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irlande - Page 3

  • 2 jours à revivre*

    Il a suffi d’une note d'elle, d’une voix rocailleuse sur une mélodie d’amour, comme ce paysage de landes et de pierres que j’aime tant et qui me manque, pour que le souvenir de cette journée, pourtant banale, me revienne.

    Je pense souvent à l’Irlande, ces derniers temps.

    Peut-être parce que l’automne est une saison qui lui va bien, et que la pluie d’ici me rappelle celle de là-bas.

    Cette journée là, pourtant, était une journée d’été, mais l’été irlandais, vous savez …

     

    J’avais emmené un ami sur les routes du Connemara, pour plusieurs jours de flâneries, sans montre ni télévision. Nous roulions au hasard de nos envies, nous arrêtant au hasard d'un lac, d'un pub ou d'un port, et dormions dans quelque Bed & Brekfast qui nous avait plu. Mes yeux d'enfant émerveillé embrassaient les falaises, jouaient avec les mouettes, dialoguaient avec les old Paddy's burinés du coin, s'embuaient au fond d'un pub noirci par la fumée, où des musiciens chantaient ma mélancolie. Ce jour-là, l'air était vif, et nous avons partagé un panier de pinces de crabes dans un pub, sur le port du vieux village de pêcheurs de Roundstone.

     

    Je m’en souviens, nous nous étions attablés près d'une fenêtre et nous sucions avec gourmandise les pinces charnues en mordant dans du pain maison, à la mie bien brune. Pour étancher notre soif, une pinte de Guinness, bien sûr, à la mousse bien noire.

    La lumière était belle et le soleil dardait parfois ses rayons à travers l'épais voile gris.

    Après le repas, nous nous sommes promenés sur le port de Roundstone.

    Nous avons admiré ses jolies maisons colorées qui se découpaient dans les gris des pierres et du ciel, ses jardinets fleuris, ses barques abandonnées au fil de l’eau et la silhouette des twelve Bens qui se découpaient sur le ciel. Nous avons respiré le vent iodé, il nous fouettait les joues et emmêlait me cheveux.

     

    Pus tard, nous avons repris la voiture. Je voulais m’arrêter à chaque virage tellement la beauté de la nature me coupait le souffle.

    Ici, les ruines d’un château posé au bord d’un lac, là une maison au toit de chaume, ailleurs des rocailles, avec pour seul horizon le bleu de la mer.

    Des panneaux écrits en gaélique, source de fou-rires mémorables et répétés, parfois un vieux papy irlandais, la casquette vissée sur le crâne, pédalant nonchalamment sur une bicyclette aussi rouillée que lui.

    Dans le Connemara, le temps n'existe pas, à l’instar de ces troupeaux de moutons tranquillement allongés au milieu de la route. Que faire, sinon couper le moteur et attendre qu'ils daignent aller brouter ailleurs ?

    Le vert n'a jamais été aussi beau que sur cette terre arrosée par la pluie et battue par le vent. Et la tourbe brune et luisante, comme des mottes de chocolat noir, et des buissons de bruyère pour toute végétation, dans ce paysage lunaire.

    Plus tard, pour nous réchauffer, nous nous sommes arrêtés dans un pub qui surplombait un lac magnifique. Il était vide et le patron, un jeune homme jovial, a discuté avec nous. Nous avons joué aux fléchettes, bu de la Guinness, encore, et puis, alors que nous repartions, ils nous a offert un pack de deux pintes de Guinness, que j’ai longtemps gardées, et utilisées.

     

    C'était il y a dix ans mais je n'ai pas oublié cette après-midi là. Je la garde au chaud dans mes souvenirs, quand j'ai besoin d'un rayon de soleil à travers le voile gris qui s'abat parfois. 

    J’espère que tu ne l’as pas oubliée, toi non plus, où que tu sois maintenant.  J’aimais ton profil d'oiseau de nuit, ton catogan, ta misanthropie, ton cynisme et ta culture.

    Ton amitié me manque, parfois, mais les paysages du Connemara me manquent si souvent, si tu savais.  

     

    * parce que Jean Becker a magnifiquement filmé le Connemara dans "2 jours à tuer". J'ai eu un énorme pincement au coeur en y reconnaissant Rounstone, justement.

     

     

  • Ils ne manquent pas d'Eire !

    En 1996, suite à un plan social de mon entreprise qui délocalisait tous ses bureaux européens en Irlande, j'atterrissais à Dublin. J'y vécus 6 ans. Le pays, jadis l'un des plus pauvres d'Europe, faisait alors l'admiration de tous. Une croissance record, un taux de chômage ridicule. Les constructions allaient bon train, les voitures étaient toutes neuves, les bars et boutiques branchées se multipliaient et les agences de recrutement fleurissaient à chaque coin de rue. Avec moi, une flopée de français, italiens, allemands, espagnols etc. vendit son exotisme dans des centres d'appels. Nous étions courtises par les plus grandes entreprises internationales - principalement américaines - pour travailler sur les marchés de la zone EMEA (Europe- Middle East-Africa). Les Africains francophones ne tardèrent pas à rappliquer, eux aussi, des pays européens ou ils vivotaient. C'est alors que la légendaire hospitalité irlandaise fut mise à mal. Le "tigre celtique" n'avait pas été préparé à l'immigration, habitué qu'il était à se vider de sa population. Une vague de xénophobie s'empara du pays et les passages à tabac se multiplièrent. Mes amis Irlandais étaient horrifiés que leurs compatriotes reproduisent un comportement dont leurs ancêtres, fuyant la misère, avaient été victimes en Australie, USA ou Angleterre.

    Je me suis retrouvée dans la peau des étrangers en France qui sont si souvent accusés de venir "piquer le boulot" des autochtones (sic).

    Moi et mes amis étrangers ne manquions pas alors de souligner ce que tous semblaient avoir oublié. Les immeubles, les bus, toutes les constructions portaient la mention "Financé par la Communauté Européenne". En adhérant à l'UE en 1972, l'Irlande sortait de la misère grâce à l'argent de la communauté européenne. Certes, d'autres pays ont bénéficié des mêmes aides et n'ont rien su en faire. Les Irlandais sont courageux et travailleurs. Mais l'attitude populaire était puante d'arrogance et de xénophobie. Au moment du vote pour le traité de Nice, les banderoles "L'Irlande ne veut plus d'étrangers" et "Le traité de Nice va appauvrir l'Irlande" ne se comptaient plus.

    Pourquoi l'Irlande a-t-elle dit non, par deux fois déjà ? Moi je dis : parce qu'elle est xénophobe et parce que, maintenant qu'elle s'en met plein les poches, elle ne veut pas participer au budget de l'Union. Il suffit de lire les gros titres des journaux irlandais pour le constater.

    Ingrate Irlande ! As-tu oublié d'ou tu venais ?

  • Dublin

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    La photo ci-dessus confirme les hypothèses émises par Mère Mi en mon absence. Ell se demandait ce que je faisais, et bien voici la réponse en images !

    Jeudi dernier, atterrissage à 23h15 à l'aéroport de Dublin. Dommage, la nuit m'empêche de profiter de l'approche des côtes irlandaises. A l'arrivée, une gigantesque file d'attente pour les taxis, nous arrivons très vite à Swords, dans la jolie zone pavillonnaire ou réside Ma Maguy. Elle habite près du centre commercial de Boroimhe, ça se prononce "Boriva". Le lendemain, je suis réveillée à l'aurore par la lumière du jour. Hé oui, bizarrement en Irlande, les volets sont rares. Je me lève  et déjeune en discutant avec Ma Maguy.

    J'ai rendez-vous à 12h30 avec une amie très chère que je n'ai pas vue depuis près de 7 ans. Une de ces irlandaises qui rendent hommage à la réputation de ce peuple, un coeur en or, une grande sensibilité, un sourire merveilleux et une immense ouverture d'esprit. Elle s'appelle Blaithin et ce prénom, qui signifie "Petite fleur", lui va à merveille. Je la connais depuis le tout premier jour de mon arrivée en Irlande, en 1996, puisqu'elle faisait partie de mon équipe chez AA. Blaithin est partie à Londres peu de temps avant que je ne rentre en France et j'avais hâte de rencontrer sa petite Roisin, née là-bas. Nous nous sommes retrouvées au Cock Tavern, un joli pub tout en bois dans la rue principale du village de Swords. En l'attendant, j'ai commandé ma première pinte de Guinness. La Guinness n'est jamais aussi bonne qu'en Irlande, c'est une bière qui voyage mal. Boire une pinte de Guinness revête un caractère sacré chez moi. Comme il y a un rituel pour la dégustation du vin, une pinte de Guinness se flaire, s'admire, se goûte. J'aime regarder le barman remplir la pinte à demi, sa robe brune fait des volutes, puis la laisser reposer et finir de la remplir, surmontée de sa belle mousse ivoire. Alors que je savourais le goût amer de ma belle brune, Blaithin est entrée dans le pub, tenant par la main une petite fille blonde. Elle n'avait pas changé, ma petite fleur irlandaise ...

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    Avant de quitter le pub, j'ai pris une photo de la plaque de porte des toilettes des dames. Ca vous rappelle quelque chose, les filles ?
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    Vers 14h, retour à la maison ou Michou nous retrouve. Ca fait des années que je le connais et c'est la première fois que je le rencontre. Il est arrivé en Irlande il y a 4 mois, un autre de ces immigrant du Sud venu chercher une vie meilleure en Europe. N'ayant pas encore le droit de travailler et parlant très peu anglais, il s'ennuie ferme. Nous passerons donc ces 4 jours avec lui. Il s'avère qu'il est charmant, courtois et d'un calme olympien.

    Nous prenons tous les 3 le bus 41, un de ces fameux bus à 2 étages, inconfortable et fort polluant. Comme toujours pendant les 6 années passées dans ce pays, je monte au 2ème étage et m'installe à l'avant du bus; sensations fortes garanties surtout dans les virages.

    Nous passons à Drumcondra, ce quartier ou j'ai vécu en coloc avec Claire dans une grande maison avec une porte géorgienne verte si typiquement irlandaise. Un pont emjambe la route, on peut y lire "Good to be back home". L'émotion me gagne car l'Irlande est mon pays de coeur. Et chaque retour sur cette île qui symbolise pour moi le temps du bonheur me remplit de nostalgie douleureuse.

    J'aime beaucoup le quartier de Drumcondra, c'est là que se trouve le jardin botanique national et la roseraie où je me suis promenée si souvent. C'est là aussi qu'alors hôtesse de l'air, dans mon joli uniforme vert, je prenais chaque jour le bus ou un taxi de la société Near Cabs pour me rendre à l'aéroport. Le bus tourne alors dans O'Connell street, passe devant la GPO (General Post Office) ou se réfugièrent en 1916, avant d'être massacrés, les insurgés qui venaient de procclamer la République d'Irlande. 

    J'entraîne Michou et Maude dans Moore street, à quelques pas de Parnell street ou j'ai vécu également. Moore street est une rue piétonne assez crasseuse ou se succèdent marchands de poissons, de fruits et légumes et de fleurs. J'y retrouve ma poissonnière, Rosie. Quand je la salue d'un "How ya doin' Love?", avec mon plus bel accent irlandais, son regard se fait interrogateur. Quand je lui demande si elle me reconnaît, elle me répond "Comment aurais-je pu oublier ? L'hôtesse de l'air !". Je pose avec elle pour la photo que je publierai prochainement. Même rituel chez mon boucher de FXB's, Franck, qui me reconnait tout de suite lui aussi, après 5 ans.  

    Nous traversons Temple Bar, ou j'ai travaillé comme serveuse dans le très bon restaurant, Elephant & Castle, réputé pour ses ailes de poulet épicées. Nous voici sur Dame street, nous passons devant le pub gay 'The George" puis nous entrons au Globe. Ce n'est pas mon bar préféré mais c'est là que nous avons rendez-vous. Mon restaurant indien, Jewel & the Crown, est malheureusement fermé pour travaux, quelle déception pour moi qui attendais avec impatience de m'attabler devant un bon lamb jalfrezi ! 

    Le lendemain, nous achetons bacon et oeufs pour nous préparer un petit déjeuner consistant avant de retrouver Salim à Bray, une jolie ville au bord de la mer dans le Sud. Nous prenons le métro, le Dart, qui porte bien mal son nom de "flèche" et passons à Tara street avant de longer la mer : Dalkey, Monkstown d'ou j'envoie un SMS à Hervé qui y a vécu, Dun Laoghaire puis Bray. Salim fume sa clope en nous attendant à l'extérieur de la gare. On va boire un café sur la plage de galets ou le soleil a attiré de nombreux promeneurs.

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    Je voulais grimper jusqu'à Greystones, qui se trouve juste derrière la montagne de Bray Head, pour savourer un bon crumble à la rhubarbe dans le jardin du salon de thé Poppie's, mais Salim m'informe que le propirétaire a changé. Il nous propose d'acheter un crumble au magasin Avoca et de le manger chez lui. Il a une mignonne petite maison, très cosy, avec plein d'éléphants dans son salon. Salim est un gourmand comme moi, après avoir englouti le crumble il a tenu à nous confectionner des brownies au chocolat.

    A 21h30, on retrouve Michou devant la GPO et je les emmène dans un de mes pubs préférés, le Porterhouse dans Parliament street. Dans ce pub sur 3 niveaux, pas de Guinness, ils brassent leurs propres bières et elles sont savoureuses. Ce soir là, il y a un groupe de musiciens, ils sont très doués, on chante et on danse, ambiance pub, quoi, encore plus agréable maintenant que la cigarette y est interdite.

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    Le lendemain matin, je sacrifie le brunch dominical pour manger le bon madesu que Ma Maguy nous a préparé. Vers 14h, mon vieux pote Bedel sonne à la porte. Il nous accompagne à Howth pour une ballade qui est un autre de mes rituels. Je ne peux passer un séjour à Dublin sans déguster un fish & chips sur la jetée de ce port du nord de Dublin.

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    Chez Beshoff, on mange un des meilleurs fish & chips, le cabillaud a une belle chair nacrée, parfaitement cuite, et pour ceux qui aiment ça, on peut arroser ses frites de vinaigre. Ca ne vous donne pas faim, ça ?

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    On finit la journée au pub qui se trouve sous la station de Dart, au soleil. Le soir, je mange un bon poulet à la moambe, avec des bananes plantain, en discutant avec Grady, la fille de Ma Maguy. C'est une belle jeune fille de 16 ans maintenant. Le lendemain, c'est mon dernier jour en Irlande.
    Nous retrouvons Salim sur Mary street pour manger un kebab au Epicurian Food Hall.
    A 14h30, retrouvailles avec Michou qui nous acompagne dans une séance de shopping jusqu'à 16h45, heure à laquelle je retrouve Cliff devant le magasin HMV de Grafton street, LA rue commercante de Dublin, toujours noire de monde ou des chanteurs ambulants égaient les jours de pluie. C'est là qu'a débuté Paddy Casey, un de mes chanteurs préférés. 
    Grafton street s'étire de Trinity College à St Stephen's green. Trinity College, prestigieuse université irlandaise, a accueilli en son temps des étudiants aussi célèbres que Oscar Wilde, Bram Stoker (auteur de Dracula), Samuel Beckett, Jonathan Swift (auteur des Voyages de Gulliver). Aujourd'hui Trinity College accueille toujours des étudiants du monde entier et abrite aussi le livre de Kells. Adjacente au parc de St Stephen's green se trouve Baggot steeet ou, coincé entre 2 murs, on peut apercevoir un cimetière huguenot français, malheureusement fermé au public, souvenir de cette sombre période de l'histoire de France ou les protestants durent fuir les persécutions.  
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    Nous buvons un café à la terrasse du Metro Café, le temps de faire quelques photos de Cliff.
    Puis Bedel nous rejoint et m'emmène boire ma dernière pinte au Cocoon, un nouveau bar un peu trendy, off Grafton.medium_Turquie_057.JPG
    Ca faisait un an et demi que je n'étais pas revenue à Dublin. La ville a encore changé. Un hôtel s'est installé dans ma rue. Les berges de la Liffey ont été réamménagées en promenade. La population s'est enrichie d'une nouvelle vague d'immigrants, venus de l'Est. Il y a moins de Chinois et de Français, m'a-t-il semblé, et aussi moins de toxicos. Des couples mixtes sont apparus. Les rues de Dublin sont toujours aussi animées le samedi soir, les Irlandais toujours aussi peu frileux et les chauffeurs de bus conduisent toujours aussi mal. 
    La prochaine fois, j'irai directement dans le Connemara. Envie d'étendues sauvages, de lacs, de couchers de soleil sur la Sky road de Clifden et de me perdre dans le Connemara parce que je ne comprend rien aux panneaux en gaélique.
  • Nina


    medium_Nina_Simone.jpgUn jour de juillet 1999, dans mon petit tailleur vert à boutons dorés, je bois un café avec des "coordo" sur le tarmac de Roissy, en attendant que mes passagers embarquent sur le vol Paris-Dublin. On m'annonce une "wheelchair passenger", j'ouvre ma porte arrière pour que sa chaise roulante soit hissée dans le galley. Je suis dans l'allée centrale et je vois une femme noire et âgée, visiblement riche, s'avancer vers moi.

    Cette femme majestueuse au profil reconnaissable entre tous, c'est Nina Simone. De son vrai nom Eunice Wayman, elle s'était rebaptisé en hommage à Simone Signoret, qu'elle admirait.

    Nina Simone, ma toute première grande émotion musicale. Je me souviens précisément de ce jour où, allongée dans ma chambre chez mes parents, j'eus une révélation en écoutant une compil de chanteuses de jazz que je venais d'acheter.

    2 notes de piano et puis, une brise légère et suppliante "Love me, love me, love me, say you do", qui se transforme en vent tropical et enfle sous le souvenir des caresses, "With your kiss my life begins", puis chuchote "Like a leaf clings to a tree, oh my darling, cling to me", le piano s'emballe, la voix monte comme une tormade, puis crie sa soufrrance "Wild is the wind". J'écoutai cette chanson en boucle pendant des heures et à chaque fois, le souffle de Nina, pareil au vent, déclenchait un frisson le log de mon échine. Il y a une forme de recueillement dans sa musique, quelque chose de spirituel qui me bouleverse à chaque écoute. Nina était entrée dans ma vie.

    J'ai hésité qelques minutes, je n'aime pas déranger les gens célèbres qui voyagent. Mais elle !

    J'ai demandé à mes collègues, qui travaillaient à l'avant de l'avion, comme elle était. Elles ne la connaissaient pas, trop jeunes sans doute, mais ont répondu "She's a bitch". Je ne m'attendais pas à une autre réponse, vu le caractère de diva de la dame. Prenant mon courage à deux mains, je m'agenouillait devant elle et lui dis à quel point je l'admirai. Je racontai tout, "Wild is the wind", sa biographie que j'avais dévorée, et son accent si émouvant sur "Ne me quitte pas". Elle comprit au mien que je n'étais pas irlandaise et nous discûtames quelques instants. Elle venait donner un concert à Dublin, parlait fort et lançait de bruyants "Thank you, thank you". Elle insista pour me donner un autographe, que j'ai perdu ensuite, ce n'était pas le plus important.  

    Nina est morte en 2003, non pas sur la terre de ses ancêtres africains, comme elle le souhaitait, mais en France, à Carry le Rouet.

    Combattante de la lberté, elle avait défilé aux côtés de Martin Luther King pour la défense des droits civiques. Malheureuse en amour et en affaires, elle ne s'était jamais pardonné de n'être pas allée voir son père sur son lit de mort.

    "Elle aimait la France et les Français. Je vous demande de ne pas laisser mourir son souvenir. Parlez d'elle, jouez sa musique", a demandé sa fille Lisa Celeste.

  • Bloody Sunday

    J'ai bien chialé hier en regardant ce film de Paul Greengrass qui retrace la tristement célèbre journée du 30 janvier 1972 au cours de laquelle une marche pacifique à Derry, Irlande du Nord, se transforma en bain de sang et signa le début de la guerre civile. Le réalisme du film qui s'apparente à un documentaire donne vraiment la nausée, surtout quand on sait que les soldats responsables de cette boucherie (13 morts) furent ensuite décorés par la Reine.

    La seule joie de cette soirée fut d' entendre cet accent irlandais que j'aime tant, même si j'ai du mal à capter l'accent nord-irlandais, supposé être le plus sexy du pays. Je me souviens de la mine horrifiée de certains lorsque je leur annonçai mon départ pour Dublin, i y a quelques années : "ouhla mais c'est chaud là-bas, les bombes et tout"... J'avais beau leur expliquer que Dublin se trouve en République d'Irlande et que, pour simplifier, c'était 2 pays différents, ils m'imaginaient déjà rasant les murs. Je n'ai jamais vraiment réussi à parler du conflit avec mes amis irlandais, trop douloureux et trop compliqué sans doute. Le sentiment anti-Anglais est encore très présent et les hostilités se déclenchent facilement, surtout avec quelques Guinness de trop. Une des raisons sans doute qui explique que les Irlandais aiment bien les Français ...