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Pensée du jour - Page 6

  • En vrac

    Samedi :

    Enfin je vois en chair et en os Raphael Saadiq, ex Raphael Wiggins des 3T (Tony!Toni!Toné!), au Bataclan et gratos, grâce à Bibiche. Si je ne suis pas adepte de sa transformation en crooner des années 50, je dois admettre qu'il a de superbes abdos. Il a réussi à faire chanter la salle (un exploit, de faire chanter des Gaulois, et Parisiens de surcroît, donc recroquevillés) et nous a gratifié d'un bonus mémorable.

    A la sortie, je n'ai pas envie de rentrer chez moi. Bibiche me propose de venir boire un verre dans le bar où il bosse jusqu'à 2 heures du matin. Juchée sur un tabouret au comptoir, le verre s'éternise, je préfère l'ambiance joyeuse du karaoké au silence de mon appartement. A côté de moi, un homme s'est accoudé, seul, le regard dans le vague, visiblement encore plus mélancolique que moi. Je lève ma pinte et fais tinter son verre, le tirant de sa songerie.

    "Ça va ?" je demande.

    Jiuliu a un léger accent et la surprise se dessine sur ses traits lorsqu'à l'annonce de son origine, je réponds que je connais son pays. Il a fait des études d'informatique mais son diplôme n'est pas reconnu en France et puis "quand tu es Roumain, tu travailles dans le bâtiment", alors Jiuliu est maçon.

    Jiuliu souffre de la mauvaise image collée aux Roumains, pourtant il est persuadé que la France lui offre plus de chances d'une bonne vie que la Roumanie. Il a bien quelques amis ici, mais ils sont mariés et rentrent chez eux le soir, alors il parcourt Paris, seul, et boit des verres, seul. Il demande si je sais dans quelles sociétés il pourrait postuler. Je lui donne mon mail car en l'occurence, ma boîte a une grande sympathie pour les Roumains.

    Lundi :

    Je reviens dans la région de Tarbes, sans ma filleule qui a pris son envol. Je retrouve le sourire lumineux et le calme olympien de M., un de mes chouchous. La neige a fondu et nous déjeunons en terrasse du restaurant d'un club de golf. Le soir, la jeune patronne de l'hôtel me reconnaît et m'indique un parcours, me convainquant de combattre les 4 heures de sommeil de la nuit précédente pour courir 30 minutes dans le soleil couchant.

    Le ledemain matin, je la surprends au petit-déjeuner et elle se répand en excuses car elle m'a oubliée et tout débarrassé. Vite, elle me sert café, tartines et fromage et, confirmant les affinités déjà pressenties, nous sympathisons, réalisant que nous avons plus ou moins le même parcours. Le soir, au dîner, elle m'apporte en personne une coupe de champagne pour se faire pardonner. Elle et son mari forment un couple de quadras absolument charmants. La région n'est pas très joyeuse mais j'aime bien venir ici.

     

  • Chose promise, chose dûe (Lulu)

    Lundi matin, 6 heures 30, ma filleule m'attend devant les bornes d'enregistrement automatiques. Juchées sur des escarpins compensés de 10 cms, facile. Je la charrie :

    " Tu as la tenue adéquate pour un déplacement dans la neige, toi "

    J'ignore si ma filleule me porte la poisse ou l'inverse. En tout cas, lundi matin, à l'aéroport de Pau, on m'a refilé le même veau que la semaine dernière. Et chez notre client, toujours pas de chauffage ! Putain quel sens de l'accueil !

    Le soir, nous avons été accueillies chaleureusement par les propriétaires de l'hostellerie des Cèdres, ancien manoir des Montespan (je ne sais pas quel lumière m'a frappée pour que je me rappelle que c'était un marquis ???) et découvert avec soulagement le confort douillet de cette belle bâtisse.
    Le restaurant était à la hauteur du reste et je peux vous dire qu'on s'est soignées.

    Ce soir, aux rayons X de l'aéroport, ma filleule, égale à elle-même :
    " Hé merde, ils vont encore m'emmerder avec mon bain de bouche ! C'est que ça se boit pas ce truc-là ! Déjà ce matin, je me suis déchiré la bouche avec !"
    Derrière nous, un couple se marre. Ca y est, on est repérées.
    [ La semaine dernière, elle avait dû boire une gorgée de son sirop aux rayons X d'Orly, histoire de prouver que ce n'était pas un poison. Moi je veux bien l'aider, mais faut qu'elle arrête de transporter des liquides imbuvables ]

    Dans l'avion, avant le décollage, le commandant nous accueille : "Température à Paris -8°C"
    - Youpi ! hurle ma filleule. Je me cache la tête dans les mains.
    [ A la rangée voisine, un type lève les yeux de son journal et rigole. Il ne sait pas qu'on a passé 3 jours à se cailler les miches dans une salle non chauffée par -15°C ]

    "Ca fait des mois que je ne me suis pas claquée devant un film" dit ma filleule. J'éclate de rire.
    - Je ne sais pas d'où tu sors, toi, mais c'est sûr, tu n'es pas parisienne. Ca sort d'où cette expression ? Jamais entendu ça avant. Tu parles avec un accent chti mais tu prononces les o avec un accent du sud.

  • Gueuler en silence

    J'ai dû me faire violence ce soir pour aller au cours de théâtre. En sortant du bureau, un froid mordant a contracté mes épaules déjà endolories et je n'avais qu'une envie : me lover au chaud sur mon canapé. Pourtant, je n'ai pu me résoudre à lâcher mon groupe et je suis descendue à la station Vavin.

    Peu motivée, j'avais décidé de rester en arrière-plan. Au premier jeu, qui consistait à faire un cercle, dans le noir, et se "lâcher" en criant, racontant des blagues, riant, je me suis contentée de rigoler en entendant les autres qui, eux, se lâchaient.

    Au deuxième jeu, qui consistait, toujours dans le noir, à se toucher "en évitant les parties stratégiques", méfiante, j'ai croisé les bras pour protéger mes seins. On m'a touchée et étreinte, mais je n'ai pas désserré les bras.

    Puis le prof lance le thème suivant : vous préparez un défilé de mode. Il y a 2 mannequins capricieux, 1 couturier épidermique, 2 petites mains. Je ne veux pas de photographe. Soyez drôles et n'oubliez pas l'élément perturbateur et la chute.
    Je n'ai pas envie de faire l'andouille ce soir. Je choisis donc le rôle de petite main, en l'occurrence une maquilleuse qui panique et se fait houspiller parce que sa collègue est en retard. Quand enfin les rôles et le scénario sont définis, le prof insiste pour que je prenne le rôle de la couturière épidermique. J'essaie d'esquiver mais il tient bon. Je m'éxécute de mauvaise grâce. En observant la prestation du premier groupe, je réalise que ce sont souvent les mêmes qui héritent des premiers rôles, soit qu'ils les sollicitent, soit que le groupe les désigne comme meneurs, comme  dans mon cas. Du coup, je me suis amusée à questionner mes camarades sur leur métier, pour tenter de faire des parallèles.

    C'est le tour de notre groupe. Rémi déambule sur le catwalk improvisé, la chemise nouée sur son nombril velu. Il est très drôle. Moi j'ai du mal à entrer dans la peau de la couturière hystérique qui hurle sur tout le monde. Du coup, je prends un accent américain, pour m'aider. Le sketch se termine sur les trois mannequins qui chutent lamentablement comme des dominos.

    Le prof fait un bilan. Certains ont encore des progrès à faire et doivent s'aventurer dans la prise de risques. Il s'adresse plus particulièrement à un jeune homme rougissant, au physique très particulier, et l'enjoint à s'exprimer davatage. Il lui demande d'inviter une jeune fille du groupe à danser, le fait recommencer. Puis il se tourne vers moi : "Toi, Fiso, tu as un caractère très fort mais tu ne te lâches pas. C'est bizarre, je ne comprends pas pourquoi, pourtant tu aurais beaucoup à y gagner."
    Nous rangeons nos affaires et tandis que je médite ses paroles, le prof vient vers moi, s'inquiète de m'avoir froissée. "Tu as raison, j'ai du mal à exprimer certaines émotions".

    En fait, j'ai clairement identifié, au fil des impros, que j'aimais jouer les déconneuses, les fantasques, les grandes gueules, les râleuses, les alummeuses, les dominatrices mais pas les femmes en colère. Le prof a raison. Jouer la colère m'aiderait peut-être à l'exprimer dans la vraie vie.

    Nous nous dirigeons tous vers le café où nous avons l'habitude de finir la soirée. En chemin, j'interpelle le jeune homme rougissant et le taquine "Bon alors il faut qu'on apprenne à se lâcher, à sortir de nos corps ?" Il me confie avoir été vexé par la remarque du prof et très embarrassé du sketch qu'il lui a fait jouer, juste après. "Je suis très timide avec les femmes, c'était horrible pour moi, ce sketch." Au café, il s'installe en face de moi. Il est temps que je fasse la connaissance de ce jeune homme auquel je n'ai jamais adressé la parole jusqu'ici.

  • C'est pas passé loin

    C'est quand même marrant.

    Ma mère flippe sa race dès que je prends l'avion, à fortiori pour une destination hors zone euro, mais là, alors que je suis arrivée ce matin à Liège, juste 3 heures avant qu'un taré n'arrose la foule à la kalachnikov, place Saint-Lambert où j'ai mes habitudes, silence radio.

    Mon père passe pourtant ses journées vissé devant I>Télé, où les infos tournent en boucle. Tu parles d'une retraite paisible.

    Du coup, vexée, j'ai envoyé un sms "Ca va, vous ne vous inquiétez pas trop pour moi, on dirait ?"

    PS : J'ai craint quelques heures de devoir passer la soirée barricadée dans mon hôtel. Le calme semble revenu, je verrais ça d'ici quelques instants quand je me rapprocherai du centre. N'empêche, il a fait un sacré carnage, ce barge, c'est bien triste.

  • 40 !

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    "Life begins at 40", they say.

    Un petit plaisantin avait coiffé Molière d'un cône rayé. Moi je n'ai pas bu beaucoup d'alcool. Les mélanges improbables étaient dans la salle, des blogueurs (ses), un échantillon impressionant de notre pourtant toute petite famille, quelques hommes perdus sans collier, de vieux amis, collègues et aussi des rencontres mythiques.

    Un beau brun a l'allure de jeune premier a bravé les grèves - vive le covoiturage - pour venir danser avec nous. Il m'a laissé un film chaud comme son sourire, un conte drôle et cruel, que je languis de revoir depuis des années, Zorba le Grec, hymne à la liberté. Le samedi soir, je n'ai pas résisté à sa vingtaine toute fraîche et l'ai emmené manger un mafé du côté de Parmentier.
    Il y avait lui, le solitaire si sensible, et à mon cou, j'ai demandé qu'il accroche un bijou vert comme l'île qui nous a réunis, un soir de coupe du monde. Et puis il y avait elles, leur élégance, leur douceur, que j'ai connues ici, que j'ai imaginées, devinées, découvertes. Il y avait mes hommes, qui m'aiment mieux que ne le font leurs congénères hétéros. Il y avait ma fratrie, mon sang, mes protégés, et ma petite soeur protectrice et généreuse, et son grain de beauté, là, et un autre ailleurs mais c'est classé secret famille.
    Il y avait lui, qui est aussi bavard en petit comité que silencieux en groupe, lui que j'ai réellement découvert en août, au hasard d'une bière du côté de Saint-Germain, une bien belle soirée, un sacré bonhomme.
    Il y avait une main qui pensait être à l'abri des regards pour caresser sa croupe, derrière le rideau de velours, mais c'était sans compter la lucarne indiscrète du passe-plats.
    Il y avait deux entrecôtes sous-vide et deux couillons qui ricanaient de leur bonne blague.
    Il y avait elle, à laquelle je pense chaque jour, et qui répond qu'elle m'aime. Désormais, je l'emmènerai chaque semaine avec moi et peut-être que je me sentirai mois seule. Peut-être.

    Il y avait lui, mon boxeur, que j'ai appelé en larmes quand la fête était terminée et que la pluie tombait.  
    Il y avait ce paquet tellement gros que je ne l'ai pas cru pour moi, et pourtant si. Quel dommage qu'il s'en aille, il m'a touchée en plein coeur, le ténébreux gentleman, et à ses lèvres, j'ai bu le plus enivrant des cocktails. Happy hour.