Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Gens (d'ici et d'ailleurs) - Page 6

  • Voyage dans le ventre de Paris

    je vous ai croisé,louchébem,restaurants,paolaHier, vers 15h30, j'ai retrouvé ma petite Colombienne, Paola, au pied de l'église Saint-Eustache, pour un déjeuner quelque peu tardif. Elle avait envie de viande, je l'ai donc emmenée au Louchébem, restaurant boucher des Halles depuis 1878. Ne commencez pas à saliver, le propos de ce billet n'est pas le contenu de mon assiette, même si je vous défie d'avoir encore de la place pour une deuxième assiette du rôtisseur (jambon rôti, cuisse de boeuf et gigot d'agneau, 22€90, à volonté) servi avec 3 sauces et une savoureuse purée maison, elle aussi à volonté. Bon, je vois déjà Phil faire la moue, ok une petite photo, mais elle n'est pas de moi :

    je vous ai croisé,louchébem,restaurants,paola

    Paola a vite calé et le serveur, habillé en garçon boucher, lui a gentiment emballé le reste de son assiette de viandes pour qu'elle puisse le savourer à la maison; attention assez rare à Paris pour être soulignée.

    La salle étant quasi-vide, j'ai discuté un peu avec le serveur, m'enquérant de l'activité du restaurant : le mois de mai est une catastrophe, m'a t-il dit. Un peu plus tard, j'explique à Paola la signification du mot louchébem, qui signifie "boucher" en argomuche, langage inventé par les bouchers du quartier, à l'époque où les Halles n'était pas un centre commercial mais véritablement des halles maraîchères, le fameux "ventre de Paris". Ces halles étaient fournies par les abattoirs de Paris, ceux de la Villette et aussi ceux de Vaugirard, une de mes balades préférées. Je pointe du doigt, par la fenêtre, la facade en boiseries du restaurant "Chez Denise" autre institution du quartier, et en profite pour glisser sur la magnifique et toute proche tour Saint-Jacques, dernier vestige de l'église Saint-Jacques de la Boucherie, où les découpeurs de viande venaient prier.

    M'aidant d'internet, je lui révèle aussi la présence d'un immense charnier humain, le cimetière des Innocents, à l'emplacement de la fontaine du même nom, dont les ossements furent déplacés dans les catacombes lorsque les fosses commencèrent à s'écrouler sous le poids des squelettes qu'elles contenaient. En y réfléchissant, c'est peut-être ce qui a coupé l'appétit de ma jolie Colombienne, qui en redemandait pourtant et m'écoutait en ouvrant de grands yeux. Je prends à partie le serveur, qui s'ennuyait ferme à quelques pas, pour qu'il complète mes propos. Il nous invite à regarder les nombreuses photos, de l'époque du "ventre de Paris" qui ornent les murs du restaurant, en bas, dans l'escalier et à l'étage.

    Après le dessert où Paola suit mes conseils et déguste un Paris-Brest, l'occasion pour elle autant que moi de découvrir (merci Internet), l'origine du nom de cette pâtisserie, tout en picorant les desserts de mon café gourmand (que chevere ! el arroz con leche de mi mama ! s'écrie-t-elle en dégustant une cuillerée de mon riz au lait à la cannelle), nous partons en exploration dans le restaurant.

    Un autre serveur, plus âgé que le précédent, nous rejoint et fournit les légendes des photos. Il montre celle d'un type rougeaud, coiffé de gigantesques oreilles de porc, verre à la main. "C'est ce qu'on appelait un fort des Halles, dit-il. Ce sont les types qui portait des quartiers de viande entiers sur leurs épaules, à l'époque. Ce monsieur est venu il y encore 5 ans, c'était un colosse, plus grand que moi. Ils portaient le chapeau qui est dans l'escalier." Accroché au mur, il y a un chapeau à larges bords ronds, une sorte de sombrero. Après recherches, il s'agit du coltin, un chapeau muni d'un disque de plomb. Un site rend un fort bel hommage aux forts des Halles, et en musique, ici. Je pique une photo :

    je vous ai croisé,louchébem,restaurants,paola

    Didier, puisque c'est son prénom, complète ma mémoire défaillante en donnant les dates de la destruction des Halles.

    "C'était l'équivalent des Halles de Rungis d'aujourd'hui, n'est ce pas ? demandai-je. On vendait tous les produits frais, ici, pas seulement la viande ?"
    Didier confirme et pointe le doigt : " Du côté de la bourse du Commerce, ancienne halle aux blés, c'était le marché aux volailles. Au pied de Saint-Eustache, le marché de la viande."

    Je l'interromps : "Vous avez connu les Halles de l'époque, on dirait ?"

    - Oui, j'étais tout gamin et j'accompagnais mon père qui venait au cul des camions aider au déchargement, pour gagner un peu d'argent avant de partir travailler. Moi je l'attendais dans la voiture mais je m'en souviens bien."

    Quelle chance de rencontrer quelqu'un qui qui n'est pas là par hasard mais véritable contributeur de la mémoire du quartier. Un griot des Halles !

    Paola est aussi ravie que moi de ce déjeuner très culturel. Didier nous entraîne jusqu'à l'écran LCD, à l'entrée du restaurant, qui diffuse des images de l'époque, qu'ils ont eu quelque mal à retrouver. On y voit une photo de la facade du restaurant, à l'époque, lorsque son entrée se trouvait dans l'angle.

    je vous ai croisé,louchébem,restaurants,paola

    " Vous trouverez toutes les infos sur le site internet du restaurant " précise Didier. Moi, je crois que je ne vais pas tarder à me programmer une balade-reportage dans ce quartier, un must pour la gourmande que je suis, non ?

    Si l'histoire du restaurant et du quartier vous intéresse, cliquez sur l'onglet Historique, . Pour des photos d'époque, c'est ici. Si vous êtes tombée amoureuse d'un boucher qui le parle ou que vous voulez juste faire le malin au prochain dîner avec vos potes en parlant l'argomuche, cliquez . Et surtout, ne manquez pas d'aller vous taper un morceau de la savoureuse barbaque du Louchébem, où les serveurs sont si sympas (parce que ce sont de vrais Parisiens, eux ! )

    Le Louchébem au 31 rue Berger, Paris 1er (Tel 01.42.33.12.99)

  • Les fous du roi

    index.jpgIl n'y a pas de crise du leadership. Il n'y a que des leaders en crise.

    Pourquoi ai-je sorti de mes étagères ce livre prêté il y a plusieurs années par mon ami JM et que je n'avais jamais lu ? Sans doute parce qu'aujourd'hui, après 4 années dans une PME détenue par un financier, évidemment principal actionnaire, je suis à même de comprendre le sens du discours de son auteur, Rémi Tremblay, alors PDG de la filiale canadienne d'Adecco.

    4ème de couverture :

    Les patrons sont les nouveaux fous du roi. Leur souverain ? L'actionnaire, cet être inconscient et cupide qui exige que ses actions montent en flèche. Pour le satisfaire, les fous licencient, fusionnent, rationalisent, centralisent et décentralisent (...)

    Dans les fous du roi, Rémi Tremblay lance un cri du coeur. Ses cibles : la tyrannie de l'actionnaire, le manque d'éthique, les patrons qui se servent au lieu de servir. Son rêve : éveiller les consciences, rétablir la confiance, rapprocher les leaders de leurs valeurs profondes.

    Réflexion sur le pouvoir, cet ouvrage troublant place le lecteur face à ses propres comportements. Après tout, nous sommes tous les fous d'un roi. Que seriez-vous prêts à faire pour un bon mot de votre patron, de vos parents, de votre professeur ? Lire ce livre, c'est prendre un risque, celui d'affronter ses peurs pour tenter de s'en libérer.

    Imaginez le carnage quand votre patron est en plus actionnaire ... En écoutant mon nouveau PDG cette semaine, la raison évidente de la mort annoncée de mon ex-société (que je sens venir depuis janvier 2012 très exactement) m'est apparue comme une évidence : comment une société dont le coeur de métier est l'humain (gestion des RH) peut-elle être détenue par un financier dont la seule préoccupation est de faire de l'argent ? Comment ses salariés, majoritairement animés par le sens du service client, peuvent-ils s'épanouir et être heureux dans un tel climat, où leurs préoccupations sont à l'opposé de celles de leur PDG ?

    J'ai relévé, dans le livre de Rémi Tremblay, quelques passages qui ont fait cruellement écho :

    "C'est fou ce qu'on tolère. Les jeux de pouvoir, notamment. On commence par les tolérer, puis on finit par y participer. Parce qu'on veut se protéger. Chose certaine, l'effritement de la confiance s'opère graduellement, insensiblement. Je l'ai observé dans mon organisation. J'ai vu les employés se protéger toujours davantage les uns des autres. Pour moi, le plus bel exemple de méfiance, ce sont les copies conformes, que je déteste souverainement (...) Pourquoi me mêler à cela ? La réponse est simple : parce que celui qui envoie le courriel n'a pas confiance en celui à qui il l'adresse. ET parce qu'il veut lui faire peur en m'informant de leur échange."

    Dans mon ex-société, ma boss refusait que nous la mettions en copie de nos échanges avec d'autres services. Certains d'entre nous insistions, voulant l'obliger à jouer son rôle : être au courant de ce qu'on nous demandait de faire, à nous ses collaborateurs. Et surtout intervenir lorsque la teneur ou le ton des échanges était inappropriés et/ou irrespectueux. Ce n'était même pas une question de confiance; c'était, en ce qui me concerne, un refus de recevoir des ordres d'autres qu'elle, et surtout de cette façon-là. Quand j'étais manager, je n'ai jamais accepté que qui que ce soit d'autre que mes responsables donne des consignes à mes collaborateurs. Et de la même façon, je respecte ma hiérarchie et je ne double pas par la droite (référence au billet à venir).

    " A l'été 99, j'étais en détresse. Cette détresse n'a pas débuté du jour au lendemain. Elle s'est installée petit à petit. J'ai commencé par ressentir de moins en moins de plaisir. Un conquérant, d'ailleurs, ne connaît que le plaisir, jamais le bonheur. Le plaisir, c'est physique, c'est instinctif. Tromper sa femme procure du plaisir, pas du bonheur. Obtenir une promotion en écrabouillant un collègue procure du plaisir, pas du bonheur. Atteindre des objectifs financiers en licenciant des employés procure du plaisir, pas du bonheur."

    Je suis certaine que mes copains adultères ou repentis pourraient témoigner de la misère morale et affective dans laquelle ils se trouvent ou se sont trouvés. En écrabouillant un collègue ou en tentant de le faire, on n'est même pas garantis d'obtenir la promotion recherchée. En revanche, je sais ce qu'on y perd : le respect des autres, ceux qui n'ont pas de pouvoir mais des valeurs et de la lucidité. Quand aux licenciements pour obtenir des résultats financiers, mes ex-collègues sont hélas en plein dedans : 6 licenciements annoncés il y a 15 jours, dont 1 qui est un pur règlement de compte, et l'annonce récente d'une baisse des salaires décidée de façon unilatérale et à durée illimitée. Les salariés paient les erreurs de gestion et de stratégie de leur dirigeants. En revanche, la femme du PDG, elle, emploi fictif notoire et un des meilleurs salaires de la boîte, fait toujours partie des effectifs ... Et j'entend des gens essayer de me convaincre que c'est normal. On marche sur la tête.

    " Une amie m'a raconté que dans son entreprise, la DRH conseille aux gestionnaires de congédier un employé en cinq minutes, le vendredi à 17h. On appelle ça "terminer un employé". Quelle expression épouvantable !

    Pensez un peu à la douleur de ces personnes à qui on cache les véritables raisons de leur départ, ou encore à qui on ne dit rien. A qui on montre simplement la porte, par manque de courage."

    J'ai vécu ça, en live, dans le groupe de grande distribution dans lequel j'ai travailé pendant 6 ans. J'ai vu, outre des assistantes en larmes et des patrons qui se mettaient la loi Evin au cul et fumaient sous le nez de ces mêmes assistantes, parfois enceintes, des responsables de service hagards et incrédules, escortés par la sécurité jusqu'à leur voiture. L'un d'entre eux, avec lequel je m'étais liée d'amitié, a fini en dépression nerveuse après s'être fait chasser de cette façon et n'a plus répondu à mes mails.

    Pour aller plus loin :

    Des interviews de Rémi Tremblay dans les magazines Le Manager Urbain, En Quête

  • Kiwi(s) !

    Le samedi 4 mai, c'était ma dernière balade bénévole pour Parisien d'Un Jour. N'ayant pas réussi à honorer, en 2012, les 6 balades annuelles minimum demandées, j'ai préféré arrêter. Difficile de sacrifier une demi-journée de son précieux weekend quand, en déplacement chaque semaine ou presque, c'est le seul moment que l'on peut consacrer à ses amis. Et encore plus à l'arrivée des beaux jours, où mes envies de weekends au vert sont aussi fréquentes que les mails de PDJ.

    Et puis j'ai un autre projet de bénévolat dont j'espère vous parler bientôt, quand ma candidature sera acceptée. Un projet très enthousiasmant, en parfaite cohérence avec mes valeurs et mon parcours professionnel.

    N'empêche, être guide bénévole pour Parisien d'Un Jour a été une belle expérience. J'ai rejoint l'association en septembre 2011 pour d'une part, contribuer à donner une meilleure image des habitants de ma jungle urbaine et d'autre part, multiplier les occasions - trop rares - de converser en anglais. J'ose croire que j'ai rempli ma mission. De son côté, PDJ a exaucé mes voeux en ne m'envoyant que des visiteurs anglophones, à l'exception de Paola, ma petite Colombienne.

    Le 4 mai, donc, je suis passée chercher Angie et Stan, un couple de fermiers néo-zélandais, dans leur joli hôtel La Maison Favart (A), du côté de Richelieu-Drouot. Du coup, nous avons fait ma balade, qui devait partir de la place de la Concorde, à l'envers. J'ai fait un démarrage en beauté en partant dans la direction opposée de celle souhaitée, ce dont je me suis rendu compte en arrivant à l'angle des rues Lafayette et de Châteaudun. "Ce n'est pas grave, Sophie, a dit Angie, nous on est contents de visiter Paris".

    Du coup, comme on repassait du côté de Richelieu-Drouot et que je leur parlais des passages parisiens, nous avons fait un détour par le passage Jouffroy (B) et celui des Panoramas (C).

    De là, nous prenons la rue Vivienne et comme je ne suis pas encore dans un de "mes quartiers", je marque un rapide arrêt pour m'asssurer, plan à la main, que celle-ci débouche bien sur le Palais-Royal. Deux hommes s'arrêtent successivement pour proposer leur aide. "Arrêtez, je suis censée être guide touristique, dis-je en rigolant".

    Nous longeons la place de la Bourse (D), que Stan prend en photo pour un de ses fils qui travaille à la bourse d'Auckland. La rue Vivienne est quasi déserte par cette première belle journée ensoleillée qui a favorisé une fuite des Parisiens. Cette parenthèse silencieuse est bien agréable entre le vacarme du boulevard Montmartre que nous venons de quitter et celui de la rue de Rivoli qui nous attend.

    Mes fermiers néo-zélandais ont l'air plutôt sereins dans ma jungle urbaine, eux qui vivent en plein centre de l'île avec leurs moutons et pas grand-monde à la ronde. Angie a une maison d'hôtes et m'invite à y séjourner. "Si vous avez des moutons, vous faites des barbecues", demandai-je à Stan. "Oh oui !" Cet argument, couplé à l'alléchante description du pain maison d'Angie, visiblement fort apprécié de ses visiteurs, et une vieille envie de visiter la Nouvelle-Zélande me séduisent. En plus, Stan tond lui-même ses moutons et même s'il n'est pas galbé comme Luke O'Neill dans "Les oiseaux se cachent pour mourir ", ça doit valoir le spectacle.

    Nous voici dans la rue de Beaujolais, au charme rétro avec son escalier en pierre et nous entrons dans le jardin du Palais-Royal (E) où Parisiens et touristes se rafraîchissent au bord de fontaines. Le temps d'une pause photo sous les roses, je découvre qu'en Nouvelle-Zélande, on ne dit pas "Cheese" pour garantir un sourire photogénique mais "Kiwi". Je raconte à mes compagnons l'anecdote du petit canon du Palais-Royal et profite de ce détour pour entraîner Angie dans la boutique de Serge Lutens. Elle aimerait dénicher une tenue pour le mariage d'un de ses fils, je propose donc de terminer la promenade aux Grands Magasins du boulevard Haussmann, où elle devrait trouver son bonheur.

    Pour l'heure nous traversons le parterre de colonnes de Buren pour rejoindre la place Colette, jeter un oeil à la Comédie Française et rejoindre le Louvre et sa pyramide de verre, que Stan n'a jamais vue. Je laisse le choix à mes visiteurs de l'axe pour rejoindre la place de la Concorde, soit le jardin des Tuileries, soit la rue de Rivoli. Ils choisissent le jardin (G), que je n'ai pas traversé depuis une bonne dizaine d'années ! C'est l'occasion pour moi de découvrir que la superbe arche qui fait face au Louvre rend hommage à Napoléon.

    Nous voici place de la Concorde (H) où avant l'obélisque trônait une autre curiosité qui fit perdre la tête, au sens propre, à Marie-Antoinette, Danton, Charlotte Corday et plus de 1000 guillotinés en un an. J'aime bien amener les touristes sur cette place majestueuse qui a résonné, autrefois, des cris de l'hystérie collective. Mes Néo-Zélandais, comme beaucoup d'autres, pensaient que la guillotine se trouvait place de la Bastille; c'est qu'elle a pas mal voyagé, la Veuve ...

    De la place de la Concorde nous rejoignons la rue de Castiglione qui, comme nombre de rues alentour, célèbre une victoire napoléonienne et aussi, mais il faut avoir de bons yeux pour la débusquer, la mémoire de l'ambassade du Texas, dont la France fut le seul pays à reconnaître l'indépendance, pendant les 9 années où, libéré du Mexique, il n'était pas encore tombé aux mains des Américians.

    Nous débouchons place Vendôme dont la colonne de bronze, inspirée de celle de Trojan à Rome, fut érigée en fondant les canons pris aux Russes et Autrichiens. Pour l'anecdote, sous la seconde guerre mondiale, les nazis élurentt domicile ici, au Ritz, tandis qu'à leur nez et barbe, au n°15, s'installait le réseau de résistants Saint-Jacques, dirigé par Maurice Duclos.

    Angie et Stan ont soif et envie de m'offrir un verre, je les emmène donc place du Marché Saint Honoré (I), histoire de profiter d'une terrasse sans circulation automobile. Je bois du cidre tandis que Stan paie 7€ pour un verre de vin. Avoir soif coûte la peau du cul, place du marché Saint Honoré ... Je montre à mes compagnons le chemin parcouru, pour qu'Angie puisse en retrouver les étapes dans son guide touristique. Et je leur conseille vivement, le lendemain matin, de profiter de leurs dernières heures parisiennes pour se balader dans Montmartre plutôt que sur les Champs-Elysées.

    La balade touche à sa fin. Cette pause nous a un peu coupé les jambes et je propose de remonter jusqu'aux grands magasins en bus, que nous prenons avenue de l'Opéra (J).

    A 19 heures, j'abandonne Stan et Angie dans l'effervescence du Printemps Haussmann, les embrasse et leur fait promettre de me raconter la suite de leur séjour parisien. Nous avons passé 4 heures à marcher et parcouru pas loin de 5 kilomètres, je suis éreintée, retour maison pour un samedi soir sur mon canapé, avec un bon verre de rhum.

     
    Agrandir le plan

  • Un café au marché Notre-Dame de Poitiers

    Après avoir déposé le petit pétard atomique à l’école, je décide de profiter d’une accalmie pour me promener un peu dans le centre de Poitiers. Depuis mon arrivée, 2 jours plus tôt, il pleut sans discontinuer. Tata Sophie n'a pas beaucoup vu le soleil penant ces 15 jours de pré-transition professionnelle ... En revanche j'ai eu ma dose de câlins et de bisous, et j'ai été réveillée ce matin par un ange à la chevelure mousseuse, penché sur mon sommeil.

    Je remonte l’étroite Grand Rue jusqu’à la Grange à Pain, place Charles de Gaulle, où j’achète 2 broyés poitevins (frère jumeau de la galette charentaise) et un étui de macarons (4€50 les 10, on est loin des tarifs parisiens !). Je m’apprête à redescendre vers la cathédrale lorsque je suis attirée par l’effervescence autour de l’église. Mais oui, c’est vrai, le marché Notre-Dame a lieu tous les jours ! Voilà une bonne occasion de tâter le pouls de la ville et de me rincer l’œil avant de reprendre le train.

    La halle est assez déserte en ce vendredi. Au fond, poissonniers et bouchers exhibent la fraîcheur de leurs produits. Les paupiettes de veau aux cèpes et griottes de la boucherie Point me font de l’œil. Ce n’est pas que je sois friande des paupiettes mais la farce de celles-ci m’intrigue. J’en prends 4, puis rassurée par le boucher qui m’assure que tout est fait maison (sauf le pâté de Pâques, que je ne mange que chez mère Mi de toute façon), je repars aussi avec  des saucisses de veau aux herbes et au fromage. Près de la caisse enregistreuse, des employés parent et ficellent à tout va.

    Après un détour par le fromager qui lève un sourcil dubitatif lorsque je lui demande s’il vend des vœux du Poitou, je décide de lui emboîter le pas pour boire un café à la paillote qui trône entre odeurs marines et caprines.  Ils sont là, entre copains, attendant le chaland : le poissonnier, reconnaissable à son tablier bleu plastifié, le fromager et quelques autres.

    Vous, vous me connaissez ; je ne suis venue là que pour tailler la bavette avec des gens du coin, en fait. J’amorce la conversation avec le fromager, sur le thème du Vœu du Poitou dont il n’a jamais entendu parler. Il faut dire que j'ai découvert ce crémeux fromage sur un étal de mon marché local et jamais revu ailleurs. Le fait qu’il soit parsemé de sarriette, herbe typiquement provençale, fait douter Didier le fromager de ses origines poitevines.

    Stéphane le poissonnier dégaine son téléphone avant moi et confirme : le Vœu du Poitou est un fromage de chèvre à pâte molle de la région Charente-Poitou.

    Je fais mon petit effet ... Intrigués par cette Parisienne qui sourit et en connaît un petit rayon côté frometons, nous discutons pendant une vingtaine de minutes, rejoints par un ex parisien qu'est d'min coin.

    Lorsque je sors à l’air libre, un peu soleil éclabousse les pavés, j’envoie un baiser au petit pétard atomique qui doit être en train de jouer avec ses copines et redescends jusqu’au baptistère, levant le nez au passage sur les nombreux édifices historiques qui jalonnent mon parcours, comme la Maison des Trois Clous, qui date du 15ème siècle. Vous les voyez, là, au-dessus de la dernière ouverture, entre les deux gargouilles ?

    maison des trois clous.jpg

    Il faudra que je revienne quand il fera beau, pour visiter enfin cette ville que je ne connais pas, le baptistère qui abrite une piscine octogonale où l’on procédait au baptême par immersion, et qui serait, d’après le taxi qui me conduisit de la gare à mon point de chute, le plus ancien édifice religieux d’Europe.

  • Dernière soirée à Lleida

    Ce soir, j’ai salué pour la dernière fois José, le patron de la bodegueta. Je suis heureuse de savoir que bientôt, c’est ma chouch’ adorée qui va reprendre mes formations ici et manger dans les endroits que j’ai aimés. Nous nous sommes assis, avec Cesc, devant un tonneau de bois. J’ai commandé los anchoas del cantabrico et ils étaient dodus à souhait. Avec le jambon de Bellota, on nou a servi de belles tranches de pain frotté à la tomate et imbibés d’huile d’olive fruitée. Et nous nous sommes rafraîchi les gencives en croquant la belle salade de la maison. En dessert, une assiettes de gambas odorantes.

    « Il y a les gens qui mangent la tête et ceux qui la laissent, a dit Cesc.

    - Et d’après toi, je suis dans quelle catégorie, moi ? ai-je demandé.

    - Toi, tu la manges. »

    Des hommes sont entrés, beaucoup, je n’avais jamais vu autant de monde dans la bodegueta, pourtant le match de foot France-Espagne n’est que demain. Un habitué est entré et je l’ai salué. Et puis vers 22h, Manuel, avec lequel j’avais rendez-vous ce soir, est entré. Il a d’abord cru que Cesc, que j’ai présenté comme étant mon collègue, était français. Je lui ai dit que j’avais mangé la tête de mouton. Lui et Cesc étaient morts de rire de savoir que j’avais passé la sécurité de l’aéroport de Barcelona avec ma tête de mouton sous-vide. Et j’ai appris que les yeux, c’était super bon, mais ça, franchement, avec toutes les cojones dont je suis lotie, je suis pas sûre que je pourrais ….

    Manuel a proposé de nous emmener boire un verre ailleurs après notre repas. Cesc a dit "C'est elle qui commande, je suis". Après 3 verres de vin, j’avais chaud aux étiquettes, mais c’était ma dernière soirée à Lleida, merde …   Nous sommes donc montés dans la Mégane de Manuel (je leur ai appris qu’on disait UNE Mégane et pas un Mégane) et nous nous sommes arrêtés devant la Nuba African Tavern, un pub à la déco africaine et un énorme rhino qui trône à l’entrée. Là on a bu (encore) et discuté. J'ai enfin cessé de dire que j'avais été alcachofa (artichaut) et mémorisé le mot alzafata (hôtesse de l'air).

    Manuel est très cultivé et a répondu à mes questions, à savoir pourquoi il y a tant d’africains à Lleida. 22% de population d’origine étrangère, majoritairement des Roumains, Maghrébins, et Africains sub-sahariens venus à l’époque ou Lleida, ville agricole, avait besoin de beaucoup de main d’œuvre.

    Il a dit de belles choses Manuel. Que ce qui compte, plus que ce qu’on mange, ce sont les gens avec lesquels on mange. Que les meilleurs repas seuls ne valent pas un repas médiocre avec des amis. Il a déclamé des poésies et des proverbes que je n’ai pas toujours compris, mais c’était beau. Il aime la musique, les villes chaotiques et Gilbert Bécaud. Et il a profité que Cesc s’absente quelques minutes pour me draguer effrontément. Ma dernière soirée a Lleida a été une bien belle soirée.  

    La Bodegueta, calle Alcalde Costa, Lleida.