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maroc

  • Joyeux Noël, David

    J'ai rencontré le Père Noël cette année. Dans un somptueux riad de Tetouan, un soir où je n'en menais pas large, frigorifiée, toute dégoulinante de pluie, le mascara dilué.
    A une table, sous la lumière dorée des lanternes, il était en train de discuter avec mon Yo. Il me serre la main, se présente, David. Je suis au bord des larmes, épuisée d'une journée qu'on peut qualifier "de merde". Devant ma mine piteuse,  David lance "Ca va aller, Sophie, on va te chanter du Brassens !"

    Dix minutes plus tard, les cheveux séchés, habillée de sec, je m'assieds à table. David a des yeux bleus comme la mer qui borde sa ville natale, un sourire lumineux et une vie hors du commun. Originaire d'Aigues-Mortes, il a étudié la philosophie puis a été maçon avant de rejoindre un organisme humanitaire en tant qu'ingénieur en logistique. Depuis, il parcourt le monde et ses blessures. David s'offre un break réparateur au Maroc et des leçons particulières d'arabe, après une mission éprouvante en Haiti et une autre dans le nord-Yemen.

    David est aussi poète et musicien, d'ailleurs il ne voyage jamais sans sa guitare. Un de ses modèles, c'est le poète sétois à la moustache, bien sûr, dont il chante les chansons partout, dans des cafés de Montmartre, à Neufchâtel, Port au Prince, Sanaa.
    « Ce n'est pas antinomique, humanitaire et poète ?
    – Non. Ca peut paraître étrange mais il y a de la poésie dans la violence. Et en toutes choses.»
    Les yeux de David s'illumine alors qu'il évoque l'intense félicité qu'il a ressentie un soir que, bravant toutes les consignes de sécurité, il a grimpé sur le toit de son abri, au nord Yémen.
    Allongé sous les étoiles, il a chanté et joué de la guitare pendant des heures, tandis que les bombardements déchiraient le ciel et le silence. David a la foi.
    Tandis que je m'apaise au son de sa voix chaleureuse et posée, la conversation se fait plus grave. Témoin et parfois victime de la violence aveugle des hommes, c'est pourtant en Europe que celle-ci heurte David.
    « Un jour, j'étais en gare de Nîmes, et j'ai été très choqué que des jeunes insultent une femme qui leur demandait de baisser le volume de leur téléphone portable sur lequel ils écoutaient de la musique. J'ai ressenti beaucoup plus de violence dans cette gare, en France, qu'au nord-Yemen où pourtant les combats font rage.»

    David continue : « Quand je rentre en Europe, la tristesse des gens me frappe. En Haïti, alors que le pays est touché par le choléra, il y a une joie de vivre et un dynamisme incroyable.»

    David, qui donne de nombreux concerts, est à chaque fois plus choqué de la façon dont certaines personnes du public manifestent ouvertement leur impatience, voire leur ennui. Il déplore la perte des valeurs, l'individualisme, le manque d'écoute et d'attention.

    Moi j'ai oublié les galères de la journée, la pluie, la boue, les moutons, les bouchons. Dedans il fait chaud et je suis maintenant tout à fait détendue, amusée de cette nouvelle leçon que m'offre la vie. David est arrivé comme un rayon de soleil sur cette journée grise et a balayé mes tensions de son sourire chaleureux.

    Désireuse de prolonger cette parenthèse enchantée, j'ose relancer notre compagnon d'un soir sur sa proposition de me jouer du Brassens. Il se saisit de sa guitare et nous demande « notre lettre au Père Noël ». David nous offre "Elsa je t'aime", d'Aragon et "A un voyageur" de Victor Hugo, qu'il a mis en musique, et puis des mélodies de Brassens, dont "La supplique pour être enterré sur une plage de Sète", que Yo nous avait chantée en voiture, au retour de vacances dans le Lot. Les titres fusent et ce n'est pas une chanson mais un véritable concert privé que David nous offre, un moment  fraternel et réconfortant que je ne suis pas prête d'oublier.

    Ce soir, David, alors qu'une année se clôt et qu'une autre s'approche, je te souhaite de continuer encore longtemps à atténuer les souffrances, même momnentanément, de ton regard vif et de ta voix chaude. Quand à moi, j'espère, un peu égoistement, recroiser un jour ta route.

    Et je vous offre, en guise de cadeau de Noël, une des chansons de ce soir-là, à la lumière des bougies du riad, que j'ai enregistrées avec l'accord de David.


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  • Rabat - Chechaouen


    Il paraît que la CTM est la meilleure compagnie de bus du pays. A la gare routière, il y a foule et pas de touristes. Le bus se pointe avec 30 minutes de retard et nous quittons Rabat à 15h15. Le site internet de la CTM annonce 4 heures de trajet, nous devrions donc arriver à Chefchaouen vers 19h30.
    Ma plus grande inquiétude, c'est surtout que nos valises, que j'aperçois sur le tarmac, restent sur place.


    Le bus, bondé de familles et d'enfants, est d'une propreté très douteuse. Pourvu que ça ne chouine pas !
    Après avoir quitté Rabat, nous traversons de grandes étendues monotones, on croirait la Beauce. Parfois on traverse de petites villes où les maisons cubiques, collées les unes aux autres, ressemblent à des constructions Lego. 
    La nuit est déjà tombée - et la pluie s'y met - quand nous faisons une halte dans une ville sinistre, où les types attablés aux terrasses, sous des auvents, ne le sont pas moins.
    "Tu veux aller faire un tour ?" me lance Yo, goguenard.
    "Heu, non merci, ils n'ont pas l'air très engageants dans le coin".
    Ca fait déjà une demi-heure qu'on est arrêtés devant ce café, je m'impatiente. "Bon, on repart où on couche là ???"
    "Ah non, pitié, pas ça, s'écrie Yo. Vas-y, file moi un cachou !"
    En liaison avec un ami resté à Paris, celui-ci confirme que l'arrêt qui s'éternise correspond à la pause repas du chauffeur.
    Le bus s'ébranle enfin, puis nous sommes plongés dans le noir complet. Noir dedans, noir dehors, le bus tangue dans la pampa marocaine, c'est vachement rassurant comme ambiance ...
    Au cas où, j'envoie un sms à ma collègue, et seule amie marocaine, Jam, qui m'envoie des boussa.
    Dans la nuit noire, l'écran de mon téléphone s'illumine.

    C'est P_o_L : "Tu es rentrée poulette ou toujours marocaine ?
    Moi " Je suis très exactement dans un bus plongé dans le noir, en route pour un village de montagne"

    Le bus effectue un 2ème arrêt et cette fois, je descends me dégourdir les jambes. Dans une gargotte, je prends un jus d'avocat, désormais un classique bien nourrissant, surtout quand il est servi en format milk-shake. Des jeunes assis à une table aimeraient visiblement engager la conversation avec moi mais leur français ne nous permet d'échanger que quelques mots.

    Enfin, notre bus se lance à l'assaut des montagnes et vers 21h, il s'immobilise sur la place de la gare routière. Il tombe des trombes d'eau et une touriste allemande nous propose de partager un taxi jusqu'à la ville.

    Arrivés là, suivis par de jeunes hommes qui nous demandent si nous voulons du "chocolat", [Chaouen est un haut-lieu de la culture de la marijuana], nous traînons nos valises dans les rues transformées en torrent. La mienne fait à peine plus de 10 kilos, certes, mais j'ai oublié quelques indispensables, comme un parapluie. Heureusement, Yo en a un et je m'aggrippe à son bras, lâchant régulièrement un "Oh putain !" quand un filet d'eau me coule dans la nuque et le dos. Mon jean trempe  dans la flotte. Nous nous arrêtons sous un auvent, le temps d'essayer de repérer sur mon guide où nous sommes et où nous allons. Un commerçant invite Yo à entrer dans sa boutique pour acheter des djellabas.

    "Il est con, lui, à me demander si je veux acheter des djellabas alors que je suis sous un déluge en train de chercher mon hôtel ?" explose Yo, passablement excédé.

    Enfin, nous apercevons l'enseigne de l'hotel Gernika et sommes accueillis par Raul, un jeune espagnol d'Alicante, très sympa. Je sors ma déclaration de vol, il n'a pas de quoi en faire une copie et propose de la garder et de me la rendre le lendemain matin. Je grimace, pas très envie de lui laisser l'original d'un document qui est indispensable à la poursuite de mon voyage mais Yo me tranquilise.

    Nous hissons nos valises dans l'escalier étroit. Notre chambre au dernier étage, à l'atmosphère monacale et peinte de rose saumon, est toute douillette et me plaît beaucoup. Dormir dans ce cocon en écoutant la pluie tomber, quel pied ! N'empêche, en descendant l'escalier abrupt de l'hôtel, je finis sur le cul. Je suis bonne pour un beau bleu, encore, tiens ....

    L'hôtel ne fait pas restaurant et sur les conseils de Raul, nous interrompons la soirée peinarde, face à son poste de télévision, du patron du restaurant "Chez Fouad" qui nous sert un délicieux tajine à la viande et aux figue et un autre à la viande hachée, le tout pour 75 drh. Son ardoise accrochée à la devanture du restaurant propose aussi des tajines de sardines, crevettes et même des tortillas espagnoles. C'est que la région est plus influencée par l'Espagne que par la France.

    Chefchaouen - que beaucoup de Marocains désignent par Chaouen - accueillit les maures d'Espagne quand ceux-ci furent chassés par les rois catholiques. Les juifs s'y installèrent aussi mais pas les chrétiens, auxquels la ville fut longtemps interdite. Dans le train entre Rabat et Fès, Zakariae, originaire de Chaouen, m'avait appris l'origine de son nom : "chouf" (regarde) et "chaouen" (les cornes) car elle se trouve entre deux pics.

    Nous rentrons bien vite à l'hôtel où, dans la salle à manger, nous pianotons sur internet (un ordinateur est mis à disposition des visiteurs) avant d'aller nous coucher là-haut sous les étoiles.

    Chez Fouad, rue Targui

  • Quelques heures à Meknès ...


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    Après de longues minutes d'attente à un carrefour, nous avons abandonné l'idée de trouver un taxi et traîné ma valise dans la poussière et sur les trottoirs défoncés de la rue Lalla Asmaa jusqu'à la gare de Fès. Le trajet est loin d'être agréable ...
    Nous achetons nos billets (20 drh) et prenons le train de 12h50 en gare de Fès.
    Dans le wagon, j'achève le chapitre de "Femmes de dictateur" concernant Lénine, dont je me demande bien pourquoi il est taxé de dictateur par Diane Ducruet, et apprend que le quartier de la porte d'Orléans à Paris fut très fréquenté par les révolutionnaires russes. J'y avais d'ailleurs trouvé les traces de Lénine.

    La gare de Meknès ne dispose pas de consigne, nous allons donc devoir les traîner avec nous. Les taxis sont rares. Sur l'avenue Mohamed V, une femme en hèle un pour nous et le vieux chauffeur édenté, auquel je raconte que mon grand-père est venu faire son service militaire ici à la fin des années 40, nous apprend que Meknès est la troisième ville militaire du Maroc, après Marrakech et Kenitra, et le premier aéroport militaire d'Afrique.

    Meknès est d'abord l'une des quatre cités impériales du Maroc et l'ancien siège du sultanat marocain. Moulay Ismail (1672-1727), sultan sanguinaire qui fit de Meknès sa capitale, contribua grandement à l'essor culturel du Maroc, chassa les Britanniques de Tanger et reprit aux Espagnols une grande partie de leurs possessions marocaines. Après la mort de cet homme qui marqua l'histoire du pays, Meknès perdit son aura au profit de Fès et Marrakech. Avec le début du protectorat, en 1912, la ville devint le quartier général de l'armée française et les colons s'installèrent dans les alentours jusqu'à l'indépendance en 1956. Vous pouvez lire l'histoire de ce célèbre sultan ici.

     
    Notre chauffeur nous dépose devant Bab al-Mansour, la plus imposante des portes impériales marocaines, derrière laquelle s'étend la cité impériale :ambiance.

    Il est 14h, nous avons très faim et cherchons le restaurant des Mille et Une Nuits, à proximité de la place el-Hedim. A l'entrée d'une ruelle, un petit garçon nous guide et soulève une tenture sur une très belle pièce au plafond en bois peint, murs couverts de zeilliges et panneaux de bois au centre de laquelle un joyeux bazar s'entasse : matelas, chaussures et lits d'appoint. Deux femmes en train d'astiquer le sol se redressent en gloussant.
    "Le restaurant est ouvert ?" "Oui, oui !" Elles nous fraient un passage au milieu du tas de bordel et nous installe sur des banquettes de velours, dans une pièce au fond. Le restaurant est désert, bien sûr. La carte est alléchante; des tajines, des pastillas, aux alentours de 90 drh (le guide mentionnait une fourchette allant de 45 à 85). Il est clair que les établissement figurant dans les guides touristiques pratiquent des prix plus élevés que dans les établissements standards. "C'est l'heure du ménage ?" demandé-je à la dame. Elle m'explique qu'il y a eu une fête la veille dans la maison, d'où les lits et les matelas. La sitaution est cocasse.
    La cocotte minute pchipchitte allègrement, une bonne odeur nous chatouille les narines mais nous rongeons notre frein pendant près d'une heure. "On ne va plus avoir beaucoup de temps pour la visite", fait remarquer Yo.
    Après plus d'une heure d'attente (c'est le prix du tout frais fait maison !), un jeune garçon dépose devant moi une pastilla saupoudrée de canelle et de sucre glace, et devant Yo un tajine de poulet aux figues sèches. Nous faisons moitié-moitié. Ma pastilla est absolument divine, la pâte feuilletée d'une légèreté aérienne et le fourrage de poulet aux amandes concassées délicieux. Yo se régale aussi et je lui pique des figues. Mes photos ne sont pas terribles car l'endroit est sombre mais je vous assure qu'on s'est régalés !

    meknès,maroc

    Le patron du restaurant propose de garder nos valises pendant que nous visitons la ville, c'est très sympa et ça nous arrange bien ...

    Nous retournons sur la place el-Hedim, sur laquelle la lumière est magnifique. M'est avis que cette photo pourrait faire l'objet d'un très beau tableau de notre artiste-peintre familiale ...

    meknès,maroc

    Sur la place, l'animation commence à grandir. Il paraît que la municipalité de Meknès voudrait en faire un équivalent de Djemaa el-Fna à Marrakech ... Pour l'heure, le charmeur de serpents ne parvient pas à réveiller les siens, assoupis.

    Il nous reste 1h15 pour visiter la ville. Nous optons pour la meilleure solution en cas de timing serré : un tour de la ville en calèche. Le jeune homme porpose 160 drh pour une visite complète de tous les incontournables de la ville et promet de tenir notre timing. Yo doute mais nous tombons d'accord sur 120 drh. Top chrono, c'est parti !

    Devant le mausolée de Moulay Ismail, nous sautons de la calèche pour visiter - gratuitement - la sépulture de cet homme si important. Hélas, la salle funéraire, principal intérêt de ce site et supposément sompteuse, n'est pas ouverte aux non-musulmans. Nous nous contentons donc de poser dans une des cours peintes d'un jaune flamboyant et ornées de magnifiques zelliges.

    meknès,maroc

    Les horloges ornant le mausolée auraient été offertes par Louis XIV à Moulay Ismail lors de son refus de lui accorder la main de sa fille, la princesse de Conti [source].

    En chemin dans les larges avenues, notre jeune conducteur nous apprend que la muraille qui entoure le palais royal fait 5 kms et celle qui entoure la medina, 45 kms. Une brise légère, conjuguée au soleil, rend la balade très agréable. Meknès est une ville calme et très reposante en comparaison de Fès, Rabat, Casa ou Marrakech.

    Après le mausolée, on traverse le mechouar (place d'armes), aujourd'hui place Lalla Aouda, où Moulay Ismail passait en revue sa fameuse Garde Noire, unité d'élite composée de 16 000 escalves d'Afrique Noire, dont même les enfants étaient élevés pour servir dans cette garde.

    meknès,maroc

    Plus loin, on arrive sur la koubba as-Soufara où le jeune homme désigne, à droite, la prison des Chrétiens, ce que conteste notre guide et ce site, qu parle d'entrepôts de nourriture. A gauche s'étend le golf aménagé dans l'ancien jardin des sultanes.

    Plus loin encore, le quartier aux esclaves, dont la plus grosse partie était espagnols et portugais, mais aussi italiens et français :
    "En 1708, le sultan Mûlây Ismâ'îl, qui fit dénombrer tous ses esclaves “en trouva huit cents et fut surpris d'en avoir un si grand nombre”19. Les Français étaient au nombre de 200, il y avait 400 Espagnols, 200 Portugais, quelques Italiens et Hollandais. En 1711, le religieux espagnol Juan de la Concepcion souligne la présence de 1000 chrétiens dans les prisons de Meknès20, et 1100 captifs en 1720, dont 296 Anglais qui furent rachetés en 172121. En 1728, tous les captifs portugais sont rédimés22 et en 1736, c'est le tour des Espagnols ; la prison resta à peu près vide." [source]


    Nous posons le pied à terre devant Heri es-Souani, les immenses écuries et greniers de Moulay Ismail, qui pouvaient acceuillir 12 000 chevaux et leur nourriture. La visite coûte 10 drh et si les écuries présentent peu d'intérêt, la lumière du soleil sur la rangée de voûtes en ruine, à perte de vue, est de toute beauté.

    meknès,maroc

    Au nord du Heri es-Souani s'étend le bassin de l'Agdal, alimenté par un système de canaux de 25 kms de long et destiné à l'époque à l'irrigation des jardins royaux.
    Sur les bancs de pierre qui entourent le bassin, la jeunesse meknassi prend le soleil.

    meknès,maroc


    Avant de rejoindre la porte Bab al-Mansour, nous apercevons les balcons de bois de l'ancien quartier juif et traversons un marché très animé.

    Notre guide a tenu parole. Disposant de si peu de temps, nous n'aurions pu espérer meilleur aperçu de la ville. Déjà enthousiaste à l'idée de visiter Meknès, j'ai trouvé la ville très belle et reposante, offrant de multiples points d'intérêt, la population sympathique et me promets d'y revenir.

    Meknès mérite au moins une nuit sur place, d'autant plus qu'à une trentaine de kilomètres de la ville se trouvent les célèbres ruines romaines de Volubilis. Sur ce site, on propose de sympathiques balades dans Meknèset ses environs.

    Nous traversons de nouveau la place el-Hedim et retournons chercher nos valises dans le restaurant. Lorsque je soulève la tenture, les femmes crient "Chkoun ?", ce à quoi Yo répond : "C'est nous !". Chkoun, ça veut donc dire "Qui c'est ?"

    meknès,maroc

    Un taxi charge ma valise verte sur son toit - mon cadeau d'anniversaire est déjà bien rentabilisé mais elle douille, la pauvre - et nous dépose à la gare d'où nous prenons un train pour Rabat. Ce retour en arrière est hélas obligatoire pour que je récupère le laissez-passer qui me permettra de prendre l'avion dans 3 jours.

    PS : Ce billet est très long et proportionnel à mon intérêt pour cette très belle étape de mon voyage.

  • Promenade dans la nouvelle Fès

    Ce matin, nous esquiverons le petit-déjeuner à 40 drh de l'hôtel, qui n'a rien d'exceptionnel. Nous nous fions au guide qui nous emmène jusqu'à la crèmerie Skali. Le monsieur vêtu d'un veston "Carte Noire" m'apporte une belle carte en français. Nous commandons thés à la menthe et mehloui au miel (18 drh) qui s'avère être le meilleur que nous ayions mangé jusqu'ici. A côté de nous, un monsieur lit son journal en mangeant des oeufs brouillés à la viande.

    Pourchassés par une guêpe qui a décidé de fureter autour de nos verres de thé plutôt que dans les traces de miel de nos assiettes - les guêpes seraient-elles particulièrement friandes de menthe ou allergiques au miel ? - nous levons le camp et hélons un taxi. Le passager déjà présent, comme à chaque fois, passe devant pour ne pas séparer notre "couple" et me laisser seule avec lui sur la banquette arrière. En route, je constate l'optimisation de l'espace à la marocaine :

    fès, maroc

    Nous prenons la direction de Fès El-Jdid, "la nouvelle Fès" qui désigne quand même un quartier vieux de 700 ans, et nous faisons déposer tout près de la place des Alaouites. C'est là que se trouve la palais royal, inaccessible au public, mais dont nous pouvons au moins admirer les portes en cuivre entourés de zelliges et de bois de cèdre sculpté.

    fès, maroc

    Sur le boulevard Boukhsissat, on trouve déjà les immeubles ornés de balcons en bois sombre, constructions caractéristiques des quartiers juifs au Maroc. Nous sommes dans le mellah, l'ancien quartier juif, et les seuls touristes, peinards, dans le coin.

    D'une cabine téléphonique, j'appelle le consulat qui confirme qu'il a reçu l'accord de me délivrer un laissez-passer.

    Dans les rues, je m'amuse des étrangetés marocaines : les incontournables plaques des dentistes, que nous traquons désormais, la vente de lessive, les sacs de laine de mouton et l'optimisation de l'espace de ce commerçant, qui utilise la façade de la banque voisine pour accrocher lustres et horloges :

    fès, maroc

    Une méchante envie de pisser nous prend et nous quittons ce quartier animé pour localiser deux cafés mentionnés sur notre guide. Nous jetons un oeil à la carte de l'un d'eux, le Mezzanine, un bar-lounge branché : 28 drh un thé à la menthe ! Jamais vu un prix aussi exorbitant ! Bon, ben, je vais attendre ... Nous pénétrons dans le Jnan Sbil, un joli jardin aperçu la veille. Youpi, il y a des toilettes !

    Un homme nous emboîte le pas et entame la conversation; il s'appelle Abdoul, il est chanteur et nous laisse ses coordonnées au cas où nous reviendrions à Fès. Il se promène avec nous dans le jardin qui, autrefois irrigué, est désormais désseché mais toujours agréable. Les jeunes garçons et filles marocains s'y pressent et écoutent de la musique.

    Il est temps de rentrer à l'hôtel récupérer nos valises pour continuer notre voyage. Aujourd'hui, nous allons à Meknès, où mon grand-père, qui y fit son service militaire en 1949, rêvait de retourner ...

  • Soirée de Fès (spéciale dédicace à Nicolas)

    Après une pause à l'hôtel, où le wifi ne fonctionne toujours pas, nous décidons d'aller boire un verre au café Jawharat Fès, à côté du centre américain.

    Je m'installe en terrasse tandis que Yo va passer un coup de fil, et commande un jus d'avocat aux dattes et amandes, un délice. En terrasse, les hommes boivent et pianotent sur leur ordinateur portable. L'intérieur, que je visite, est chouette, ses colonnes sont couvertes de zelliges et plusieurs portraits de femmes (dont la Joconde) ornent ses murs. Près du bar, un panneau de bois sombre représente des scènes égyptiennes. A l'étage, désert derrière sa jolie balustrade de bois, il y a une cheminée. Même les toilettes sont très belles.

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    La faim se fait sentir. Les échoppes bon marché, sur le chemin de l'hôtel, ne proposent que des tajines ou du poulet grillé et nous n'avons pas énormément d'appétit. Un des restaurateurs nous indique un snack, dans une rue à droite.

    Au snack Chamonix, le vieux serveur demande au "petit prince" s'il va bien et nous invite à nous installer.
    "Et la princesse, on ne lui demande pas si elle va bien ?" demandé-je, feignant d'être vexée.
    "C'est parce que le petit prince est riche. La princesse, elle paie."
    "Ah ben non, je ne suis pas d'accord ! C'est le petit prince qui est riche et c'est la princesse qui paie ? C'est le monde à l'envers !"
    Il se marre, nous aussi. Pour 100 drh (9€), soit 4€50 chacun, nous avons droit à un menu complet de salade marocaine, brochettes (je prends un assortiment mixte de petites brochettes de foie, coeur, kefta et mouton, parfaitement grillées) et crèmes caramel maison. Le serveur est vraiment très sympa et plaisante avec nous pendant tout le repas. Une bonne adresse !

    Snack Chamonix au 5, rue Mokhtar Soussi , bd. Med. V, Fès (Tél. 05 35 62 66 38)