Le soir de mon arrivée à Orléans, sur les conseils de mon hôtelier et munie d'un plan de la ville, je quitte l'hôtel et réussis l'exploit de parvenir jusqu'au restaurant Chez Eugène, tout en papotant avec ma copine Boug' (quand j'arrive à la choper au téléphone, je ne la lâche plus !)
Chez Eugène se trouve dans une ruelle sombre. Un des meilleurs restaurants de la ville, il est d'ailleurs complet. J'appelle mon hôtelier « Votre restaurant machin de zinc, il est où, déjà ? »
« Vous prenez la rue Bannier jusqu'à la place où Jeanne d'Arc est sur son cheval (elle a chevauché que ça, la pauvre, ndlr). Dans sa main droite, elle pointe une épée et vous indique ainsi la direction à prendre pour trouver le restaurant Brin de Zinc »(trop fort l'hôtelier, on se croirait dans la Chasse au Trésor, j'adore !)
Le Brin de Zinc,rue Sainte-Catherine, est animé et chaleureux. La carte, très riche, est écrite sur un format cahier d'école à carreaux. On m'installe à une table et je me plonge dans le bouquin que pour une fois, j'ai pensé à emmener. Comme je l'avais dit à Boug' sur la route, ce soir, je mange léger :
Le formidable os à moelle et son pain grillé, c'est léger ça, non ? (t'as raison, Multi-Sourires, y vont finir par croire que je passe réellement mon temps à bouffer). Les serveurs sont mignons comme tout au Brin de Zinc, « frais » est le terme qui convient.
En plat, je choisis une cocotte de blanquette de lapin à la vanille. Je fais une cure de lapin depuis quelque temps, j'ai redécouvert cette viande et j'ai l'impression qu'on la trouve plus facilement qu'avant, en tout cas, en portions plus appropriées à la célibataire que je suis. J'ai une petite recette de lapin en vapeur à la thailandaise, avec lait de coco, gingembre et herbes aromatiques, je ne vous dis que ça ... Oubliez le lapin trop sec du Brin de Zinc et les tagliatelles, trop cuites, elles, qui baignent dans la blanquette (quelle idée !).
Sur le chemin du retour, j'appelle mon vieil ami de lycée,Tony, que moi j'appelle Bibiche (vous verriez le bestiau, vous ne vous risqueriez pas à l'appeler Bibiche !) et je lui raconte mon coup de stress du dimanche soir. Je me fais gentiment sermonner, bien sûr.
Le lendemain soir, après quelques longueurs à la piscine du Palais des Sports d'Orléans, je décide de préférer Le Chalut, restaurant de poissons, à l'autre restaurant de poisson - cru, lui et certifié japonais tenu par des japonais- Hikari (je note, ça peut toujours servir).
Le Chalut est un bel endroit sophistiqué, en gris perle et pêche, peuplé de volatiles en bois ou fer forgé. La patronne, une belle blonde en chignon et lunettes, a un faux-air de Brigitte Bardot. Le patron (je suppose) ressemble à s'y méprendre au parrain de mon frère. En chemise à carreaux sous une cravate rayée bordeaux et or et un blazer bleu marine, il paraît austère mais ... ses lunettes à montures larges métallisées et son jean un peu lâche (Madame en porte une version plus moulée) cassent un apparent classicisme. Finalement c'est le serveur, dans son pantalon noir et sa chemisette blanche qui est le plus strict des trois.

Au début du repas, alors que j'attends une soupe de poissons et que je n'ai pas encore touché à mon verre de vin, je me pose une question existentielle : mon verre d'eau penche ou bien c'est moi qui suis de traviole ?