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Jour 12 : Halte à Sibiu, sur la route du retour
C'est le jour du départ. Pour notre dernier petit-déjeuner, Dana nous a fait une surprise : une brioche au chocolat, truffée de dés de loukoums, des pains fourrés au fromage doux et des strudels aux pommes. Nous quittons Rm Vâlcea un peu avant 9h.
La route jusqu'à Sibiu ne nous est pas familière puisqu'à l'aller, nous l'avons faite de nuit. Dans ce sens et en journée, il y a beaucoup moins de poids-lourds et elle nous paraît moins longue. A Sibiu, aucune direction du centre-ville, nous nous retrouvons à proximité un peu par hasard. Nous garons la voiture sur un parking près d'une station-service Rompetrol et en profitons pour faire une photo souvenir pour Stéphane.
Guide en main, nous arrivons sur la Piaţa Cibin où se tient un marché que nous traversons. La ville de Sibiu tire son nom de la rivière Cibin, afluent de l'Olt. Fondée par des colons allemands au 12ème siècle, Sibiu, anciennement Hermannstadt, a miraculeusement été épargnée des destructions sous la seconde guerre mondiale puis sous l'ère communiste, sans doute parce que le fils de Ceauşescu y avait des responsabilités et aimait y séjourner. Les Strada Filozofilor (rue des Philosophes), Masarilor (des Tisserands) et la Piaţa Armelor (place des Armes) témoignent du passé médiéval de Sibiu. Du marché, nous prenons la Strada Azilului (rue de l'Asile, où se trouve un hospice de vieillards) et apercevons les tourelles de monuments sur notre droite. Je voudrais commencer notre rapide visite de Sibiu par la Ville Basse, nous montons donc les marches qui mènent au pont de fer Podul Minciunilor (Pont des Mensonges) et prenons à gauche. Nous nous engouffrons dans le pasajul Aurarilor (passage des Orfèvres), un charmant escalier menant à la place du même nom, dans la Ville Basse. Là, nous remarquons les pittoresques maisons basses et à large toiture, trouée de lucarnes en forme d'amandes qu'on surnomme « les yeux de Sibiu » ou « ochii oraşului » (yeux de la ville). On les retrouve un peu partout dans la ville.
Quasiment toutes les maisons portent une plaque indiquant qu'elles sont monument historique et contrairement aux autres villes de Roumanie, de nombreux plans du quartier ou plaques devant les monuments (et en français aussi !) expliquent ce que l'on admire. Quel dommage cependant que les voitures soient autorisées à pénétrer dans la Ville Basse et que la municipalité n'interdisent pas les enseignes criardes qui enlaidissent les somptueuses façades aux teintes pastel !
Nous remontons vers la ville et débouchons sur la Piaţa Mică (Petite Place) entourée de maisons aux teintes pastel, blotties les unes contre les autres. Je comprends pourquoi mon guide indique que Sibiu est la plus jolie ville du pays et pourquoi Dana insistait tant pour que nous la visitions. Le voyage de la veille jusqu'à Brasov valait le déplacement pour les paysages montagneux grandioses que nous avons traversés mais la ville médiévale de Brasov fait triste mine à côté de la beauté de Sibiu. On retrouve tout à fait l'influence austro-hongroise de cette ville qui appartient déjà à la Transylvanie, longtemps empire hongrois. Dépassant les toits des maisons, nous apercevons même les tuiles vernies d'une église, tout à fait semblables à celles que l'on trouve dans le quartier du château de Budapest.
Nous rejoignons la Piaţa Huet, passant devant la magnifique cathédrale orthodoxe dotée de coupoles rebondies, qui se donne des airs de Sainte-Sophie d'Istanbul.
Je hâte le pas et Boug' trottine derrière moi. Nous parvenons enfin à une rue commerçante et entrons dans un café (j'avais une envie pressante de café, ça ne se commande pas). Après une courte pause et deux espressi, nous ressortons et parvenons à la Piaţa Mare (Grande Place) au charme saisissant. Là encore, de très beaux bâtiments entourent la place, celui, jaune pâle, de la Banca Agricola, des bâtiments rose saumon, bleu pâle, mauve, vert tendre. J'ai l'impression d'être dans le quartier du château de Prague, cette fois. Nous prenons un tel nombre de photos que les piles de nos appareils photos rendent l'âme simultanément.
Après une heure et quart à marcher dans la ville, nous nous résignons à abandonner la visite car la route est encore longue jusqu'à Budapest. En redescendant vers le marché, nous nous faisons la remarque de la physionomie très différente des passants. Ils sont beaucoup moins typé s et ont le teint et les cheveux beaucoup plus clairs que la plupart des Roumains que nous avons croisé lors de notre séjour. Nous empruntons l'artère centrale du marché et prenons quelques clichés des étals : radis énormes et ronds (que j'ai croqué à chaque petit-déjeuner, avec concombres, tomates, olives et fromage de brebis), poireaux, fraises, tomates, assortiment de miels, mottes de fromages granuleux.
Nous reprenons la voiture, un tantinet frustrées. La magnifique ville de Sibiu aurait bien mérité que nous lui consacrions une journée entière.
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Jour 11 : En route pour Braşov, sur les traces de Dracula
Aujourd'hui, nous entreprenons un petit périple jusquà la ville de Braşov. La veille Sabin, notre guide pour la visite du musée du village, nous a indiqué notre trajet d'environ 200 kilomètres nous prendrait 2h30/3 heures et donné deux itinéraires : via Curtea de Arges ou via Pitesti. Nous nous étonnons que l'une ou l'autre prennent le même temps, puisque Pitesti constitue clairement un détour, et comprendrons pourquoi une fois en route.
Nous décidons d'emprunter la route nationale jusqu'à Curtea de Arges. Pas un poids lourd en vue, c'est la fête. Il fait 16°C, le soleil est radieux, les oiseaux gazouillent et très vite, droit devant nous, apparaissent les sommets enneigés des Carpates.
Peu après Curtea de Arges, dans un virage sur la route de Câmpulung, je pile. La route est défoncée. Des nids de poule énormes, des trous, je dois zigzaguer et rouler au pas sur une bonne vingtaine de kilomètres. La Mégane cahote et souffre sur le bitume, sous le regard tranquille des chiens postés sur le bas-côté de la route. Je lance à Boug' « On aurait dû acheter des soutien-gorge de sport avant de venir en Roumanie ! » Les mains crispées sur le volant, je ne peux même pas admirer le paysage magnifique et les villages blottis en contrebas. Boug' mitraille depuis notre départ. Nous amorçons maintenant notre montée vers Campulung. Dans un virage, je profite d'une aire de stationnement pour m'arrêter et admirer le panorama.
Une vieille femme édentée qui vend ses produits sous une ombrelle s'approche de nous et entreprend de nous parler (en roumain). Elle désigne la ville en contrebas et répète « castel, castel ». Je lui fais comprendre que nous allons à Braşov. Elle pointe Boug' du doigt et demande « Mama ? ». « Elle croit que tu es ma mère », dis-je à Boug'. J'ai beau répéter « friend, », la femme n'en démord pas. « Soit je fais 20 ans, soit tu as pris un sérieux coup de vieux, ma biche », dis-je à Boug'. Nous repartons en rigolant et la vieille femme nous fait de grands signes d'au revoir.
Nous sommes maintenant à presque 1300 mètres d'altitude et avons perdu plusieurs degrés depuis notre départ de Rm. Vâlcea. Nous traversons les villages de Fundata et Moieciu de Sus et sommes maintenant entourées de montagnes : à gauche, les monts Făgăraş, à droite le massif Bucegi.
Notre premier arrêt se fait à Bran où se trouve le château de ... Dracula. En chemin, munie d'un guide Roumanie-Moldavie que j'ai emprunté à ma bibliothèque municipale, Boug' m'a fait la lecture de la légende de Dracula. En fait, c'est un héros national, Vlad Ţepeş alias Vlad l'empaleur, prince de Valachie et ardent défenseur de sa principauté contre les attaques turques, qui aurait inspiré à Bram Stoker son roman sur le comte Dracula. Le nom de Draculea (fils du dragon) lui aurait été donné à titre honorifique, par son père. Vlad l'empaleur, à l'image de la société du 14ème siècle, particulièrement violente, faisait empaler ses prisonniers grecs et turcs sur un pieu, introduit dans l'anus, qui ressortait entre les épaules sans avoir touché aucun organe vital. L'agonie pouvait prendre jusqu'à 48 heures et la légende dit que Vlad aimait prendre ses repas à l'extérieur pour observer le supplice de ses victimes.
Le plus étonnant est que Stoker n'a jamais mis les pieds en Transylvanie et a écrit son roman à l'aide de livres. C'est d'ailleurs celui-ci qui a rendu le château célèbre et fait de Bran une ville ultra-touristique où nombre de gadgets à l'effigie du célèbre vampire sont vendus. On sent d'ailleurs très vite qu'ici les touristes sont des pigeons, sentiment que nous n'avons eu nulle part ailleurs. La moindre place de stationnement est payante, d'ailleurs à peine sommes-nous garées qu'un type se rue vers nous et semble mécontent que je ne veuille pas visiter le château et lui demande un ticket de stationnement pour une heure. Nous nous contentons de prendre des photos du pied du château car des gardiens barrent même l'accès au parc qui entoure le château. Prix de la visite 10 leu, ce qui est très cher, ici. Nous jetons un œil aux nombreuses boutiques de souvenirs et découvrons la spécialité du coin, le coajă, un fromage enveloppé dans de l'écorce.
En revenant à la voiture, alors que je m'apprête à dépasser une famille, j'avise le gamin qui bande son arc, prêt à décocher une flèche. Boug' essaie de me retenir. « Tant qu'il ne me la plante pas dans le cul, tout va bien ! » La famille éclate de rire. « Merde, des Français ! » me dis-je. Ce ne serait pas la première fois que je me ferais avoir, j'en ai quelques-unes comme ça à mon actif. En fait, non, ils ne sont pas français mais ont juste plus ou moins deviné la teneur de mes propos. L'air est frais, il fait 11°C à Bran, soit 5 degrés de moins qu'à Rm. Vâlcea. Nous quittons vite la ville car après que Boug' m'ait mis l'eau à la bouche en me décrivant un chalet de montagne à une vingtaine de kilomètres de là, j'ai une dalle terrible. Et comme on sait, en Roumanie, mieux vaut mesurer les distances en temps plutôt qu'en nombre de kilomètres.
Notre guide ne donne que peu d'indications sur l'adresse du restaurant, nous le cherchons donc d'abord à Răşnov avant que des habitants ne nous indiquent une route s'enfonçant en montagne. Après quelques kilomètres, j'arrête un garde-forestier, dubitative, mais il me fait des signes m'indiquant de continuer. En fait, la Coliba Haiducilor (cabane des Haïdouks) se trouve au pied du téléphérique de la première station de ski roumaine, Poiana Braşov. C'est un chalet tout en bois absolument superbe, doté d'une grande terrasse. Nous entrons dans le chalet. J'ai rarement vu un restaurant plus chaleureux. Les murs de rondins sont couverts de peaux de bêtes, ours, renards et autres mammifères qui font la richesse de la faune transylvanienne. Des poteries, assiettes en céramique peinte, napperons brodés, guirlandes d'ail et d'épis de mais sont suspendus partout et un feu trône au milieu de l'immense pièce. Les chaises sont recouvertes de peaux de mouton.
En revanche, nous sommes déçues par la nourriture. Si elle est bonne, elle est relativement chère et bien moins copieuse que ce à quoi nous sommes habituées ici. Le verre de vin rouge qui accompagne mon filet de sanglier est délicieux, comme tous les vins que j'ai bus en Roumanie, et les épaisses tranches de pain maison, servi chaud, un moment de doux réconfort. En revanche, quand la facture arrive, nous avalons notre salive car la carte de crédit n'est pas acceptée et il nous manque 4 leu. Nous découvrons ainsi que le prix indiqué l'est pour 100g de nourriture, détail que nous n'avions pas relevé, et que le pain est également payant. Le soir, Dana confirmera que cela est fréquent. Nous pouvons heureusement compléter par des euros.
Nous pouvons maintenant poursuivre notre route jusqu'à l'ultime étape de cette journée : Braşov. Un jeune homme rencontré sur le site de la SPH, grand amateur de l'Europe de l'Est, m'en a dit le plus grand bien. Nous nous garons près du centre-ville et repérons sur notre guide, décidément très utile, le trajet jusqu'aux points d'intérêt. Fondée par les chevaliers Teutoniques au 13ème siècle, la ville de Braşov fut entourée de remparts destinés à la protéger des attaques des Tatars et Turcs. Nous remontons vers la ville en longeant ces remparts et repérons les Tours Blanches et Noires. Nous passons ensuite devant une étrange église sombre, c'est la Biserica Neagră (Eglise Noire) qui doit son nom à l'incendie de 1689 qui noircit sa façade. De là, nous rejoignons la Piaţa Sfatului où se dresse la Maison du Conseil, coiffée de la Tour des Trompettistes puis nous engageons dans la Strada Republicci, piétonne, et immortalisons la même scène.
Nous sommes ici en plein pays Saxon et l'architecture de la ville en est une parfaite représentation ; ici, pas de maisons roumaines mais des bâtisses imposantes et colorées. Après Bucarest, Braşov serait la deuxième ville la plus visitée du pays, nous la trouvons pourtant décevante. Et ce constat sera d'autant plus vif après la visite de Sibiu, le lendemain, sur la route du retour vers la France. Nous prenons toutefois plaisir à nous promener jusqu'à la porte Schei qui délimitait la ville, habitée par les Saxons, et maintenait les Roumains à l'extérieur de son enceinte, dans le quartier Schei. En route vers cette porte, j'avise, derrière des grilles, un très beau bâtiment qui est indiqué comme étant la synagogue. Elle n'a pourtant pas l'apparence de celles que j'ai pu voir jusque là.
Le contraste entre les maisons teutonnes, à l'intérieur de la ville, et les maisons roumaines, au-delà de la Poarta Schei, est saisissant. A droite se trouve la très jolie Poarta Ecaterinei, la seule datant de l'époque médiévale.
Il est 17 heures, nous devons reprendre la route pour passer notre dernière soirée avec Dana. Cette fois c'est Boug' qui s'y colle tandis que j'admire le paysage, tout en lui faisant, à mon tour, la lecture. A la sortie de Braşov, nous nous retrouvons derrière un véhicule crachant d'énormes nuages noirs. Impossible de le doubler dans les cols montagneux, Boug' trépigne derrière son volant "Il est en train de cramer son moteur, ce con !". Un peu plus bas, dans la vallée, des vaches errent sur le bord de la route. Tout à coup, je pose une question existentielle sur l'ours que j'ai failli bouffer le midi. Nous nous étranglons de rire et Boug' a mal aux abdos. "N'empêche, on a assuré jusqu'ici, on a pas écrasé un seul chien !" Boug' renchérit "Ouais, on n'a écrasé ni chien, ni mouton, ni vache, ni ours, pourtant l'ours, on aurait presque voulu, rien que pour vérifier ..."
Nous décidons de prendre le second itinéraire jusqu'à Pitesţi car la carte routière de Boug' indique une route plus importante - et en meilleur état, on peut l'espérer - que celle du matin. En route, Boug' me fait plaisir en s'arrêtant pour embarquer un auto-stoppeur. Ce n'est pas Brad Pitt mais le monsieur embaume le parfum dans son gilet de laine. Aucune chance de faire la conversation avec lui, je ne sais même pas où il va et me retourne régulièrement. A Campulung, il s'agite et après avoir refusé les billets qu'il nous tend (Dana nous apprendra le soir que l'auto-stop se pratique beaucoup en Roumanie et qu'il est normal de participer aux frais d'essence), il nous quitte en nous envoyant des baisers. Un peu plus loin, je repère un étrange convoi. « Stop, Boug' ! Photo ! ».
3 heures plus tard, à Pitesţi, nous prenons la direction de Rm Vâlcea. La route s'élargit soudain, nous nous retrouvons sur une quatre voies. « Mais .... C'est une autoroute ! » s'exclame Boug'. Malheureusement, avant même qu'elle ait pu prendre de l'élan, l'autoroute est déjà finie. Je scrute la carte routière ; en effet, c'était juste la fin de l'autoroute qui vient de Bucarest. La seule autoroute du pays, longue de 200 kms, dont Dana m'apprit que la réalisation de 5 kms prit 4 ans de travaux, ce qui fut une bonne source d'inspiration pour le caricaturiste roumain Mihai Stanescu.
A 21h, Dana descend nous rejoindre. Ce soir, pour notre denière, Boug' et moi nous offrons la savoureuse Ciorba de Legume de la Casa Vâlceana. Demain, c'est déjà le départ !
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Où courir à Râmnicu Vâlcea ?
Avertissement : Ce billet est plutôt un clin d'oeil aux notes que je rédige parfois sur mes expériences de joggings matinaux aux 4 coins de la France et d'ailleurs, et surtout l'occasion d'évoquer le sort des malheureux chiens errants dont les dépouilles peuplent les bas-côtés des routes roumaines.
Il y a deux jours, j'ai joggé sur un chemin caillouteux, le long de l'Olt, la rivière qui traverse Râmnicu et se jette dans le Danube. Il suffit de suivre la E81 en direction de Bucarest. A gauche l'Olt et à droite, les vergers des maisons de Rm Vâlcea. Quelques croix de métal sont érigées ça et là à la mémoire de personnes qui se sont noyées. La veille, lorsque Dana m'a montré l'endroit pour que je puisse y revenir seule en voiture le lendemain, nous avions aperçu des promeneurs et même un joggeur mais aujourd'hui, je ne croise personne durant ma course, à part un monsieur au visage tanné par le soleil qui pédale sur son vélo et ne répond pas à mon salut.
Un peu plus loin, après un ravin boueux, on rejoint des habitations. Je vois se dresser, non sans inquiétude, les oreilles de chiens en faction devant les maisons. Les chiens errants, une plaie en Roumanie, sont les victimes de la politique d'expropriations massives de Ceauşescu. Celui-ci a chassé les paysans de leurs terres et rasé leurs maisons, les parquant dans des barres d'immeubles hideuses et les poussant, par la même occasion, à abandonner leurs chiens. Ceux-ci divaguent sur les routes et dans les villes, finissant généralement sous les roues d'un camion ou d'une voiture. Pour pallier ce problème qui prend une ampleur importante, une campagne de stérilisation des chiennes a été lancée.
Une meute de 5 ou 6 chiens ne tarde pas à rappliquer vers moi. Je raisonne la petite voix qui susurre « Ils vont te chiquer les mollets, demi-tour, Fiso ! » en me répétant ce que j'ai lu : « Généralement, les chiens n'attaquent pas les humains qu'ils craignent parce qu'ils les battent ». Et en effet, les chiens courent vers moi et aboient mais restent à bonne distance. Plusieurs fois, sur la route, des groupes de chiens se précipitent vers moi. Une seule fois, j'ai dû élever la voix sur un corniaud plus belliqueux que les autres, qui trottinait sur mes talons en jappant furieusement.
Un peu plus loin, la route goudronnée s'écarte du bord de l'eau. Je cherche en vain une piste de terre dans les bois jonchés de détritus et au sol noirci par les feux que les gens allument lors de pique-niques, le week-end. Ici, on peut encore faire des feux en forêt. Je dois maintenant courir sur une route en direction de ... Méfiante, j'enlève un de mes écouteurs pour ne pas me faire surprendre par les voitures.
Je continue encore un peu en direction d'un pont mais lorsque je repère une meute de chiens errants paresseusement allongée au soleil, je décide de tourner les talons. Courageuse mais pas téméraire, la Fiso, je n'ai pas envie d'y laisser mes mollets. Je décide de ne plus aller jusqu'aux maisons la prochaine fois. Je ferai des allers-retours au bord de l'eau.
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Le salut roumain ?
Et bien ... ! en rédigeant le billet précédant celui-ci, je ne pensais pas que mon paragraphe sur le sentiment roumain d'être méprisé par d'autres pays, notamment la France, avait été illustré, il y a quelques jours, par un des guignols de Ruquier ...
En fin de journée, alors que je réponds aux commentateurs de mon blog sur fond sonore de journal télévisé roumain, mon oreille est tout à coup tirée de sa léthargie par des mots dans ma langue maternelle. Je lève les yeux "Hey, Boug' c'est en français !"
Nous fixons toutes deux l'écran et reconnaissons le plateau télé de Ruquier, son émission à la con que j'éxècre et ne regarde jamais. Un sinistre personnage est affublé d'un jupon criard. Il est question de salut romain, auquel il répond par sa version du salut roumain : il se lève, courbe le dos et plié en deux, tend la main en grimaçant "S'il vous plaît monsieur, madame". Et le public, magnifique troupeau de moutons bêlants, se lève à son tour et imite son geste..
Edit du 25 avril 2010 : j'avais décidé ne pas insérer cette vidéo dans mon billet, pour ne pas faire de pub à cette émission mais la plupart des Français auxquels j'en parle ne sont pas au courant de ce sketch (ce qui est plutôt bon signe, entre nous). Je l'insère donc pour que vous puissiez juger du degré "d'humour" de M. Lambert :
Quand on a rencontré des gens comme Dana, Costel, Andreea, Petre, Luminitsa ou Elisabeta, pour ne citer que quelques-uns de ceux qui m'ont accueillie avec chaleur et simplicité, on ne peut qu'être profondément choqué - et honteux - par l'image du peuple français que Ruquier et ses copains prétendent refléter. Ce n'est pas comme cela que j'aime entendre parler de mon pays à l'étranger.
Un peu plus tard, au restaurant, Dana découvre à son tour ce sketch puant qui provoque actuellement un scandale en Roumanie.
Dana nous traduit le gros tittre "Comparati cu cersetorii" (comparés à des mendiants). Lorsque nous nous indignons que, au-delà de ce sketch qui n'est pas drôle, le public tout entier ait renchéri, elle demande "Mais ils sont payés pour ça, non ?".
Et bien, non, ils ne sont pas payés. Ils sont juste très cons. Je crois qu'au delà de l'auteur de ce sketch, c'est vraiment l'image du public qui se lève à sa suite qui m'écoeure profondément.
Dana secoue la tête : "Nous sommes habitués".