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  • Dans l'métro (1)

    ligne 13.jpgJe suis debout sous les néons blafards d’une station de la ligne 13. Sur le quai opposé, dans un wagon aux couleurs d’acier qui file vers le sud, tu me regardes. Tes dents blanches apparaissent et me décochent un sourire lumineux auquel je répond.

    Mon métro entre dans la station, j’appuie sur le bouton d’ouverture des portes, rabat un strapontin  et m’assied. A droite, dans mon champ de vision, je sens ton visage tourné vers moi. Au moment où ton wagon s’éloigne, je jette un regard, comme pour dire au revoir. Debout, tu agites les bras debout, désespéré, me fais signe d’attendre. Je hausse les épaules avec un petit sourire, genre « c’est la vie ! »

    Pourquoi les hommes français ne peuvent-ils pas se contenter d’un sourire ?

  • Effets secondaires

    sieste.jpgC’est l’heure de la sieste. Ce moment de la journée où derrière les volets clos, les corps se dénudent et les poils se hérissent de plaisir dans la fraîcheur de la pénombre. La lumière est belle, les lèvres exhalent des odeurs de pastèque, les peaux sont fraîches et les souffles légers.

    Le corps fonctionne au ralenti, invitant à l’amour langoureux. Les mains des amants errent sans but sur la peau et dans une union tendre, leurs sexes palpitent doucement en une caresse intérieure.

    Je suis dans une de ces chambres, inerte entre les draps frais aux parfums de lavande. Endormie dans ma position préférée, celle qui me réconforte et me rend vulnérable, qui tout à la fois me protège d’un autre et m’offre à lui. Une position indécente, paraît-il. Alors un drap léger me couvre jusqu’à la taille, au cas où…

    Et justement, la porte s’ouvre et un ami passe la tête. « Fiso, regarde qui est là... » chuchote-t-il d’un air malicieux.

    Derrière lui, je distingue, comme un mirage, ta stature imposante qui s’avance dans l’embrasure de la porte. Plus tard, tu diras que tu passais à quelques kilomètres de là quand tu t’es souvenu que j’y étais. Mais là, gêné d’interrompre ce moment d’intimité, soudain intimidé, tu hésites, comme ce jour-là.

    Ce jour-là … Nous n’avions fait que parler, et c’était si rassurant après le choc de la rencontre. Les mots me permettaient d'apaiser la tornade que ta proximité déclenchait. Tu étais tellement différent de ce que j’avais imaginé. A tous points de vue.

    Aujourd’hui, je n’éprouve plus le besoin de parler. Mes paupières et mes lèvres sont lourdes, elles ne veulent pas s’ouvrir. Ne parle pas, mon ténébreux amant. Laisse moi émerger doucement de cette délicieuse rêverie, retiens tes mots qui briseraient le silence. Que pourrait dire un homme à une femme, nue sous les draps blancs, dans la pénombre d’une chambre à coucher, sinon des niaiseries ?

    J’ai rêvé et craint ce moment. Je ne l’ai pourtant ni provoqué, ni fui. J’ai attendu, sans hâte, que la vie décide si nos regards devaient de nouveau se croiser. Et même si j’évitais d’y penser, je savais qu’en cet instant, ton regard me happerait comme la première fois et que nous serions connectés. Que plus rien alors n’existerait en dehors de nous deux. Nos retrouvailles étaient une évidence et leur attente un délice.

    Nous en savons assez l’un sur l’autre pour laisser à présent nos épidermes se parler. Je te souris « comme un ange », comme dirait cet ami qui me connaît si bien, et empoigne l’oreiller dans lequel je plonge mon visage, pour tenter de dissimuler le trouble que tu y as semé en quelques secondes. J’ai très chaud soudain, comme si une main farceuse avait glissé une bouillotte entre les draps frais. Le cœur battant à tout rompre, j’entends tes pas sur le parquet clair. Je ferme les yeux et mes mains cramponnent l’édredon ouaté. Le matelas s’enfonce à côté de moi. Je retiens mon souffle. Dans mon dos, je sens le feu de ton regard allumer sur ma peau des milliers de volcans. Tes yeux me découvrent, s’attardent sur l’arrondi d’une courbe, se fondent dans la chaleur d’un pli, caressent le velouté d’un grain de beauté.

    Savourons l’ultime répit.

    Bientôt nos peaux réunies, nos souffles emmêlés, nos fluides échangés déchireront le silence. Est-ce que tu savoures, toi aussi, cet instant magique où nous sommes tous deux comme suspendus à un fil invisible ? Cette poussière d’éternité délicieusement douloureuse, où nous ne savons encore rien l’un de l’autre, ni les cicatrices que la vie a semé sur nos peaux, ni l’odeur de nos corps, ni le goût de nos bouches ?

    Où ta main d’homme se posera-t-elle ? Caressera-t-elle d’abord, avec une infinie douceur, mes cheveux fins de petite fille ?  Suivra-t-elle la courbe chaude et charnue de mon épaule ? Ou frôlera-t-elle chastement le drap recouvrant ma hanche ? A moins que ce ne soit ta bouche qui, en tandem avec ton nez si fin, explore mon corps débarrassé de l’artifice des tissus et parfums ? Sera-t-elle alors caressante ou autoritaire ? Sauras-tu écouter les signes ? 

    J’attends avec appréhension, le ventre tendu, ta chaleur libératrice qui fera fondre mes derniers doutes. L’air est électrisé, chargé de promesses mille fois rêvées et inassouvies. Tu ne bouges pas. Je ne t’entends même pas respirer. Et soudain je tressaille, quand ton souffle chaud s’engouffre dans les volutes de mon oreille et murmure contre mes cheveux emmêlés : « Tu m’as manqué ».

     

     
  • Mon sportif du dimanche

    Reçu samedi matin ce sms d'un homme pour lequel j'ai énormément de tendresse :

    « Bonjour,

    Suite à ton billet sur le jogging, je me suis remis au sport après 15 ans d’abstinence. Les sourcils au vent, je m’élance, objectif 5 kms. Résultat : le premier jour, je me fais un claquage. Suis pas prêt de me remettre au sport, lol ! »

    J’explose de rire et tape, incrédule :

    « C’est une blague ?? »

    Réponse immédiate :

    « Nan c’est pas une blague ! J’ai super mal et je marche aussi vite qu’un petit vieux. Lol. » 

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    Toi qui m’a envoyé ce SMS, sache que je me marre depuis samedi à chaque fois que je t’imagine. Tu me manques et s’il le faut, je te porterai jusqu’à notre pub préféré. Reviens vite ! Et la prochaine fois, au lieu de faire le kéké, viens courir avec moi !

     

  • Eloge de la paresse


    La lumière du jour, le souffle léger du vent contre la moustiquaire et le chant des oiseaux me réveillent. La maison est silencieuse. Sur un plateau, quelques tartines, un mug de café fort, je file à l'arrière de la longue maison, finir ma nuit près de la piscine.

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    Chaque matin, le même délicieux rituel et la caresse, chaude comme celle d'un amant, du soleil sur ma peau nue qui brunit chaque jour un peu plus. Le clapotis de l'eau berce mes rêves de mains d'homme. Je ne sais plus si les frissons qui parcourent mon épiderme sont provoqués par le vent timide ou le souffle brûlant d'une bouche impérieuse. J'ouvre les yeux. Symphonie de vert, celui de palmiers majestueux, bleu de la piscine et blanc des dalles brûlantes. Sur le dos, les bras relevés, je sens la brise délicieuse caresser doucement l'intérieur de mes cuisses, mes aisselles musquées et chaque parcelle de ma peau offerte. Sur mon corps alangui, terrassé par la chaleur, les fleurs rouges déploient leurs fins pétales et exhalent, impudiques, leurs arômes les plus intimes.

    Mon pied bruni s'est posé sur la dalle rugueuse. Penchée en avant, les orteils aggripés au rebord, je savoure l'instant ou mon corps brûlant pénètrera les reflets turquoise de l'onde fraîche. D'abord la pulpe des doigts, les bras puis la tête, la pointe des seins, tout le corps et enfin mes orteils laqués. Quelques brassées vigoureuses dans les profondeurs et puis, cet immense et bruyant souffle de vie, aspirer une goulée d'air et jaillir de l'eau. Nager sur le dos, le ventre, longer le fond du bassin, et plonger une fois, dix fois, et éclater de rire comme une enfant. Je suis une sauvageonne qui a retrouvé son père et sa mère, les éléments qui l'ont vue naître et ont accompagné ses premiers pas, sur une île du Pacifique. L'eau, le soleil. Je suis échouée sur une île de sensualité. Je revis sous leurs caresses, mon corps sort de sa léthargie et caresse à son tour l'eau, le vent, la terre, les fleurs. Mon nez s'emplit de l'odeur du sel, du sucre des frangipaniers, de la délicatesse du jasmin, de l'odeur sauvage de l'herbe. Mes mains errent sur les douceurs de ma peau dorée, palpent ses contours moelleux. Mes doigts savourent la tension d'un muscle, suivent le creux de la clavicule, s'immiscent dans la chaleur du nombril. Silence. Plaisir. Soupirs.

    Aux heures les plus chaudes, je me réfugie dans l'ombre ou je m'endors, abandonnée à la caresse du vent. Seul le soleil me dit le temps qui passe. Je ne sais plus quel jour, quelle heure. On ne m'attend nulle part et je n'attend personne.

    Cet après-midi, ce soir, cette nuit, sous la lune pleine, dans la lueur turquoise de la piscine et des lumières vertes du jardin, dans le silence juste troublé par la clameur des grillons, je plongerai encore et encore ...

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  • En la bodega Guerola

    Il est plus de 15h quand je franchis le seuil de la bodega Guerola. A l'exception d'un couple installé à une table près de la porte, les convives sont massés au fond du restaurant. Les ventilateurs rafraîchissent la lourde chaleur de cet après-midi andalou. Je grimpe sur un tabouret, comme nous l'avions fait quelques jours plut tôt, en compagnie de Pepito et sa copine. Derrière le comptoir, un type d'une bonne cinquantaine d'années m'observe, un sourire en coin derrière ses lunettes. Sous mes yeux, derrière des vitrines, poissons et coquillages exhibent leur fraîcheur. Pour un peu, on se croirait chez Toritcho ... pourtant, le décor est bien différent.

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    Au dépouillement immaculé de Toritcho, la bodega Guerola oppose un chaleureux fatras de poutres et ornements. A droite, derrière la porte d'entrée, une peinture représente un torero. Sur une table, des bouteilles de vin sont exposées. Sur la gauche, le long comptoir de bois foncé s'étire jusqu'au fond de la salle. Les murs sont couverts de cadres, photos et affiches.

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    Un serveur m'invite à m'assoir à une table ou je serai plus à l'aise pour manger. J'acquiese et le suis, avant de me raviser et de retourner m'installer au comptoir. C'est que je vais m'emmerder moi, toute seule à une table ! Je préfère de beaucoup être au coeur de l'action, observer, m'étonner, poser des questions et sans doute, intriguer assez le personnel pour qu'ils entreprennent de me parler. Voyager seule a cet énorme avantage qu'il facilite les rencontres. En couple, rare sont ceux qui osent troubler le tête à tête et et entre amis, on se suffit souvent à soi-même.

    Me voilà donc déménageant pain, assiette, serviette et verre en bredouillant au serveur, vaguement gênée, que vraiment, je préfère manger au comptoir. Il propose alors de me placer près de la caisse, pour que j'ai plus de place. Le plus âgé me charrie en me disant que je vais faire le tour du resto avant même d'avoir commencé à manger. Je commande des calamares fritos ainsi que des coquinas, ces fameuses tellines que je n'ai plus eu l'occasion de déguster depuis mon voyage en Avignon, il y a déjà 2 ans. En attendant mes plats, je demande au serveur à lunettes le nom de ces coquillages assoiffés qui promenaient, l'autre soir, des langues démesurées d'un beau rouge corail. Conchas finas, répond-il.

    Un autre serveur, arborant de belles moustaches poiver et sel, pose bientôt devant moi deux belles assiettes de petits calamars frits et de tellines arrosées d'huile d'olive, citron et persil.

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    Tandis que je suçote mes tellines d'un air gourmand, il me demande d'ou je suis et ma réponse le surprend, visiblement. Je demande si je peux prendre des photos du restaurant, il m'entraîne et désigne ici des affiches de ferias de toros, là des photographies en noir et blanc de l'ancien Torremolinos.

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    "46 ans que la bodega est ouvert, tu n'étais pas née". J'acquiese, même si le monsieur doit me croire beaucoup plus jeune que je ne le suis.

    "Je suis venue avec des amis, il y a 2 jours". "Oui, oui, je sais, je t'ai reconnue", dit-il. Je lui demande s'il est le patron, il dément et pointe du doigt le monsieur à lunettes. Lui s'appelle Pepe. Le patron se présente, il s'appelle Clemente. Je le complimente sur sa bodega et lui dis que j'ai un blog et que je vais faire un billet dessus. J'ai fini mon repas, succulent, et Pepe me débarrasse avant de poser bruyamment 3 verres sur le comptoir, de les remplir et de m'en tendre un avant de porter les deux autres à une table. Quand il revient, je demande si c'est de la sangria, il secoue la tête et me fait signe d'approcher et de grimper sur un des tabourets tandis qu'il soulève un couvercle contenant un liquide ambré ou je distingue des rondelles d'orange et de la canelle.

    Lorsque la bodega ferme ses portes, je retrouve la chaleur de la rue et les boutiques bas de gamme de la calle San Miguel. Je piquerais bien ma petite sieste quotidienne, tiens ...

    Bodega Guerola

    Las Mercedes n° 2 - Torremolinos

    Telf. 952 38 10 57