Ce matin, j'ouvre les yeux à 8h45. Yo a encore mal dormi. Je ne sais pas comment il va tenir ce ryhtme.
Nous faisons nos valises, les confions au réceptionniste et quittons l'hôtel. Dehors, la terre, lavée par des averses soutenues, est rouge et boueuse.
A l'entrée de la Sqala, A. saute dans mes bras. J'ai bien cru ne pas la voir avant de quitter Casa. Elle me présente à un de ses collègues, comme étant "la fille qui a fait des commentaires sur les photos" et nous installe à l'abri car le jardin, trempé, est inaccessible.
Le ftor fera office de brunch car il est gargantuesque : assortiment de crêpes marocaines, coupelles remplies d'amlou, huile d'argane, beurre et confiture, oeufs brouillés au khlie en tajine, fromage jben et olives noires, salade de fruits frais, verre de lait aux fruits secs, jus d'orange pressé. Les averses se succèdent et nous retardons le départ, craignant même de devoir écourter notre promenade sur la corniche, prévue en attendant l'heure de prendre le train.
Il est presque midi lorsqu'après quelques photos souvenirs, nous quittons la forteresse de la Sqala.
"A la prochaine" ai-je promis à N. et A. "Inch'Allah" a été leur réponse...
"Y'a quand même un truc chiant au Maroc, je dis à Yo, c'est cette façon de te rappeler sans cesse que tu sais pas si tu seras encore là demain."
On en rit ensemble et Yo me raconte qu'un de ses amis marocains déteste cette réponse systématique "Inch'Allah". Pourquoi ? Parce que quand il était petit et qu'il réclamait un truc à ses parents, ceux-ci répondaient invariablement "Inch'Allah", ce qu'il traduisit vite par "Cause toujours".
Le long du boulevard, côté port, un chantier gigantesque prépare l'implantation de bureaux et les photos promettent des immeubles ultra-modernes de verre er d'acier, dignes des plus belles constructions de Dubai.
Nous atteignons la mosquée Hassan II, que j'ai visitée l'année dernière, peu après l'appel à la prière. Son élégante silhouette couleur sable, incrustée de vert et turquoise, se découpe sur le bleu lumineux du ciel. Au pied du parapet où les promeneurs sont nombreux, les vagues se fracassent avec violence et envoient dans les airs des gerbes mousseuses chargées de débris noirs. Les enfants s'en amusent et poussent des cris effarés.
Plus loin un jeune pêcheur nous gratifie d'un sourire éclatant et nous aborde; il s'appelle Younes et vient de Bordeaux, comme l'indique son accent chantant. Arrivé la veille, il est en vacances et suivra à peu près le même parcours que nous. "Bienvenue chez vous, lance-t-il en nous quittant, la planète est à tout le monde".
Les averses, nombreuses ce matin, semble vouloir nous épargner et le ciel se fait de plus en plus bleu. Bientôt, le soleil cogne de nouveau. Nous marchons toujours et après l'usine d'épuration d'El Hank, nous longeons les chantiers à ciel ouvert. "C'est bien, les ouvriers portent leurs casques de protection " remarque Yo, avant de faire une grimace plus loin en découvrant des pointes de fer non vrillées et d'autres ouvriers, tête nue et à califourchon en équilibre instable.
Nous marchons très longtemps et n'en voyant pas le bout, nous hélons un couple. "C'est loin le Mac Do ?" "C'est loin", répond le type avec un grand sourire. Nous prenons un taxi qui nous dépose devant le Mac Do'. "Bon appétit" lance le chauffeur. Ouais ... enfin, nous, on va juste pisser au Mac Do', pas question d'y bouffer !
Je fais remarquer à Yo qu'une clinique soignant l'obésité fait exactement face au Mac Do.
Peu avant 15h, nous pénétrons dans la gare de Casa-Port. Vingt minutes plus tard et pour 35 drh (soit 3€50), notre train longe l'océan en direction de Rabat. Le long de la voie ferrée, j'aperçois parfois des tentes de fortune, en tout point semblables à celles qui habillent désormais les abords du périphérique parisien.
Casablanca, cette fois c'est fini, le reste du voyage jusqu'à Tanger sera pour moi découverte. Yo, quand à lui, est tout excité à l'idée de retrouver Rabat où il a travaillé dans une association bénévole il y a 6 ans.