métro Vavin.

    Le bar était désert, seul Jules était là, qui nous a offert du saucisson sec et mis du très bon son. Quand les premières notes de "Rich Girls" de The Virgins ont retenti, j'ai commencé à chanter.

    Quelques heures et pintes de Guinness plus tard, le pub s'était rempli d'habitués. Greg, une drôle de toque blanche sur la tête, improvisait un karaoké drôlissime et Sophie chantait, assise sur le comptoir. Nous avons quitté notre recoin sombre et rejoint le comptoir. Le serveur du resto réunionnais d'à côté n'en revenait pas quand il a déboulé, vers 23h, pour livrer son assiette de rougail saucisses à Jules.

    Ensuite, c'est parti en sucette. On a chanté du Brel, du Aznav'. Ca, c'est pour la partie culturelle. Je passe sous silence le quart d'heure (au moins) délicieusement régressif que nous nous sommes offertes. Si mon père m'avait entendue entonner la version de "Cayenne", la chanson d'Aristide Bruant, par les Amis d'ta femme .... !

    Intéressante aussi, la version de Parabellum :

     

    Une petite vidéo "souvenir", de mauvaise qualité, certes, pour l'ambiance et pour faire marrer Chacha :


     

  • Mes soeurs

    Sa jeunesse, sa fraîcheur, ses cigarettes, son chat, ses longs cheveux noirs et bouclés, sa voix rauque et son prénom qui est celui de ma sœur de sang. Je serai toujours son irlandaise. Elle a été la première de mes sœurs virtuelles.

    Ses mots improbables, tricotés d’émotions, sa noirceur, parfois, ses angoisses, souvent, sa présence discrète, sa chaleur qui manque quand elle part, comme un chat qui pose sur vous ses coussinets de velours rose. Son sourire de gamine, ses photos coquines, ses « et je t’embrasse fort ». Elle m’a conquise sans que je m’en aperçoive, elle est devenue celle qui compte.  

    Sa silhouette longiligne, son profil de statue grecque, ses boucles noires (encore !), sa longue main qui lance un baiser du fond d’un taxi sur la rue de Rivoli, et moi qui marche seule, au soleil, rêveuse, avec dans la bouche la saveur moelleuse des pancakes et les yeux qui brillent du bonheur de ces moments volés, entre deux avions.

    Ses yeux de chat, sublimes sous la visière du casque, sa discrétion, son charme irrésistible, sa voix si sensuelle à laquelle j’aime laisser des messages. Elle est belle, fragile, émouvante. Elle a un nom d’homme mais la grâce d’une princesse au petit pois.

    Ses chaussures, son humour, ses baisers ailés qui m’agaçaient avant que je ne la rencontre et que je découvre qu’elle était tout sauf cucu la praline. Une bonne dose d’autodérision et du romantisme qui pointe, ça et là. La vraie bonne copine, sans rivalités, sans chichis, celle qui te prend entre 4 yeux, comme un mec. C’est son côté garçon manqué qui me séduit le plus.

    Son élégance, son rire cristallin, ses yeux fermés quand elle danse, sa folie quand elle sautille dans tous les sens et que je dois la traîner dehors. Y'en a pas une pour rattraper l'autre, dans ses moments-là. Ses carnets d'écriture, sa sensibilité, ses rêves de prince charmant, sa façon de se réfugier dans mes bras quand elle est malheureuse. Elle m'a peut-être trouvée dure, parfois mais ma tendresse pour elle est sans limites. 

    La maturité m'a rendue plus sereine. J'ai grandi entourée de frères et ces femmes sont mes soeurs, désormais.

  • "Protège-moi de mes amis, mes ennemis, je m'en charge"

    Cette nuit-là, à 0h01, son téléphone a lancé un rappel. « M., 38 ans ». Elle a fixé l'écran qui clignotait et appuyé sur la touche « arrêter ». Songeuse l'espace d'un instant, elle a eu peur de sombrer dans la tristesse, au souvenir de tous ces anniversaires passés ensemble. De ces étrangers qu'ils sont devenus, l'un à l'autre.

    A l'heure du déjeuner, elle l'a appelé. Cet anniversaire serait l'occasion de reprendre contact, puisqu'il y avait encore certains détails à régler.

    Quand il a décroché, sa voix était enjouée, il avait reconnu son numéro sur l'écran. Elle lui a souhaité un bon anniversaire, en l'appelant par son nom de famille, comme à l'armée. Il a éclaté de rire, lui a dit qu'il avait pensé à elle, la veille, en visionnant la vidéo de ses 26 ans, leur premier anniversaire ensemble. Au ton de sa voix, cça semblait être de bons souvenirs. Il a demandé des nouvelles des uns et des autres, du boulot. Lui a parlé de ses projets. Elle n'a pas posé de questions.

     « Il faut qu'on reprenne contact, cette année. On s'est un peu perdus, depuis 2 ans, hein ? »

    Elle n'a pas renchéri. Elle n'a pas rappelé toutes ces fois où il avait téléphoné. « Je viens à telle date, on déjeune ensemble, ok ? » A chaque fois, elle s'était réjouie de le revoir, avait guetté la date, attendu.  Le téléphone était resté silencieux et il avait toujours une bonne excuse à laquelle elle faisait semblant de croire. Parce qu'elle l'avait connu sincère et loyal, qu'il l'avait chérie, avant, elle ne pouvait accepter l'idée qu'il la méprise. Et pourtant un matin, l'occasion lui fut donnée, à son grand regret, de faire face à la vérité.

    Quelques heures avant celle de leur déjeuner ensemble, après si longtemps, il avait appelé, pretexté un avion raté. Une fois de plus, elle lui avait laissé le bénéfice du doute, avait été désolée de ce contretemps « Ce sera pour une prochaine, fois, hein, tu vas bien, sinon ? »  mais quand repensant à quelque chose, elle avait composé son numéro quelques minutes plus tard, elle avait compris qu'il avait menti. Il était là, à quelques kilomètres d'elle. ¨Partagée entre colère et tristesse, elle avait rappelé et demandé, incrédule « Putain, c'est ça que tu es devenu ? »

    Aujourd'hui, en entendant son ton faussement désinvolte, elle a souri, partagé entre amertume et ironie. Elle a failli lui dire la vérité, qu'il lui importe peu désormais, qu'elle ne lui réservera plus jamais une minute de son temps et qu'il ne fait plus partie de ceux qu'elle aime. Elle a juste répondu : « On s'est un peu perdus, c'est le moins qu'on puisse dire » mais elle a pensé avec tristesse : « On ne s'est pas perdus, M. Tu m'as perdue ».

  • Où nager à Vittel

    Photo281[1].jpgMessage perso à Nicolas: Ne lis pas ce qui suit, tu vas te rendre malade.

    Cette semaine, on m'a envoyée dans une contrée qui représente l'enfer sur Terre pour Nicolas. Y'a de l'eau partout, ici, Contrex, Vittel, Hépar, et j'ai poussé la cure thermale jusqu'à aller en boire à la piscine olympique Pierre de Coubertin, à Vittel.

    Suivez les pancartes « Complexe omnisports », dépassez le Carrefour Market, tournez à droite, c’est au bout de la rue.

    Le mardi, elle fait nocturne et ferme ses portes à 21h. L’entrée est chère (3,85€) mais la carte magnétique qui permet de passer le portillon d’entrée verrouille aussi le vestiaire. Pas de panier à disposition des nageurs pour ledit vestiaire, justement, et pas d’injonction d’enlever ses chaussures à l’entrée. La signalétique laisse un peu à désirer, on a l’impression que la construction de la piscine n’est pas terminée. Je découvrirai ainsi par hasard qu’en plus des douches mixtes, la version individuelle se trouve dans les toilettes femmes.

    Le sol est glissant. Je monte quelques marches, à gauche un bassin de 25m, un bassin ludique et un espace forme avec jacuzzi, hammam et sauna. Moi je suis là pour bosser alors je tourne à droite et découvre le bassin olympique, 8 lignes d’eau et une moyenne de 3 personnes par ligne. Quel pied de nager en province, je ne le dirai jamais assez !

    Les horaires, les infos, c'est .

    Pour le jogging, ça se passe à 2 pas de mon hôte, à l’Hippodrome de Vittel. Y’a que de la forêt tout autour, et des sangliers énormes comme celui qui fumait dans mon assiette, ce soir … ;)