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  • Jour 10 : visite du musée du village

    Aujourd'hui, Dana propose de nous faire visiter le Muzeul Satului (musée du village) qui était fermé lors de mon dernier séjour. C'est un ensemble de maison anciennes ramenées de différents endroits du département de Vâlcea.

    Celui-ci se trouve dans la commune de Bujoreni.

    A l'entrée, devant un portail en bois sculpté similaire à celui qui orne la maison natale de Brâncusi, un jeune homme nous attend; c'est notre guide, Sabin, et il parle parfaitement français.

    Sabin nous apprend que toutes les maisons qui se trouvent sur le terrain que nous visitons ont été démontées, amenées jusque là et entièrement remontées sur place, à l'identique. Seule la tour de guet est à sa place d'origine. Ce type de musée aurait été créé au départ "par orgueil", pour copier des initiatives similiares prises par les Soviétiques et surtout tenter de faire mieux. Aujourd'hui, ces musées qui sont à peu près au nombre de 10, qu'ils soient départementaux ou nationaux, ont vocation à préserver le patrimoine roumain et sont utilisés à des fins pédagogiques.

    Il pleut, le sol est boueux et Sabin nous prévient qu'à son grand regret, nous ne pourrons pénétrer que dans l'école mais pas dans les maisons.

    Nous commençons donc la visite par l'école où dans une grande salle se trouvent des pupitres de bois. Contre un mur, Sabin fait jouer un tableau noir coulissant. A l'autre bout de la pièce, des tuniques traditionnelles sont pendues à un porte-manteaux.

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    Nous ressortons et marchons dans une allée. Sabin explique que le parc a été organisé comme une carte du département. Chaque maison a été placée selon le point cardinal de son origine. On a même reconstruit les maisons des régions montagneuses du Nord à flanc de colline. Le parc contient deux moulins à eau. Nous découvrons un système de poulie permettant de puiser l'eau dans un puits.

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    Plus loin, nous pouvons découvrir, du pas de la porte, un foyer ouvert à l'intérieur d'une maison roumaine traditionnelle. Devant une maison, des totems surmontés de visages humains. Sabin explique que cela est une fantaisie d'un artiste et n'a rien d'une tradition roumaine.

    La pluie crépite sur nos parapluies et je n'ai plus de doute quand à la non-étanchéité de mes chaussures. La balade est très agréable dans la végétation printanière et les pépiements joyeux des oiseaux.

     

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  • Jour 9 : Le dernier palais du couple Ceauşescu

    Aujourd'hui nous conduisons jusqu'à la ville de Băile Olăneşti, une station thermale où nombre de curistes viennent soigner leurs pathologies et se promènent dans les rues de la ville, bidon en plastique à la main.

    Le principal but de notre virée, cependant, n'est pas tant les vertus thermales de Băile Olăneşti que la magnifique propriété qui se dresse au milieu de la forêt, au-dessus du sanatorium.

    Là se trouve, en effet, la dernière propriété que s'est offerte le couple Ceauşescu. Dana nous apprend qu'en parfait mégalo, Ceauşescu s'est fait construire des dizaines de propriétés à travers le pays, dans lesquelles il ne séjournait jamais. Et de fait, nous jouissons ce matin d'un privilège qu'il n'aura pas connu; le palais de Băile Olăneşti devait être son cadeau de Noël  1989, offert par Elena, dont ni l'un ni l'autre ne purent profiter puisqu'ils furent justement fusillés le jour de Noël.

    Nous garons la voiture sur le parking juste avant le portail de bois et faisons quelques pas jusqu'à une guérite où un gardien nous apprend que l'accès au palais est interdit. Nous nous résignons à rebrousser chemin quand Dana, faisant jouer ses relations, nous obtient l'entrée du parc et même la visite guidée du palais. Sur le perron, une jeune femme souriante nous accueille et nous fait pénétrer dans l'entrée principale. Boug' et moi sommes très excitées de visiter un tel endroit mais aussi très frustrées car les photos sont interdites.

    Chaque pièce est habillée d'essences de bois différentes que l'on retrouve sur les boiseries et les parquets marquetés. Des tapis entièrement tissés à la main, dont le motif reprend à l'identique les moulures du plafond, auxquels sont suspendus d'énormes lustres de cristal amenés de Bucarest, recouvrent chaque sol. Le hall d'entrée, relativement sobre en comparaison des autres pièces, est ainsi orné d'un immense tapis de 46 mètres carrés, entièrement tissé à la main.

    Notre guide nous entraîne au sous-sol et nous invite à admirer la pièce entièrement recouverte de mosaïque et abritant une piscine chauffée à 37°C, tout comme le carrelage qui l'entoure. Une rampe en cuivre descend dans le bassin. Dans une salle contiguë, un sauna et un bain à remous sur un sol en céramique blanche et bleue, avec dressing dans lequel est installé un chauffe-peignoirs. Nous pouvons constater que la légende qui prétendait que toute la robinetterie des demeures  de Ceauşescu étaient en or massif est totalement usurpée. 

    Quelques mètres plus loin, après avoir traversé la salle de billard, nous entrons dans la salle de cinéma. Une pièce toute tendue de velours vert et drapée de tentures magnifiques, brodées par les religieuses du monastère de Tismana, que nous avons visité la veille. Les murs sont recouverts de boiseries nobles comme dans chaque pièce du palais.

    Au pied de l'escalier de chêne massif aux rampes en acajou se trouve une fontaine en porcelaine blanche éclairée par un jeu de lumières sur une mosaïque en verre de Murano, oeuvre d'un artiste roumain.

    L'escalier est éclairé de vitraux colorés sur 3 étages et réchauffés de radiateurs enfermés dans des coffrages en bois précieux. Nous visitons d'abord le premier étage où se trouvent les cabinets 1 et 2, respectivement celui de Nicolae et Elena Ceauşescu. Celui de l'ex dictateur, assez sobre, contient un pupitre destiné aux discours qu'il n'a plus eu l'occasion de tenir. Les fauteuils sont recouverts de toile beige et une magnifique cheminée en marbre de Carrare trône. Le cabinet de Madame est entièrement décoré de bois de cerisier et agrémenté d'un tableau de Corneliu Baba. Chaque pièce est décorée d'un tableau unique.

    De l'autre côté du vestibule se trouve le salon puis la salle à manger, aux boiseries en racine de rosier et innombrables lustres de cristal, donnant sur une terrasse en marbre.

    Notre guide nous invite à découvrir, à présent, les 3 appartements de l'étage supérieur.  Le palier du dernier étage de cette demeure est entièrement décoré d'arcades en bois reprenant un style typiquement roumain instauré par le prince Brancoveanu et que l'on retrouve dans les monastères et les anciennes maisons roumaines.

    Tout d'abord, la chambre d'hôtes : un lit imense posé dans une alcôve à baldaquins. De chaque côté, des niches donnent à admirer de magnifiques assiettes délicatement peintes. 

    La pièce suivante est la salle de bains. La niche au-dessus de la baignoire est elle aussi recouverte d'une sublime mosaïque représentant deux nymphes. Devant l'étonnement de Boug' face à la très petite taille de la baignoire, comparé aux surfaces démesurées que nous parcourons, notre guide explique que le couple Ceauşescu craignait l'eau, ce qui explique également le peu de profondeur de la piscine qui n'excède pas 1m40.

    Nous voici à présent dans l'appartement de l'ex-dictateur, beaucoup moins impressionnante, finalement, que la chambre d'hôtes. Toujours les mêmes teintes beiges sur les lits et les tentures, le tapis est coloré de rose saumon et le dressing modeste. Là encore, la mosaïque de la salle de bains, dont les jaunes dorés sont obtenus par l'utilisation de feuilles d'or dans la fabrication du verre, est de toute beauté. Je demande à Dana d'expliquer à notre guide que nous avons un ami mosaïste à Paris qui serait ravi de voir de tels ouvrages.

    Nous terminons la visite par l'appartement d'Elena Ceauşescu. La première pièce abrite une méridienne destiné aux deux chiens du couple,Corbu et Sharona. Dans la chambre d'Elena, le bois de cerisier qui orne les lits, valets, bureaux et chevets est entièrement marqueté du même motif en damiers.  Le plafond a occupé pendant une semaine 7 personnes, à raison de douze heures par jour, pour réaliser un mètre carré de ce gypse sculpté. Elena refusa d'ailleurs leur travail à deux reprises avant d'accepter le troisième modèle, qu'elle voulait parfaitement conforme au motif des coffrages de bois.

    La propriété et les jardins alentours sont parfaitement entretenus car s'il n'est pas ouvert au public, le dernier palais du couple Ceauşescu est régulièrement utilisé pour des réunions de membres du gouvernement.

    En quittant cet endroit si paisible au milieu de la forêt, nous ne pouvons nous empêcher de nous réjouir que celui qui fit couler tant de sang sur le sol roumain n'ait jamais eu l'usufruit de cette propriété luxueuse.

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  • Jour 8 : Rendez-vous avec Petre à Târgu Jiu

    100_4044.JPGAujourd'hui, j'ai rendez-vous avec un de mes collègues de travail, roumain, le hasard ayant voulu qu'il séjourne en même temps que nous en Roumanie et à une centaine de kilomètres de Râmnicu Vâlcea. Lorsque j'avais annoncé à Petre que je retournais en Roumanie en avril, il s'était écrié « On doit se rencontrer là-bas ! ».

    Rendez-vous est pris dimanche pour midi trente dans sa ville, Târgu Jiu. Celle-ci, nichée au bord du Jiu qui lui donne son nom, abrite trois œuvres érigées à ciel ouvert et offertes à la ville par Constantin Brâncuşi, célèbre sculpteur roumain et élève de Rodin qu'il aurait quitté en déclarant « Il ne pousse rien à l'ombre des grands arbres ».

    Après un petit déjeuner ponctué des chants s'élevant de l'église qui se trouve de l'autre côté de l'avenue, nous prenons la route pour Targu Jiu sous un soleil magnifique (23°C au thermomètre). En chemin, nous visitons rapidement le monastère de Govora, un des préférés de Dana.

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    A Târgu Jiu, Petre nous attend au bord de la route, affublé de lunettes de soleil qui protègent ses yeux fatigués d'une nuit passée à faire la fête. Je saute de joie en l'apercevant et lorsque sa femme Daniela, que je ne connais pas, descend de voiture, nous achevons les présentations.

    Petre propose que nous découvrions avec eux les œuvres de Brâncuşi qui s'étalent à travers la ville sur un axe ouest-est commençant sur les rives du Jiu, traversant le parc municipal, continuant sur l'Avenue des Héros pour se terminer dans le parc entourant la Colonne sans fin. Nous commençons la visite par ce monument (en vignette) de près de 30 mètres de haut que les chars allemands et russes auraient tenté, en vain, de détruire pendant la seconde guerre mondiale.

    Nous rejoignons ensuite les rives du Jiu, traversé par un pont métallique « construit par les Français», où trône un ensemble de pierre, La Table du Silence, puis le parc municipal où nous suivons l'Allée des Chaises qui mène à la Porte du Baiser.

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    Petre prend presque plus de photos que nous, il s'en explique en faisant remarquer qu'il est devenu un touriste dans son propre pays. J'ai connu cette expérience aussi et nous convenons qu'on n'aime jamais mieux son pays que quand on en est éloigné.

    Le parc, très fréquenté en ce dimanche, est agréable et parfaitement entretenu. La ville de Târgu Jiu toute entière est d'ailleurs d'une propreté exemplaire grâce à la vigilance du maire. Daniela nous apprend que son vrai prénom est  Luminişa (un très joli prénom à prononcer Louminitsa et qui signifie «petite lumière») mais qu'elle a dû en changer parce que «c'était trop difficile pour les Français».  Elle nous promène dans le centre-ville, très plaisant, pendant que Petre s'absente pour aller chercher sa belle-mère qui veut poursuivre la visite avec nous. Comme dans la plupart des villes roumaines, les maisons anciennes ont été détruites et remplacées par des barres d'immeubles. D'après Dana, on laisserait volontairement les immeubles se dégrader pour les racheter à bas prix.

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    Nous retrouvons Petre sur le parking. De la voiture sort une femme plantureuse aux cheveux rouges et au maquillage improbable. C'est Elisabeta, la maman de  Luminişa, accompagnée de sa fille cadette. Après nous avoir embrassées comme du bon pain, elle me tend une bouteille de Coca-Cola de 2 litres, remplie d'un liquide jaunâtre. « C'est de la ţuika faite maison, pour toi»  dit Petre, hilare.  Nous éclatons tous de rire et Petre traduit ma réponse «Sophie ne boit jamais de Coca-Cola mais celui-là, elle va en boire !».

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    Il est près de 14 heures et Petre nous invite à déjeuner dans un restaurant traditionnel, le « Hanul Domnesc ». L'endroit est meublé de ce bois si chaleureux qu'on retrouve dans de nombreuses auberges roumaines et les pièces du restaurant décorées de costumes traditionnels, instruments de musiques, poteries et artisanat local. Des photos attestent de la splendeur du Târgu Jiu d'antan, avant les destructions. 

    Nous nous installons tous les 7 dans un patio fleuri. Comme souvent, la carte retrace l'histoire de l'auberge et regorge de légendes et anecdotes diverses sur les plats. Sur les conseils de Petre, je choisis un ragoût de bœuf servi dans un pot en céramique, Boug', un chou farci et Dana un plat, très goûteux, qui ressemble étrangement au rougail saucisses réunionnais. Le tout accompagné de l'incontournable mamaliga (polenta roumaine).

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    Le repas est très convivial et je m'amuse d'observer le sourire radieux de ma Boug' qui se fait tripoter la nuque et caresser les cheveux par Elisabeta qui la couvre de câlins. Lorsque nous ressortons du restaurant, Petre pointe du doigt des X5 BMW « Regarde, Sophie, ces pauvres Roumains : ici, une voiture à 70.000 €, là aussi. Il faut dire ça en France parce que tout le monde pense que nous n'avons rien à bouffer ici ». Pour preuve que les Roumains mangent, et bien, Luminişa se désole d'avoir pris 3 kilos en une semaine.  

    J'avais déjà senti à quel point les Roumains sont sensibles à l'image qu'on peut avoir de leur pays. Force est de reconnaître qu'en France, en tout cas, ce sont surtout des préjugés négatifs qui nous viennent en tête lorsqu'on évoque les Roumains et ceux qui vivent en France souffrent d'être assimilés aux gitans. Petre est fier comme Artaban de notre enthousiasme et Luminişa ne cesse de demander si nous aimons son pays. Je la rassure « Tu crois que je serais venue 2 fois en 6 mois si je n'avais pas aimé la Roumanie ? ».

    Après ce festin, nous reprenons les voitures et suivons Petre jusqu'au monastère de Tismana, un des plus anciens de Roumanie, construit au 14èmesiècle. Nous entrons dans le monastère au moment où une messe s'y tient. L'église est bondée car les Roumains sont très croyants. Les élises orthodoxes sont très sombres et par conséquent très intimistes et les fidèles sont debout ou à genoux. De rares chaises sont réservées aux personnes ne pouvant pas rester  debout.  Je me glisse dans un coin, juste à côté d'une vieille religieuse enserrée dans sa longue tenue noire, coiffée d'une sorte de calot noir tenue par un foulard épais, noir lui aussi. Ses joues flasques et rebondies débordent du tissu et se découpent dans l'obscurité de la pièce. A tour de rôle, dans chaque coin de la pièce, des religieuses entonnent des chants liturgiques particulièrement reposants. Nous visitons le petit jardin fleuri et le cimetière où reposent les religieuses.

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    Après m'avoir invité à me désaltérer à une fontaine d'où s'écoule l'eau de la montagne, Petre nous emmène à sa source, près d'une grotte. Elisabeta et Boug' sont toujours collées l'une à l'autre, elles se sont bien trouvées visiblement, ces deux-là, et la barrière de la langue n'en est pas une.  En remontant en voiture avec la carte postale que lui a offert Elisabeta, Boug' écrase une larme. Pour détendre l'atmosphère, je la charrie : « Hey, y'a pas de raison que je sois la seule à chialer ! »

    La dernière étape de notre promenade ensemble se trouve dans le village d'Hobita, à 25 kms au nord de Târgu Jiu.  C'est là que, derrière un portail en bois sculpté de toute beauté, nous découvrons la maison natale du sculpteur Brâncuşi. Au fond d'un jardin verdoyant, une vieille maison roumaine en bois est posée sur un socle de pierres blanches. La propriété a été conservée en l'état et se promener dans le jardin entre le puits et les cabanes attenantes est un voyage dans le temps très reposant.

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    Il est l'heure de se séparer et Elisabeta nous rebige comme du bon pain en nous demandant de revenir en Roumanie, chez elle. Petre et moi nous donnons rendez-vous à Paris et nous gratifie d'une invitation à venir dîner chez eux. Argument imparable, Luminişa sait faire les papanaşi et nous promet même la recette.

    Sur le chemin du retour, nous stoppons une dernière fois pour acheter quelques céramiques au bord de la route. Le repas du soir est léger, bouillon et légumes, ça nous repose l'estomac . Nous nous couchons la tête pleine des sourires irrésistibles d'Elisabeta et de cette nouvelle journée riche en rencontres humaines inoubliables.

  • Jour 7 : Râmnicu Vâlcea

    Premier petit-déjeuner sur la terre roumaine. Dana qui a maintenant révisé ce qu'on lui a enseigné des habitudes françaises - à savoir que tous les Français mangent des viennoiseries le matin - pose devant nous un plat de concombres, radis et tomates, du jambon fumé, fromage de brebis et des olives noires. Au programme ce matin : la visite de la mine de sel dont les photos entr'aperçues sur son blog m'avaient intriguée. A la sortie de la ville, Boug' prend la direction « Salina de Ocnele Mari ».

    Après nous être acquittées d'un droit d'entrée de 10 leu (2,5€), nous embarquons dans un bus qui s'engouffre en cahotant dans un tunnel sombre. Nous sommes samedi et le bus est rempli de familles qui emmènent leurs enfants passer la journée à la mine. A l'arrivée, l'endroit est assez étonnant. Outre une exposition de photos, on y trouve quantité de jeux et installations : une chapelle orthodoxe, un terrain de foot, des billards, des tables de ping-pong, un circuit de voitures dans lequel les enfants s'éclatent et même une salle de banquet où l'on peut organiser des réceptions. L'air de la mine est très bénéfique aux asthmatiques.

    Après cette visite, nous retournons vers le centre-ville où Dana nous emmène à la Casa Vâlceana, une maison réquisitionnée transformée en restaurant. Il fait un soleil magnifique et nous nous installons en terrasse, délaissant le salon intimiste où nous avions déjeuné ensemble en décembre dernier. La charmante serveuse, Tatiana, me reconnaît visiblement puisqu'elle nous salue d'un tonitruant bonjour.  La carte en papier journal est exhaustive : on y trouve les spécialtés de la maison, des plateaux de 3 kgs de grillades diverses judicieusement  baptisés « Pantagruel » et « Gargantua », des salades, soupes et plats de porc, volailles, poissons et mouton. Cette fois, je choisis une ciorba de burta tandis que Boug' qui en a rêvé devant mes clichés, déguste une ciorba de fasole in paîne.

    Nous nous promenons ensuite dans la très plaisante ville de Râmnicu Vâlcea qui signifie « Vallée aux loups ». Elle est bien plus belle que dans mon souvenir, il faut dire que je l'ai découverte en hiver et sous la neige. A cette période de l'année, les magnolias sont en fleurs. Nous visitons le lycée de Dana et grimpons à travers la forêt pour admirer le panorama sur la ville et l'Olt qui la traverse.

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    Après une petite pause, nous entrons à l'auberge des Haidouks, fort animée en ce samedi soir, pour l'incontournable papanasi. La salle est comble, remplie de jeunes et couples. Des musiciens jouent de la musique traditionnelle, le chanteur entonne des chansons mélancoliques et romantiques, aux accents orientaux et des femmes dansent en ronde dans un coin de la salle. Cristi, le serveur préféré de Dana (et on comprend pourquoi) nous installe en terrasse (qui est non-fumeurs, ça m'arrange). Et oui, car ici comme en Hongrie, on peut encore fumer dans les lieux publics. Boug' et moi calons devant nos papanasi mais pas assez pour ne pas goûter au dessert de Dana, des crêpes gratinées fourrées au fromage blanc et raisins secs.

    Après ce festin, nous ne pouvons qu'aller nous coucher.

  • Jour 6 : en route pour Râmnicu Vâlcea !

    100_3957.JPGA 11h, nous voici enfin sur la M5 qui nous emmène jusqu'à Szeged. Le temps est radieux et la route agréable. A l'approche de la frontière, les villages semblent plus typiques et les maisons plus belles, bordées de parterres de fleurs colorées et de dizaines de tulipes. Soudain, un énorme volatile passe au-dessus de notre voiture et se pose au bord d'un nid immense, posé sur la cheminée d'une maison. Une cigogne ! A partir de cet instant, ces nids immenses se succèdent tout le long de la route et jusqu'en Roumanie. Le guide que j'ai emporté m'apprend que la Roumanie est un paradis ornithologique et abrite la plus grande concentration au monde d'oiseaux migrateurs qui hibernent dans le delta du Danube.

    A l'approche de la frontière, nous sommes ralenties par un convoi ininterrompu de poids-lourds. C'est impressionnant, des dizaines de camions sont stoppés sur la bande d'arrêt d'urgence. Peu avant 14h, nous nous plions de bonne grâce au seul contrôle de papiers de notre périple et passons la frontière roumaine à Nadlag, ajoutant une vignette sur le pare-brise de Boug' (5€ pour 7 jours). Nous suivons toujours la route E68 mais progressons très lentement en raison de la présence de nombreux poids-lourds et d'une seule file de circulation. Nous comprenons très vite pourquoi mon guide déconseille de conduire en Roumanie ; en effet, les Roumains n'en ont absolument rien à cirer des panneaux d'interdiction (de doubler, par exemple) et des limitations de vitesse. Ils doublent dès que possible et ils vaut mieux laisser une bonne distance entre vous et votre prédécesseur pour permettre à celui qui vous doublerait de se rabattre juste sous votre nez, évitant de justesse un tête à tête avec celui qui arrive en face. Les routes sont dans un état déplorable et nous devons régulièrement zigzaguer pour éviter de laisser un pneu dans les nombreux nids de poule. Nous aurons un peu plus tard l'explication de l'état assez incroyable des routes roumaines ; c'est Luminita (se référer au billet suivant) qui nous expliquera que les routes sont endommagées par les importants écarts de température que subit le pays, descendant parfois à -20 en hiver pour remonter jusqu'à 44 degrés en été.  La réfection du réseau routier est une des priorités du gouvernement mais cela coûte des sommes colossales et les chantiers, en Roumanie, ne manquent pas.

    Parcourir les 400 kms de la frontière à Râmnicu Vâlcea nous prendra près de 8 heures, parmi lesquelles 45 minutes totalement à l'arrêt pour le passage d'un train. Cependant, ce long trajet ne fut pas particulièrement éprouvant, malgré l'état des routes et la conduite très latine des Roumains, en raison de la beauté des paysages que nous traversons. Des montagnes, des prairies très vertes, pas de champs de culture comme on peut en voir en France, une végétation luxuriante, des arbres fruitiers, des pommiers en fleurs. Les maisons sont particulièrement pimpantes et fleuries et des sacs de pommes de terre et d'oignons, à vendre, sont suspendus au bord de la route.

    A Sibiu, induite en erreur par un panneau, je tourne à droite et après quelques kilomètres, à la sortie d'un village, nous débouchons sur un chemin de terre. Je demande la direction de Râmnicu Vâlcea à de vieilles femmes hilares qui lèvent les bras avec de grands cris « No Râmnicu Vâlcea ! ». Je ne comprends pas grand-chose mais j'ai compris le principal : je ne suis pas dans la bonne direction. Nous rebroussons donc chemin vers Sibiu où nous avons du mal à retrouver la direction de Râmnicu Vâlcea et c'est un Allemand (décidément, ça me poursuit !) qui nous met sur la bonne direction. La nuit est tombée et je reprends le volant. Après Sibiu, nous attaquons les routes de montagne et le danger augmente car là encore, les Roumains doublent dès qu'ils ont 10 mètres devant eux. Nous appelons Dana qui nous recommande de faire attention. Tout se passe bien jusqu'à 10 kilomètres de l'arrivée où un Roumain, visiblement mécontent que je double, me bombarde d'appels de phare pour me faire dégager et entreprend de forcer le passage au moment où la voie redevient unique, manquant me foutre dans le fossé. Furieuse, je l'insulte copieusement et lui fout mes pleins phares dans la gueule, à mon tour.

    A 21h45, nous entrons dans la ville de Râmnicu Vâlcea. A la hauteur de l'hôpital, je reconnais la station-essence qui se trouve au pied de l'immeuble de Dana et m'engage sur le parking. Quelques minutes plus tard, Dana qui s'est faite très élégante pour nous accueillir nous embrasse et nous entraîne jusqu'à son appartement où après avoir trinqué à nos retrouvailles avec un verre de vin blanc roumain (Graca de Cotnari), nous dégustons ce qu'elle a préparé : soupe  aux quenelles de semoule, macédoine de légumes au poulet puis maquereau grillé sur lit de légumes croquants. Et en dessert, gâteau à la crème de griottes et des amandines (petits gâteaux au chocolat). Nous avons ensuite discuté jusqu'à 3 heures du matin et ri quand Dana a lu mes derniers billets en prime-time et quasi-instantané, avant de virer la grenouille borgne posée sur le lit confortable de Dana.

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