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2yeux2oreilles - Page 72

  • Entre Kinsale et Dingle

    Ce matin, peti déj' irlandais (le premier pour Boug') face à la baie, sagement assises l'une à côté de l'autre. Myrtle dépose devant chacune de nous une belle assiette de boudins blanc et noir aux céréales, tomate, oeufs, bacon et saucisses. Boug' mange tout, je l'ai vraiment bien choisie, ma copine de voyages.

    Myrtle confirme que j'ai largement le temps de rejoindre Dingle en passant par Bantry bay, profitant des paysages de la roûte de la côte.

    Nous quittons leur charmant B&B sous un timide soleil, avec "When your heart is weak" de Cock Robin dans les oreills, que j'ai piqué dans la discothèque de mon pote S. Nous chantons à tue-tête, espérant ne pas nous amener la pluie. Visiblement, non.

    Boug' programme le GPS. Bernard est visiblement plus performant ici qu'en France pour nous choper les satellites. Le manque de pollution, peut-être. Première étape, la petite ville de Clonakilty, aux boutiques toutes colorées et à la poste située, depuis 1924, dans une ancienne église (épicurienne me souffle Boug !!!!! J'y crois pas, cette nana me sort de ces trucs, je devrais écrire un bêtisier!!!) .... presbytérienne. Face à la poste, la statue de Michael Collins, héros controversé dans la lutte pour l'indépendance de l'Irlande, qui vécut là une année et empruntait ce chemin pour aller à l'école.

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    Notre route nous transporte à travers Glandore, Skibereen. La végétation a changé, elle est comme râpée, dans des fondus de jaune paille et verts. Les moutons ont remplacé les paisibles vaches, nous les apercevons au détour des bosquets de genêts et bruyères.

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    Le port de Bantry nous déçoit et nous décidons de nous offrir ailleurs le café tant attendu. Dans les criques à marée basse, des enfants aux jambes laiteuses pataugent gaiement. Entre Bantry et Kenmare, la route serpente entre deux cols. La vue est magnifique. Maintenant Coldplay nous accompagne.

    A Glencariff, nous faisons une petite pause avant de traverser le charmant village de Kenmare, point de départ du ring of Kerry, où je me serais bien arrêtée s'il était l'heure de remplir un peu nos estomacs. Le guide de Boug' n'en fait pas grand cas mais nous trouvons la ville chamante : la rue principale est bordée de boutiques, restaurants, salons de thé et pubs barriolés et croquignolets.

    Aux abords des lacs de Killarney, le paysage est tout simplement sublime. La roche noire plonge vers les lacs, des mottes blondes poussent sur les berges gorgées d'eau. Les camaïeux de vert tendre, noir, gris, bleu et jaune sont magiques. Nous nous offrons une pause sur les crêtes rocheuses au milieu des arbres en bourgeons.

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    Sur la route de Killarney à Dingle, j'avise une théière accrochée à un pan de mur et nous nous arrêtons pour une pause sucrée au Caife Beag Beo.

    Nous voici sur la péninsule de Dingle, un de mes endroits préférés en Irlande, que j'avais parcouru avec ma petite soeur, il y a plus de 10 ans. Nos toutes premières gouttes de pluie irlandaises tombent, juste assez pour laver mon pare-brise dégueulasse. Sur les routes de montagne, les moutons sont accrochés aux pentes escarpées. Traversant rapidement Dingle, nous filons jusqu'à la Slea Head. Là, les falaises plongent vers la mer et au loin, les îles Blasket sont battues par le vent.

    J'arrive à choper un goéland sur mon cliché.

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    Le B&B recommandé par le guide de Boug' affiche "no vacancies" et nous continuons en direction de Dingle, mais par la côte cete fois. Si vous suivez, nous avons fait une boucle. Une pancarte attire mon attention, je continue puis me ravise et fais demi-tour. Bonne intuition que j'ai eue.

    A la farmerhouse "Moriarty", Brid, une très belle femme au cheveux courts d'un gris perle, nous accueille d'un large sourire et nous ouvre la porte d'une chambre au rez-de-chaussée avec vue sur la mer. Elle est aussi moins chère que le B&B de la veille, à Kinsale : 60 € pour 2, petit déj compris. Pendant que nous allons chercher nos bagages, elle prépare thé et scones qu'elle dépose dans la salle à manger où des photos de ses enfants ornent les murs (j'apprendrai dans la soirée qu'elle en a eu 8). "Tu vois, le thé et les petits gâteaux, ça c'est l'accueil normal dans un B&B", dis-je à Boug'. Je feuillette quelques livres mis à disposition, dont un très intéressant qui ambitionne d'aider les descendants d'Irlandais à retrouver les traces de leurs ancêtres. Ils sont nombreux ces touristes Américains et Australiens à la recherche de leurs racines celtes.

    Je saute dans mes baskets et cours sur la petite route à travers la lande. A l'intersection, je traverse la route, passe devant le pub Paddy O'Sheas et prend la route qui descend vers la mer. Là, mes mollets s'échauffent sur le sable. Une Irlandaise marche avec ses enfants et son chien "Not easy to run" dit-elle lorsque je passe à côté d'elle. "Non, mais quand on vient de Paris, c'est inratable de courir sur une plage pareille". "Really? Well, enjoy your run then".

    Après une bonne douche qui détend, nous nous mettons en quête d'un endroit où manger les produits de la mer locaux. Brid nous a conseillé le Skipper, un restaurant tenu par des Français. Je ne suis pas convaincue, mais en passant devant, je m'arrête. Un jeune homme sort du restaurant au moment où nous sommes postées devant le menu, nous salue, reconnaît les Françaises et nous convainc en un sourire et quelques mots. Nous pénétrons donc dans le Skipper (billet suivant).

  • Musique irlandaise à Kinsale

     

    Je vous écris de l'Armada pub, à Kinsale, joli port de pêche ultra-touristique (mais nous sommes hors-saison) dans le comté de Cork. Une jolie ballade face au port nous a dégourdi les jambes de 4 heures de route.

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    Après une seafood chowder et assiette d'huîtres, et un Bailey's cheesecake pour Boug' au pub voisin, nous voici à l'Armada où deux musiciens, lui cheveux gris mi-long, à la guitare, elle dans une robe verte, violon à la main, nous gratifient de ballades irlandaises et écossaises. Ma pinte de Guinness, de la musique irlandaise, du soleil, un dîner d'huîtres de la baie de Kinsale, que demander de plus ?

     

    Notre couple de musicienschantent des ballades connues  : The star of the county Down, the Irish rover, Raglan road, Fiddler's green, Black velvet band, et le classique Dirty ol' town. Au comptoir, un type tape sur ses cuisses en rythme.

     

     

    Il appelle un vieil Irlandais qui vide des pintes au comptoir "Come on, sing a song John !"

    D'abord un peu timide, John s'éxécute, casquette sur la tête et croix épinglée au revers du veston.

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    Boug' se balance de droite à gauche, et elle n'a bu que du café. Je crois qu'elle a chopé l'Irlandite aiguë.

     

    "Where are you from?" nous apostrophe le chanteur. "Paris" crions-nous en choeur (des vierges, on ne se moque pas, dans le fond!). "Je chante avec tout mon coeur" dit-il. Ça, on avait pas de doute.

     

    A la fin de la session, j'achète une pinte pour la chanteuse et une pour John. Le compagnon de John, un type jovial avec casquette de marin sur la tête, commence à nous draguer gentiment "Tu ne peux pas conduire, je te ramène". Il sont hilares et s'esclaffent, se poussent du coude, se balancent des "You're fuckin' kiddin', are you ? For fuck's sake !" On dirait les 2 petits vieux du Muppet show. Je discute un peu avec le chanteur et lui montre mon brouillon de billet.

    Après une bonne poignée de main et une ultime tentative de s'incruster dans notre voiture, nous reprenons la route de Sandycove.

     

  • Début de semaine à Dublin et retrouvailles avec de beaux souvenirs

    Lundi matin, à Bray. Il fait un soleil radieux. Vers 11h, je saute dans mes baskets et vais m'offrir une heure de course sur le front de mer où les promeneurs sont déjà nombreux. Je trouve une radio locale, ça fera l'affaire. Lorsque je fais face à la falaise, le soleil me réchauffe délicieusement. J'essaie de courir sur la plage pour éviter les promeneurs mais manque me casser la gueule sur les galets.  

    Peu avant 15h, je gare la voiture dans mon ancien quartier, à Drumcondra, où j'habitais une grande maison avec une porte verte. Un basketteur africain m'a envoyé un sms, me donnant rendez-vous au Porterhouse, un de mes pubs préférés, dans Parliament street. Pour y aller, Boug' et moi empruntons Parnell street, où j'ai aussi habité. On dirait que le pub au coin de la rue, où un trafiquant s'est fait descendre il y a quelques années, a défintivement fermé. Le cinéma UGC a disparu, un hôtel a élu domicile à côté de mon immeuble et Moore street a perdu ses marchandes de poisson qui me saluaient d'un "How ya doin' luv'?".

    A la place, une ribambelle de boutiques exotiques se sont installées. Coiffeurs africains, produits tropicaux, Chateau-Rouge en plein Dublin ! Mais mon boucher est toujours là et me reconnaît.

    Henry street promène toujours ses shoppeuses, même en temps de crise. Le Pravda a changé de nom mais le Ha'Penny bridge enjambe toujours la Liffey et le pimpant Winding Stair est toujours là aussi. Dans Temple bar, je montre à Boug' le restaurant où j'ai bossé et qui fait des putain de chicken wings, et aussi le Bad Ass café, où la belle Sinead O'Connor a débuté comme serveuse, bien avant de me donner des frissons sur le catwalken chantant "Nothing compares to U". Plus loin, le Clarence hotel, propriété de U2, et puis nous voilà devant le Porterhouse et il est toujours aussi grand et manque me plier en deux en me prenant dans ses bras.

    Cet après-midi, le Portehouse est calme, bien plus que ce soir-là.

    irlande,dublin

    Après un déjeuner à l'heure du goûter, M. nous emmène jusqu'à Christchurch avant de traverser la Liffey pour un café dans l'Italian quarter. La vague d'immigration italienne qui est arrivée en même temps que moi s'est installée et a ouvert quelques bons restaurants. Les Espagnols aussi sont restés et ont fait du Da Pino, où je mangeais des osso bucco, un restaurant à tapas.

    Sur Dame street, Govinda's est toujours là. Nous marchons jusqu'à St Patrick's. Un très bon restaurant argentin a ouvert dans le quartier. Boug' se marre de ne nous entendre parler que de pubs et de restaurants. S. nous emmène au Market Bar mais juste avant, il révèle une de ses adresses secrètes à M. Juste après Hogan's, cherchez un escargot en bois, c'est là qu'à l'étage, se trouve le No Name's bar, avec terrasse intérieure. Un bel endroit installé dans un appartement.

    Au Market Bar, S. commande beaucoup, beaucoup trop de choses à manger.

    Devant Trinity College, les arrêts de bus annoncent désormais le temps d'attente. S. montre à Boug' les impacts de balles sur les murs de la GPO et nous attrapons un taxi sur O'Connell street pour rejoindre Drumcondra.

    Demain matin, nous prenons la route pour entamer notre périple dans l'Ouest irlandais.

  • Jour 1 en Irlande

     

    Départ DUB.jpgIl y a une semaine, je déjeunais en terrasse sur un trottoir de Madrid. Ce dimanche, j'ai déjeuné en terrasse, à quelques dizaines de mètres de la mer, au sud de Dublin. Arrivée vendredi soir chez moi, je n'y ai même pas passé 24h avant de m'envoler de nouveau pour Dublin, cette fois pour 2 semaines de vacances.

    Je voyage sur mon ancienne compagnie aérienne, discute avec le commandant de bord. Crise oblige, on ne sert plus de repas à bord mais des boissons avec paquets de biscuits salés et les hôtesses ne sont plus 3 mais 2. Et contrairement à nous à l'époque, elles font la gueule.

     Samedi soir, 22h15, je saute dans ses bras au niveau Arrivées de l'aéroport de Dublin. Les premiers kilomètres au volant, à la place habituelle du passager et à rouler sur la voie de gauche, dans notre Seat Ibiza, sont un peu perturbants mais aujourd'hui, je suis une vraie pilote sur la M50 entre Dublin et Bray.

    "On va au pub?" dit-il. Dans son "local", il y a une ambiance d'enfer et Elvis en personne qui chante "Love me tender", repris en choeur par des Irlandaises déchaînées. Boug' est plongée dans l'ambiance en 2 secondes et elle boit même un verre de Guinness. De retour à la maison, S. nous fait des bagels toastés au cheddar sauce HP.

    Les maisons irlandaises ne sont toujours pas équipées de volets et la lumière du jour me réveille très tôt. Ce midi, nous prenons la route du front de mer de Bray, une ancienne station balnéaire au sud de Dublin, très prisé des Dublinois le week-end et accessible par le DART, le métro aérien de Dublin qui porte plutôt mal son nom mais offre un spectacle époustouflant, au ras des falaises, en direction du sud.

    Qui a dit qu'il faisait un temps pourri en Irlande ? Nous avons passé la journée au soleil, entre balades et café-crumble.

    Au loin, un sentier grimpe et mène à Greystones. Il fait un soleil magnifique et les flâneurs sont nombreux, les enfants toujours aussi pâles et les rameurs dans l'eau.

    Après une balade le long de la plage de galets, nous nous attablons au Martello, trop tard pour le full irish breakfast mais pile poil pour une seafood chowder (soupe épaisse aux fruits de mer pour miss Boug'), servie dans un joli pain rond, à l'image des soupes roumaines  et une belle portion de chicken wings with potatoes and vegetables dont je ne mangerai qu'un quart (le reste sera emporté en doggy bag. Mes deux convives boivent du cidre et moi, de l'eau ! Hé ouais !

    Après ce déjeuner très agréable, nous reprenons la voiture et la route de Greystones. S. sait que j'affectionne cette petite ville et surtout son salon de thé, Poppies. Nous garons la voiture sans peine et rejoignons de nouveau le bord de mer. Sur les bancs, des mots sont gravés dans la pierre en souvenir de disparus qui aimaient cet endroit. Dans les voitures garées face à la mer, des couples aux cheveux blancs dorment sur leur jounal, bouche ouverte.

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    Poppies ne s'appelle plus Poppie's mais en dehors de son nom, rien n'a changé. De belles tartes, quiches et gâteaux faits maison s'étalent toujours derrière la vitrine, pavlovas, crumbles à la rhubarbe, cheesecake aux fraises ...

     

    "Il y a toujours un jardin, à l'arrière de la maison?" demandé-je à la serveuse. Nous voilà dans le jardin, au soleil. Je manque m'assoupir.

     

    "Et si on allait faire un tour à Dublin?" propose S.

     

    Nous garons la voiture dans un parking du centre (1€ le quart d'heure, incroyable !!) et empruntons Grafton street où les chanteurs s'égosillent toujours, espérant la gloire, et dans laquelle une statue de Phil Lynott a été érigée en 2005. Une expo a aussi eu lieu en mars au St Stephen's Green centre.

     

    Le temps d'aller acheter un accessoire particulier chez Marks & Spencer, qui projette une réimplantation sur les Champs-Elysées cette année, nous traversons le St Stephen's Green pour rejoindre Leeson Street, puis Fitzwilliam Square pour que Boug' puisse photographier les jolies portes géorgiennes. Nous remontons vers l'ancien Chocolate Bar pour entrer au Bleeding Horse, mon premier "local" pub, qui est devenu un sports bar où l'on diffuse des matchs de foot. Les clients ont les yeux rivés sur les écrans et quelques tables sont désormais équipés d'un système "Pour your own pint". On paie le nombre de litres qu'on veut boire, le barman charge la cuve et on peut tirer ses propres pintes, en échange de quoi on vous offre votre 4ème tournée.

     

    Il y a quelques nouveautés dans Dublin. Par exemple, un système de vélib' et par conséquent beaucoup plus de cyclistes.

     

    Nous reprenons la voiture et la route de Bray où nous dînons des chicken wings et des nems faits par la maman de S.

     

    Soleil non-stop, pas une goutte de pluie, Boug' a même pris un coup de soleil !

  • Dernier jour à Zaragoza

    J’ai fait fort pour mon dernier jour à Zaragoza.

    La journée de formation s’est terminée à 13h, dans une ambiance très détendue. Déjà, le matin, à la faveur d’une pause, j’avais papoté avec la jolie Gema et l’Andalou, leur expliquant que le lendemain, je partais en vacances en Irlande, ce qui serait un peu moins exotique. Pour une raison que j’ignore, voilà qu’en prononçant le mot exotico, je transforme le x en r, ce qui les fait éclater de rire, et moi avec. « Erotico es diferente » dit l’Andalou.

    Du coup, nous partons dans une discussion sur la conjugaison espagnole, l’emploi du prétérit versus celui du passé composé, ser ou estar, qui me posent beaucoup moins de problèmes au bout de 2 semaines, et d’autres particularités espagnoles. Estar malo, dit l’Andalou, c’est être malade, ser malo, c’est être un fils de pute (en espagnol dans le texte). L’Andalou prend mon adresse mail pour m’envoyer les adresses de restos et bars à ne pas rater à Séville. Ils remplissent les évaluations de formation (super sympas les commentaires !) et m’embrassent en me souhaitant un bon voyage.

    Je profite du réseau wifi de mon client pour envoyer quelques mails à ma boîte, passe un coup de fil à mon petit frère et à mon chef de projet et vers 14h, je quitte la plaza Beltran. Il fait un beau soleil, je passe à l’appartement récupérer ma valise, sonne en vain à la réception avant de laisser les clés dans la boîte aux lettres et file manger quelques pinchos et me siffler une bière au soleil.

    J'immortalise la très jolie église mudéjar de la Magdalena qui étincèle au soleil. Dans le quartier du centre, je passe devant une devanture remplie de sujets en chocolat. Un "taller de choocolate", Capricho. J’entre et achète des barres de chocolat de diverses origines, ainsi qu’une boîte de fruits aragonais, confits et trempés dans le chocolat et des gâteaux qu’on mangera sur la plage. Ca devrait plaire à mon ami M’sieu Chic Chic, qui vient m’attendre à l’aéroport de Dublin demain soir. Après le jogging sur les rives des rivières espagnoles, je vais m’offrir, dimanche matin, un jogging sur la plage de Bray.

    La vendeuse est très gentille, comme tout le monde dans ce pays, et j’en profite pour lui demander si elle connaît un endroit où je pourrais manger. « Tu sors d’ici, tout droit, tu arrives à une petite place, puis sur la place Santa Cruz , il y a un endroit caché mais très bon, la casa Juanico ». Au moment où je la salue, elle glisse une barre de chocolate negro de Santo Domingo à 70% dans mon sac: "Tu la mangeras en attendant ton avion à Madrid".

    A l’entrée du restaurant, de jolies bouchées s’étalent derrière une vitre réfrigérée. Les murs sont peints de vert et orange et ornés de vues de Saragosse, dans des cadres tout de traviole. Je m’installe à une table et consulte mon dictionnaire, qui est une vraie daube, en tout cas en terme de vocabulaire culinaire. Chorrera, il ne connaît pas, carillera non plus. Tant pis, je me lance et commande quantité de pinchos : jamon con chorreras, cuesco de cabra, erizo de mar, mil hojas de carillera. Je m’apprête à continuer mais le serveur m’arrête « Je vous apporte déjà ça, vous commanderez la suite après si vous en voulez encore ». Pour un peu, je me vexerais …

    Z’aiment bien la béchamel, les Espagnols … Ma croquette de jambon est fourrée de béchamel, mon hérisson de mer aka oursin, aussi. C’est très bon, en tout cas, tout comme le mille feuilles de joue de bœuf et le chèvre chaud. Mise en appétit, je continue (hé ! c’est ma dernière bouffe espagnole avant … 2 semaines !). Calabacín con chipirón, ravioli con rape y carpacio de buey con arroz meloso. Tout ça à 2€ la bouchée.

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    J’ai dû partir dans mes rêveries car quand je regarde l’heure, il est 16h07. Je hèle un taxi, direction la gare dont on m’a dit qu’elle était à 10 minutes maximum. Mon cul. J’y arrive, le cœur battant, à 16h26, soit 3 minutes avant le départ de mon train. Sauf que j’avais oublié 2 détails : 1) il y a un passage obligé par la machine à rayons X 2) L’accès aux voies est fermé 2 minutes avant le départ du train. La jeune femme m’oppose un refus désolé mais ferme. Hé merde !

    Heureusement, il y a une agence de voyages « El Corte Inglès » dans la gare, celle-là même qui s’est occupé de tous mes déplacements dans le pays. « J’ai besoin de votre aide » dis-je en poussant la porte. Elles appellent leurs collègues de Madrid, ma cliente autorise le changement de train et d’avion, verdict, je vais arriver à Madrid à l’heure où j’aurais dû décoller et je serai à Roissy à 23h.

    J’ai gagné un voyage en première classe. Ca ne rigole pas, la 1ère classe espagnole de la Refe. Télévision (à l’aller, j’avais eu droit à « L’attrape-cœurs » sous-titré en espagnol, marrant, là c’est un dessin animé de Walt), et des trolley-dollies qui servent des boissons et un plateau-repas, comme dans l’avion. Je vous rassure, j’ai juste bu un verre d’eau et un café.

    Dans les trains espagnols, c’est comme dans les trains français, en revanche. Les téléphones sonnent allègrement, les gens discutent. Un peu plus en avant, près de la fenêtre, une femme passe 3 coups de fil consécutifs. Elle commence en français, mais avec un léger accent. Sa façon de commencer ses phrasses par « allez ! » me rappelle étrangement mes stagiaires belges. L’appel suivant se fait en espagnol, pour finir par une conversation en anglais. Je me demande bien quelle est son origine.

    A ma gauche, il y a un homme assez élégant, en costard, cheveux gris rabattus en arrière. Il reçoit un coup de fil qui dure longtemps, très longtemps. Il parle vraiment très fort et il me semble capter des mots assez grossiers comme coño, cojones etc. Quand il raccroche, il se tourne vers le couple derrière moi et s’excuse s’ils les a dérangés, auquel ils répondent avec véhémence. Le ton monte et ils s’engueulent pendant de longues minutes. J’entends « No me interese Murcia », « No me interesa tu vida » et pour finir « Mal educado !”. Hé ben, me dis-je, y’a de l’ambiance. La jeune femme polyglotte me lance des clins d’œil amusés en haussant les sourcils genre « Oh la la, ça chie ! »

    Je ne peux résister à ma curiosité légendaire, me lève et me penche sur elle « Excusez-moi, je peux vous poser une question ? Vous êtes de quelle origine, parce que je vous ai entendu passer des appels en français, anglais et espagnol, vous parlez au moins trois langues ?» Elle rit « Je suis anglo-belge et toi ? ». Elle m’invite à m’assoir et nous discutons. Elle travaille dans un cabiner d’avocats et recrute de jeunes diplômés directement sur les bancs des facs de droit. « C’est difficile aujourd’hui, de recruter des gens » dit-elle. Avant, l’excellence, c’était les diplômes, aujourd’hui ce n’est plus vrai. L’excellence, c’est la finesse d’esprit, l’intelligence, la capacité à s’adapter ». Elle a un parcours atypique, la polyglotte anglo-belge. Fille de diplomate, elle a vécu au Sénégal, au Sri Lanka, à Madagascar, a passé une année à Londres, une à Bruges et une à la fac de Sceaux, en France et vit à Madrid après son mariage avec un Espagnol, il y a 15 ans. Je lui raconte mon boulot et comment je sais dire boucherie et fruits & légumes en flamand. Elle rigole. Elle est vraiment sympa et nous discutons un long moment. « J’ai raté mon train à Saragosse, me confie-t-elle. J’étais en train de boire du vin avec des collègues dans un restaurant ». Tiens, moi aussi ! Quelques minutes plus tard, alors que j’entreprends l’écriture de ce billet, elle se lève et me tend sa carte de visite « Si tu reviens à Madrid, appelle-moi, on ira boire un verre ou déjeuner ensemble ». Je lui tends la mienne à mon tour « Si tu viens à Paris … et que j’y suis ».

    La suite du voyage jusqu’à Paris me confortera dans ma conviction que finalement, ce n’était pas tant une catastrophe de rater train et avion ce soir. La lessive de culottes planifiée en vue de mon nouveau départ, demain, pour 15 jours sur les routes irlandaises, ce ne sera pas possible en arrivant à minuit chez moi mais tant pis. Au pire, M’sieu Chic Chic me fera une lessive, en qualité d’ex colocataire, ce ne sera pas la première …