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  • Les gorges d'Aradena - jour 5

    [Pour vous (nous) faire rêver un peu par ce temps maussade, je continue le récit de mes vacances, le mois dernier, en Crète]

    Ce matin-là, nous sommes une dizaine à partir pour une journée de randonnée dans les gorges d'Aradéna, au sud du pays.

    Moins touristiques que Samaria, mais tout aussi spectaculaires (et plus sauvages), on y croise bien moins de monde. les gorges de Samaria voient défiler jusqu'à 1500 visiteurs par jour.

    Constance me réveille vers 7h30. On a tous un peu la tête dans le c.. après la soirée de la veille, à Chania. Dans le bus, le guide, un beau crétois, se présente et voyant nos mines froissées, nous laisse finir notre nuit. J'ai bien dormi malgré les virages ...

    Arrivés à l'entrée du village d'Aradena, nous nous dégourdissons un peu les jambes, avant d'attaquer la descente, en buvant un mauvais (Nes)café dans une cahute au bord de la route.

    Notre randonnée part du village abandonné d'Aradéna ou l'on peut voir, au milieu des oliviers et du thym qui embaume la montagne, les ruines de maisons traditionnelles crétoises dans lesquelles errent de jolies biquettes. Julien et moi nous paumons en suivant un groupe d'Allemands au lieu du notre. Ça commence bien ...

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    Nous descendons ensuite le lit de la rivière. Nous sommes quasiment seuls, hormis le group d'Allemands croisés plus haut. Je discute randonnées et île de la Réunion avec un couple auquel je n'avais pas parlé jusque là, et qui deviendrons mes "chouchous", Anne-So et Arnaud. Un couple mignon comme tout, lui blond, les cheveux blonds bouclés attachés en queue de cheval, elle un visage enfantin et un sourire craquant. Quand je lui dis qu'ils sont un jeune couple mignon, elle me répond que ça fait 14 ans qu'ils sont ensemble ! Ils ont l'air tellement amoureux que je n'aurais jamais cru avoir affaire à un "vieux" couple. Comme quoi, on peut se connaître depuis des années et avoir toujours des étoiles dans les yeux en regardant l'autre.

    La descente des gorges est raide pour les genoux, les couleurs ocres des falaises ferrugineuses très belles. Vous nous voyez, là, tout petits dans cette immensité rocheuse ?

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    On trouve beaucoup de lauriers roses, car c'est la saison de leur floraison.  Notre guide, armé de bâtons de marche, nous raconte - en anglais - la naissance des gorges, et de la Crète. L'île fut longtemps sous l'eau et reliée à l'Afrique. En témoignent les squelettes de lion et même d'éléphants retrouvés dans des grottes. Il nous met en garde contre les chutes de pierres, très fréquentes. Et pas seulement. En effet, sur le chemin, nous croisons les cadavres séchés de nombreuses biquettes qui ont fait le saut de l'ange.

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    Nous débouchons sur la plage de Marmara ou il n'y a qu'une taverne et des maisonnettes blanches, louées aux touristes.  Pas mécontents de voir du bleu après ces 5 heures de marche dans une gorge encaissée. Au total, nous avons descendu 750 mètres. La plage de Marmara n'est accessible que par bateau ou à pied. Ça doit être bien sympa de venir se ressourcer quelques jours dans ce bout du monde. Affamés, nous nous attablons sur la terrasse en bois de la taverne. J'ai une vue de rêve sur la plage et les eaux turquoises de la mer de Libye, laquelle n'est qu'à 200 kms de nous. Un bout de paradis, on se croirait dans les Caraïbes. Vous voulez des preuves ? Vous êtes sûrs de vouloir vous infliger un tel supplice en ce moment, avec la météo pluvieuse qui sévit sur la France ? Ok, suffisait de demander ...

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    Z'avez vu ? De la balle, non ? Je suis même assortie à la couleur de l'eau ... Maintenant, vous me détestez, je sais ...

    Après un repas fort plaisant, rafraîchi par la brise, nous suivons un sentier côtier pendant environ une heure jusqu'au village de Loutro ou je me désaltère d'une Mythos (j'en rêvais!) tandis que Delphine m'apprend à jouer au tavli (backgammon local, très prisé des Crétois).

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    Notre ferry arrive, nous montons à bord, rejoignons notre car. Sur le trajet du retour, de nouveau, pas un bruit. Tout le monde dort. 

    Si vous souhaitez faire la randonnée, elle est décrite en sens inverse (ce qui est bien moins difficile) ici.

  • Oumar Thiam

    1291611568.jpgVous vous souvenez de ce choc que j'avais ressenti en entendant un musicien sierra léonais sur la ligne 6 du métro, il y a un peu plus d’un an ? Pendant les quelques minutes de sa chanson, "Children in the sun", il avait subjugué tout le wagon.  

    Bouleversée par sa voix, j’avais cherché sa trace, en vain, sur internet et écrit un billet [lien] sur lui, que Céleste, Arno, Malaika et Aïn avaient commenté.

    Imaginez alors mon émotion et ma joie lorsqu’hier, parcourant la liste des concerts, j’ai lu ces mots dans la section « World Musique » de Paris Obs :

    « Parcours fulgurant que celui de ce jeune Sierra-Léonais, passé en peu de temps des couloirs du métro à l’Olympia grâce à sa guitare folk et son blues africain, entre Keziah Jones et Daby Touré ».

    Mon cœur a bondi de joie et je me suis écriée « C’est lui, j’en suis sûre !!! » dans le RER bondé. Et ce matin, première chose en arrivant, je tape son nom sur Myspace et je retrouve la chanson qu’il avait chantée ce jour-là, « Children in the sun ». Pour l'écouter en live, c'est ici. Il s'appelle Oumar Thiam et a conquis de grandes pointures comme Youssou N'Dour et Akhénaton, ex-IAM.

    Je suis heureuse pour lui à un point que vous ne pouvez pas imaginer !

    Le rayon de soleil qu’Oumar a balancé dans mon wagon, ce soir-là, redonnant à tous les voyageurs des yeux d’enfants émerveillés, s’est transformé en une belle histoire. Et moi, quand la vie me donne de belles émotions comme ce jour-là, je recommence à croire aux contes de fée !

    PS 1 : Je viens de le rater à l’Entrepôt, c’est trop con, mais j’irai l’écouter dès que possible

    PS 2 : Décidément, je l’aime vraiment, mon métro parisien !

  • C., ou la solitude

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    « Elle n’est pas jolie mais elle a du charme », entend-on souvent. C. n’a ni l’un ni l’autre.  

    Ses cheveux sont mi-longs, d’un blond cendré, sur des racines noires. D’épais sourcils noirs durcissent son visage et quand on s’approche d’elle, on distingue nettement une moustache et des poils épars, aussi noirs que ses sourcils, sur son menton.

    Ses tenues sont provocantes, vulgaires même, et ses rondeurs boudinées dans des vêtements trop étriqués. Elle « cherche » visiblement un homme et flirte ouvertement avec les mâles du groupe. Certains esquivent, gênés, d’autres s’en amusent. Aucun n’est flatté. Les filles qui se croient plus jolies se moquent.     

    Même le soleil ne l’aime pas. Il l’a mordue, infligeant de vilaines traces rouges sur sa peau désespérément blanche. Elle s’en protège désormais en appliquant sur son visage une pâte verdâtre, ramenée de Birmanie. Efficace, visiblement, mais moche.

    Elle ne dégage ni féminité, ni douceur, malgré tous ses efforts. Même son accent, pourtant exotique, est rugueux comme du papier de verre. C. n’aime pas son prochain, et il le lui rend bien. Ou alors c’est l’inverse.

    Au fur et à mesure des jours, les chaises se vident autour d’elle. Quand elle parle, je surprends des sourires goguenards et des mimiques agacées. Deux petites connasses dédiées au culte du corps et du bronzage en cabine ne se gênent pas pour se moquer ouvertement d’elle. La nature humaine est riche d’enseignements.

    Sur la piste de danse d’un club quelconque, seule au milieu du groupe, elle danse étrangement, en sautillant. J’aime bien la regarder danser, elle a le rythme. C’est le seul moment où, les yeux fermés, un sourire à peine perceptible sur les lèvres, elle semble un peu heureuse. Un garçon, le crooner du groupe, beau brun aux yeux verts, allumeur, s’approche et se frotte à elle. Je les regarde et mes sentiments oscillent entre gêne, pitié et agacement. Agacement parce que je sais qu’il la méprise et j’ai peur qu’il ne s’amuse à ses dépens. Une fille du groupe, par ailleurs adorable, se penche vers moi et dit « Le sein de C. ne va pas tarder à jaillir de son tee-shirt… ».

    Je reste songeuse. M., avec laquelle je bois un verre, observe aussi la scène. La conversation dévie sur C., et plus généralement sur la bêtise et la méchanceté des gens qui préjugent de l’intelligence d’autrui.  

    C. parle fort et rit souvent, aux éclats même. Un rire forcé, en totale contradiction avec ses yeux bruns inexpressifs. C’est ce regard qui m’a fait entrevoir des blessures secrètes ; il est vide de toute émotion, comme celui que promènent sur le monde les êtres qui ont trop souffert.

    C. vient d’un pays issu de l’ancien empire soviétique. Quand j’ai demandé ce qui l’avait amenée en France, elle a répondu presque sèchement « des raisons personnelles ».

    Un soir, dans le restaurant d’un port animé, nous sommes assises à la même table. Elle a bu, un peu trop, elle est euphorique et parle fort. Un musicien s’approche et nous ayant identifiés, commence à jouer sur son accordéon, « La vie en rose » et autres standards des répertoires français et anglo-saxons. C. commence à chanter, en français et en anglais. Sa voix est belle et je m’étonne de sa connaissance de notre répertoire après seulement 7 ans en France.

    Le musicien se plante alors devant elle et entame « Le temps des fleurs ». Vous savez, cette chanson dont nous connaissons tous la reprise, en français, de Dalida. Je fredonne doucement « C’était le temps des fleurs, on ignorait la peur, les lendemains avaient un goût de miel … ».

    Soudain, la voix de C. enfle et accompagne l’accordéon de mots inconnus. Dans une langue magnifique, mystérieuse et difficile à apprivoiser, elle redonne son origine à cette chanson traditionnelle russe, « Dorogoï dlinnoyu »,comme le fit Ivan Rebroff [lien] à la fin des années 60.

    C. chante, le regard soudain perdu dans un monde appartenant au passé. Elle regarde droit devant elle mais ne me voit plus. Elle a oublié les regards moqueurs et les rires sous cape de ceux qui la raillent et qui n’ont jamais connu l’exil. Le cœur serré par la mélodie triste et sa voix qui pleure la terre natale, je vois son sourire disparaître et ses yeux se brouiller.

    Et moi, la fille de nulle part et de partout à la fois, attachée à aucune terre et amoureuse de toutes, je suis bouleversée, comme à chaque fois que je perçois la tristesse d'un exilé, et je la trouve belle.

  • Coups de coeur

    Après les coups de gueule et loin des coups de blues, mes derniers coups de cœur musicaux :

    "Tu l'aimeras" de Spleen, à écouter ici [lien], hip hop folk sensuel, découvert en 206 sur la compil "FNAC Indétendances". J'aime sa voix éraillée sur cette complainte douloureuse de l'homme abandonné pour un autre.

    "C'est bien t'as l'air heureuse hein?
    épanouie du haut de tes trente glorieuses.
    J'te vois porter ton regard sur lui
    Comme celui que j'ai connu autrefois."
     

    Un peu dég', je suis, car j'ai raté la Nuit Zébrée [lien] de vendredi dernier, où il passait en concert à la Bellevilloise [lien]. A l'écoute du concert, en live sur radio Nova, quelque chose m'a dit que l'ambiance sur scène aurait plu à Tonnegrande.

    Et puis, Absynthe Minded [lien], un groupe belge flamand. C'est un des groupes préférés d’Arno (non, pas toi !) et quelque chose me dit que ça plairait à M. Poireau [lien]. J’écoute « My heroics part One » en boucle mais j'aime beaucoup aussi les autres morceaux, notamment le violon (encore!) très "Djangoesque" sur "Pretty Horny Flow".

    "Isn't it always so?
    the story is unfold, at least
    you got a different role
    and now you gotta quit the scene"

    Leur site et les dates de leurs concerts (veinards, ces belges !...), c'est  [lien]. Mag, Francouas et autres mangeurs de frites, vous connaissez ?

    Et enfin, un inconnu (pour moi, en tout cas), que j’ai découvert au hasard de vagabondages sur « My Space Music » : EDI [lien]. J’aime son rap posé qui m’emmène « A la recherche du bonheur » et la mélodie triste de « Ecchymose ».

     

  • Festival de l'eau (3)

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    Sur le pont d’une ginguette, du côté de Nogent,

    Sous la lumière dorée d’un tableau de Cézanne,

    Jailliront des éclats de rire insolents

    Des lèvres trop fardées de beautés diaphanes.

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    Dans une robe moirée, je boirai du vin blanc,

    Un accordéon beige chantera le vieux Paris

    Et dans le parfum suave de grappes de lilas blanc,

    Nous poufferons gaiement, par l'alcool étourdis.

     

    Sous le soir vrombissant de doux coléoptères,

    Lorsque résonneront les accords de musette

    J’aurai une pensée pour celle que fut Colette,

    Née de père inconnu, grandie dans la misère.

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    Souvent, elle racontait, sous le tilleul fleuri,

    L’uniforme allemand, les dernières maisons closes,

    Les lèvres tendres et roses de son premier amant,

    La couture dessinée sur la jambe, au crayon,

    Au Balajo rue de Lappe, la valse, la java bleue,

    Qu’elle dansait dans les bras de garçons ténébreux,

    Les petits matins blêmes en gare de Vierzon,

    Et les chagrins d’amour qui durent toute une vie.

    (J'espère que ma célébration poétique de l'eau ne vous saoûle pas, ce serait un comble ...)