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2yeux2oreilles - Page 146

  • En la bodega Guerola

    Il est plus de 15h quand je franchis le seuil de la bodega Guerola. A l'exception d'un couple installé à une table près de la porte, les convives sont massés au fond du restaurant. Les ventilateurs rafraîchissent la lourde chaleur de cet après-midi andalou. Je grimpe sur un tabouret, comme nous l'avions fait quelques jours plut tôt, en compagnie de Pepito et sa copine. Derrière le comptoir, un type d'une bonne cinquantaine d'années m'observe, un sourire en coin derrière ses lunettes. Sous mes yeux, derrière des vitrines, poissons et coquillages exhibent leur fraîcheur. Pour un peu, on se croirait chez Toritcho ... pourtant, le décor est bien différent.

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    Au dépouillement immaculé de Toritcho, la bodega Guerola oppose un chaleureux fatras de poutres et ornements. A droite, derrière la porte d'entrée, une peinture représente un torero. Sur une table, des bouteilles de vin sont exposées. Sur la gauche, le long comptoir de bois foncé s'étire jusqu'au fond de la salle. Les murs sont couverts de cadres, photos et affiches.

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    Un serveur m'invite à m'assoir à une table ou je serai plus à l'aise pour manger. J'acquiese et le suis, avant de me raviser et de retourner m'installer au comptoir. C'est que je vais m'emmerder moi, toute seule à une table ! Je préfère de beaucoup être au coeur de l'action, observer, m'étonner, poser des questions et sans doute, intriguer assez le personnel pour qu'ils entreprennent de me parler. Voyager seule a cet énorme avantage qu'il facilite les rencontres. En couple, rare sont ceux qui osent troubler le tête à tête et et entre amis, on se suffit souvent à soi-même.

    Me voilà donc déménageant pain, assiette, serviette et verre en bredouillant au serveur, vaguement gênée, que vraiment, je préfère manger au comptoir. Il propose alors de me placer près de la caisse, pour que j'ai plus de place. Le plus âgé me charrie en me disant que je vais faire le tour du resto avant même d'avoir commencé à manger. Je commande des calamares fritos ainsi que des coquinas, ces fameuses tellines que je n'ai plus eu l'occasion de déguster depuis mon voyage en Avignon, il y a déjà 2 ans. En attendant mes plats, je demande au serveur à lunettes le nom de ces coquillages assoiffés qui promenaient, l'autre soir, des langues démesurées d'un beau rouge corail. Conchas finas, répond-il.

    Un autre serveur, arborant de belles moustaches poiver et sel, pose bientôt devant moi deux belles assiettes de petits calamars frits et de tellines arrosées d'huile d'olive, citron et persil.

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    Tandis que je suçote mes tellines d'un air gourmand, il me demande d'ou je suis et ma réponse le surprend, visiblement. Je demande si je peux prendre des photos du restaurant, il m'entraîne et désigne ici des affiches de ferias de toros, là des photographies en noir et blanc de l'ancien Torremolinos.

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    "46 ans que la bodega est ouvert, tu n'étais pas née". J'acquiese, même si le monsieur doit me croire beaucoup plus jeune que je ne le suis.

    "Je suis venue avec des amis, il y a 2 jours". "Oui, oui, je sais, je t'ai reconnue", dit-il. Je lui demande s'il est le patron, il dément et pointe du doigt le monsieur à lunettes. Lui s'appelle Pepe. Le patron se présente, il s'appelle Clemente. Je le complimente sur sa bodega et lui dis que j'ai un blog et que je vais faire un billet dessus. J'ai fini mon repas, succulent, et Pepe me débarrasse avant de poser bruyamment 3 verres sur le comptoir, de les remplir et de m'en tendre un avant de porter les deux autres à une table. Quand il revient, je demande si c'est de la sangria, il secoue la tête et me fait signe d'approcher et de grimper sur un des tabourets tandis qu'il soulève un couvercle contenant un liquide ambré ou je distingue des rondelles d'orange et de la canelle.

    Lorsque la bodega ferme ses portes, je retrouve la chaleur de la rue et les boutiques bas de gamme de la calle San Miguel. Je piquerais bien ma petite sieste quotidienne, tiens ...

    Bodega Guerola

    Las Mercedes n° 2 - Torremolinos

    Telf. 952 38 10 57

  • Dans les hauts de Torremolinos

    J'avais emmené mes baskets, espérant, malgré la chaleur, profiter de cette semaine de vacances pour courir régulièrement. Le lendemain de mon arrivée, lorsque je lui demandai où je pouvais courir, S. m'indiqua un parcours "à travers l'urbanisation", ce qui me fit un peu peur, mais en fait, les rues du quartier du Pinar, ancienne pinède, sont désertes.

    Quel plaisir de courir à la fraîche, aux dernières lueurs du jour, sur les hauteurs de Torremolinos ! Après une série d'abdos et d'étirements, bouteille d'eau dans le sac en bandoulière et le beat dynamique de K-OS dans les oreilles, je tire sur moi la lourde porte de fer. Premières enjambées dans la descente qui longe la villa Nirvana puis je tourne à droite, faisant détaler un chat noir famélique et borgne, de surcroît.

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    Je cours sur le bitume, entre les rangées de villas luxueuses aux tons de terre, ocres et orangés, d'où pendent des grappes de pimpants bougainvillés et de chèvrefeuille odorant et frangipaniers odorants.

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    Peu de passants, pas de circulation ni de bruit hormis les aboiements furieux que je déclenche à chaque passage. Je m'engage, légère, dans une rue plate, dépasse le sauna Las Estrellas (qui n'est pas un sauna).  Le lendemain de mon arrivée, je dis à S. : C'est cool, t'as un sauna à côté de chez toi. Il sourit : C'est pas un sauna, en tout cas, pas un sauna pour toi. Moi : Ah ? C'est un sauna gay ? Non, c'est un bordel, répond-il.

    Je tourne à droite et attaque ma première côte jusqu'au chantier de résidences où une pancarte indique "Panorama del Pinar". Je longe les constructions désertes et suit la courbe qui se fait encore plus raide. La, je sens les muscles antérieurs de mes cuisses se contracter sous l'effort et dès le deuxième tour, de grosses gouttes de sueur dégoulinent le long de mes tempes, dans ma nuque et sur mon buste.

    Mais voici, à droite, la calle Cueva del gato qui me permet de détendre mes muscles. Margo s'étale en lettres de fer forgé sur la facade blanche. Je vire à droite, encore une petite montée, puis j'arrive dans la calle Montana où juste après la villa Panorama, la bien nommée, la villa Rincon laisse à peine entrevoir derrière sa facade rose, de jolis escaliers arabo-andalous.

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    Encore une courbe à gauche, je passe devant la villa Neptuno, aux couleurs des Cyclades, puis les dernières maisons de "l'urbanisation" avant de bifurquer à droite dans un chemin de terre caillouteux, entre les oliviers. Là, mon corps se fait plus lourd et je laisse son poids me porter dans la descente, bras relâchés, épaules détendues, en prenant garde de ne pas déraper sur les cailloux.

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    "I'm free", chante K OS, et c'est bien ce que je ressens, un sentiment de plénitude et de liberté exacerbés par l'ivresse de l'effort et du plaisir qu'il procure. A ma gauche en contrebas, l'autoroute embouteillée déroule sa guirlande de feux rouges. Rouge aussi, le ciel carmin du soir tombant sur la Sierra Nevada. Je surplombe toute la ville de Torremolinos, ses grues, ses immeubles et droit devant moi, dans une cuvette, le bleu de la mer, frangée des lumières scintillantes de Malaga.

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    Brroussailles, palmiers et cactus gigantesques, grillées par le soleil, laissent passer une brise vivifiante qui rafraîchit le débardeur collé a mon corps. J'admire, émerveillée et grisée, la végétation luxuriante. Si loin et si proche de l'humanité. Le bonheur doit ressembler à ce que je ressens à cet instant-là.

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    Le terrain redevient plat, je traverse quelques ronces puis plutôt que de suivre le chemin de terre, tourne à droite et monte 4 à 4 des marches sommaires qui me propulsent devant la maison de S. Là, je m'arrête quelques instants, boit 2 ou 3 gorgées d'eau fraiche, en asperge mes bras puis repart pour un nouveau tour.    

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  • ...

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  • La légende de Narcisse

    L'alchimiste prit en main un livre qu'avait apporté quelqu'un de la caravane. Le volume n'avait pas de couverture, mais il put cependant identifier L'auteur : Oscar Wilde. En feulletant les pages, il tomba sur une histoire qui parlait de Narcisse.

    L'alchimiste connaissait la légende de Narcisse, ce beau jeune homme qui allait tous les jours contempler sa propre beauté dans l'eau d'un lac. Il était si faciné par son image qu'un jour il tomba dans le lac et s'y noya. À l'endroit où il était tombé, naquit une fleur qui fut appelée narcisse.

    Mais ce n'était pas de cette manière qu' Oscar Wilde terminait l'histoire.

    Il disait qu'à la mort de Narcisse, les Oréades, divinités des bois, étaient venues au bord de ce lac d'eau douce et l'avaient trouvé transformé en urne de larmes amères.

    « Pourquoi pleures-tu? demandèrent les Oréades.
    -Je pleure pour Narcisse, répondit le lac.
    -Voilà qui ne nous étonne guère, dirent-elles alors. Nous avions beau être toutes constamment à sa poursuite dans les bois, tu étais le seul à pouvoir contempler de près sa beauté.
    -Narcisse était donc beau? demanda le lac.
    -Qui, mieux que toi, pouvait le savoir? répliquèrent les Oréades, surprises. C'était bien sur tes rives, tout de même, qu'il se penchait chaque jour! »

    Le lac resta un moment sans rien dire. Puis :
    « Je pleure pour Narcisse, mais je ne m'étais jamais aperçu qu'il était beau. Je pleure pour Narcisse parce que, chaque fois qu'il se penchait sur mes rives, je pouvais voir, au fond de ses yeux, le reflet de ma propre beauté. »

    [Prologue de L"alchimiste de Paulho Coelho]

  • 1 chatte ça va, 3 chattes ...

    chat griffe.jpgDepuis 15 jours, je garde les 2 chattes de ma copine Claire. J'adore les chats, y'en a pratiquement toujours eu chez mes parents. Aujourd'hui ils coulent une retraite verdoyante chez 3 chats fort sympathiques. Ben oui, tout le monde sait que quand on a un chat chez soi, on vit chez lui et pas l'inverse. Bref. Il y a peu, je disais à mon copain Lancelot qui lui est allergique aux chats, que je n'aimais pas les chiens. C'est vrai. Je trouve ça dégueulasse. C'est peut-être dû au fait que les chiens que j'ai croisés dans ma famille étaient traités comme des êtres humains, ce qui non seulement me choque terriblement, mais en plus me dégoûte quand ledit chien entreprend de me rouler une pelle. ou de farfouiller sous mes jupes. Pour revenir aux matous, s'il y a bien un truc que je trouve cruel, c'est d'avoir un chat en appartement. Ce beau félin indépendant est un chasseur qui est heureux quand il gambade dans les herbes folles à la poursuite d'un mulot. Je n'ai donc jamais eu de chat chez moi. Mais j'ai proposé à Claire, qui a souvent les fesses en l'air (comme dans la chanson de Dutronc) de les lui garder si un jour elle devait s'absenter. Lilou et Lula sont 2 soeurs câlines et drôles. Rien à voir avec le chat dépressif du mec de ma soeur. Mais.

    Jour 1 : Claire dépose 2 tas de poils miaulant à l'affreux chez moi. Les adieux déchirants durent 15 minutes. Je me retiens de rire devant les "mes moumounettes, mes bichounettes" et autres fifilles à sa maman. Faut dire quand je suis chez mes parents, je ne fais pas plus intellectuel dans l'échange humano-félin. Je me vois rebaptisée d'un ragoûtant "Tata Sophie" et les deux frangines sont priées d'être gentilles avec moi. Ca promet. Une fois seules, je leur installe la litière, les bols d'eau et de croquettes dans la cuisine. Elles passent la journée dans le placard de l'entrée et sortent pile poil au moment ou le match de foot commence. On le regarde donc en famille, les demoiselles refusant poliment un magnum amandes. Le soir venu, je laisse la porte de ma chambre ouverte, histoire qu'elles se sentent moins seules. Lorsque l'aube pointe, je suis tirée de mon sommeil par une cavalcade effrénée. Ca court et ça bondit de tous les côtés là-dedans, salon, chambre, cuisine. Excédée, je bondis moi aussi et les vire de ma chambre illico. Désormais, on ne dormira plus ensemble.

    Jour 2 : Non, vraiment, je n'arriverai pas à savourer mes tartines confiturées aux figues blanches en ayant sous le nez la litiière odorante des boules de poils. Allez hop, sur le balcon, la litière ! Je cherche longtemps Lula. Aurait-elle sauté par la fenêtre, à la recherche de sa maîtresse,, ignorant que celle-ci se trouvait dans les airs ? Non, la garce a réussi à se faufiler sous la housse de ma penderie et à se hisser sur une pile de fringues. Je brandis, dépitée, la jupe couverte de poils que je comptais mettre ce jour-là. Je considère d'un air rêveusement sadique des bandes de cires froides oubliées au fond d'un tiroir... et leur interdis l'accès à ma chambre pour la suite du séjour.

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    Jour 3 : Je surprend la petite sur MA chaise longue en cuir noire a laquelle je tiens COMME A LA PRUNELLE DE MES YEUX BORDEL ! Je suffoque et saisie d'une vision cauchemardesque, soulève le plaid dont je l'ai recouverte. AAAAARGGGGHHHH ! Le côté de la chaise longue est griffé ! Que dis-je ? Lacéré, oui ! Ca y est, ma journée est gâchée, ma vie foutue, notre amour humano-félin mort à jamais. Pas ma chaise longue !! Je'essaie de relativiser en me disant que d'abord ce n'est que du matériel (ouais, mais bon) et que ce n'est pas visible car sur le côté de la chaise longue (oui, mais la prochaine fois??) J'appelle Claire qui est quelque part entre la Corse et la Martinique et la voix brisée, lui annonce qu'à la prochaine griffure, je devrai arracher les pattes rendre les chattes à son ex. Elle est morfondue. "Quand tu les chopes, tu les grondes ou tu leur mets une tape, elle ne le feront plus". Encore faudrait-il que je sois souvent chez moi ..."Bah, ce sont des chats, hein ..." lui dis-je. Et je pense "P'tain, encore 15 jours ! Plus jamais !"

    Jour 11 (aujourd'hui) : Ce matin, au lever, je constate avec inquiétude que mon coloc' a eu la mauvaise idée de virer sa guitare que j'avais mise en rempart anti-chats sur la chaise longue en cuir. Bilan : dossier lacéré. Je mets une tape sur le cul poilu de Lula quand elle s'avise d'y retourner. Oh!91 arrive pour boire le thé, il est allergique lui aussi, alors je passe un coup d'aspirateur vite fait et nettoie la terre des plantes en pot répandue sur le parquet (Lilou adore tasser la terre de mes plantes en pot, de ses petits coussinets délicats, qu'elle essuie ensuite sur la couette de mon colc'). Lula, quand à elle, a du se convertir à l'islam vu qu'elle fait ses ablutions après chaque passage à la litière et se nettoie les pattes dans le bol d'eau (mais ne les essuie pas, bien sûr, ce serait trop beau). 

    Inutile de vous le redire, les chats chez moi, c'est FI-NI. En plus, mes potes sont allergiques.