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2yeux2oreilles - Page 172

  • Directive de la honte

    Est-ce parce que je n’ai jamais oublié la nausée qui m’a submergée, un soir du doux mois de mai 1991, lorsque sous mes yeux un africain a enjambé le parapet de verre et s’est jeté du premier étage du hall de Roissy, pour échapper à une expulsion ?

    Est-ce parce que j’ai appartenu à une famille africaine dont pratiquement tous les membres sont arrivés illégalement en Europe, laissant leurs enfants dans un pays en guerre (l’ex-Zaïre), travaillant jour et nuit pour les faire venir, taisant la souffrance immense de vivre jusqu’à 10 années sans jamais les revoir ?

    Est-ce parce qu’alors hôtesse de l’air, j’ai ressenti un choc immense et baissé les yeux, de honte, en voyant monter à bord des hommes enchaînés comme des bêtes, les yeux exorbités de terreur, encadrés par des policiers ? En priant que jamais ce ne soit un de mes amis ou membre de ces familles que j’aimais tant …

    Est-ce parce qu’un soir de mars 1999, j’ai été réveillée par le hurlement de l’homme que j’aimais, qui venait d’apprendre que sa mère de 50 ans, qu’il n’avait pas revue depuis 8 ans et tentait de faire venir en Europe, était morte le jour même d’une bête crise de paludisme à Kinshasa ? Faute de papiers, aucun de ses 3 fils exilés n’a pu assister à ses funérailles. Celui dont je parle a dû attendre 6 années pour pouvoir enfin pleurer sur sa tombe.

    Est-ce parce que comme toi, Oh!91, "beaucoup de mes amis ont été des étrangers et pourtant comme mes frères et soeurs" ?

    Rien ne peut justifier, pour moi, l’hypocrisie de la politique d’immigration, les humiliations subies par les immigrants et les morts, tombés des avions ou noyés au large de l’Afrique et de Cuba.

    C’est pourquoi je relaie le billet de mon ami Oh !91 contre le projet « d'une directive concoctée par la Commission européenne des Libertés qui autorise l’enfermement pendant dix-huit mois d'étrangers au seul motif qu'ils sont en situation irrégulière »

    Oh!91 explique : « La durée d’enfermement pourra atteindre dix-huit mois et s’appliquera, sans distinction, à toutes les personnes n’ayant pas d’autorisation d’entrée sur le territoire. Autrement dit, que vous fuyiez votre pays où un génocide est en cours, où se déroule une guerre, où votre vie est en danger parce que vous êtes une femme, parce que vous êtes homosexuel, ou que vous fuyiez la misère, le traitement sera le même. Seuls pourraient en être exemptés les mineurs isolés et les étrangers malades. Ce qui veut dire que des enfants, même en âge d'être scolarisés, seraient concernés par cet enfermement de dix-huit mois s'ils se trouvent en présence de leurs parents.»

    La pétition contre ce texte se trouve ici et une manifestation européenne est prévue le 19 janvier.

    Edit : Une chanson tout à fait dans le ton de ce billet, trouvée chez Gael : "Africain à Paris" de Tiken Jah Fakoly 

  • Résolution 2008 n° 1 : Ranger !

    Je viens de faire un test psycho « Garder ou jeter ? » dont je connaissais déjà le résultat :

    « Vous avez tendance à tout conserver et vous présentez quelques symptômes de gardite aigue ! Par crainte d'oublier des gens ou des bons moments, par peur de manquer "au cas où", ou par simple tendance à la nostalgie, vous entassez. »

    Ben ouais, c’est tout moi. J’ai d’autres défauts dont je reparlerai mais celui là m’empoisonne sacrément l’existence et explique une bonne partie du bordel qui s’entasse chez moi.

    J’ai toujours tout gardé.

    Il y a les objets à valeur sentimentale : les lettres (de mes parents quand j'avais 11 ans, amis perdus dans les méandres de mes souvenirs, de mes amoureux), les cadeaux sincères et malheureux dont je refuse de me séparer, genre la perruque rousse effilochée qu’on m’a offerte le jour de mon départ d’Irlande (parce qu’un cadeau, ça ne se jette pas), des centaines de photos d’une autre époque toujours dans leur pochette avec négatifs incorporés, jamais triées, les bibelots rapportés de contrées lointaines et qui n'attirent plus que la poussière.

    Les vêtements : des tailles 38 qui ne sont plus là que pour me rappeler le doux souvenir de l’époque où je me glissais dedans comme … non, je censure … et que je garde au cas où je réussirais l’exploit de perdre 10 kilos (mais dans ce cas, j’aurai toujours le stock des tailles plus grandes que je garderai au cas où je regrossirais), mes tongs en cuir bleu canard que j’adore et que j’ai l’espoir de recoller depuis 2 ans, malgré les vaines tentatives de mon Pap’s armé de son tube de Superglu, des erreurs de shopping que je n’ai portées qu’une fois, des vêtements à retoucher, boutons à recoudre depuis … non, non, j’ai honte ..

    Les magazines : ah ! les magazines ! Pendant des années, j’ai trimballé mes 50 numéros de Vital, de déménagement en déménagement. Aujourd’hui, ce sont des piles de Nouvel Obs qui dorment à côté de mon lit et que je garde pour les relire un jour de pluie (et pourtant, il pleut souvent mais je préfère me réfugier au ciné ou dans un café), sans compter les magazines féminins que me filent ma copine Sophie et que je garde pour les passer à une autre.

    Tous les « ça peut servir un jour» : j’en ai des kilos !

    Des guides touristiques édition 1996 d’endroits où je ne retournerai pas, cartes de restaurants à refiler aux copains (que je ne trouve jamais quand je les cherche, les cartes), des dossiers spéciaux « voyages » (ma grande passion) sur des endroits merveilleux, pour le jour où j’irai (quand les adresses citées seront obsolètes), des incontournables à acheter  / visiter / essayer / lire / voir / bloguer, découpés dans lesdits magazines, des centaines de recettes de cuisine découpées dans des mags et jamais expérimentées, la couscoussière de ma mère qui n’a jamais servi depuis 3 ans vu que le meilleur couscous est au « Vieil Alger », échantillons de parfums que je ne porte pas à donner aux copines (sauf que je ne sais pas quel parfum elles portent, ce serait trop long alors faites vos listes les filles)

    L’arrivée d’internet ne m’a pas facilité les choses. Ma messagerie est encombrée de mails agréables que je garde pour les relire à l’occasion (qui ne se présente jamais), de blagues à resservir (mais je vais rarement au resto ou dans un dîner avec mon ordi sous le bras) et des coordonnées de gens que j’ai perdus de vue depuis des années (au cas où).

    Chaque déménagement est l’occasion de me débarrasser, bon gré, mal gré, de toutes ces choses inutiles qui m’encombrent. Parfois je rêve que quelqu’un entreprenne un tri de mes affaires, parce que j’en suis incapable. Je suis sûre que je ne me rendrais pas compte de l’absence des ¾ des choses.

    J’ai cherché sur internet des infos sur cette manie de tout garder. On parle de refus de trier et d’accepter le passé, de besoin de se raccrocher à des « doudous » imaginaires mais aussi d’une simple « bonne vieille mauvaise habitude ».

    Vivez-vous la même chose ? Qu’en pensez-vous ?

  • Libertés chez Pascal

    Je fais de la pub pour un nouveau blogobébé (moins d'un an), un copain que je connais depuis plus de 10 ans, même si on s'est perdus de vue un moment. Le ton de son blog Libertés devrait plaire à certains copains du côté du KB et de Toulouse (et aux autres, aussi) ...

    Bien avant son blog, ce sont ses photos que j'ai découvertes, elles sont sensuelles, drôles ou graves, à lécher du regard ici.

    PS : Pascal, le printemps approche, c'est plus la saison des cols roulés ... si jamais ... c'est oui ! ;)

  • Mon frère

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    Hier c’était l'anniversaire de mon petit frère. J'écris "petit frère" pour vous, mais je ne l'ai jamais appelé comme ça. Même avant qu'il me dépasse de plusieurs têtes.

    Le souvenir le plus lointain que j’ai de lui, c’est à l’école primaire d'une petite ville de Beauce où, à chaque récréation, je me précipitais au grillage qui séparaient les primaires des maternelles pour le retrouver. L’école était une torture pour lui, il pleurait tout le temps et courait vers moi, les yeux gonflés de larmes. Ca me fendait le cœur de ne pas pouvoir le serrer dans mes bras. En dehors de ça, à cette époque, mon petit frère m’intéressait peu, bien trop occupée que j’étais à jouer au docteur avec les 3 fils du voisin.

    Quand nous sommes partis en Allemagne, j’avais 7 ans. Nous avions des chambres communicantes, la bonne aubaine ! Chaque soir, dès la lumière éteinte, on s'appelait sur les talkie-walkie qu’ils avaient eu la bonne idée de nous offrir à Noël et on foutait le dawa jusqu’à ce que mon père débarque. On détalait alors dans nos lits en glapissant "pitié, papa, pitié" et on recommençait dès qu’il avait tourné le dos. On n’avait pas honte, tiens ... 

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    Peut-être que ma place d’aînée explique que j’ai toujours pris la défense des plus faibles. Je n’ai jamais supporté l’injustice, ça remonte à l’enfance. Nous étions tellement différents que dans la famille, chacun avait ses préférences pour l’un ou l’autre et nous en étions parfaitement conscient. Comme on ne comprend pas toujours les paroles des adultes, on se fie à notre instinct, comme de jeunes animaux. Lui était aussi turbulent et bruyant que j'étais calme et silencieuse. Je me souviens d’une fois où mon grand-père chtimi m’avait donné des bonbons devant mon frère. « Tiens, Sophie, c’est pour toi », avait-il dit. Quand j’avais demandé « Et S. ? », il n’avait pas répondu alors, révoltée, j’avais tout partagé avec mon frère, devant lui, comme pour lui donner une leçon.  

    Un des jeux préférés de mon frère était de me pousser à bout. Je restais imperturbable, espérant qu’il se fatigue tout seul et retourne jouer avec ses Playmobil. On passait notre temps à se chamailler mais on était toujours complices pour faire des conneries, en général à mon initiative.

    Bien sûr j'ai pris mon rôle d'aînée très à coeur et ai participé à son éducation. Plus tard, j’ai « crapauté » avec lui mes premières cigarettes, des Royale menthol piquées à la grand-mère. C’est ma petite sœur de 4 ans qui nous a balancés, bien involontairement, la pauvre. Arrivés à Paris, j’avais 14 ans, je l’ai emmené au cinéma découvrir le petit génie de Mineapolis dans "Purple Rain".  Pour parfaire son éducation en même temps que la mienne, je lui ai aussi fait découvrir la richesse des programmes de Canal +, un certain premier samedi du mois où des soubrettes se faisaient malmener, en long en large et en travers, dans un hôtel. Le film qui s'appelait « Dodo » nous a laissés, à tous les deux, un souvenir ému. Ca m’a valu quelques baffes parce qu’on avait oublié d’éteindre le décodeur et que ce couillon est tombé dans le panneau comme un débutant quand mes parents l’ont questionné.

    Nos rapports ont vraiment changé quand je suis entrée au lycée. J’ai commencé à avoir des copains blacks qui me faisaient écouter du rap et de la funk. De retour à la maison, je lui apprenais à faire des défis et à chaque fois que je pouvais, je l’emmenais en soirée avec moi. Il était super fier que mes copains lui prêtent de l’attention. C’est à ce moment là qu’il a commencé à m’appeler Fiso. Aujourd’hui il dit que la plus grande partie de sa culture musicale vient de moi. Je ne me suis jamais vraiment rendue compte à quel point je l’avais influencé, jusqu’à ce qu’il me le dise, par petites touches, comme récemment, quand ma petite sœur et lui ont parlé de la façon dont ils me voyaient, plus jeunes. Ca m’a beaucoup touchée de voir de la fierté dans leurs yeux, pour moi qui me sentais si quelconque à l’époque.  

    Plus tard, quand je suis partie vivre en Irlande, il est venu plusieurs fois me voir, seul ou avec ses copains, toujours fier de présenter « sa grande sœur Fiso ». Ils m’appellent tous comme ça, d’ailleurs, et ça fait d’eux aussi mes petits frères. Il y a presque 5 ans, on est partis en vacances au Venezuela ensemble. J’étais en pleine séparation et ces 3 semaines ensemble nous ont fait retrouver notre complicité d’antan. J’ai pris l’habitude de débarquer chez lui le dimanche avec un poulet rôti.

    Quand 6 mois plus tard, il est venu habiter « juste 15 jours » chez moi, le temps de trouver un appart’, j’ai retrouvé une raison de rentrer à la maison le soir, moi qui ne le faisait plus que quand j’étais assez fatiguée pour m’écrouler dans mon lit et ne plus réfléchir. J’ai retrouvé le plaisir de manger et cuisiner, on s’est même fait de sacrés gueuletons.  

    Ca fait 3 ans maintenant qu’ on vit en coloc. Ma plus grande fierté, c'est son attitude envers les femmes. Faut croire que nous, les 3 femmes de la maison, on lui a laissé assez de place et lui en a montré une image assez bonne pour qu'il n'en aie pas peur et les respecte, aujourd'hui. Avec ses potes, c'est un ami fidèle et loyal. Y'a pas beaucoup de gens, hommes ou femmes, qui ne l'aiment pas. Jeté trop tôt, injustement, du système scolaire, il s'est cultivé seul et a galéré d'apprentissage en CDD avant de se stabiliser, enfin. 

    Il dit souvent à ses potes que si je n’avais pas été là, il y a 3 ans, il aurait pu finir à la rue. Il ignore à quel point je lui suis reconnaissante, moi aussi, de n’avoir rien dit, rien demandé, juste posé une tasse de café devant moi quand j’émergeais les yeux rougis d’avoir trop pleuré. Comme ce jour là, sur la plage, il m’a aidée à me relever, mon petit frère.

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    La seule fois où j'ai croisé une soeur comme moi avec un frère comme le mien, c'était Léna, chez Giao. Parfois, on nous charrie, surtout ses potes : « Hé, vous allez pas vivre toute votre vie ensemble, quand même ? ». Bien sûr que non. On sait bien, d’ailleurs, qu’on a repris assez de forces maintenant, lui financièrement et moi moralement, pour continuer seuls. Mais personne ne nous fera rougir de s’aimer comme on s’aime. On sait ce qu’on se doit, tous les 2.

  • Des voeux comme j'aime

    Merci à mon oncle et ma tante de m'avoir fait bien rire aujourd'hui !
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