Chez Sheila, on sert le petit-déj jusqu'à 10h. Du coup, on en profite pour s'offrir la grasse mat' écourtée la veille par un troupeau d'éléphants et on met le réveil à 9h40.
Ca sent tout le temps bon chez Sheila. L'odeur de quelque chose de sucré et parfumé qui cuit dans le four.
A la tabel du petit déjeuner, il y a déjà des verres de jus d'orange devant chacune de nous, sur une coupelle, et une corbeille remplie de pain à la banane et aux noix et brown bread faits maison. Peu après, Sheila dépose devant nous l'irish breakfast, dont je commence un peu à me lasser, je dois l'avouer. Plus les jours avancent, plus il est copieux. Ce matin, 3 saucisses, 2 oeufs, 3 tranches de bacon, boudins blancs et noirs. Je me jette sur le pain à la banane, dont Sheila me donne la recette.
Boug' dit, l'assiette vide : le pain à la banane m'aurait suffi. Trop forte, celle-là.
Au milieu de ce festin pantagruélique, une camionnette blanche déverse 3 solides gaillards qui s'attablent devant des céréales. Comme ils ont piqué le jus d'orange, je me lève pour leur en taper un verre et ils en profitent pour me proposer de m'assoir avec eux et me demander d'où je suis, où je vais etc. Ils sont de Dublin et nous discutons de la beauté de la région. C'est un spot de surfers et kyte-surfers, et pas mal de Français viennent dans le coin pour ça. Ils me conseillent une balade, un joyau disent-ils, peu connu car caché. "Tu prends la route de Tralee, tu roules et juste avant le Seven Hogs pub, tu tournes à droite. Si tu arrives au pub, c'est que tu es allée trop loin".
Avant de reprendre la route, Boug' et moi allons faire les andouilles dans les dunes. Trop chouettes ces édredons géants, j'ai envie de m'y jeter (et aussi d'autres envies moins avouables ...). Boug' pique une crise de fou-rire à cause de mes conseils de poses de photographe amateur (elle vous racontera, sans doute). Sur la plage, des poneys cavalent sur le sable, crinière au vent car il souffle ce matin mais le soleil est toujours là et nous offre une superbe lumière dans le ciel gris souris.
Nous trouvons sans peine la balade de Glanteenassig wood. Au pub rouge brique, je fais demi-tour et prend la direction indiquée à 4 kms sur un panneau vert. Je roule à travers la campagne colorée de blond et vert tendre. Des moutons et leurs agneaux broutent tranquillement sur le bas-côté de la route, je ralentis car ils sont en liberté.
Nous nous arrêtons d'abord au premier lac, le Lough Slat. L'endroit est totalement désert, et les rives de sable rouge offrent une touche de couleur dans l'écrin des roches grises.
Plus loi, c'est le lac Caum, paradis des pêcheurs de truite, randonneurs et pique-niqueurs. A 210m au-dessus du niveau de la mer, il est encaissé entre une forêt et la Stradbally mountain qui culmine à 798m.
L'endroit est parfaitement balisé. Des pancartes bleues indiquent le sens de la marche, et le parcours se fait sur de solides planches recouvertes de grillage pour éviter les glissades (car il pleut parfois en Irlande, quand même). Des tables de pique-nique sont posées ça et là. Nous faisons le tour du lac, cela prend une heure, le temps de digérer le petit-déj de Sheila.
L'endroit rêvé pour un pique-nique, non ?
A Abbeyfeale, après 2 heures de route, nous nous arrêtons au Coffee Pot, moi pour une soupe maison et Boug' pour des scones. Hé oui, je n'ai pas envie de Guinness ce midi. En revanche, je ne résiste pas au pain maison. C'est un truc vraiment appréciable, en Irlande, le fait que le moindre café ou pub fasse son pain maison, qui est délicieux à coup sûr.
Je ne me sens pas très bien, soudain, coup de fatigue. Irritée, je manque deux fois de m'emplafonner une bagnole sur un rond-point. Je propose un arrêt à Ennis, aux portes du Burren. Ca tome bien, le guide de Boug' dit que c'est une ville adorable. Pas de B & B en centre-ville et nous avons un peu de mal à en trouver un mais enfin, ça y est. Kathleen nous accueille, sans thé cette fois.
Je m'allonge un moment, j'ai un point sur l"estomac et je finis par être vraiment malade. Visiblement, la coquille de seafood Mornay ne nous a pas réussi car Boug' a été malade, elle aussi.
Nous partons en ville, en quête, pour ma part, de riz blanc pour plâtrer mon estomac soudain vide. La ville est déserte et tout, pubs et restaurants, fermés. Ben oui, c'est Vendredi Saint, et un jour sacré en Irlande. Tout est fermé. Les Irlandais vident les rayons alcools des supermarchés pour picoler chez eux. Nous tournons dans les rues pour essayer de trouver un chinois ouvert mais nous avons trop tardé et ils ne servent plus. Les seuls êtres vivants que nous croisons sont des ribambelles de canards qui se laissent porter par le courant de la rivière Fergus. Dans l'obscurité, j'aperçois un fier volatile au bec acéré, solidement arrimé dans les eaux glaciales. Un héron ! Plus loin, un autre, à l'affût, gobe des poissons qu'il pique de son long bec.
Ce soir, pour nous, c'est régime sec, nous ne mangerons ni ne boirons mais ... on aura vu deux hérons.