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  • Leffe, Peket, Herve et Traou Mad

    4 jours en Belgique, dont 2 dans la ville de champions de foot, qu'on atteint après 4 heures de trajet de Paris, et 2 dans la région de Liège.
    Ils m'aiment bien, les Belges, je crois. Pourquoi ? Notamment parce que je bois de la bière.
    En début de semaine, j'ai retrouvé la directrice que j'avais formée début avril. A l'occasion d'une pause, elle m'avait confié ses soucis personnels. Son mari, malade, attendait depuis des mois une greffe du coeur. "C'est difficile, vous savez, une telle épreuve dans un couple, m'avait-elle confié. Je me suis toujours reposée sur lui et aujourd'hui, il est affaibli, je dois tout gérer". Sacrée bonne femme, me disais-je en l'observant. Elle s'amusait de mon accent lorsque je disais des mots en flamand.
    Lundi matin, je l'ai retrouvée égale à elle-même, souriante, dynamique. La seule différence, c'est qu'elle était vêtue de noir et qu'un portrait de son mari était posé sur son bureau. Il est mort il y a 3 semaines. "Heureusement que je travaille" a-t-elle dit.

    Aujourd'hui, le directeur que je formais, grand amateur de bières, m'a proposé, lors d'une prochaine visite, d'aller déguster de la Val Dieu, brassée à l'abbaye du même nom.

    Ce midi, on m'a demandé quel sandouiche je voulais. "Crudités" ? "Avec du jambon ?" "Heu, non, juste crudités". "On peut aussi vous donner juste deux tranches de pain, si vous voulez, hein". Visiblement, ça ne se fait pas les sandouiches crudités en Belgique. "Bon, alors mettez moi du fromage". "Vous voulez un Dagobert ?" Devant mes yeux écarquillés, le directeur a ajouté "Un Dagobert, c'est un club, chez vous". C'était mon dernier sandouiche en 4 jours. Je vous rassure, le soir, je me suis bien rattrapée.


    Mardi soir, nous avons récupéré, vers 21h30, la troisième des drôles de dames épuisée et au bord des larmes après avoir vu les portes de son train se fermer à son nez et nous nous sommes changé les idées dans un restaurant proche. Après la Chouffe et une Leffe, j'ai sifflé un Peket citron. Et j'ai super bien dormi. Le lendemain, mon doublon du jour qui passait me chercher à l'hôtel a rigolé et dit "C'est dangereux la Chouffe, Fiso ! C'est fort !". En tout cas, moi, j'ai super bien dormi. La prochaine fois j'irai faire un tour à la Maison du Peket pour une dégustation approfondie.

    Hier, après un rapide jogging le long de la Meuse (vraiment pas top, un parcours à se déglinguer les genoux), nous avons dîné  rue des Guillemins, chez Frédéric Maquin.
    En entrée, j'ai choisi une brochette de noix de St Jacques et boudin noir, poire émincée et jus crémé et elles, une salade gourmande de foie gras, saumon fumé, écrevisses et magret fumé. Ensuite, j'ai dégusté une poitrine de pigeonneau, bigarade légère à la fraise, compotée de rhubarbe, grenailles au gros sel et elles, un filet de bar Victoria à la plancha et aux zestes de citron confit. Et en dessert, alors que nous louchions sur l'étonnante pyramide de Dame Blanche de la voisine, nous avons plongé nos cuillères dans une soupe de fraises au champagne, coiffée d'un sorbet à la violette et servie dans un contenant très original. Un restaurant classieux à la cuisine savoureuse dont je ne regretterai qu'une infime chose : que le service, bien qu'irréprochable, soit un tout petit peu guindé.  

    belgique

     

    En fin de journée, sur le parvis de la gare de Liège, une jeune femme vêtue d'une robe très très courte, courir vers moi, hilare, les bras ouverts, la culotte au vent. Car celui-ci souffle très fort en cette fin de journée et les clients attablés devant une mousse en terrasse apprécient le spectacle. Elle tente bien de protéger ses fesses d'une main et ça nous fait beaucoup rire. Elle est vraiment givrée, celle-là, elle me fait trop marrer. On se saute dans les bras l'une de l'autre. "Dis donc, on dirait que je t'ai manqué ?"


    Il nous reste 20 minutes d'attente avant l'arrivée de notre train. Un petit tour au supermarché du coin où j'achète des bières pour l'apéro dans le Thalys car 4 collègues doivent nous y retrouver. Dans le train, c'est bonheur, ça fait 6 semaines que je ne les ai pas vus. Quand la demoiselle à la jupe courte déballe un fromage Herve, le wagon se vide tout à fait. Enfin peinards. Leffe, frometon qui pue sa mère, chocolats belges, tout va bien.
    A l'arrivée à Paris, direction Chez Casimir, rue de Belzunce, restaurant figurant dans mes favoris depuis qu'un blogueur m'y a emmenée.

    Et là, après des supions marinés à l'avocat, servis dans une conserve, une poularde de Bresse aux petits légumes et un sorbet coco-mangue, j'ai sauté dans un taxi et retrouvé ma couette. "Ce restaurant est décidément une excellent adresse", a confirmé mon chef de projet qui éclairait les plats que je prenais en photo. 

    belgique

     

  • Penche-toi vers moi

    Me rattraperas-tu quand je tomberai ? Est-ce que tu m’entendras appeler ?

    Mettras-tu un sourire sur mon visage, me sortiras-tu de l’exil ?

    Te pencheras-tu vers moi, assez bas pour m’entendre murmurer ?

    J’ai l’impression qu’on m’a abandonnée dans le froid.

    Est-ce que tu verras celle que j’ai oublié d’être ? Est-ce que tu verras que j’essaie d’atteindre le soleil ? Qui ouvrira la porte vers un monde que je n’ai jamais vu ?

    Quand tu es blessée et que tu te  sens misérable, parce que tu as en toi un amour qui ne meurt pas. Un amour qui ne mourra jamais.

    Te pencheras-tu sur moi, assez bas pour m’entendre murmurer ?

    Quand tu pleures sous la pluie, personne d’autre ne peut sentir ta douleur. Qui me prendra par la main ? Essaiera de me convaincre ?

    Quand tu es blessée et que tu te  sens misérable, parce que tu as en toi un amour qui ne meurt pas. Un amour qui ne mourra jamais.

  • Red velvet

    Leur rendez-vous avait été planifié quelques jours auparavant. La veille, elle avait reçu un sms de sa part, lui demandant si elle était toujours d’accord pour le rencontrer malgré qu’il ait décroché un CDD depuis leurs derniers échanges. Une métaphore qu’elle n’avait pas décryptée. Un brin perplexe, elle avait répondu oui bien sûr.

    Le jour J, elle l’attend, attablée à un tonneau, dans un de ses bars préférés. Il entre. Il est un peu plus jeune qu’elle et a tout à fait le style faussement négligé de la bande de potes de son frère. Le courant passe entre eux dès le premier sourire. Elle lui offre à boire et le félicite « Alors ce nouveau boulot ? Raconte ! » En fait de nouveau boulot, le CDD est une jeune femme rencontrée le week-end précédent. Elle rit de sa méprise ; à partir de cet instant, la soirée se déroulera comme s’ils se connaissaient depuis toujours.

    Un peu plus tard, alors qu’ils ont déjà vidé quelques verres, le barman monte le son. Il bondit sur ses pieds « Tu sais danser le rock ? » Il insiste un peu, tente de l’entraîner sur la piste. Elle trouve son enthousiasme charmant mais décline en riant ; elle se ridiculiserait et lui écraserait les pieds.

    Plusieurs heures après, ils quittent le bar. Sur le trottoir, il confie, avec une touchante spontanéité, avoir passé un moment exceptionnel en sa compagnie. Cet instant de grâce les a donc frappés simultanément. Ses yeux brillent et elle le devine troublé. Elle-même se sent un peu en apesanteur, touchée par la bienveillance avec laquelle ils se sont parlé pendant des heures. Elle réfrène une violente envie de l’étreindre, de le serrer contre elle, avec une force semblable à ce qu’ils ont partagé. C’est lui qui résume en un geste le sentiment qui les saisit. Un peu hésitant, il se penche vers elle et pose sur ses lèvres un baiser sonore, généreux et sans ambigüité. Un baiser quin ne possède pas mais qui étreint.

    Alors qu’elle attendait son bus, rêveuse, elle a reçu un sms de lui, quelques minutes après qu’ils se soient quittés « Ne change rien, surtout. Tu es aussi belle à l’intérieur qu’à l’extérieur ».

    Quelques semaines plus tard, elle est dans le même bar, avec son crabe givré. Elle lui raconte, justement, la jolie rencontre qu’elle y a faite. Et envoie un sms au jeune homme « Devine où je suis ? La musique est toujours aussi bonne, j’espère que tu vas bien, une pensée pour toi, gentleman ». Quelques minutes plus tard, il est là, devant elle, hilare et accompagné de sa dulcinée, qu’il lui présente, en toute transparence, avec cette authenticité qui le caractérise.  Il confie avoir, depuis leur rencontre, fait sien cet endroit qu’elle fréquente régulièrement.

    Par la suite, elle a tenu parole et lui a envoyé quelques messages, pour prendre de ses nouvelles. Le temps a englouti les promesses répétées d’un autre verre ensemble et son dernier sms est resté sans réponse.  C’est sans doute mieux. Elle aurait aimé en faire un bon pote et il aurait peut-être tenté sa chance. Elle ne l’en a trouvé que d’autant plus élégant. Et cette rencontre ponctuée d’un baiser chaste est restée, elle, la plus belle qu’elle ait vécue depuis bien longtemps. 

  • Jerez dernière (pour le moment)

    Dans mon groupe de stagiaires, il y a un homme particulièrement jovial, au visage rond, bardé d'un bouc. Il a vécu au Japon plusieurs années, y retourne très régulièrement et autour d'un café, nous avons échangé nos goûts pour la cuisine japonaise.
    Aujourd'hui, à la fin de la journée, il m'a proposé de passer me chercher à l'hôtel, vers 22h, pour aller dîner avec lui et son épouse. C'est ma dernière soirée à Jerez et je suis ravie de la passer en agréable compagnie.

    A 22h25, ils sont à la réception de l'hôtel. Elle est une charmante brunette qui a étudié le français pendant 2 ans mais l'a oublié. Il se ressemblent, c'est marrant. Ils me proposent de choisir entre un restaurant typique espagnol et un autre, coréen. En chemin, je leur dis ma déception de n'avoir pu écouter du flamenco. Hélas, il se joue les weekends et moi je pars demain. Ma formation à Jerez a eu lieu la semaine précédant la fameuse feria de Jerez. En un se,s, tant mieux, parce que je ne sais pas à quelle heure je me serais couchée ... Déjà que j'ai sérieusement la tête dans le cul ...

    Quelques minutes plus tard, nous voilà attablés dans une courette du restaurant La Solera, à quelques pas de mon hôtel. Le port n'est pas loin et ils me vantent la qualité du poisson et des fruits de mer. Ils commandent un verre de tinto de verano, je ne sais pas ce que c'est mais je les suis. J. explique que ce mélange de vin blanc et Fanta citron était un moyen de rendre plus goûteux un mauvais vin blanc. Très rafraîchissant après un jogging d'une heure sous 30 degrés.
    Comme j'ai oublié mon dictionnaire en France et que je ne comprends pas grand-chose au menu, je leur fais entière confiance. Je précise juste que j'aime beaucoup le poisson.

    Ils commandent une assiette d'oeufs brouillés au jambon et gambas, que nous partageons, puis une autre de poissons frits, cazon, puntillitas y chocos. Moi j'ai hâte de goûter une spécialité dont raffole la femme de J. et que l'on ne trouve que dans la province de Cadiz : las ortiguillas. Une variété d'algues frites qui doivent être très fraîches, m'explique J. De retour à l'hôtel, j'apprends que les ortiguillas sont, en fait, des anémones de mer frites. J'ai pris des photos, mais des photos de friture, ça ne rend rien. Et puis, j'étais toute entière à ma conversation avec mes charmants convives.
    Nous picorons dans nos assiettes en discutant du Japon et de la Galice, dont elle est originaire. Et aussi des escargots locaux, qui ne se dégustent qu'en mai. Je me régale du poisson frais et des calamars fondants. J. et E. sont cordialement invités à Paris, qu'ils ne connaissent pas. J. et sa ravissante épouse ont hâte, outre les restaurants parisiens, le Louvre, la tour Eiffel et le Moulin Rouge, que je les emmène rue Saint-Anne où j'ai mes habitudes nippones car ici, comme ailleurs, les restaurants japonais sont tenus par des Chinois. Peu avant minuit, ils me raccompagnent jusqu'à la porte de mon hôtel. Nous nous bisons chaleureusement. Super soirée. J'ai vraiment envie de revenir à Jerez. Les Andalous sont super sympas.

    La Solera

    Calle Divina Pastora, S/N

    JEREZ DE LA FRONTERA

    Teléfono: 956 32 02 51

  • Jerez

    L'atterrissage a été rude. Le premier jour, j'ai eu quelques moments d'absence. Difficile de switcher en moins de 24 heures de l'anglais à l'espagnol, surtout face à des andalous qui ont un accent corsé et avalent les mots. Mais qu'est ce que mon groupe est sympa ! Je les adore !

    Dès le premier jour, et même dès la première pause café, j'ai brisé la glace, à supposer qu'il y en ait eu une, en sortant une connerie monumentale, et bien entendu à caractère hautement masturbatoire. Il y a eu un grand silence, ils ont regardé leurs pieds. A., le sévillan de 34 ans qui venait de me placer, mine de rien, qu'il était sans femme, sans fiancée, sans rien et avait proposé de me déposer à l'aéroport de Séville le vendredi plutôt que je ne prenne le train (tout ça en moins de 5 minutes) m'a dit :"Sophie, vendredi, toi et moi on va avoir une petite discussion dans la voiture". J'ai piqué un fard parce qu'à leurs têtes, j'ai vite compris que j'avais sorti une connerie pas piquée des hannetons, ils ont tous ri aux éclats et moi j'ai essuyé mes larmes. Le soir, j'ai tapé sur un moteur de recherche le mot que j'avais prononcé et j'ai lu "vulve". Bon ben voilà.. ça, c'est fait ...


    Je rame pas mal quand même. Le vocabulaire acquis à Salamanque et Saragosse a été dilué dans la Guinness. Ça, pour faire le vide, je l'ai fait pendant mes vacances en Irlande !


    Le premier jour, je suis allée courir sur l'avenue plantée d'orangers et de palmiers. En début de soirée, les cyclistes et joggeurs y sont nombreux, et les pépés andalous prennent le frais sur un banc en regardant mes fesses (grillés ! ). Si je me fonds souvent dans la foule, c'est mon côté caméléon, ici visiblement, je ne passe pas inaperçue. Au retour, j'ai demandé un ticket d'accès au wi-fi. Il y avait un anglais à la réception. Le réceptionniste, un type très "vieille Espagne", m'a interpellée "Je voulais vous demander quelque chose. Vous aimez les mojitos, le rhum, les cocktails ?" J'ai haulluciné ! C'est écrit sur ma tronche ou quoi ?
    Heu ... oui" ai-je répondu, un peu interloquée. "Je vais vous conseiller un endroit, ils font les meilleurs cocktails d'Espagne".
    Hier soir, après ma journée de travail, j'étais assez stressée. Je me suis dirigée vers le centre ville de Jerez, un plan à la main. D'abord, un hammam. Trois bassins pour moi toute seule, dis donc ! Inespéré !
    Après le hammam, je suis tombée en admiration devant la cathédrale toute dorée. Un ballet de chauves-souris virevoltait dans le ciel rougeoyant.J'ai remonté une ruelle qui longeait la cathédrale, sur sa gauche et ai débouché sur la place de l'Alcazar, déserte. A droite, la bodega Gonzalez Byaz et une statue à la gloire de "Tio Pepe".
    C'est pratique, à Jerez, les restaurants sont indiqués sur des panneaux à fléchettes. Justement, Juanito, c'est là que je vais. Un de mes 8 stagiaires me l'a recommandé. A l'angle de la pescaderia vieja, une ruelle, une courette, c'est là. Je m'installe, commande de l'eau et un bacalhau a la plancha, accompagné de légumes sautés très savoureux. D'un café voisin, la voix d'un chateur de flamenco qui pleure sa mélancolie eplit la courette. Magique.


    Sur le chemin du retour, j'ai entendu un air de guitare. J'ai levé la tête vers les fenêtres mais rien. J'ai cherché quelques instants, puis je l'ai aperçu, son profil se découpant dans le ciel déjà d'encre, jambes ballantes dans le vide. Regardez bien, vous le verrez aussi.

    Assis sur le toit, il grattait quelques accords andalous, la tête tournée vers moi. J'ai regretté mes talons qui perturbait sa mélodie. Et terriblement envié sa liberté. J'aurais aimé le rejoindre sous les étoiles et contempler la ville d'en haut, en rêvassant. Sans faire de bruit.

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