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2yeux2oreilles - Page 39

  • La communication non-violente : je m'accroche !

    Il y a quelques jours, j'ai été invitée à une soirée d'anniversaire dans un pub irlandais à Châtelet. La personne qui fêtait son anniversaire, que j'appellera ici "mon pote", a volontairement omis de me prévenir de la présence d'une femme (que j'appellerai la lionne) qui me déteste historiquement, bien que je ne l'aie jamais rencontrée.

    Heureusement, dans le groupe, il y a le petit frère que j'aime beaucoup et un de ses amis, un type assez bluffant qui a déclenché chez la lionne au moins autant d'hostilité que moi. Comme elle n'a pas osé s'attaquer frontalement à moi, il a morflé pour nous deux.     

    Je ne suis pas très à l'aise devant ma pinte de Guinesse, c'est un fait, car la lionne, assise en face de moi, en fait des tonnes. A six autour d'une table, difficile de faire abstraction de sa présence d'autant plus qu'elle parle trop et trop fort, et rit trop et trop fort. J'observe mon pote en me disant que décidément, on a les amours qu'on mérite.
    Comme elle a visiblement de la hargne à évacuer, elle s'attaque à mon voisin de droite (le type bluffant), un Congolais qui se fait traiter en moins de cinq minutes de faux africain vendu aux "babtous" (suivez mon regard).  Il se marre et la laisse libre de lui coller les étiquettes qu'elle veut. J'admire son stoïcisme. Le pote qui fête son anniversaire proteste et s'offusque qu'on utilise le terme "babtou" devant moi. Je le tranquillise : ça me passe au-dessus.

    Je me fais royalement chier, le mot est faible, et puisque la courtoisie n'est plus de mise, je décide d'ignorer la lionne, bien que je n'ai qu'une envie : lui demander de fermer sa grande gueule. Elle continue de me provoquer par des allusions à peine masquées. En apparence impassible, je garde l'oeil rivé sur l'écran, face à moi, qui retransmet un match de foot.

    Mon apparent détachement agace, il faut croire. La meilleure amie de la lionne, sous prétexte de vouloir entrer en contact avec moi, me pose une question tout à fait inopportune et voulue déstabilisante. Elle rebondit contre le mur que je suis devenue et se fait mal. Après l'angélisme, elle revient à la charge et tente la culpabilisation pour obtenir une autre réponse que celle que je lui ai donnée. Elle m'accuse de lui avoir prêté de mauvaises intentions et d'avoir fermé la porte au dialogue.
    "Si j'avais été fermée, je t'aurais dit d'aller te faire foutre.
    - Non, tu ne m'aurais pas dit ça parce que tu ne me connais pas.
    - Ah si je t'assure. Ne pas te connaître n'est pas le genre de choses qui m'arrête, bien au contraire. Si tu veux dialoguer, poses-moi n'importe quelle autre question, j'y répondrai. Ou pas."

    En fin de soirée et malgré ma faim, je décide de ne pas les suivre au restaurant. Les meilleures plaisanteries sont aussi les plus courtes, surtout lorsqu'elles ne font rire personne. La meilleure amie de la lionne, déjà mise à mal par mes réponses, se prend, en privé, une leçon de morale par mon pote et finit en larmes.

    Ils me déposent chez moi et je remercie le pote du frère d'avoir été mon allié mental, ce qui le fait rire. J'ai tenu le coup mais une fois la porte fermée, éprouvée par la méchanceté gratuite et les tensions que j'ai vécues, les larmes ne sont pas loin.

    Le lendemain matin, je me réveille tôt, toujours contrariée, me rejouant la soirée en boucle. Seul mon frère, passé prendre un café, me permettra de mettre des mots sur mes sentiments. La colère envers le pote qui m'a mise dans cette situation inconfortable se mélange à une colère contre moi-même. La bouille de mon petit plumeau atomique, que je garde pour la journée, et un déjeuner avec un ami cher achèveront de me changer les idées.

    Depuis, j'ai réfléchi à cette désagréable expérience. Cette soirée catastrophique ne m'a rien apporté, sinon l'occasion d'éprouver ma capacité à ne pas réagir, ce qui représente un gros effort pour moi. Seule l'amie a essuyé quelques plâtres mais elle l'avait bien cherché.

    Pourtant, si j'ai opté pour le silence afin d'éviter la confrontation qui aurait été violente, je n'ai pas pratiqué la communication non-violente : tout dans mon attitude était message de fermeture. Dans ce bras de fer avec la lionne, qui m'a fait rester un temps qui me semblait suffisant pour que l'honneur soit sauf, j'ai oublié de me poser la question qui devrait rythmer mes choix désormais et m'éviter bien des souffrances : est-ce que j'ai envie de vivre ça ?    

    Il faudra que je réfléchisse sérieusement, un de ces jours, à la raison qui me pousse à m'infliger de telles épreuves alors que ma liberté me permet de me lever, de saluer l'assemblée et de rentrer chez moi.

  • Je t'aimais, je t'aime et je t'aimerai (part I)

    Elle s'était garée sur la place du château et l'avait appelé pour qu'il la guide jusqu'à lui. Rejouant la chasse au trésor de son enfance, elle hélait les rares passants. Aucun ne situait le bar "que tout le monde connait"et dans son oreille, il riait de son euphorie surjouée. Dévalant d'un pas vif les escaliers qui plongeaient dans le ventre de la ville, elle balayait d'un regard distrait les toits de tuile couvrant la marmite humaine.

    Elle était joyeuse et nerveuse à la fois, partagée entre la joie de retrouver un être cher et la crainte de ne pouvoir réprimer un élan vers lui, si proche et pourtant si lointain. Le souvenir de leurs dernières retrouvailles obscurcirait-il par instants cette soirée qui se voulait enjouée ?

    Assis à une terrasse, il la regarde s'avancer vers lui, un sourire aux lèvres. Elle frissonne sous son regard magnétique, dans lequel, aujourd'hui encore, elle croit déceler une lueur d'admiration.

    Cet homme sombre et lumineux, qui l'attend à quelques pas, c'est l'un des points d'interrogation de sa vie, son dernier chagrin, sa fracture ouverte.

    Maintenant à ses côtés, elle se détend peu à peu, heureuse que leur inoffensive conversation, entre confidences et taquineries, réaffirme leur complicité passée. Elle n'est venue que pour ça, pour qu'il comprenne qu'elle ne lui en veut pas. Elle a accepté ce qu'il est et ce qui ne sera pas.

  • Mais c'est déjà pas mal

    Au comptoir d'un café parisien, il lui demande :
    - Tu es heureuse ?
    Désarmée, elle acquiesce, regard fuyant, sourire forcé.
    Dans un autre contexte, elle aurait répondu non. Le bonheur, ça n'est pas l'absence de malheur.

  • Dernier jour de vacances (entre Torre del Mar y Torremolinos)

    La nuit a été étrange. Lovées sous notre couette, dans un studio au bord de la piscine ouvert aux 4 vents, nous avons entendu le fracas de la pluie toute la nuit, comme si nous dormions en plein air. Boug', complètement déboussolée, s'est même réveillée plusieurs fois en sursaut pour éponger la plage arrière de la voiture (sic!) Moi j'ai rêvé de baisers passionnés sur un parking. La faute sans doute aux vodka caramel, vin blanc et café irlandès que j'ai bus hier soir.

    Après le déjeuner, et malgré la pluie, nous sommes allées nous balader le long de la côte, en repérage, car j'ai le projet d'acheter un pied-à-terre en Andalousie. La région de Cadiz n'étant paraît-il pas une bonne idée, j'ai revu mes prétentions d'authenticité à la baisse et reconsidéré la costa del sol. Mais vraiment, la zone qui court de Marbella à Malaga et attire son lot de charters en direct de Manchester, à grands coups de pintes de bières et musique beuglante, ne m'attire pas le moins du monde. J'ai la prétention, s'agissant d'un endroit où je m'offrirai du bon temps, de vouloir choisir mes voisins. M. Villages m'a proposé la région à l'est de Malaga, qu'on appelle la costa tropical, en ligne droite de Grenade. Comme je ne connais pas, j'ai proposé à Boug' d'aller s'y balader, histoire de voir si le coin me plairait.

    A Torre del Mar, j'ai aimé la hauteur raisonnable des immeubles, le front de mer dépourvu de boutiques à touristes, les nombreux restaurants de poissons et cafeteria con churros. Boug' et moi on s'est bu un verre en terrasse, à quelques mètres de la plage, en s'imaginant se balader avec nos déambulateurs, à la retraite, et tremper nos churros dans du chocolat chaud. Et puis, des trombes d'eau se sont nouveau déversées et on a pataugé dans les flaques. Dommage pour nos sandales qui avaient enfin séché ...

    Au retour, on a rejoint Malaga par la route de la côte, histoire de voir les petits villages. Jusqu'à Rincon de la Victoria, ça va. Le village de pêcheurs de Benajarafe, avec ses quelques barques colorées posées sur le sable, m'a bien plus aussi. Comme on n'avait pas fait les andouilles depuis Tarifa, on s'est arrêtées sur une plage de rochers et une vague a profité d'un moment de distraction pour me tremper lâchement le bas du pantalon.

    Comme le soleil perçait un peu à travers les nuages, j'ai proposé à Boug' d'aller prendre l'apéro au centre de Torremolinos. On y a bu notre meilleure sangria de tout le séjour et mangé de succulents chocos grillés au beurre, ail et persil ainsi que des tortillitas de camarones.

    Un retour à la maison où on a proposé à M. et Mme Villages de sortir dîner avec nous, offre qu'ils ont décliné, et puis nous sommes retournées à La Chacha nous taper un second round de fruits de mer. Vacances pluvieuses mais vacances heureuses, Boug' a aimé l'Andalousie, le tinto de verano, le chocolate con churros, le lomo, les tapas. Elle envisage même d'apprendre le portuguais l'espagnol (blague privée).

  • Notre périple andalou, plus de 900 kilomètres

    Je n'ai noté que les étapes où nous avons passé la nuit : Lucena, Granada, Jerez de la Frontera, El Puerto de Santa Maria, Los Caños de Meca, Tarifa, Malaga.


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