Philo me souhaitait en ce début d'année beaucoup de voyages et de rencontres. Et bien, 2012 démarre fort. Après un weekend à Londres qui n'attend plus que quelques photos pour être publié, j'ai fait "un beau voyage et de jolies rencontres", cette semaine.
Dimanche après-midi, j'aterris à l'aéroport de Biarritz où je récupère une Mégane avant de traverser la frontière et de trouver enfin, tout au fond d'une zone industrielle, mon hôtel en périphérie de Pampelune. Le premier soir fut loin d'être festif car j'ai bossé jusqu'à minuit et même oublié de dîner (un comble, non ?)
Le lendemain au petit déjeuner, je retrouve "Kiique", notre jeune commercial espagnol, accompagné d'un bonhomme tout rond, "Cesc", notre partenaire local. Ils vont tous deux assister à la formation de 4 jours que je m'apprête à donner.
Comme d'habitude, mes premières phrases en espagnol sont un peu hésitantes. Mon diesel se met en route.
Sur le parking de notre client, une masse vient à notre rencontre et nous broie la main. Mon "stagiaire" est physiquement très impressionnant, un vrai rugbyman. Après 15 ans de boîte, il est peu enclin à s'en laisser conter par un logiciel qui prétend faire aussi bien, voire mieux, que lui. J'enfile discrètement mes gants de velours.
Trois charmantes jeunes femmes nous rejoignent en salle de formation et je commence mon show.
Vers 11 heures, nous descendons à la cafétéria pour "un café". Je retrouve les automatismes appris l'année dernière et les drôles de pratiques de mes compagnons : café solo pour moi, verre rempli de glaçons arrosés de café pour eux. Me souvenant du rythme espagnol, je commande un sandwich. C'est qu'il va falloir tenir le coup quelques heures encore car ici, on part déjeuner à 14 heures.
A 14 heures, justement, nous nous attablons tous ensemble dans un restaurant, au premier étage du centre commercial. Je commande une soupe en entrée (merde, j'avais oublié que les entrées sont des plats ici !) et des chipirones, dont je raffole, suivis d'une médiocre tarte au fromage. En face de moi, Kique et Cesc dégustent un étrange amas de choses non identifiées; ce sont des "kokotxas de bacalao", des joues de cabillaud. Je goûte, trop bon. "Y'a des choses que tu n'aimes pas ?" demande Kique. Je suis démasquée.
Le soir, nous nous retrouvons tous trois à la réception de l'hôtel vers 20h30 et après un tour dans les rues et le long des remparts de Pamplona, nous entrons, sur les conseils de notre stagiaire qui a l'air de s'y connaître question bouffe, au Gaucho. Ptain, les pinchos sont à tomber au Gaucho, un truc de malade ! Beaux et savoureux, impossible de choisir, ni de se contrôler, on s'est régalés, lasagna de puerro con gambas (le truc en bas et au milieu), hojaldre de ajo arriero con huevo, pinchos de foie, le tout accompagné d'un bon rioja ! Jugez plutôt :
Pendant le repas, notre partenaire espagnol, que j'ai appelé Alfredo toute la journée, me glisse gentiment "Moi, c'est Cesc". On a bien rigolé. Il est super drôle ce type. Après ce festin, on a refait un tour en ville et Cesc a inventé deux mots très marrants pour me guider : izquierdamos et derechamos.
Le lendemain, on passe aux choses sérieuses. Notre stagiaire, ravi de rencontrer d'incorrigibles gourmands, nous confie faire partie d'un cercle gastronomique. Et ce soir, il nous invite à dîner. A 20h30, sa tête apparaît au premier étage d'un restaurant de la place.Il faut une clé pour monter l'escalier en haut duquel il nous accueille, vêtu d'un tablier, et nous fait admirer la vue qu'on a sur la place :
Là, d'un coup, j'ai senti que la soirée allait être longue...
Sachez juste qu'on a commencé les réjouissances avec des chistorras, de la morcilla et du fromage, que M. a débouché un magnum de rioja (qu'on a sifflé à 3), fait griller des entrecôtes, que la table voisine m'a fait goûter un mojito maison, qu'à la fin du repas, M. a débouché une bouteille remplie d'un liquide pourpre, un digestif non identifié mais néammoins succulent qui s'appelle Patxaran, que quand je suis revenue des toilettes, on m'en avait traîtreusement resservi un troisième verre, que quand je me suis couchée, la chambre tournait, que j'ai fini la tête dans la cuvette des chiottes mais que je me suis sentie vachement mieux après, et que le lendemain, au petit déj, quand mes 2 collègues, avouant une terrible gueule de bois, m'ont demandé si j'avais bien dormi et comment je me sentais, j'ai lancé sans honte aucune un arrogant "Super bien !" (je compte sur votre discrétion, les amis )
N'empêche, c'était une super soirée, en compagnie d'un sacré personnage ...
Le lendemain midi, j'ai fait léger : pavé de thon et sorbet au citron. Le soir, y'avait foot et mes collègues m'ont demandé si je voulais venir le match avec eux. Rien que pour l'ambiance, oui. Je sais donc maintenant dire match en espagnol (partido) et j'ai appris plein d'insultes, entre deux pinchos. On a été petits joueurs ce soir-là, seulement 2 verres de rouge et 5 pinchos chacun. On était un peu fatigués, il faut dire ...
Et ce midi, pour la dernière, apès quelques emplettes - dont une bouteille du "Patxaran" fatal, à propos duquel internet met effectivement en garde contre une "gueule de bois terrible" - je me suis retrouvée entourée de 6 solides gaillards. M. avait commandé - en entrée - 4 omelettes au cabillaud.
Quand la serveuse a posé devant moi un dos de cabillaud, j'ai protesté, objectant que j'avais commandé de la viande. "Ben oui, a répondu M. la viande, c'est après, on commence avec du poisson". Ben oui, voyons Fiso, quelle question !?...
Ce déjeuner fort convivial a été un peu obscurci par Cesc qui soudain a fermé les yeux, face à moi, et j'ai crié "Il se sent mal" et on a dû l'allonger et appeler les pompiers. J'ai eu la trouille, c'est que je l'aime bien ce bonhomme, il a un humour inattendu et est d'une gentillesse incroyable. Il est venu récupérer sa valise dans le coffre de ma Mégane, a promis d'aller consulter un médecin dès le lendemain. En le regardant s'éloigner, sa valise à la main, je l'ai trouvé tout fragile.
Au moment de se quitter, M. m'a fait la bise. Je préfère ça plutôt que de me faire broyer la main. Notre commercial a dit "Bravo Fiso", et j'ai repris la route jusqu'à Biarritz. Une super semaine, je vous dis. Et en plus, je commence à savoir utiliser le subjonctif en espagnol.