Mes nombreux voyages m'ont confrontée à l’image de la France et des Français à l’étranger. J’ai pu constater souvent que l’accueil que j’y recevais était bien meilleur que dans mon propre pays, pourtant si touristique. Mes compatriotes m’ont parfois fait honte. Dès lors, j’ai été soucieuse de l'image donnée.
Déjà, quand je bossais à Orly et Roissy, je récupérais régulièrement des touristes paumés dans l’aéroport ou le RER et je finissais par les accompagner jusqu’à leur destination finale, après leur avoir laissé mon n° de téléphone « au cas où ».
Pendant mes 6 années en Irlande, je me suis réchauffée au contact de ce peuple chez lequel le sourire et le dévouement semblent innés. Pas étonnant qu’il y ait autant d’Irlandais dans le monde humanitaire et hospitalier. A chaque retour en France, mon sourire se fracassait douloureusement sur les mines revêches des employés de la RATP, des garçons de café, des chauffeurs de taxis.
Quand j’étais hôtesse de l’air, mes collègues irlandaises me laissaient avec plaisir gérer les passagers français qui ronchonnaient systématiquement et pour tout : les retards, les bagages à ranger, la bouffe dégueulasse, le temps, le charmant accent de mes collègues qui elles au moins faisaient l’effort de parler une autre langue. Avec les touristes en partance pour Paris, mon plus grand plaisir était de griffonner sur leurs guides touristiques les adresses des restaurants, bars, musées à ne pas rater, les lignes de métro à prendre. Je me souviens d’un passager irlandais qui a embarqué sur mon vol plâtré des pieds à la tête ; il arrivait d’Afrique et était le seul survivant du crash d’un petit coucou. Traumatisé, il tremblait. Je lui ai tenu la main pendant le décollage et l’atterrissage. Atténuer un peu les peurs fait partie du métier. Arno et Fa, dont la vocation est similaire mais le métier bien plus difficile, savent de quoi je parle.
Technicienne de support informatique, j’ai dû subir la bêtise doublée de mauvaise foi de clients même pas foutus de lire leur mode d’emploi avant d’appeler. Assistés, les Français ?Aujourd’hui je gère principalement des hôtesses d’accueil et un plateau d’appels. Ce sont des métiers peu valorisés alors qu’ils représentent l’image d’une entreprise et demandent de nombreuses qualités. Et pourtant avec le développement de la concurrence et l’uniformisation de l’offre, c’est désormais la qualité du service qui fait la différence pour le client.
En 4 ans, ma société actuelle est passée de dernière à première de son secteur d’activité pour la qualité de l’accueil téléphonique de son siège social et service client. Manager et motiver des métiers aussi peu considérés est un travail de tous les jours. Parce que sourire face au mépris, malgré les soucis et la fatigue demande un effort sur soi-même. Je suis crédible parce que j’ai fait le boulot et que je valorise mes équipes. Exigeante, je le suis mais je sais aussi les récompenser et les féliciter de leurs efforts.
Une chose m’a toujours frappé chez mes compatriotes, en opposition avec l’attitude des Américains par exemple. C’est la facilité avec laquelle les Français se plaignent et leur difficulté à complimenter, féliciter, remercier. Je l’ai vécu et sensibilisée à cette carence, je m’étonne toujours moi-même de la surprise avec laquelle on accueille mes remerciements ou mes encouragements.
Alors s’il vous plaît, pensez-y la prochaine fois que vous appellerez un quelconque service client. Quel que soit le litige qui vous oppose à votre prestataire, la voix au bout du fil qui enchaîne son 100ème appel de la journée n’y est pour rien. Et tout comme vous avez le droit d’exprimer votre mécontentement, un « merci de votre gentillesse » ou « bon courage », c’est peu mais c’est beaucoup !