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  • Menteur !

    Il lui dit : « J’ai envie de t’embrasser. Je sais que ça ne se fera pas, mais je te le dis, parce que je suis bien avec toi ».

    Elle se répète ses mots : « Je suis bien avec toi », balancés d’une façon à la fois naturelle et solennelle, en les appuyant, comme si c’était important. Comme si c’était un cadeau. Elle lui décoche un sourire rassurant et faussement détendu. Elle guette son regard fuyant ou un léger vacillement du regard qui donnerait raison à la voix intérieure qui a terni cet instant en chuchotant « Menteur».

    Mais non, pas la moindre malice dans les yeux rieurs qui la captent. Elle s’étonne de son air tranquille et confiant, de son sourire insouciant, de sa joie visible. Les rares fois où elle a prononcé des mots de ce genre ont été suivies d’une lourde et paralysante appréhension.

    Ils rient. Elle respire fort et tout en soutenant son regard, elle articule lentement « C’est vrai ? Merci, ça me fait plaisir que tu te sentes bien avec moi. Vraiment. »

    Il est heureux dans cet après-midi nimbé d’un halo de soleil.

    Son regard à elle s’est voilé d’une tristesse qui ne la quittera plus jusqu’au soir.

    Elle repense à toutes les fois où on lui a dit quelque chose de gentil. Elle est horrifiée, soudain, comme il le serait sans doute s’il savait ce que la voix intérieure a crié en réponse à sa tendresse. Elle vient de réaliser qu'à chaque fois ou presque qu'on lui a manifesté de l'amour, elle a pensé "il/elle dit ça pour ma faire plaisir". Comme si l'éventualité qu'on puisse l'aimer était absente de sa tête.   

    La putain de toile d’araignée, invisible et gluante, a toujours été là entre elle et les autres.  

    Tout en marchant à ses côtés sur le boulevard, parlant de choses et d’autres, elle se souvient de ces quelques fois.

    Il y a peu, elle avait entendu un homme lui dire qu’elle était la passion de sa vie. Elle ne l'avait pas écouté, murée dans sa forteresse-prison et à chaque mot qu’il disait, elle hurlait intérieurement « Menteur ! ». Elle avait raccroché, pleine de colère, les insultes au bord des lèvres, et raconté la conversation à ses amis les plus proches. L’un d’eux s’était étonné de son amertume « Il tient à toi, quand même, ce garçon ». Haussant les épaules, elle avait marmonné « Ouais, peut-être » mais dans sa tête elle avait pensé « qu’est ce que t’es naïf! ». 

    Elle s’est souvenue. Tous ces moments qu’elle n’avait pas su savourer. Les bras tendus qu’elle avait refusés. Les corps contre lesquels elle s’était raidie. Ces lanternes allumées dans la nuit qu’elle évitait par peur de brûler ses ailes délicates de petite abeille joyeuse. Tout lui revenait. Elle avait l’impression que ça durait depuis toujours. Que chaque histoire, finalement, n’avait pu exister que parce qu’elle était vouée à une fin plus ou moins proche.

    L’abandon, le désamour, la haine, en revanche, ça elle n’a jamais eu de mal à y croire.

    Toute la journée, elle a fouillé sa mémoire, à la recherche de la dernière fois où elle s’était abandonnée sans qu’un mot, un geste ou la voix intérieure ne la fasse se raidir.

    Le soir venu, elle s’est jetée de nouveau dans la toile d’araignée virtuelle. Elle a rebondi dessus, d’abord doucement. Et plus elle essayait de bouger, plus elle s’emmaillotait dedans. Alors, elle s’est recroquevillée dans la position du fœtus et n'a plus bougé. Les seuls bras qu’elle a pu sentir enroulés autour d’elle étaient les siens. Elle a pleuré. D’abord en silence, et puis ça l’a submergée.

    Est-ce qu’une petite abeille peut traverser une toile d’araignée ?

  • Biennale d'art contemporain à Eragny sur Oise

    Vendredi dernier, mon ami Igor, dont les œuvres avaient été sélectionnées, m’a invitée au vernissage de cette exposition. Cet évènement se veut être le témoin des croisements culturels et métissages dans l’Art Actuel. Les œuvres très africaines de mon ami hongrois y avaient donc tout naturellement leur place.

    Une vingtaine d’artistes venus principalement d’Europe, avec en « tête d’affiche » le peintre-sculpteur français Rachid Khimoune, sont exposés à la 5èmeBiennale d’Art Contemporain : Ghani Alani(Irak), Dorota Baer (Pologne), Carla Benvenuto et Valéria Capitanio(Italie),Corinne Bretel, Pascal Catry, Jean-François Chenais, Nathacha, Laurent Vignais et Marie Wermuth(France), Alvar Calvet-Castells et Gabriel Hernandez(Espagne), Knagny Folly (Togo, France), Bruno Gérard (Belgique), Igor Laszlo(Hongrie), Noé Nguyen (Vietnam), Stoïmen Stoïlov (Bulgarie) Diana Stoïlova (Autriche)

    J’ai aimé la clarté de la salle et le regroupement des œuvres par artiste. D’emblée, mon œil fut attiré par les sculptures longilignes, en acier, de Laurent Vignais qui rappellent le style de Giacometti. Je restai songeuse devant un couple enlacé dans un baiser.

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    Je tombai ensuite devant un arbre étrange, œuvre du peintre-sculpteur Rachid Kimoune (et compagnon d’Eve Ruggieri). L’arbre s’appelle « Strange fruit » et porte de drôles de fruits, comme dans la chanson de Billie Holiday : les masques de visages humains se balançant au bout de chaînes.

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    Un peu plus avant, sur un monticule de sable, de drôles de tortues dont la carapace est remplacée par des casques des armées de tous pays :

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    J’avais vu un reportage sur cet artiste, Rachid Khimoune, qui s’amuse à composer un monde imaginaire et poétique en utilisant des objets de notre quotidien : plaques d’égout, prises électriques, ampoules etc. Son oeuvre la plus célèbre, « Les Enfants du Monde » est installée dans le parc de Bercy depuis 2001. Chacune des 21 sculptures a son jumeau dans le pays « d’origine », d’où Rachid Khimoune a prélevé la « peau des sols », nécessaire à leur construction. Ci-après, vous pouvez découvrir Enzo le Vénitien et Ayako la Japonaise. Mignons, non ?

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    Je restai un long moment dans l’espace consacré au plasticien espagnol Alvar Calvet-Castells. Ses pièces en noir et blanc, graphiques et apaisantes, m’ont intriguée tout autant qu’un livre dans lequel il pose une série de questions à des Marocains. Pour chaque question figure la réponse en arabe de son interlocuteur et sa traduction en espagnol. Rejointe par mon ami O., nous nous amusâmes à déchiffrer ensemble, lui en arabe et moi en espagnol, les réponses des personnes interrogées. Des réflexions empreintes de sagesse, parfois surprenantes. Par exemple, à la question « De quoi rêves-tu ? », il n’est jamais fait allusion à la richesse et l’argent.

    Par exemple :

    C’est quoi pour toi l’Espagne et l’Europe ?

    "L’eau salée nous sépare" mais aussi "des pays de droits humains ou, paradoxalement, où certains ont beaucoup et d’autres rien".

    Ou encore :

    De quoi as-tu peur ?

    "De rien" mais aussi "De l’intolérance et du terrorisme".

    C’est quoi pour toi le paradis ?

    "Rien" mais aussi "Un endroit où il n’y a plus de races parce que nous sommes tous les enfants de Dieu".

    Ensuite, je me suis extasiée avec Igor devant les tableaux remarquables du bulgare Stoïmen Stoïlov qui retranscrit les symboles des mythes et légendes des civilisations antiques. Ses œuvres d’une finesse remarquable ont l’aspect du parchemin. J’ai lu depuis qu’il avait été fort influencé par les aborigènes parmi lesquels il avait vécu.

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    Bien sûr, j’ai retrouvé avec plaisir les mosaïques d’Igor que j’ai la chance de pouvoir admirer à loisir chez lui. Je vous en mets une, pour le plaisir, ma préférée, "Séduction wodaabe" :

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    Le temps d’un discours, de quelques petits fours et du tintement joyeux d’une flûte de champagne et nous sommes allés dîner tous les 3 dans une brasserie … ch’timi !

    Pour l’expo, si vous passez dans le Val d'Oise, c’est jusqu’au 6 avril !

    Salle des Calandres (Théâtre de l’Usine) à Eragny-sur-Oise (95)

    Entrée libre

    Mardi, mercredi, jeudi, de 14 h à 19h

    Vendredi de 14h à 20h

    Samedi et dimanche de 10h à 12h et de 4h à 18h

    Renseignements au 01 34 48 35 55

     

  • 6 petites choses sans importance (quoique)

    J’ai eu la surprise et le plaisir d'être taguée par la facétieuse Céleste !

    Le règlement du jeu stipule qu’il faut :

    * Mettre le lien de la personne qui vous tague
    * Mettre les règlements sur votre blog
    * Mentionner six choses/habitudes/tics non importants sur vous-même
    * Taguer six personnes à la fin de votre billet en mettant leurs liens
    * Aller avertir directement sur leurs blogs les personnes taguées

    Voici ces fameuses petites choses sans importance (en tout cas pour moi) :

    1. S’il y a bien un trait de caractère qui me caractérise et exaspère souvent mon entourage, ce sont mes retards systématiques. Je suis tout le temps à la bourre. Oh ! pas de beaucoup ! J’excède rarement le ¼ d’heure si j’ai rdv dans un endroit public. Mes sms se suivent et se ressemblent : « J’arrive ! »  Je mentais souvent avant, assurant être au coin de la rue alors que je partais à peine de chez moi, et puis, mon frère m’a copieusement engueulée plusieurs fois et depuis, je ne le fais plus. Les plus malins me disent désormais, quand on a rdv : « appelle-moi quand tu pars de chez toi ». Au boulot, j’arrive tous les jours entre 9h15 et 9h30, le midi, mes collègues commencent leur déjeuner sans moi et le soir, au moment de partir, j’ai toujours un dernier mail à lire. J’ai souvent raté des trains mais jamais des avions, bizarrement. Je rêve d’un poste à horaires libres. J’aurais dû être africaine, c’est ce que me disent mes potes blacks, les seuls à faire preuve d’indulgence à mon égard.  
    2. J’aurais pu faire un copié-collé du point 1 de Céleste. Je suis également bordélique au possible mais je trouve n’importe quel doc en moins de 5 minutes. Le classement des papiers, factures et relevés de banque est une torture. La bannière « à classer » sur mon bureau déborde.
    3. Je siffle dans la rue. Ca me rappelle mon grand-père (celui qui m’emmenait aux champignons). Je le copiais, ça l’amusait beaucoup, il me faisait un clin d’œil complice. Les remarques répétées de mon père « les filles, ça ne siffle pas » ont renforcé la saveur de ce petit acte rebelle. Aujourd’hui quand je siffle, j’imagine qu’il me fait un clin d’œil de là-haut.
    4. J’ai l’habitude de rebaptiser les gens que j’aime de petits noms absolument farfelus. Ca a donné des choses comme Pili-pili, P’tit Bounia, Mozz, Honey Bunny, Tonton Dan, M’sieu Chic Chic. J’use aussi abondamment des « ma biche », « ma poule », « ma caille », « beau gosse » et « vieille branche ».
    5. Je jure beaucoup, et comme un charretier. Ca, je le tiens de mon père. Quand j’étais gosse et encore aujourd’hui, je réfrénais un fou-rire en l’entendant égrener un chapelet d’injures que je vous épargne. J’ insulte donc régulièrement les meubles dans lesquels je me cogne, mes vêtements, mes chaussures, mon vélo, les piétons, les voitures, les trottoirs, bref tout ce qui me fait obstacle.  Vous vous rappelez la scène de « Le père Noël est une ordure » où Thierry Lhermitte se fait pincer le doigt dans un boitier en voulant débloquer l’ascenseur ? Ben c’est moi.
    6. Je ne peux pas sortir de chez moi le matin sans avoir mangé. Ca me met de très mauvaise humeur, d’autant plus qu’il n’y a aucune boulangerie à proximité. Mon coloc’ se souvient de la dernière fois où il a eu le malheur de finir le paquet de biscottes que je m’étais gardé pour le petit déj du lendemain. J’ai dû me lancer dans la confection de pancakes et il s’est fait incendier à peine le pied par terre.  

    Je passe le relais à Giao, M., Nicolas, Cha, Malaika et Igor.

  • "Au nom du père"

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    Mon frère m'a offet récemment le DVD de ce film de Jim Sheridan, un de mes favoris. On l'a regardé ensemble il y a quelques jours. En VO, obligé, pour savourer les expressions et l'accent irlandais qui caresse ma mémoire.

    Ce film poignant fut tiré du roman autobiographique de Gerry Conlon, "Proved Innocent". Il retrace un scandale judiciaire majeur des années 80 : la condamnation à la prison à vie de Gerry Conlon, jeune délinquant irlandais, arrêté à Londres en 1975 avec 3 autres, (les 4 de Guidford) pour un attentat de l'IRA dans un pub. Avec lui, son père et plusieurs membres de sa famille furent emprisonnés, avant qu'ils soient innocentés, 14 ans plus tard.

    Bien sûr, le thème du film est le conflit en Irlande du Nord et la situation des Irlandais, humiliés et méprisés en Angleterre. Mais "Au nom du père" est surtout un film sublime sur les rapports père-fils.

    A l'époque, j'avais été bouleversée par la performance de Pete Postlethwaite qui interprète Giuseppe Conlon, le père de Gerry. Il est depuis un de mes acteurs préférés.

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    Daniel Day-Lewis, autre acteur - irlandais - absolument génial, exprime à merveille la souffrance de Gerry et sa haine pour l'image du père, si parfait et intransigeant, mais aussi résigné et victime de sa vie. La scène ou Gerry parle de son enfance, "tu étais toujours là quand je faisais quelque chose de mal, jamais quand je faisais quelque chose de bien" est d'une violence rare. La droiture inébranlable de Giuseppe et l'amour qu'il a pour son fils, malgré tout, sont bouleversants. Ce film évoque aussi les regrets de n'avoir pas eu le temps de dire cet amour. J'aime la pudeur des personnages, les errances de Gerry, rebelle immature. Si vous ne le connaissez pas encore, rattrapez votre retard. Vous ne le regretterez pas.

  • Fiso

    Fiso, ce n’est pas qu’un pseudo de blog. C’est mon prénom en verlan.

    Sa mélodie a toujours coulé de source, pour moi, mais quand je rencontre des blogueurs, la plupart le prononcent comme ils le lisent : « Fizo ». Du coup, ça n’a plus aucun sens.

    Fiso, à prononcer Fisso, donc, c’est le p’tit nom affectueux auquel, depuis l’adolescence, je réponds autant qu’à Sophie. Dans mes souvenirs, c’est mon père qui a commencé à m’appeler comme ça, puis mon frère et ses copains, ma sœur et ma mère, mes potes de l’époque hip hop. Mais jamais mes amis intimes ni mes amants. En dehors des blogueurs qui me découvrent sous cette identité, je n’aime pas que des inconnus s’approprient Fiso. 

    A quoi me renvoient donc Sophie et Fiso, contraires et complémentaires ? Et pourquoi les gens préfèrent l’une ou l’autre ?

    Pour l’enfant qu’a été Sophie, Fiso a longtemps été un idéal inaccessible, jusqu’à ce qu’elle comprenne qu’elle vivait à l’intérieur d’elle. Que les qualités qu'elle lui enviait était les siennes qu'elle ne voyait pas. J'ai longtemps détesté Sophie. Aujourd'hui, si je ne l'aime pas encore, j’accepte doucement l’idée que les 2 me sont vitales.

    Qu’aucune ne fait de l’ombre à l’autre. Que de la violence peut naître la douceur.

    J’ai fait plier le tuteur de plastique qu’on avait mis pour me forcer à pousser droit. Mes racines s’enfoncent et s’entremêlent, mes branches se déploient vers le ciel.

    Je suis un niaouli, un « arbre à peau », aux couches multiples.

    Fiso. Le positif de mon négatif. La tempête après le calme. Le Yang de mon Yin.

    Le point lumineux au bout d’un tunnel obscur

    Le ciel de ma liberté quand je m’enfonce sous terre

    Le jour apaisant de mes nuits agitées

    Le masculin musculeux dans mon corps si féminin

    Le sourire chaud qui a fait fondre ma froideur glacée

    Le château fort érigé pour protéger mes faiblesses

    Pousser mon corps à l’action pour le forcer au repos

    Le grain de folie qui défie ma philoSophie

    Mettre à mon actif les leçons d’un passé passif